ICPE – distances d’implantation entre un bâtiment agricole et une maison d’habitation : le Conseil d’État précise sa position (CE 8 juin 2016)

Par Me Marie-Coline Giorno (Green Law Avocats) L’article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime dispose que  “Lorsque des dispositions législatives ou réglementaires soumettent à des conditions de distance l’implantation ou l’extension de bâtiments agricoles vis-à-vis des habitations et immeubles habituellement occupés par des tiers, la même exigence d’éloignement doit être imposée à ces derniers à toute nouvelle construction et à tout changement de destination précités à usage non agricole nécessitant un permis de construire, à l’exception des extensions de constructions existantes […].” Parmi les distances d’implantation devant être respectées entre les bâtiments agricoles et les habitations et immeubles occupés par des tiers, les élevages de bovins soumis à déclaration au titre du livre V du code de l’environnement doivent, notamment, être « implantés à au moins 100 mètres des habitations des tiers […] » (arrêté du ministre de l’écologie et du développement durable du 7 février 2005 fixant les règles techniques auxquelles doivent satisfaire, notamment les élevages de bovins soumis à déclaration au titre du livre V du code de l’environnement, annexe I, article 2.1.1). Jusqu’à très récemment, le Conseil d’Etat estimait que la vérification du respect des prescriptions contenues dans les arrêtés préfectoraux pris en application de la législation relative aux installations classées pour la protection de l’environnement ne s’imposait pas à l’autorité délivrant des permis de construire  (Conseil d’état, 1ère sous-section jugeant seule, 2 février 2009, n°312131 ; Conseil d’Etat, 6ème sous-section jugeant seule, 16 octobre 2013, n°357444) Cependant, dans une décision mentionnée dans les tables du recueil Lebon en février 2016, le Conseil d’Etat a opéré un revirement de jurisprudence en considérant que les règles de distance imposées lors de l’implantation d’un bâtiment agricole en vertu, en particulier, de la législation relative aux ICPE étaient applicables, par effet de réciprocité, à la délivrance du permis de construire une habitation située à proximité de ce bâtiment. L’autorité devant délivrer le permis de construire un bâtiment à usage d’habitation doit donc désormais vérifier si les règles d’implantation sont bien respectées lors de l’instruction de la demande de permis de construire (Conseil d’Etat, 1ère / 6ème ssr, 24 février 2016, n°380556, mentionné dans les tables du recueil Lebon : voir notre analyse ici). Il a, en effet, considéré qu’ « il résulte de l’article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime que les règles de distance imposées, par rapport notamment aux habitations existantes, à l’implantation d’un bâtiment agricole en vertu, en particulier, de la législation relative aux installations classées pour la protection de l’environnement sont également applicables, par effet de réciprocité, à la délivrance du permis de construire une habitation située à proximité d’un tel bâtiment agricole ; qu’il appartient ainsi à l’autorité compétente pour délivrer le permis de construire un bâtiment à usage d’habitation de vérifier le respect des dispositions législatives ou réglementaires fixant de telles règles de distance, quelle qu’en soit la nature » (Conseil d’Etat, 1ère / 6ème ssr, 24 février 2016, n°380556, mentionné dans les tables du recueil Lebon ). S’inscrivant dans le prolongement de cette décision, le Conseil d’Etat a, récemment, précisé les conditions d’application dans le temps de cette règle. Il s’agit de la décision présentement commentée (Conseil d’État, 10ème – 9ème chambres réunies, 8 juin 2016, n°383638, Mentionné dans les tables du recueil Lebon). Dans cette affaire, deux permis de construire pour la réalisation de maisons à usage d’habitation ont été délivrés en 2008 à 50 mètres des bâtiments d’élevage de bovins d’une exploitation agricole, déclarée au titre des dispositions du livre V du code de l’environnement. Un véritable feuilleton judiciaire s’en est suivi. L’exploitant agricole a demandé au tribunal administratif de Pau d’annuler les deux permis de construire. Par un jugement n° 0802254, 0802255 du 4 mai 2010, le tribunal administratif a fait droit à sa demande. La cour administrative d’appel de Bordeaux, faisant droit à l’appel formé par le ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, a annulé ce jugement, par un arrêt n° 10BX02035 du 7 juin 2011. Un pourvoi a alors été formé par l’exploitant agricole devant le Conseil d’Etat. Par une décision n° 351538 du 4 novembre 2013, le Conseil d’Etat a annulé l’arrêt la cour administrative d’appel de Bordeaux et a renvoyé l’affaire devant cette cour. Par un arrêt n° 13BX03110 du 17 juin 2014, la cour administrative d’appel de Bordeaux, statuant sur renvoi après cassation par le Conseil d’Etat, a cette fois rejeté l’appel formé par le ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement contre le jugement du tribunal administratif de Pau du 4 mai 2010 (CAA Bordeaux, 17 juin 2014, n°13BX03110) La ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité a formé un pourvoi devant le Conseil d’Etat tendant à l’annulation de cet arrêt. Dans son pourvoi, elle soutenait que la cour administrative d’appel de Bordeaux avait commis une erreur de droit en faisant application, à la date à laquelle les permis de construire ont été accordés, de l’exigence d’éloignement de 100 mètres posée par l’arrêté du 7 février 2005 et en jugeant que les constructions litigieuses ne respectaient pas les dispositions combinées de l’article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime et de cet arrêté. Une application différée (en raison de l’application différée pour les installations d’élevage existantes) aurait été, selon Mme le Ministre, préférable. Le Conseil d’Etat rejette ce pourvoi. Dans un premier temps, le Conseil d’Etat rappelle les textes applicables. Ainsi, aux termes de l’article 2 de l’arrêté du ministre de l’écologie et du développement durable du 7 février 2005 fixant les règles techniques auxquelles doivent satisfaire, notamment les élevages de bovins soumis à déclaration au titre du livre V du code de l’environnement, « Les dispositions de l’annexe I sont applicables dans un délai de quatre mois à compter de la publication du présent arrêté au Journal officiel. / Pour les installations existantes, déclarées au plus tard quatre mois après la publication du présent arrêté au Journal officiel, les dispositions mentionnées à l’annexe II sont applicables dans les délais suivants : (…) au plus…

Dommages de travaux publics et aménagement des berges : la démonstration du préjudice anormal et spécial est nécessaire ! (Conseil d’État, 25 mai 2016, n°393692)

Par Me Marie-Coline Giorno (Green Law Avocats)   Aux termes d’une décision du 25 mai 2016, le Conseil d’Etat a rappelé que lorsqu’un tiers avait subi un dommage de travaux publics, la responsabilité sans faute de l’administration ne pouvait être engagée qu’en présence d’un préjudice anormal et spécial, dûment établi. (Conseil d’État, 25 mai 2016, n°393692)   Les faits de l’espèce étaient les suivants. Durant un hiver, une partie des eaux de l’Oise s’est déversée accidentellement dans un étang à la suite d’une rupture de la digue le séparant de la rivière. En application d’une convention du 30 août 1986, conclue entre les anciens propriétaires du plan d’eau et le syndicat intercommunal pour l’aménagement de l’Oise moyenne et de ses affluents, chargé de l’entretien du cours d’eau, des travaux de rétablissement du cours initial du lit de l’Oise ont été entrepris. En 2009, l’étang a changé de propriétaire. En 2010, le syndicat a supprimé un barrage sur la rivière qui devait réguler le niveau de l’étang. Le nouveau propriétaire de l’étang a demandé au syndicat de remédier aux désordres résultant de cette intervention car elle aurait eu pour effet d’abaisser le niveau de l’eau de l’étang et d’aggraver en conséquence le phénomène de sédimentation. Le nouveau propriétaire a également demandé à être indemnisé des préjudices subis du fait des travaux publics ainsi réalisés. Le 13 mai 2014, le tribunal administratif d’Amiens, saisi par le nouveau propriétaire, a retenu la responsabilité du syndicat à hauteur de la moitié des préjudices subis par le nouveau propriétaire et ordonné une expertise afin de les évaluer. Le 21 juillet 2015, la cour administrative d’appel de Douai a confirmé ce jugement (CAA Douai, 21 juillet 2015, n°14DA01182). Elle a retenu, contrairement au tribunal administratif d’Amiens, que le nouveau propriétaire avait la qualité de tiers par rapport aux ouvrages publics constitués par les aménagements des berges de l’Oise et aux travaux publics entrepris sur ces ouvrages, et non celle d’usager de ces mêmes ouvrages. Elle en a déduit que la responsabilité du syndicat ne pouvait être engagée qu’à raison, non d’une faute de sa part, mais du caractère anormal et spécial du préjudice subi. Saisi d’un pourvoi principal par le syndicat et d’un pourvoi incident par le nouveau propriétaire, le Conseil d’Etat a censuré cet arrêt. En effet, il a considéré que « si la cour a retenu l’existence d’un lien de causalité entre les travaux entrepris par le syndicat et les préjudices subis par [le nouveau propriétaire], elle s’est abstenue de préciser les éléments sur lesquels elle se fondait pour estimer que le préjudice subi par [lui] revêtait un caractère anormal et spécial de nature à engager la responsabilité sans faute du syndicat ; qu’en statuant ainsi, la cour a entaché son arrêt d’une insuffisance de motivation et commis une erreur de droit ». (Conseil d’État, 25 mai 2016, n°393692) Cette décision du Conseil d’Etat est intéressante, à la fois sur ce qu’elle dit expressément et sur ce qu’elle sous-entend implicitement.   En premier lieu, le Conseil d’Etat rappelle que la responsabilité sans faute de l’administration du fait d’ouvrages publics ou de travaux publics ne peut être engagée que : d’une part, s’il existe un lien de causalité entre l’action de l’administration et le préjudice et que, d’autre part, si le préjudice présente un caractère anormal et spécial. L’abandon du caractère anormal et spécial du préjudice avait été envisagé (CAA Douai, 22 décembre 2008, n° 07DA01467) mais semblait avoir rapidement été abandonné (CAA Marseille, 15 décembre 2008, n°07MA01949) même si une décision récente a pu semer le doute (CAA Marseille, 13 février 2015, n°13MA02037). Le Conseil d’Etat revient donc sur une conception traditionnelle de la responsabilité sans faute de l’administration.     En deuxième lieu, le Conseil d’Etat souligne qu’il est impératif de démontrer en quoi le préjudice est anormal et spécial. Les juridictions du fond ne peuvent se borner à l’affirmer sans apporter aucun élément en ce sens. Il s’agit du motif pour lequel il censure la Cour administrative d’appel. Le caractère anormal et spécial du préjudice ne peut se déduire simplement des faits. Le Conseil d’Etat avait récemment sanctionné une Cour qui n’avait pas recherché si des pluies exceptionnelles constituaient un évènement de force majeure de nature à exonérer l’administration de sa responsabilité (Conseil d’État, 6ème SSJS, 22 octobre 2015, n°371894).   Le Conseil d’Etat exige donc une véritable vérification part les juridictions du fond des conditions d’engagement de la responsabilité sans faute.   En troisième et dernier lieu, le Conseil d’Etat semble valider le fait que les nouveaux propriétaires de l’étang soient des tiers par rapport aux travaux publics entrepris sur les aménagements des berges. La question aurait pu se poser de savoir s’ils n’avaient pas, en réalité, la qualité d’usagers ce d’autant plus qu’une controverse existait entre les juges de première instance et d’appel. En première instance, les premiers juges ont retenu la responsabilité pour faute du syndicat en raison d’un défaut d’entretien normal des aménagements affectant les berges et abords de l’Oise, lequel ne concerne que les usagers de ces ouvrages publics, et non la responsabilité sans faute dont seuls peuvent se prévaloir les tiers aux ouvrages ou travaux publics. En revanche, en appel, la Cour a retenu que « la modification de la configuration des lieux, déjà intervenue lors de l’acquisition de l’étang par la SCI du…. en 2009, résultant de l’écoulement de l’Oise à travers l’étang depuis la rupture de la digue, a eu pour conséquence d’établir une interdépendance entre ce cours d’eau et l’étang, de telle sorte que la SCI du … pourrait être regardée comme ayant la qualité d’usager par rapport aux ouvrages publics constitués par les aménagements des berges de la rivière, il résulte toutefois des écritures de première instance de la SCI du Bien Tombé que celle-ci n’invoquait que les préjudices résultant de la réalisation des opérations d’enlèvement du barrage de bastaings effectuées en 2010, qui constituent des travaux publics à l’égard desquels elle a la qualité de tiers » (CAA Douai, 21 juillet 2015, n°14DA01182). Elle a donc retenu…

Plans de prévention des risques technologiques : un projet de décret soumis à consultation publique

Un projet de décret relatif aux plans de prévention des risques technologiques (PPRT) est soumis à la consultation du public sur le site du Ministère de l’environnement jusqu’au 17 juin 2016. Pour rappel, les PPRT sont des documents de planification créés par la loi n°2003-699 du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages à la suite de la catastrophe de l’usine AZF de Toulouse de 2001. Régis par les articles L. 515-15 à L. 515-26 et  R. 515-39 à R. 515-50 du code de l’environnement, ils ont pour objet de limiter les effets des accidents susceptibles de survenir dans les installations « Seveso seuil haut » figurant sur une liste fixée par décret et pouvant entraîner des effets sur la salubrité, la santé et la sécurité publiques directement ou par pollution du milieu. Comme l’indique le site du ministère de l’environnement, « ils  visent à améliorer la coexistence des sites industriels à haut risques existants avec leurs riverains, en améliorant la protection de ces derniers tout en pérennisant les premiers. » Les PPRT concernent : les installations classées « Seveso seuil haut » ou les stockages souterrains susceptibles d’accidents pouvant entraîner des effets sur la salubrité, la santé et la sécurité publiques, les sites comportant plusieurs de ces installations ou stockages. Les mesures qu’ils peuvent instaurer sont de nature foncière ou urbanistique. Elles visent tant à accroître la protection de  l’urbanisation existante (expropriation ou droit de délaissement,  travaux de renforcement…) qu’à réduire les risques induits par la présence de l’installation (mesures de réduction du risque à la source sur les sites industriels, restrictions sur l’urbanisme futur…). Le projet de décret soumis à consultation (consultable ici) s’inscrit dans une démarche d’amélioration des PPRT : en effet, ayant constaté que les mesures foncières ou les prescriptions de travaux pouvaient avoir pour effet de mettre certaines des entreprises riveraines en difficulté, le pouvoir législatif a autorisé le Gouvernement à légiférer sur cette question par voie d’ordonnance (loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises). Une ordonnance relative aux plans de prévention des risques technologiques a donc été publiée le 23 octobre 2015 (ordonnance n° 2015-1324 du 22 octobre 2015), et c’est dans la continuité de cette ordonnance qu’a été élaboré le projet de décret. Ainsi, ce texte procède à une mise en cohérence de la partie réglementaire du code de l’environnement (art. R. 515-39 à R. 515-48) pour tenir compte des évolutions de la partie législative. Mais le projet de décret va plus loin, puisqu’un certain nombre de dispositions vont également être modifiées : l’article R. 515-39 du code de l’environnement est modifié pour prendre en compte le fait que les stockages souterrains sont devenus des installations classées ; la liste des documents d’un PPRT est modifiée : la note de présentation est ainsi supprimée ; les modalités de l’information prévue au I de l’article L. 515-16-2 du code de l’environnement sont précisées. Il est également prévu qu’en cas de vente ou de location ultérieure du bien, cette information est reportée dans l’état des risques par le vendeur ou le bailleur en application de l’article L.125-5 ; les projets de documents soumis à la consultation des personnes et organismes associés restent accompagnés d’une note de présentation, tout comme les projets de documents soumis à enquête publique ; un dispositif d’accompagnement des riverains peut désormais être organisé par les pouvoirs publics.

ENERGIE: Allègement des obligations relatives à l’autorisation d’exploiter une installation de production électrique (décret du 27 mai 2016)

Par Sébastien BECUE – GREEN LAW AVOCATS Le décret n°2016-687 du 27 mai 2016 procède à une refonte de la section du code de l’énergie consacrée à l’autorisation d’exploiter une installation de production d’électricité. Relèvement généralisé des seuils pour toutes les ENR et instauration d’une dispense pour les installations hydrauliques autorisées ou concédées Le décret modifie les seuils de soumission à autorisation d’exploiter une installation de production d’électricité de la façon suivante : Source d’énergie utilisée par l’installation Ancien seuil Nouveau seuil Energie radiative du soleil 12 MW 50 MW Energie mécanique du vent 30 MW 50 MW Combustion/explosion de matières non fossiles d’origine animale/végétale 12 MW 50 MW Combustion/explosion biogaz 12 MW 50 MW Nappes aquifères/roches souterraines 12 MW 50 MW Valorisation des déchets ménagers hors biogaz 12 MW 50 MW Energies houlomotrice, hydrothermique et hydrocinétique (installations implantées sur le domaine public maritime) X 50 MW Combustibles fossiles hors gaz naturel et charbon 4,5 MW 10 MW Gaz naturel 4,5 MW 20 MW Energie hydraulique (installations mentionnées aux articles L. 511-2, L. 511-3 et L. 531-1 du code de l’énergie) X Dispensées   Simplification du contenu du dossier de demande et de ses modalités de publication Le pétitionnaire n’a plus à produire dans son dossier de demande les notes : Relative à l’incidence du projet sur la sécurité et la sûreté des réseaux publics d’électricité ; Relative à l’application de la législation sociale dans l’établissement ; Exposant l’intérêt que présente le site pour la production électrique et une liste commentée des dispositions environnementales susceptibles d’être applicables sur le site ; Ainsi que la copie du récépissé de la demande de permis de construire ou de la déclaration préalable. En revanche, pour les demandes déposées à compter du 1er juillet 2016, le pétitionnaire doit désormais : Préciser, dans le cadre de la description des caractéristiques principales de l’installation, la quantité de gaz à effet de serre émise ; Produire un note relative à l’efficacité énergétique de l’installation comparée aux meilleures techniques disponibles à un coût économiquement acceptable. La publication au JO des principales caractéristiques de la demande, auparavant obligatoire pour tous les types d’installations, est désormais restreinte aux seules installations dont la puissance dépasse 500 MW. Cette dernière modification est réellement de nature à simplifier la faisabilité des centrales de production dans la mesure où en pratique les opposants ont commencé à contester ces mesures de publicité, parfois dans des buts exclusivement dilatoires, ce qui permettait de ralentir la mise en exploitation. Codification du régime spécial de caducité de l’autorisation pour les installation ENR marines Pour rappel, en principe, l’autorisation devient caduque, sauf cas de force majeure ou fait de l’administration, si l’installation : n’a pas été mise en service trois ans après sa délivrance ; n’a pas été exploitée durant trois années consécutives. Sur demande du pétitionnaire, le ministre chargé de l’énergie peut accorder des délais supplémentaires pour un total de dix années en incluant le délai initial de trois ans. Le décret codifie les possibilités de prolongation pour les installation ENR marines initialement instaurées par le décret n° 2016-9 du 8 janvier 2016 : au-delà des dix ans, leur autorisation peut encore être prolongée pour une période de trois ans, renouvelable deux fois. Le décret précise que cette possibilité de prolongation est également applicable aux autorisations en cours de validité le 29 mai 2016.  

Urbanisme: une piscine constitue-t-elle l’extension d’une construction existante ? (CE, 15 avril 2016, n°389045)

Par Me Marie-Coline Giorno (Green Law Avocats) A l’approche des vacances d’été, une question fondamentale se pose : comment qualifier juridiquement une piscine découverte ? Le Conseil d’Etat a heureusement anticipé ce débat en tranchant la question de savoir si une piscine devait être regardée comme « l’extension » d’une construction d’habitation existante. (CE, 6ème / 1ère SSR , 15 avril 2016, n°389045, Mentionné dans les tables du recueil Lebon) Dans cette affaire, un maire avait accordé un permis de construire et un permis modificatif en vue de réaliser une extension d’une habitation existante située en zone NC et de créer un cellier, un abri extérieur ainsi qu’une piscine, implantée à 4,5 mètres de l’habitation et intégrée à une terrasse dallée contigüe à l’habitation. La zone NC était, selon l’article R. 123-18 du code de l’urbanisme alors en vigueur, une zone de richesses naturelles, à protéger en raison notamment de la valeur agricole des terres ou de la richesse du sol ou du sous-sol. L’article NC1 du règlement du plan d’occupation des sols applicable sur le territoire de la commune interdisait en zone NC toutes les constructions qui n’étaient pas directement liées aux activités agricoles. Par exception à cette règle, l’article NC 2 du même règlement autorisait dans cette zone la restauration et l’extension des constructions existantes en vue de l’habitat, à condition que leur surface hors œuvre brute existante soit supérieure ou égale à 70 m2 et que ces bâtiments soient clos et couverts. Le Préfet de Vaucluse a déféré au tribunal administratif de Nîmes le permis de construire délivré pour la réalisation d’une « extension d’une habitation existante, piscine ». Il estimait en effet qu’une piscine découverte ne pouvait, au regard de l’article NC2 du règlement du plan d’occupation des sols, être autorisée. Par un jugement du 18 octobre 2013, le tribunal administratif de Nîmes a annulé le permis de construire en tant qu’il autorisait la construction de la piscine. Par un arrêt du 22 janvier 2015, la cour administrative d’appel de Marseille a annulé le jugement du tribunal administratif de Nîmes en tant qu’il avait annulé partiellement le permis de construire et a rejeté les conclusions du déféré du préfet de Vaucluse auxquelles le tribunal administratif avait fait droit. Elle a considéré qu’ « en vertu de l’article 2 du règlement de la zone NC du plan d’occupation des sols de L. l’extension des habitations existantes est autorisée ; que contrairement à ce que les premiers juges ont retenu, la piscine et le dallage projetés, qui sont implantés dans la continuité de l’habitation existante avec laquelle elles forment une même unité architecturale, constituent une extension de cette habitation au sens et pour l’application de ces prescriptions » (CAA Marseille, 22 janvier 2015, n°13MA05164) Le ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité a saisi d’un pourvoi le Conseil d’État afin de lui demander l’annulation de l’arrêt de la cour administrative d’appel de Marseille. Le Conseil d’Etat devait donc se prononcer sur le statut juridique des piscines découvertes afin de déterminer si elles pouvaient être incluses parmi les « extensions d’habitation existante » autorisées en zone NC du plan d’occupation des sols. Aux termes de sa décision, le Conseil d’Etat a considéré que « sous réserve de dispositions contraires du document d’urbanisme applicable, une piscine découverte peut être regardée, eu égard à sa destination, comme une extension d’une construction d’habitation existante si elle est située à proximité immédiate de celle-ci et forme avec elle un même ensemble architectural ». Il admet donc qu’une piscine découverte soit regardée comme l’extension d’une habitation à trois conditions : elle doit être située à proximité immédiate de la construction à usage d’habitation existante ; elle doit former avec elle un même ensemble architectural ; le règlement du document d’urbanisme ne doit pas en disposer autrement. En l’espèce, la Haute Juridiction confirme l’arrêt de la Cour administrative d’appel en considérant qu’en jugeant que la piscine et le dallage qui l’entoure, qui sont implantés dans la continuité de l’habitation existante constituaient une extension de cette dernière, la Cour n’avait pas entaché son arrêt d’une erreur de droit et qu’elle avait porté une appréciation souveraine sur les pièces du dossier, exempte de dénaturation. Il pourrait toutefois exister un débat sur le fait que cette extension soit « en vue de l’habitat » comme l’exigeait l’article NC2 du plan d’occupation des sols. Dans cette décision, le Conseil d’Etat vient préciser les critères qu’il avait posés en 2005 lorsqu’il avait jugé que « l‘édification d’une piscine découverte, construction qui n’est pas un bâtiment et pour laquelle le code de l’urbanisme prévoit une exemption de permis de construire, est toutefois soumise au respect des règles d’urbanisme relatives à l’occupation et à l’utilisation des sols ; que si […] l’article NC 1 du plan d’occupation des sols de la commune […], qui énumère limitativement les occupations et utilisations des sols admises en zone naturelle réservée à l’activité agricole, autorise, dans certaines limites, l’extension des constructions d’habitation principale existantes à la date de la publication du plan d’occupation des sols, la construction d’une piscine découverte, qui n’est pas attenante à un bâtiment à usage d’habitation existant, ne saurait être regardée, au sens de ces dispositions, comme constituant une extension de celui-ci ». (Conseil d’Etat, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 9 mai 2005, n°262618, mentionné aux tables du recueil Lebon) Pour qu’une piscine découverte soit considérée comme l’extension d’une habitation, étaient alors exigées, d’une part, l’absence de règles contraires et, d’autre part, la proximité de la piscine avec la construction à usage d’habitation était alors prises en compte. Désormais, une unité architecturale est également requise. Les critères posés par le Conseil d’Etat pour qualifier une piscine d’extension d’une construction d’habitation existante nous semblent pertinents. La piscine est souvent considérée comme étant un équipement de la maison d’habitation (au même titre qu’un garage ou une véranda) lorsqu’elle est située à proximité de la maison avec laquelle elle forme un ensemble architectural. En outre, l’absence de règle contraire est également importante pour ne pas méconnaître l’intention des auteurs du document d’urbanisme et pour protéger les espaces concernés. A toutes fins utiles, il convient…