ICPE: exclusion des garanties financières pour certaines installation de combustion (arrêté du 20 septembre 2013)

Un arrêté du Ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie publié au Journal Officiel du 25 octobre 2013 modifie la liste des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) soumises à l’obligation de constituer des garanties financières en application du 5° de l’article R. 516-1 du code de l’environnement. Pour rappel, au delà des installations réglementairement visées par l’article R 516-1 du code de l’environnement, l’arrêté du 31 mai 2012 (modifié par l’arrêté du 20 septembre 2013) fixe la liste des installations classées soumises à cette obligation de constitution de garanties financières selon les substances qu’elles utilisent et les activités qu’elles mènent, et ce en application de l’article R 516-1, 5° : « Les installations soumises à autorisation au titre de l’article L. 512-2 et les installations de transit, regroupement, tri ou traitement de déchets soumises à autorisation simplifiée au titre de l’article L. 512-7, susceptibles, en raison de la nature et de la quantité des produits et déchets détenus, d’être à l’origine de pollutions importantes des sols ou des eaux. Un arrêté du ministre chargé des installations classées fixe la liste de ces installations, et, le cas échéant, les seuils au-delà desquels ces installations sont soumises à cette obligation du fait de l’importance des risques de pollution ou d’accident qu’elles présentent. » Le nouvel arrêté du 20 septembre 2013 (publié au JORF du 25 octobre 2013) exclut de cette liste les installations de combustion de gaz naturel et de gaz de pétrole liquéfié autrement dit « G.P.L. » visées à la rubrique 2910-A de la nomenclature ICPE. Leur exclusion s’explique, selon le ministère, par le constat selon lequel « ces installations ne présentant pas de risque de pollution des sols et ne produisant pas de déchets, l’insertion dans le dispositif des garanties financières ne présente que peu d’intérêt ». Pour les autres installations visées à la rubrique 2910-A, l’obligation de constitution de garanties financières perdure pour les installations dont la puissance thermique maximale de l’installation est supérieure à 50 MW et, à compter du 1er juillet 2017, pour celles dont la puissance thermique maximale de l’installation est supérieure à 20 MW. Il sera remarqué que les installations de combustion de biomasse, qui devaient également être exclues de l’obligation de garanties financières dans le projet d’arrêté soumis à consultation par le Ministère, demeurent finalement soumises à cette obligation. Enfin, l’arrêté prend en compte la modification de la nomenclature ICPE découlant du décret du 22 mars 2012 en ce qu’il reprend la nouvelle dénomination de la rubrique 1523 relative à la fabrication industrielle du soufre. L’arrêté soumet donc à garanties financières la fabrication industrielle (rubrique 1523-A.1), ainsi que la transformation ou la distillation de soufre (rubrique 1523-A.2). Valentin Guner Green Law Avocat

La possible indemnisation du propriétaire d’une parcelle déclassée en raison de la création d’un périmètre de protection rapprochée d’un plan d’eau

Dans un arrêt en date du 09 octobre 2013 (Civ. 3e, 9 oct. 2013, FS-P+B, n° 12-13.694), la Cour de cassation souligne le droit à indemnisation d’un propriétaire de parcelles déclassées à la suite de la modification du zonage d’un plan d’occupation des sols (POS), conséquence de la création d’un périmètre de protection rapprochée d’un prélèvement d’eau. En l’espèce les faits soumis à la Cour de cassation étaient classiques en la matière : Le préfet avait déclaré d’utilité publique la dérivation des eaux d’une rivière et avait instauré, en application de l’article L. 1321-2 du code de la santé publique, un périmètre de protection rapprochée d’une prise d’eau située sur la commune d’Itteville. L’arrêté qui avait été pris précisé que les zones de ce périmètre devaient être classées en zones agricoles. Il s’en était suivi une modification par la commune de son plan d’occupation des sols. Le propriétaire de plusieurs parcelles avait été indemnisé par le juge de l’expropriation au titre de l’article L 1321-3 du Code de santé publique. Le syndicat intercommunal au profit duquel le prélèvement d’eau avait été déclaré d’utilité publique contestait la décision des juges du fonds d’accorder au propriétaire une indemnisation liée au déclassement des parcelles. Confirmant la décision de Cour d’appel, la Cour de cassation rejette les arguments du syndicat intercommunal et rappelle le bien fondé des éléments de fait appréciés par les juges du fond qui ont permis de conclure à l’indemnisation du propriétaire terrien: « Mais attendu qu’ayant exactement retenu que le classement en zone NC ou ND de parcelles classées à la date de l’arrêté préfectoral du 21 février 2003 en zone d’urbanisme NAUI et NAUL ainsi que l’interdiction de certaines activités et les restrictions apportées à d’autres, caractérisaient une restriction au droit de jouissance du bien et que la diminution importante de leur usage subie par les parcelles était consécutive non pas à leur classement en zone non constructible mais à leur inclusion dans un périmètre de protection, leur classement n’étant que la technique utilisée par l’administration pour faire respecter le périmètre de protection, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes et qui a déduit à bon droit de ces seuls motifs, sans excéder ses pouvoirs, que cette diminution d’usage devait être indemnisée, a légalement justifié sa décision » ; Cette décision de la Cour de cassation a le mérite de mettre en lumière l’indemnisation de propriétaires terriens qui subissent un déclassement de leur parcelles dans le cadre de la création d’un périmètre de protection rapprochée d’un plan d’eau prise au titre de l’article L 1321-2 du Code de santé publique. Surtout, on ne pourra que constater qu’en se plaçant sur le terrain de la restriction d’usage  pour justifier l’indemnisation du propriétaire, la Cour de cassation répond par ailleurs à l’argumentation du syndicat qui contestait l’appréciation qui avait été faite de l’indemnisation allouée, puisqu’elle précise que les juges du fond n’était tenu, ni de fixer une date de référence, ni de rechercher l’usage effectif des parcelles à cette date ni de préciser à quelle date il se plaçait pour évaluer cette dépréciation. Une telle liberté d’appréciation est pour le moins détonante eu égard aux règles très strictes édictées notamment en matière d’expropriation. Aurélien BOUDEWEEL Green Law Avocat

Gaz de schiste: la loi interdisant la technique de fracturation est jugée conforme à la Constitution

Le Conseil constitutionnel a rejeté l’ensemble des griefs d’une société spécialisée dans l’exploration de gaz de schiste à l’encontre des articles 1er et 3 de la loi n° 2011-835 du 13 juillet 2011 (Décision n°2013-346 du 11 octobre 2013) Rappelons que cette loi vise à interdire l’exploration et l’exploitation des mines d’hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique et à abroger les permis exclusifs de recherches comportant des projets ayant recours à cette technique. La société avait soulevé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) à l’encontre de cette loi, et le Conseil d’Etat avait transmis le 12 juillet dernier la QPC au Conseil constitutionnel. Différents arguments étaient soulevés: la violation du principe d’égalité devant la loi (la technique de fracturation n’était pas interdite pour la géothermie); la violation du principe de la liberté d’entreprendre la violation du principe de précaution consacré par l’article 5 de la Charte de l’environnement ; la violation du droit de propriété ; la violation du principe de conciliation des politiques publiques avec la protection et la mise en valeur de l’environnement, le développement économique et le progrès social consacré par l’article 6 de la Charte de l’environnement. Dans sa décision du 11 octobre 2013, le Conseil constitutionnel rejette la question prioritaire en considérant que Premièrement, “que la différence de traitement entre les deux procédés de fracturation hydraulique de la roche qui résulte de l’article 1er est en rapport direct avec l’objet de la loi qui l’établit ;”, et que par conséquent, le principe d’égalité n’était pas méconnu. Deuxièmement, s’agissant de la liberté d’entreprise, le Conseil considère “que l’interdiction de recourir à des forages suivis de la fracturation hydraulique de la roche pour rechercher ou exploiter des hydrocarbures sur le territoire national est générale et absolue ; qu’elle a pour effet de faire obstacle non seulement au développement de la recherche d’hydrocarbures « non conventionnels » mais également à la poursuite de l’exploitation d’hydrocarbures « conventionnels » au moyen de ce procédé ; qu’en interdisant le recours à des forages suivis de fracturation hydraulique de la roche pour l’ensemble des recherches et exploitations d’hydrocarbures, lesquelles sont soumises à un régime d’autorisation administrative, le législateur a poursuivi un but d’intérêt général de protection de l’environnement ; que la restriction ainsi apportée tant à la recherche qu’à l’exploitation des hydrocarbures, qui résulte de l’article 1er de la loi du 13 juillet 2011, ne revêt pas, en l’état des connaissances et des techniques, un caractère disproportionné au regard de l’objectif poursuivi.” Troisièmement, s’agissant du droit de propriété, il est jugé que l’article 3 de la loi ne porte pas atteinte à une situation légalement acquise et que “les autorisations de recherche minière accordées dans des périmètres définis et pour une durée limitée par l’autorité administrative ne sauraient être assimilées à des biens objets pour leurs titulaires d’un droit de propriété ; que, par suite, les dispositions contestées n’entraînent ni une privation de propriété au sens de l’article 17 de la Déclaration de 1789 ni une atteinte contraire à l’article 2 de la Déclaration de 1789.” Quatrièmement, au sujet de l’article 6 de la Charte de l’environnement qui prévoit que « Les politiques publiques doivent promouvoir un développement durable. À cet effet, elles concilient la protection et la mise en valeur de l’environnement, le développement économique et le progrès social », le Conseil considère que “cette disposition n’institue pas un droit ou une liberté que la Constitution garantit ; que sa méconnaissance ne peut, en elle-même, être invoquée à l’appui d’une question prioritaire de constitutionnalité sur le fondement de l’article 61-1 de la Constitution ;” Enfin, que le grief tiré de la violation du principe de précaution est “en tout état de cause inopérant” car le législateur s’est fondé sur le principe de prévention.

A quelles conditions un chemin peut il être qualifié de “rural” par prescription acquisitive?

Dans un arrêt en date du 26 mars 2013 (Cour de cass., 3ème chambre civile, 26 mars 2013, pourvoi n°2012-16558), la Cour de cassation souligne que le caractère « rural » d’un chemin peut s’affirmer par la prescription acquisitive au bénéfice d’une commune. Les faits de l’espèce soumis à la Haute juridiction étaient simples : un particulier avait assigné une commune en revendication de propriété d’un chemin traversant les parcelles de terre dont il est propriétaire. Confirmant la décision de Cour d’appel, la Cour de cassation valide l’appréciation des éléments de fait par les juges du fond qui ont permis de conclure à la prescription acquisitive au profit de la commune : « Mais attendu, qu’ayant constaté, d’une part, que la commune par délibérations du 11 juin 1959 et du 10 avril 1961, avait classé le chemin litigieux comme chemin rural, après un affichage en mairie n’ayant suscité aucune opposition et que, depuis, ce chemin figurait dans la liste des chemins ruraux reconnus et apparaissait comme tel au cadastre et, d’autre part, que plusieurs permis de construire délivrés à l’auteur de M. X…, entre 1964 et 1982, signalaient expressément ce chemin rural, l’un d’eux prévoyant la cession « d’une bande de terre nécessaire à l’élargissement du chemin », et relevé que ces actes marquaient la volonté de la commune de Signes de posséder le chemin litigieux, par incorporation à la voirie communale, et que la famille X… avait accepté pendant plus de trente ans cette possession continue et non interrompue, publique, non équivoque et à titre de propriétaire, la rendant ainsi paisible, la cour d’appel, qui a procédé à la recherche prétendument omise, a légalement justifié sa décision ». Le pourvoi du requérant a par conséquent été rejeté. Cet arrêt de la Cour de cassation confirme la jurisprudence administrative qui considère que, les chemins ruraux, appartenant au domaine privé, peuvent faire l’objet de la prescription acquisitive trentenaire (CE, 19 mai 1976, n° 93629, Sté coopérative ” La Léonarde ” : Dr. adm. 1976, comm. 184. – CE, 11 mai 1984, n° 24755, Épx Arribey : Rec. CE 1984, p. 782). Une vigilance particulière doit donc être portée par les propriétaires terriens de chemins sur le risque d’acquisition, par le jeu de la prescription acquisitive au profit des communes, de « chemins » dans le cadre notamment des diverses actes administratifs et autorisations d’urbanisme délivrées par la personne publique. Aurélien BOUDEWEEL Green Law Avocat

Remblaiement de plan d’eau: le propriétaire n’est pas totalement libre d’y procéder (rép. Min. 3 septembre 2013)

Une réponse ministérielle en date du 03 septembre 2013 (réponse ministérielle publiée au JO le 03/09/13 page 9236 suite à la question n°21044 de M. Yves Nicolin) apporte des précisions sur la réglementation encadrant le remblayage des plans d’eau présents sur des terrains privés. Le ministre de l’écologie était interrogé sur le fait de savoir sous quelles conditions un propriétaire de terrain sur lequel se trouve un étang, non relié à un cours d’eau et servant de réserve d’eau pour un hameau, pouvait, de sa propre initiative et sans autorisation préalable, assécher et remblayer le dit plan d’eau. Le ministre de l’écologie dans sa réponse raisonne en plusieurs temps : Il rappelle tout d’abord que les plans d’eaux seulement alimentés par des eaux pluviales et de ruissellement ou des eaux de sources, ne donnant pas naissance à un cours d’eau au-delà des limites d’une propriété, constituent un mode spécial d’aménagement des eaux privées. Il souligne ensuite que le propriétaire du fonds sur lequel reposent ces eaux en a la libre disposition conformément aux articles 641 et 642 du code civil. Toutefois, il apporte un bémol puisque la vidange d’un plan d’eau, tout comme sa création sont, selon les seuils fixés par la nomenclature annexée à l’article R. 214-1 du code de l’environnement, peuvent être soumises au régime d’autorisation ou de déclaration institués par l’article L. 214-3 du même code. En effet, ces eaux constituent une interface entre les eaux souterraines et les cours d’eau et ne peuvent qu’être soumises à la police administrative spéciale de l’eau et des milieux aquatiques en raison du principe de gestion équilibrée, énoncé par l’article L. 211-1 du code de l’environnement. Afin de répondre à la question posée par le député, le ministre de l’écologie rappelle au visa de ce qui vient d’être susmentionné que, conformément à l’alinéa 3 de l’article 642 du code civil et à la jurisprudence afférente, le propriétaire d’une source ne peut enlever aux habitants agglomérés d’une commune, d’un village ou d’un hameau, les eaux qui leur sont nécessaires (Cf. Cass. civ. 3e , 2 juillet 1997, pourvoi n° 95-13.457, Epoux Brulé c/ Gavet et autres). De fait, le ministre rappelle que « la vidange de plans d’eau privés et a fortiori le remblayage de ces plans d’eau ne sauraient donc être autorisés dans la mesure où cela affecterait la fourniture en eau potable d’un hameau ». La réponse ministérielle apporte donc des précisions intéressantes sur la liberté de principe dont dispose le propriétaire d’un terrain sur lequel se trouve un plan d’eau (non relié à un cours d’eau) tout en rappelant les contraintes imposées par le Code de l’environnement qui oblige ledit propriétaire à veiller au respect desdites dispositions spéciales. Les particularités de la législation sur l’eau associées aux règles de droit privé (énonçant une liberté certaine) démontrent l’insécurité juridique pouvant exister pour les propriétaires de plans d’eau, profanes du droit. Aurélien BOUDEWEEL Green Law Avocat