Légalité d’une autorisation unique expérimentale de construire et d’exploiter une installation de méthanisation (TA Caen, 10 juillet 2018, n°170087)

Une autorisation unique d’une installation de méthanisation / cogénération soumise à autorisation unique expérimentale (valant permis de construire et autorisation d’exploiter) était contestée par des voisins. Aux termes de cette décision (TA Caen, 10 juillet 2018, n°170087, jurisprudence du cabinet), le Tribunal a rejeté leur requête et écarté les nombreux moyens invoqués par les requérants. On peut retenir en particulier l’absence en l’espèce de nécessité d’une demande de dérogation “espèces protégées”; l’indépendance de l’autorité environnementale (le rôle d’autorité environnementale avait été joué par un service de la DREAL alors que le préfet de département avait délivré l’autorisation). Le Tribunal relève à juste titre que :”qu’eu égard à l’interprétation des dispositions de l’article 6 de la directive du 27 juin 2001 donnée par la CJUE dans son arrêt rendu le 20 octobre 2011 dans l’affaire C-474/10, et à la finalité identique des dispositions des deux directives relatives au rôle “des autorités susceptibles d’être concernées par le projet, en raison de leurs responsabilités spécifiques en matière d’environnement”, il résulte clairement des dispositions de l’article 6 de la directive du 13 décembre 2011 que, si elles ne font pas obstacle à ce que l’autorité publique compétente pour autoriser un projet ou en assurer la maîtrise d’ouvrage soit en même temps chargée de la  consultation en matière environnementale, elles imposent cependant que, dans une telle situation, une séparation fonctionnelle soit organisée au sein de cette autorité, de manière à ce qu’une entité administrative, interne à celle-ci, dispose d’une autonomie réelle, impliquant notamment qu’elle soit pourvue de moyens administratifs et humains qui lui sont propres, et soit ainsi en mesure de remplir la mission de consultation qui lui est confiée et de donner un avis objectif sur le projet concerné ;” la complétude et la suffisance des études d’impact et de dangers (risques relatif à l’eau, scénario de référence, mesures ERC, risque foudre, modalités d’évacuation des eaux pluviales, étude des impacts liés au poste d’injection, trafic routier). Les dispositions prises par l’exploitant ont été déterminantes là encore. la légalité du POS de la commune d’implantation; la suffisante prise en compte des risques de pollution des eaux, d’inondation, d’explosion, d’émissions de gaz dangereux, proximité ligne THT…Une vraie question de preuve à apporter par les requérants en matière de présence d’une source (ce qui serait valable pour les cours d’eau, la distance avec les tiers, ou des périmètres) a été abordée par le Tribunal. Ce dernier a retenu que les avis techniques d’un bureau d’études n’étaient pas utilement contredits par les opposants. Les mémoires de l’exploitant en réponse à l’avis de l’autorité environnementale, aux services consultés, et aux observations de l’enquête publique ont également permis de compléter et préciser le dossier initial. L’arrêté d’autorisation prévoyant des prescriptions exigeantes et adaptées a été également été retenu par la juridiction dans son appréciation. Le dossier de demande d’autorisation était en l’espèce solide et adapté aux enjeux, notamment sur les modalités de gestion des eaux.

Biogaz: aperçu de jurisprudences intéressantes (recevabilité opposants, étude d’impact, avis de l’AE)

L’année 2018 et le début d’année 2019 ont donné lieu à plusieurs jurisprudences relatives aux unités de méthanisation. Une sélection des décisions obtenues par le cabinet ces derniers mois permet de constater l’importance de la qualité des dossiers initiaux, des réponses techniques apportées par le demandeur et illustrent un pragmatisme de la juridiction administrative. La connaissance des moyens de régularisation d’éventuelles vices participe à favoriser les chances de succès pour les projets de plus en plus souvent contestés. Le Tribunal administratif de Rennes a ainsi porté plusieurs appréciations intéressantes: Selon ses caractéristiques, une installation de méthanisation peut constituer une « installation agricole » et un « équipement collectif compatible avec l’exercice d’une activité agricole » (TA Rennes, 8 juin 2018, n°1602011, 1700566 – jurisprudence cabinet) La seule référence aux critères du code rural (intrants majoritairement d’origine agricole et détention majoritaire de la structure par un exploitant agricole) ne peut suffire à fonder le caractère agricole d’une installation de méthanisation (CE, 14 fév. 2007, n°282398 ; CAA Douai, 30 nov. 2017, n°15DA01317), mais constitue certes un sérieux indice, quoique non déterminant. Une analyse au cas par cas des caractéristiques de l’installation s’impose, dans le respect de l’indépendance des législations. Pour en savoir plus, le cabinet en détaille la portée ici. Comme les éoliennes ou les centrales solaires (CE, 13 juillet 2012, n°343306), les installations de méthanisation, dès lors que l’électricité ou le gaz qu’elles produisent est renouvelable et destiné à alimenter le réseau public de distribution, sont susceptibles d’être qualifiées d’équipements collectifs. Là encore, selon la rédaction des documents d’urbanisme, il reste à procéder à une analyse au cas par cas des caractéristiques de l’installation pour justifier de la compatibilité de l’installation avec l’exercice de l’activité agricole. ****************************** D’autres décisions rendues par les juges du fond et le Conseil en matière de méthanisation, se sont prononcées sur : l’indépendance de l’autorité environnementale, après une analyse pragmatique du juge administratif. l’appréciation du risque hydraulique, en particulier des eaux pluviales chargées. la recevabilité de tiers riverains à 400 mètres, qui a été refusée au regard de la configuration des lieux et des dispositions prises en process; la recevabilité d’une entreprise exerçant une activité sur la parcelle voisine et alléguant de risques. Sa recevabilité a été rejetée par le Tribunal, les risques allégués n’étant pas constitués au regard de la nature des activités exercées et la configuration des lieux; L’absence de nécessité automatique de mener une analyse de la pollution atmosphérique sur les particules de taille 2.5PM pour les installations de cogénération. Le Conseil d’Etat a ainsi  rappelé la règle importante de proportionnalité de l’étude d’impact.

Application des pouvoirs du juge de l’autorisation environnementale à des permis de construire éoliens (CAA Bordeaux, 7 mars 2019, n°17BX00719/17BX00721)

Par Me Sébastien BECUE- Green Law Avocats Par un arrêt en date du 7 mars 2019 (n°17BX00719/17BX00721), la Cour administrative d’appel de Bordeaux a décidé d’appliquer les pouvoirs de plein contentieux du juge de l’autorisation environnementale à des permis de construire éoliens délivrés avant le 1er mars 2017. Suite à la décision (codifiée à l’article R. 425-29-2 du code de l’urbanisme) de dispenser, à compter du 1er mars 2017 les projets éoliens de la nécessité d’obtenir un permis de construire, les praticiens de ce contentieux se sont demandés si cette dispense pouvait avoir pour conséquence de rendre irrecevables les conclusions introduites à l’encontre des permis de construire délivrés avant cette date, ou contre les autorisations uniques expérimentales en tant qu’elles valaient permis de construire. Assez logiquement, le Conseil d’Etat (CE, 26 juil. 2018, n°416831) avait conclu que le juge reste tenu de statuer sur la légalité des permis de construire éoliens : en effet, dès lors que la nouvelle autorisation environnementale ne tient pas lieu de permis de construire, les permis délivrés continuent donc à produire leurs effets. S’il est saisi de la question de leur légalité, le juge doit donc statuer en excès de pouvoir, comme c’est la règle en contentieux de l’urbanisme, c’est-à-dire en tenant compte des circonstances de droit et de fait applicables à la date de la décision. Les données de la problématique ont évolué avec l’intervention de la loi n°2018-727 du 10 août 2018, qui a modifié l’article 15 de l’ordonnance « autorisation environnementale ». Celui-ci prévoit désormais que « les permis de construire en cours de validité à cette même date autorisant les projets d’installation d’éoliennes terrestres sont considérées comme des autorisations environnementales relevant du chapitre unique du titre VIII du livre Ier de ce code ». Comme l’exposait le rapport de présentation du projet de loi, cette modification a pour objet « d’éviter que les parcs éoliens qui ont été autorisés avant 2010 par le biais d’un simple permis de construire, et qui feraient l’objet de modifications, ne soient obligés de déposer une demande d’autorisation environnementale complète, au même titre que les installations nouvelles ». Ainsi, grâce à cette disposition, les projets éoliens qui avaient fait l’objet d’un permis de construire peuvent évoluer sans qu’il soit nécessaire d’effectuer de démarches au titre de l’urbanisme (et donc sans nécessité d’obtenir un permis de construire modificatif). La Cour administrative d’appel de Bordeaux tire dans l’arrêt commenté deux autres conséquences possibles (et juridiquement courageuses, il faudra attendre leur validation par le Conseil d’Etat) de cette modification de l’article 15 de l’ordonnance. Conséquence sur la jonction des instances : En l’espèce, les permis de construire et l’autorisation d’exploiter faisaient l’objet d’instances séparées. La Cour relève qu’il y a lieu de joindre les instances et de rendre un arrêt unique dès lors que ces actes « forment ensemble l’autorisation environnementale instituée par l’ordonnance du 26 janvier 2017 dont [le porter de projet] est ainsi titulaire pour la construction et l’exploitation du parc d’éoliennes projeté ». Cette précision aura le mérite de simplifier un peu le traitement du contentieux des actes relatifs à un même projet, qui font encore trop souvent l’objet d’audiences et de de jugements séparés. Conséquence sur les pouvoirs du juge : Au lieu de différencier les pouvoirs du juge selon qu’il statue en excès de pouvoir – pour les permis de construire – ou en plein contentieux – pour l’autorisation d’exploiter devenue autorisation environnementale, la Cour rappelle uniquement les pouvoirs de plein de contentieux de l’autorisation environnementale. Les pouvoirs de plein contentieux du juge s’appliquent donc aux permis et à l’arrêté d’autorisation d’exploiter. Conceptuellement audacieuse, cette unification des pouvoirs de plein contentieux n’a en réalité qu’une faible portée pratique. Comme le rappelle la Cour, « la légalité de l’autorisation au regard des règles d’urbanisme s’apprécie au regard de celles de ces règles applicables à la date de la délivrance de ladite autorisation ». Or c’est déjà le cas en matière de légalité des permis de construire.

Urbanisme: faute d’enregistrement sous un moins d’une transaction prévoyant le désistement d’un recours contre un permis de construire, les sommes doivent être rendues !

    Par Me Valentine SQUILLACI- Green Law Avocats La Cour de cassation vient de rappeler une règle souvent méconnue des opposants à des projets de construction ayant obtenu le versement d’une somme d’argent en échange du désistement de leur action (arrêt de la 3ème Chambre de la Cour de Cassation, 20 décembre 2018 n°17-27.814) laquelle applique pour la première fois à notre connaissance la sanction posée par l’article L600-8 du Code de l’Urbanisme en cas d’inobservation de cette obligation. La portée de cette décision montre qu’il ne faut pas négliger l’enregistrement auprès de l’administration fiscale, dans le délai d’un mois de leur conclusion, des transactions prévoyant le désistement du recours pour excès de pouvoir formé contre un permis de construire, de démolir ou d’aménager en contrepartie du versement d’une somme d’argent ou de l’octroi d’un avantage en nature. A défaut, la transaction ne peut faire l’objet d’une exécution forcée ou, s’il elle l’a déjà été, les sommes versées doivent être remboursées. Les faits ayant donné lieu à l’arrêt sont relativement simples. Un permis de construire obtenu par un promoteur immobilier pour la construction de deux bâtiments a fait l’objet d’un recours par le propriétaire de la parcelle voisine. En cours de procédure devant la juridiction administrative, les deux parties ont conclu une transaction prévoyant, en contrepartie du désistement du recours, la réalisation de mesures compensatoires en nature et le versement d’une somme d’argent par le promoteur. En exécution de la transaction conclue, l’auteur du recours s’est désisté de sa requête en annulation du permis de construire et a sollicité du promoteur le versement de sa somme d’argent. Ce dernier a alors opposé la caducité du protocole en faisant valoir qu’il avait été enregistré tardivement. Celui-ci avait en effet été enregistré plus d’un an après sa conclusion. Or, l’article 635 1. 9° du Code Général des Impôts impose l’enregistrement « dans le délai d’un mois à compter de leur date » de toute « transaction prévoyant, en contrepartie du versement d’une somme d’argent ou de l’octroi d’un avantage en nature, le désistement du recours pour excès de pouvoir formé contre un permis de construire, de démolir ou d’aménager. » Cette exigence est également contenue dans le Code de l’Urbanisme, dont l’article L600-8 disposait, dans sa version antérieure à la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique : « Toute transaction par laquelle une personne ayant demandé au juge administratif l’annulation d’un permis de construire, de démolir ou d’aménager s’engage à se désister de ce recours en contrepartie du versement d’une somme d’argent ou de l’octroi d’un avantage en nature doit être enregistrée conformément à l’article 635 du code général des impôts. La contrepartie prévue par une transaction non enregistrée est réputée sans cause et les sommes versées ou celles qui correspondent au coût des avantages consentis sont sujettes à répétition. L’action en répétition se prescrit par cinq ans à compter du dernier versement ou de l’obtention de l’avantage en nature. Les acquéreurs successifs de biens ayant fait l’objet du permis mentionné au premier alinéa peuvent également exercer l’action en répétition prévue à l’alinéa précédent à raison du préjudice qu’ils ont subi. » Comme le permet l’article 1567 du Code de Procédure Civile, le créancier de l’indemnité transactionnelle a saisi le Président du Tribunal de grande instance, lequel a rendu une ordonnance conférant force exécutoire à la transaction. Le promoteur a alors sollicité devant le Président du tribunal statuant en la forme des référés la rétractation de l’ordonnance, ce qu’il a obtenu. La rétractation a été confirmée par la Cour d’Appel de Grenoble (CA Grenoble, 1re ch., 3 oct. 2017, n° 17/00596). Aux termes de l’arrêt commenté, la Cour de Cassation confirme l’arrêt de la Cour d’Appel, en conséquence, la lourde sanction attachée au défaut d’enregistrement, dans le délai d’un mois de leur conclusion, des transactions prévoyant, en contrepartie du versement d’une somme d’argent ou de l’octroi d’un avantage en nature, le désistement du recours pour excès de pouvoir formé contre un permis de construire, de démolir ou d’aménager. Selon la Cour de Cassation, cette sanction est l’impossibilité de donner force exécutoire à la transaction, laquelle est illégale en raison du défaut d’enregistrement. L’arrêt de la Cour de Cassation, dont la rédaction est extrêmement pédagogique, permet de tirer les enseignements suivants. D’une part, la sanction prévue par l’article L600-8 alinéa 1er du Code de l’Urbanisme s’applique dès lors que le délai d’un mois prévu par l’article 635 du Code Général des Impôts, « délai de rigueur qui ne peut être prorogé », n’a pas été respecté et ce, « quel que soit le motif du retard ». L’auteur du pourvoi avait fait valoir que la rédaction de l’article L600-8 antérieure à la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 ne mentionnait pas ledit délai, l’alinéa 2 précisant uniquement que la sanction devait s’appliquer à une « transaction non enregistrée ». Ladite loi a en effet modifié l’alinéa 2 de la disposition qui prévoit désormais (depuis son entrée en vigueur le 1er janvier 2019) que la sanction s’applique à « une transaction non enregistrée dans le délai d’un mois prévu au même article 635 ». L’auteur du pourvoi en déduisait qu’antérieurement à la réforme, la sanction ne devait pas s’appliquer à une transaction dont l’enregistrement avait réalisé, bien que tardivement. Cette position n’était pas dénuée de pertinence. L’application littérale de l’ancien alinéa 2 de l’article L600-8 devait en effet conduire à ne pas appliquer la sanction si la transaction avait été enregistrée, même tardivement. La Cour de Cassation a cependant censuré cette interprétation et sa motivation mérite d’être reproduite : « Mais attendu qu’il ressort de la combinaison des articles L. 600-8 du code de l’urbanisme et 635, 1, 9° du code général des impôts que la formalité de l’enregistrement doit être accomplie dans le mois de la date de la transaction et que, à défaut d’enregistrement dans ce délai, la contrepartie prévue par la transaction non enregistrée est réputée sans cause ; Que considérer que le délai d’un mois est dépourvu de sanction et admettre ainsi qu’une transaction ne pourrait être révélée que tardivement serait…

L’obligation d’information du vendeur prévue par l’article L. 514-20 du Code de l’Environnement ne s’applique que lorsqu’une ICPE a été implantée sur le terrain vendu (Cass, 22 novembre 2018)

Par Valentine SQUILLACI, Avocat au Barreau de Lille, Green Law Avocats Aux termes de son arrêt du 22 novembre 2018, la Haute juridiction exclut l’application des dispositions de l’article L. 514-20 du Code de l’Environnement dans le cas où le terrain, issu de la division d’un site dont une partie a été le siège d’une installation classée, n’a pas accueilli ladite installation (Cass. Civ. 3ème, 22 novembre 2018, n°17-26.209). Analyse. A l’heure où l’obligation d’information du vendeur d’un terrain pollué est en voie d’expansion puisque les arrêtés d’application relatifs à la détermination des secteurs d’information sur les sols (qui devront faire l’objet d’une information par le vendeur en vertu de l’article L125-6 du Code de l’Environnement) sont en cours d’élaboration, la Cour de Cassation vient de rappeler que les contours de cette obligation doivent être appréciés strictement. L’arrêt rendu le 22 novembre 2018 par la Cour de Cassation (Cass. Civ. 3ème, 22 novembre 2018, n°17-26.209) concerne en effet l’application des dispositions de l’article L. 514-20 du Code de l’Environnement qui mettent à la charge de vendeur d’un terrain sur lequel a été exploité une Installation Classée pour la Protection de l’Environnement (ci-après « ICPE ») l’obligation d’informer l’acquéreur, par écrit, d’une telle exploitation. Le vendeur est également tenu d’informer son cocontractant des « dangers ou inconvénients importants qui résultent de l’exploitation » et dont il aurait connaissance lors de la vente. Faute pour le vendeur de se conformer à ces obligations, il s’expose, au choix de l’acquéreur, à la résolution de la vente, à la restitution d’une partie du prix (qui correspondra en pratique au coût de la dépollution) ou à la réhabilitation du site à ses frais « lorsque le coût de cette réhabilitation ne paraît pas disproportionné par rapport au prix de vente ». Ce dispositif, créé par la loi n°92-646 du 13 juillet 1992 relative à l’élimination des déchets ainsi qu’aux installations classées pour la protection de l’environnement, a été modifié à plusieurs reprises et son évolution illustre le phénomène d’expansion de l’obligation d’information du vendeur. Ainsi, le législateur a ajouté en 2003 l’obligation, pour le vendeur également exploitant de l’installation, d’indiquer par écrit à l’acheteur si son activité a entraîné la manipulation ou le stockage de substances chimiques ou radioactives. Par ailleurs, applicable à l’origine uniquement aux installations soumises à autorisation, l’obligation d’information instituée par L. 514-20 du Code de l’Environnement a été étendue aux installations soumises à enregistrement en 2009 (Ordonnance n° 2009-663 du 11 juin 2009 relative à l’enregistrement de certaines installations classées pour la protection de l’environnement, article 15). Semblant vouloir contenir cette expansion, la Cour de Cassation avait déjà tranché (Civ. 3ème, 9 avril 2008, n°07-10.795) en faveur d’une application littérale du texte en confirmant que cette obligation ne s’étendait pas, d’une part, à la vente d’un terrain sur lequel l’exploitation est en cours (le texte précise en effet que l’obligation s’applique « lorsqu’une installation (…) a été exploitée sur un terrain ») et, d’autre part, aux installations soumises à déclaration (Cass. Civ.3ème, 16 juin 2009, n°07-20-463 ; Cass. Civ. 3ème, 20 juin 2007, n°06-15.663). Aux termes de son arrêt du 22 novembre 2018, la Haute juridiction confirme cette tendance en excluant l’application des dispositions de l’article L. 514-20 du Code de l’Environnement dans le cas où le terrain, issu de la division d’un site dont une partie a été le siège d’une installation classée, n’a pas accueilli ladite installation (I). Dans une telle hypothèse, seule l’obligation d’information de droit commun semble dès lors trouver à s’appliquer (II). L’exclusion de l’application des dispositions de l’article L. 514-20 du Code de l’Environnement faute d’exploitation d’une ICPE sur le terrain vendu A l’origine de l’arrêt commenté, un site industriel ayant été le siège, depuis la fin du 19ème siècle, d’activités de fabrication de pièces automobiles et sur lequel l’exploitant avait été autorisé à exploiter plusieurs activités soumises à la législation relative aux ICPE. A compter de la fin des années 1980, l’exploitant, dont les droits avaient été repris par une autre société, a progressivement cessé ses activités et cédé des portions du site à divers acquéreurs. L’un de ces acquéreurs, ayant acquis trois parcelles du site en 1992 et 1993, a découvert, dans le cadre d’une opération de réaménagement de son terrain, une pollution des sols et des eaux souterraines. Ce dernier a donc poursuivi le vendeur en soutenant notamment que celui-ci ne l’avait pas informé de l’exploitation d’une ICPE sur le site, ni du risque de pollution associé. L’acquéreur a été débouté de ses demandes par les juges du fond (TGI de Bobigny, 6ème Chambre, 5ème section, 10 septembre 2015, n°12/08673 puis CA PARIS, Pôle 4, Chambre 1, 23 juin 2017, 15/20790), ces derniers relevant sur ce point que bien que le site dont était issu le terrain acquis avait effectivement été le siège d’une ICPE, le demandeur n’apportait pas la preuve qu’une ICPE avait été exploitée sur son terrain. L’acquéreur s’est pourvu en cassation en soutenant que l’obligation d’information instituée par l’article L.514-20 du Code de l’Environnement « porte non seulement sur la vente des parties du site sièges des activités relevant du régime de l’autorisation mais également sur la vente de tout terrain issu de la division de ce site ». Ce moyen n’était pas dénué de tout bon sens dès lors qu’il existe en effet un risque important de contamination de la pollution potentiellement liée à l’exploitation d’une installation classée aux parcelles environnantes. Mais la Cour de Cassation refuse d’interpréter ainsi les dispositions de l’article L.514-20 du Code de l’Environnement et rejette ce moyen en affirmant que le texte « nécessite, pour son application, qu’une installation classée ait été implantée, en tout ou partie, sur le terrain vendu ». On notera que la Cour assimile l’exploitation d’une installation classée aux installations ou équipements « de nature, par leur proximité ou leur connexité avec une installation soumise à autorisation, à  modifier les dangers ou inconvénients de cette installation » au sens de l’ancien article R. 512-32 du Code de l’Environnement. Dans la mesure où l’article R512-32 a été abrogé par le Décret 26 janvier 2017 relatif à l’autorisation…