Par David DEHARBE, avocat gérant (Green Law Avocats)
Afin de pouvoir disposer de sites adaptés à l’accueil de nouvelles usines, tout en limitant l’artificialisation de zones naturelles, le projet de loi relatif à une industrie verte, présenté le 16 mai en Conseil des ministres consacre au chapitre IV de son titre 1er divers mesures encourageant la réhabilitation des friches industrielles (téléchargeable ci-dessous).
I. Améliorer la gestion des cessations d'activité et faciliter la libération des fonciers industriels
En son article 5, le projet de loi comporte plusieurs mesures destinées à accélérer et à faciliter le renouvellement et la réhabilitation du foncier industriel pour des sites arrivant en fin d’activité ou d’ores et déjà en cessation d’activité :
- La possibilité à un exploitant dont la cessation d'activité a été notifiée avant le 1er juin 2022 de demander à l'administration, de façon volontaire, l'application de la nouvelle procédure de cessation de la loi « ASAP » du 7 décembre 2020 (JORF n°0296 du 8 décembre 2020) d'activité impliquant la mise en oeuvre de « délais de silence vaut accord » ;
- La possibilité pour le tiers demandeur de procéder, en plus de la réhabilitation du site, à la mise en sécurité incombant légalement au dernier explorant de l'installation classée ;
- L'engagement de la responsabilité résiduelle du dernier exploitant uniquement en matière de mise en sécurité du site et non de réhabilitation ;
- L' élargissement du cadre du déclenchement de notification de cessation d'activité en prenant en compte l'arrêt définitif d'une installation classée sur une seule partie de l'emprise du site exploité, l'autre partie pouvant continuer à être le siège d'une poursuite d'activités classées.
II. Renforcer l'action de l'État en cas de défaillance d'un exploitant et favoriser la réhabilitation des fonciers industriels
Dans la même perspective, l’article 6 du projet de loi vise à renforcer l’action de l’État en cas de défaillance d’entreprises et de renforcer les actions de mise en sécurité des sites en offrant de nouveaux leviers d’action lorsque l’exploitant ne s’est pas acquitté de ses obligations en matière de mise en sécurité du site :
- Le remplacement de l'obligation de constitution des garanties financières des ICPE relevant du 5° de l'article R. 516-1 du code de l'environnement) par des mesures plus efficaces, permettant de sécuriser les sommes destinées à la mise en sécurité du site, dans les deux cas ciblés (liquidation et exploitation illégale) ;
- L'introduction des dépenses visant à assurer la mise en sécurité des installations classées pour la protection de l'environnement dans la liste des créances à payer à leur échéance en cas de liquidation judiciaire ;
- La séniorisation de la créance environnementale en cas de liquidation judiciaire de l'entreprise en introduisant un nouveau privilège des créances liées aux dépenses de mise en sécurité environnementale ;
- La consignation de sommes en cas de non-respect des mesures conservatoires imposées par l'administration et d'exploitation illégale d'un site.
III. Anticiper la procédure de compensation pour favoriser la bonne mise en oeuvre du dispositif « site clés en main »
Dans un souci de plus grande efficacité en matière de gestion foncière, l’article 7 propose des mesures pour favoriser la bonne mise en oeuvre du dispositif « sites clés en main ».
Pour mémoire, un site clé en main est un site, d’une taille minimale d’1 ha, pouvant recevoir des activités industrielles (dont activités de R & D associées) ou logistiques relevant, sauf exception, de la règlementation des ICPE, et pour lesquels les procédures relatives à l’urbanisme, l’archéologie préventive et l’environnement ont été anticipées afin de permettre l’instruction des autorisations nécessaires à l’implantation d’une nouvelle usine dans des délais fiables et maîtrisés (Cf. Gouvernement, Fiche technique « Qu’est ce q’un site industriel en main », Décembre 2020)
Aujourd’hui cette procédure est difficile à anticiper : la réglementation n’autorise que la mise en place de sites naturels de compensation (SNC) (articles D. 163-1 à D. 163-9 du code de l’environnement), qui doivent être mutualisés entre plusieurs projets.
Ce dispositif est dans les faits peu utilisé et perçu comme techniquement complexe par les porteurs de projet.
Ainsi l’article 7 du projet de loi entend faire émerger une véritable offre d’écosystèmes restaurés, par la mise en place de sites naturels de restauration et de renaturation (SNRR), en remplacement des SNC afin de permettre :
- Aux porteurs de projet de réaliser des opérations de compensation par anticipation, y compris pour des projets isolés, par exemple pour des sites « clés-en-main » ;
- De créer un cadre législatif adapté pour le développement des opérations de restauration de la biodiversité conduites pour des engagements volontaires d'entreprises et collectivités, et facilite la procédure d'agrément des sites.
Pour une analyse plus approfondie du texte, nous renvoyons à l’article de Blandine ROLLAND « La loi « industrie verte » et les procédures de traitement des difficultés des entreprises ».