Stocamine : suspension du confinement définitif des déchets

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Par David DEHARBE, avocat gérant (Green Law Avocats)

Par une ordonnance rendue le 7 novembre 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a suspendu l’arrêté préfectoral prolongeant l’autorisation de la société des Mines de Potasse d’Alsace (MDPA) visant à confiner définitivement ses déchets, tout en enjoignant au préfet de prendre les mesures nécessaires pour veiller à la maintenance du site et de l’ensemble des galeries (ordonnance n° 2307183, téléchargeable ci-dessous).


Par un arrêté du préfet du Haut-Rhin en date du 3 février 1997, la société Stocamine a été autorisée à exploiter un stockage souterrain réversible de déchets dangereux (déchets industriels ultimes, c’est-à-dire qui ne peuvent plus être traités ou valorisés), sur le territoire de la commune de Wittelsheim, dans les cavités salines creusées à 600 mètres sous terre, correspondant aux anciennes mines de potasse.

Depuis 2015, la société MDPA a succédé à la société Stocamine et entend fermer le site de stockage tout en confinant les déchets restants.

Cependant, la Cour administrative d’appel de Nancy a annulé l’arrêté du 23 mars 2017 autorisant la société MDPA à maintenir pour une durée illimitée le stockage souterrain des déchets pour défaut des capacités financières et techniques (CAA Nancy, 15 octobre 2021, n° 19NC02483, 19NC02516, 19NC02517, pour en savoir consulter notre commentaire).

Par un jugement du 12 janvier 2023 (n°2201802, 2202043), le tribunal administratif de Strasbourg a annulé l’autorisation préfectorale de poursuivre, à titre conservatoire, les travaux entrepris en vue du stockage, pour une durée illimitée, des déchets dangereux des anciennes mines de potasse de Wittelsheim (pour en savoir consulter notre commentaire).

A la suite de ces décisions, le préfet du Haut-Rhin a pris un arrêté en date du 28 septembre 2023 afin de prolonger pour une durée illimitée, l’autorisation donnée à la société MDPA pour le stockage souterrain en couches géologiques profondes de produits dangereux, non radioactifs, sur le territoire de la commune de Wittelsheim.

Toutefois dans le cadre d’un référé suspension introduit par l’association Alsace Nature et des personnes physiques, le tribunal a prononcé la suspension de l’exécution de cet arrêté après avoir caractérisé l’urgence ainsi que le doute sérieux quant à la légalité de l’acte (TA de Strasbourg, 7 novembre 2023, n°….).

Concernant la condition d’urgence, la juridiction juge qu’elle est remplie étant donné que :


Pour ce qui est du doute sérieux quant à légalité de l’acte, le juge des référés considère que la condition est remplie au motif que :

En se fondant sur la « capacité des générations futures » mentionné au septième alinéa du préambule de la Charte de l’environnement, le juge des référés participe à la consécration jurisprudentielle du droit des générations futures entamée récemment par le Conseil constitutionnel (Conseil constitutionnel, 27 octobre 2023, 2023-1066 QPC, pour en savoir consulter notre commentaire).

Pour mémoire, les Sages de la rue Montpensier ont souligné qu’en adoptant des mesures susceptibles de porter une atteinte grave et durable à un environnement équilibré et respectueux de l’environnement « le législateur doit veiller à ce que les choix destinés à répondre aux besoins du présent ne compromettent pas la capacité des générations futures et des autres peuples à satisfaire leurs propres besoins, en préservant leur liberté de choix à cet
égard
» (Conseil constitutionnel, 27 octobre 2023, 2023-1066 QPC, point 6).