Biométhane / Décrets sur le délai de mise en service et les sanctions : mais à quand de réelles avancées ?

flamme gaz

Par Stéphanie GANDET, avocate associée, spécialiste en droit de l’environnement

L’actualité du biométhane reste riche : la parution des deux décrets du 21 août 2023 vient en témoigner, après de précédents textes datant déjà du mois de juin (Décrets n°2023-809 et 2023-810, téléchargeables ci-dessous).


Mais on ne peut s’empêcher de se dire qu’au-delà des effets d’annonce, il manque des réelles avancées et un dispositif efficace. Avant d’analyser en détail le dispositif actuel, il convient de faire remarquer que le développement des unités de méthanisation, et en particulier de biométhane injecté dans un contexte de crise énergétique aurait surtout mérité :

Le développement du biométhane, ressource locale et renouvelable ne suppose t-il pas un vrai corpus de règles cohérentes et efficaces ?

I. Présentation des deux décrets du 21 août 2023


En attendant, les règles issues des deux décrets du 21 août 2023 vont concerner :


En attendant, les règles issues des deux décrets du 21 août 2023 vont concerner :

II. Analyse des règles de délais de mise en service des contrats d'achat de biométhane


La « notice » du décret du 21 août 2023 semble être affectée d’une erreur car elle indique que le décret prévoit un allongement de la durée de mise en service pour les installations ayant conclu un contrat de vente de biométhane « postérieurement » au 24 novembre 2020.

Or, il est bien prévu au sein du décret que ce sont les contrats d’achat de biométhane signés antérieurement au 24 novembre 2020 qui sont concernés.

Et c’est d’ailleurs logique, puisque ce nouveau décret s’inscrit dans le prolongement de deux précédents décrets du 21 septembre 2021 et du 10 juin 2023 et qui avaient déjà prévu l’allongement de la durée du délai de mise en service d’une installation en cas de recours contentieux pour les contrats dont la signature est postérieure au 24 novembre 2020.

La situation en synthèse est donc la suivante au sujet du délai de mise en service des unités de production de biométhane en injection sous contrat d’achat :

A. Contrat d’achat de biométhane conclu avant le 24 novembre 2020

1) S'agissant du délai de mise en service, plusieurs règles s'appliquent

2) Des cas de suspension sont maintenant prévus :


Cela suppose une demande et une justification du producteur qu’il convient de soigner et qui devra donner lieu à un avenant.

Chaque période de suspension débute à la date d’enregistrement de la requête de première instance et s’achève à la date à laquelle la dernière décision juridictionnelle relative à cette requête est devenue définitive.

B. Contrat d’achat de biométhane conclu avant le 24 novembre 2020


Chaque période de suspension débute à la date d’enregistrement de la requête de première instance et s’achève à la date à laquelle la dernière décision juridictionnelle relative à cette requête est devenue définitive.

III. Analyse du nouveau dispositif de sanction des producteurs de biométhane en cas de fraude


Le second décret n°2023-810 du 21 août 2023 vient renforcer le dispositif de sanction.

La notion de fraude, et une procédure de contrôle et de sanction des producteurs de biométhane est ainsi ajoutée au sein du code de l’énergie.

Cela témoigne d’un renforcement notable des exigences à l’égard des producteurs.

La loi avait déjà introduit un dispositif de sanction prévoyant, notamment, qu’en cas de fraude, l’autorité administrative peut résilier le contrat et exiger le remboursement de sommes par le producteur, sans mise en demeure et après l’avoir invité à présenter ses observations dans un délai déterminé.

Cela date de la loi n°2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale (JORF n°0044 du 22 février 2022) qui a créé l’article L 446-56 du code de l’énergie.

Le remboursement concerne tout ou partie des sommes perçues en application de ce contrat pendant la période au cours de laquelle le producteur n’a pas respecté les dispositions mentionnées aux articles L. 446-4, L. 446-5, L. 446-14, L. 446-15 ou L. 446-24, et dans certaines limites.

Lorsqu’une fraude est constatée en application de l’article L. 446-56, le préfet de région peut engager à l’encontre du producteur une procédure de sanction.

A. Une procédure contradictoire est prévue

 

Le Préfet invite le producteur concerné à présenter ses observations dans un délai qu’il fixe, qui ne peut être inférieur à un mois.

Il lui demande l’identité de son cocontractant et l’informe que la fraude qui lui est reprochée est susceptible d’entraîner la résiliation du contrat conclu, selon le cas, en application des articles D. 446-8, R. 446-12-19, R. 446-12-52, R. 446-12-57 ou R. 446-61 et le remboursement des sommes perçues au titre de ce contrat.

B. Puis les suites suivantes sont possibles, impliquant le Préfet, le producteur et l’acheteur de biométhane

 

Une fois expiré le délai imparti au producteur pour présenter ses observations et au regard des éléments transmis, le préfet peut :


Il en informe le producteur par la même voie.

A la réception de la demande du préfet de région, le cocontractant résilie le contrat à compter de cette date.

C. En cas de demande de résiliation par le Préfet à l’acheteur, une demande de remboursement est aussi possible


S’il a demandé la résiliation du contrat en application de l’article L. 446-56, le préfet de région peut également enjoindre au producteur de rembourser à son cocontractant ou, le cas échéant, à l’acheteur de dernier recours mentionné à l’article D. 446-14 tout ou partie des sommes qu’il a perçues au titre de son contrat, depuis la date du début du manquement, de la fraude ou de la non-conformité ou, à défaut, depuis la date de son constat jusqu’à la résiliation du contrat.

La période à prendre en compte pour le calcul du montant de ce remboursement ne peut toutefois remonter au-delà de la date d’entrée en vigueur du décret n° 2023-810 du 21 août 2023.

Le montant du remboursement ainsi mis à la charge du producteur est apprécié par le préfet de région en fonction de la gravité de la fraude, du manquement ou de la non-conformité et de la situation du producteur.

Ce remboursement porte :