Report de la caducité des POS au 31 décembre 2020

Par Théo DELMOTTE (green LAw avocats) La loi « Engagement et Proximité » a reporté la caducité des plans d’occupation des sols (POS) au 31 décembre 2020 dans les communes membres d’une intercommunalité qui n’aurait pas encore achevé l’élaboration du plan local d’urbanisme intercommunal (PLUi). En effet, l’article 18 de la loi du 27 décembre 2019 relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique, dite « Engagement et Proximité » (loi n° 2019-1461, publiée au JO du 28 décembre), a modifié l’article L. 174-5 du code de l’urbanisme qui laisse désormais plus de temps aux intercommunalités pour approuver leur PLUi. Cet article prévoit également que les anciennes communautés, qui ont engagé une procédure de révision ou d’élaboration d’un PLUi avant le 31 décembre 2015 et dont l’ensemble des communes ont fusionné après l’engagement de ce PLUi, ont également jusqu’au 31 décembre 2020 pour approuver ce PLUi. Pour mémoire, la loi dite ALUR du 24 mars 2014 avait prévu à l’article 123-19 du code de l’urbanisme (devenu l’article L. 174-1 du même code) la caducité des POS, qui n’avaient pas été mis en forme de plan local d’urbanisme (PLU) au plus tard le 31 décembre 2015, à compter de cette date. Néanmoins, la loi du 20 décembre 2014 (loi n° 2014-1545, publiée au JO du 21 décembre), puis la loi du 27 janvier 2017 (loi n° 2017-86, publiée au JO du 28 janvier, dite « Égalité et citoyenneté »), avaient prévu une forme de dérogation à l’article L. 174-5 du code de l’urbanisme. Ainsi, lorsqu’un établissement public de coopération intercommunale, compétent en matière de PLU ou de document d’urbanisme en tenant lieu, avait engagé une procédure d’élaboration d’un PLUi avant le 31 décembre 2015, l’application du POS pouvait être maintenue jusqu’à l’approbation du PLUi. Et ce, au plus tard le 31 décembre 2019. La caducité du POS devait alors survenir après cette date, entrainant l’application du règlement national d’urbanisme. Désormais, cette échéance est donc reportée au 31 décembre 2020. L’enjeu est de taille, puisque comme le soulignaient les promoteurs de ce report devant le Sénat, au 31 décembre 2018 environ 1 102 communes disposaient encore d’un POS opposable dans le cadre d’une procédure d’élaboration d’un PLUi.

Réforme de la procédure civile : ce qui change dès le 1er janvier 2020 !

Par Maître Ségolène REYNAL (Green Law Avocats) La loi du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 modifie substantiellement la procédure civile. Trois décrets ont été publiés en date du 1er septembre 2019 afin de préciser les modalités de fusion des TGI et TI au profit de la création du Tribunal Judiciaire. Un décret en date du 11 décembre 2019 (n° 2019-1333) et un décret du 20 décembre 2019 (n° 2019-1419) tirent les conséquences d’une telle fusion et participent à la réécriture du Titre 1er livre II du Code de procédure civile. Afin d’entamer cette nouvelle année avec sérénité il convient de souligner les changements majeurs en matière de procédure civile: La suppression du TGI et TI et création du Tribunal Judiciaire et de chambres de proximité (art L.212-8 COJ) ; La Création d’un juge chargé des contentieux de la protection (JCP) ; La simplification des modes de saisine ; L’extension de la représentation obligatoire ; L’extension des pouvoirs du juge de mise en état et la convention de procédure participative aux fins de mise en état ; L’exécution provisoire de droit et la fin du principe de l’effet suspensif de l’appel ; La procédure accélérée au fond (PAF). A titre liminaire, relevons que l’entrée en vigueur de cette réforme se fait en trois temps : Le principe est que la réforme est applicable au 1er janvier 2020 aux instances en cours et aux affaires nouvelles. Toutefois deux exceptions existent : La réforme est applicable au 1er janvier 2020 aux instances nouvelles uniquement, pour les dispositions relatives à l’exécution provisoire de droit, à l’extension des pouvoirs du juge de la mise en état, à la représentation obligatoire par avocat et à la procédure accélérée au fond. La réforme entrera en vigueur au 1er septembre 2020 pour les affaires en nouvelle uniquement, pour les dispositions relatives à la généralisation de l’assignation avec prise à date. I/ La suppression du TGI et TI et la création du Tribunal Judiciaire et des chambres de proximité (art L.212-8 COJ) Le Tribunal Judiciaire devient la juridiction de droit commun et dispose d’une compétence de principe. Il connaît de toutes les affaires civiles ou commerciales pour lesquelles compétence n’est pas attribuée expressément à une autre juridiction. Il existe des compétences communes à tous les tribunaux judiciaires, des compétences particulières à certains tribunaux judiciaires et des compétences exclusives (article R.211-3-26 CJA). Lorsque l’ancien TI n’est pas situé dans la même ville que l’ancien TGI, il sera créé des « tribunaux de proximité ». Les nouveaux textes continuent de distinguer les compétences qui sont toujours à charge d’appel, celles qui sont toujours en premier et dernier ressort et celles qui sont à charge d’appel ou en dernier ressort en fonction du montant de la demande. En revanche, le taux du ressort est porté de 4.000 € à 5.000 € devant le Tribunal Judiciaire, mais il reste à 4.000€ pour les autres tribunaux : tribunal de commerce, conseil de prud’hommes etc. La réforme instaure un mécanisme de spécialisation de certains tribunaux judiciaire. Cette nouveauté risque de susciter des difficultés, d’être source de complexité et de porter atteinte à la lisibilité de l’organisation judiciaire. En effet, lorsqu’il existe plusieurs tribunaux judiciaires dans un même département, certains d’entre eux pourront être spécialisés. Ils pourront être désignés par décrets pour connaître seuls, dans l’ensemble du département, de certaines matières civiles notamment (article R.211-4 I COJ) : Actions relatives aux baux commerciaux Actions relatives au préjudice écologique Actions relatives aux procédure collectives Des actions en paiement, en garantie et en responsabilité liées à une opération de construction immobilière Il conviendra donc que les avocats identifient en amont le Tribunal Judiciaire compétent afin de ne pas se voir opposer l’incompétence de ce dernier. Afin de simplifier les questions de compétences au sein d’un même Tribunal Judiciaire, il a été créé mécanisme facultatif de renvoi de juge à juge par simple mention au dossier. Si une difficulté persiste l’affaire est renvoyé au président du tribunal qui pourra désigner le tribunal compétent. II/ La création d’un juge chargé des contentieux de la protection (JCP) C’est un juge spécialisé dans le contentieux de la vulnérabilité. Il a notamment compétence dans : -l’expulsion des personnes qui occupent sans droit ni titre (article L213-4-3 COJ) -le contrat de louage d’immeuble à usage d’habitation (article L.213-4-4 COJ) -les actions relatives au crédit à la consommation III/ La simplification des modes de saisine La saisine du Tribunal Judiciaire se fait par assignation ou par requête (conjointe ou non) (article 54 CPC). La déclaration au greffe et la présentation volontaire des parties ont été supprimées. Lorsque la demande est faite voie électronique, le demandeur, à peine de nullité, devra mentionner son adresse électronique ainsi que son numéro de téléphone mobile (article 54 CPC). Le renforcement du caractère obligatoire des Modes Alternatifs de Règlements des Litiges (MARD) dans les petits litiges est encore un point notable de la réforme. Actuellement dans les litiges de 4.000€ maximum, le demandeur est tenu de justifier par tous moyens qu’il a recouru à un MARD. Désormais, à peine d’irrecevabilité par le juge, lorsque la demande tend au paiement d’une somme maximum de 5.000 € ou est relative à un conflit de voisinage, il convient de justifier d’une tentative de conciliation menée par un conciliateur de justice, d’une tentative de médiation ou d’une tentative de procédure participative. La réforme apporte trois modifications : Le seuil en-dessous duquel la tentative est obligatoire passe de 4.000 € à 5000 € (article 750-1 CPC) ; La demande est relative à un conflit de voisinage (articles R.211-3-4, R211-3-8 COJ) concerne le bornage, plantations ou élagage d’arbres ou haies, constructions et travaux prévus à l’article 674 code civil (puits, fosse d’aisance, cheminée etc)), le curage des fossés et canaux servant à l’irrigation des propriétés ou au mouvement des usines et moulins, l’établissement et l’exercice des servitudes instituées par les articles L.152-14 à L.152-23 code rural et articles 640 et 641 code civil ; Les MARD sont limitativement énumérés : conciliation, médiation à une convention de procédure participative. La dispense de faire état de…

Vous avez dit simple la déclaration ICPE ?

Par David DEHARBE (Green Law Avocats) La Cour administrative de Bordeaux (CAA Bordeaux, 5e ch., 17 déc. 2019, n° 17BX03677) vient de censurer en ces termes le Tribunal administratif de Poitiers (Tribunal administratif de Poitiers, 27 septembre 2017, N° 1500942) pour avoir rejeté l’intérêt agir à des requérants contre le récépissé de déclaration d’une installation de méthanisation délivré le 1er avril 2014 :  « 4. Il résulte de l’instruction que le projet en litige est implanté dans une zone de bocages dédiée à l’activité agricole. Les pièces du dossier, et notamment des vues aériennes produites par les requérants eux-mêmes, établissent que M. et Mme H…-J…, Mme I…, M. et Mme Q… demeurent …. S’il n’est certes pas établi au dossier que la construction projetée serait visible depuis les demeures des requérants, il n’en reste pas moins que la distance de 750 mètres est relativement faible s’agissant d’une usine destinée à traiter en moyenne 29,9 tonnes de matières par jour. A cet égard, les requérants font valoir que l’unité de méthanisation projetée entraînera pour eux des nuisances olfactives. Il résulte de l’instruction que le stockage des déchets avant incorporation dans le digesteur est de nature à émettre des odeurs même si les fumiers acheminés sur le site doivent être entreposés dans des structures bétonnées et bâchées, les digestats liquides stockés dans une structure couverte et les digestats solides placés sous abri. Eu égard aux nuisances olfactives susceptibles d’être engendrées par le processus de méthanisation, alors même que celui-ci ne se réalise pas à l’aire libre, à l’épandage des matières, même si ce processus est moins odorant que lorsqu’il concerne des matières brutes, et à la distance relativement faible qui séparent les bâtiments autorisés des habitations de M. et Mme H…-J…, Mme I…, M. et Mme Q…, ces derniers justifient d’un intérêt suffisant à contester le récépissé de déclaration en litige, sans qu’il soit besoin d’examiner la recevabilité des conclusions présentées par les autres demandeurs de première instance.». Est-il bien raisonnable de reconnaître un intérêt agir à des requérants aussi éloignés d’une installation de méthanisation, sans une réelle problématique d’épandage ? Les actions juridictionnelles dont sont trop souvent désormais victimes les exploitants d’installations d’élevage et de méthanisation  mériteraient sans doute une approche moins subjective de la recevabilité et assurément mieux fondée scientifiquement. Il serait opportun que le Conseil d’Etat joue ici son rôle pour préserver la filière agricole d’actions contentieuses qui ne devraient pas passer le cap de la recevabilité, tant l’agribashing devient insupportable pour les éleveurs… certaines actions sont tellement menées avec virulences qu’elle peuvent conduire à des renoncements à projet avant même d’être jugées ! L’on sait au demeurant que le financement sur recours, s’il n’est pas impossible, demeure extrêmement coûteux psychologiquement pour le porteur de projet et contre nature dans la culture bancaire française… Certes on peut se rassurer à la lecture de l’arrêt rendu parc la CAA de Bordeaux, dès lors que la Cour rejette au fond tous les moyens articulés contre le récépissé et en particulier s’agissant de la complétude du dossier (CE, 23 mars 1990, n° 62 644) ou du classement (solution classique s’agissant d’un tonnage journalier : cf. CAA Paris, 5 nov. 1998, n° 97PA01612) : « En deuxième lieu, il résulte de l’instruction que la demande de récépissé comportait un plan cadastral et un plan de localisation des bâtiments projetés. Il comportait aussi des développements sur la question du traitement des bruits et des odeurs en lien avec le fonctionnement de l’installation. Par suite, le contenu de la demande respectait sur ces points les exigences de l’article R. 512-47 du code de l’environnement. En troisième lieu, le dossier de déclaration comportait un volet explicitant le choix du lieu d’implantation de l’installation et son intégration dans le paysage. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, le dossier de déclaration est conforme sur ce point aux exigences de l’article 2.2 de l’annexe I à l’arrêté du 10 novembre 2009 relatif aux prescriptions générales applicables aux installations classées de méthanisation soumises à déclaration. En quatrième lieu, selon la rubrique n° 2781 de la nomenclature des installations classées pour la protection de l’environnement annexée à l’article R. 511-9 du code de l’environnement, les unités de méthanisation qui traitent moins de 30 tonnes par jour relèvent du régime de la déclaration et, au-delà de ce seuil, du régime de l’enregistrement. Le dossier de déclaration déposé par la société Méthane Invest Bleu indique que la quantité totale annuelle d’effluents traités est en moyenne annuelle de 10 910 tonnes, soit 29,9 tonnes par jour et non de 11 910 tonnes, valeur correspondant aux tonnages maximum que l’usine de méthanisation est en mesure de traiter. Par suite, le projet de la société Méthane Bleu Invest relevait du régime de la déclaration et non de celui de l’enregistrement » Mais l’on relève tout de même un contrôle du récépissé qui dépasse la seule complétude du dossier pour voire le juge se saisir du respect des intérêts protégés par la loi  par la décision de délivrance: « 12. En cinquième et dernier lieu, aux termes de l’article L. 512-8 du code de l’environnement : ” Sont soumises à déclaration les installations qui, ne présentant pas de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts visés à l’article L. 511-1, doivent néanmoins respecter les prescriptions générales édictées par le préfet en vue d’assurer dans le département la protection des intérêts visés à l’article L. 511-1 “. 13. Il résulte de l’instruction que le terrain d’assiette du projet se situe dans une zone de nature ne présentant pas, par elle-même, de caractère ou d’intérêt particulier et dépourvue aussi de monuments historiques ou encore de sites protégés. Par ailleurs, l’installation doit fonctionner parmi un ensemble de bâtiments agricoles déjà existants. Dans ces conditions, le préfet ne saurait être regardé comme ayant méconnu les intérêts protégés à l’article L. 511-1 du code de l’environnement en délivrant le récépissé en litige ». Effectivement le moyen des requérants sollicitait bien du juge qu’il contrôle le respect de prescriptions techniques par la délivrance dès lors que les appelantes soutenaient que : « l’installation d’une…

Performance énergétique des bâtiments : nouvelles obligations pour les entrepôts commerciaux et locaux industriels avec la Loi Énergie climat

Par Maître Sébastien BECUE, avocat of counsel (Green Law Avocats) La loi dite « Energie et climat » (loi n°2019-1147 du 8 novembre 2019), publiée au JO le 9 novembre 2019 crée au sein du code de l’urbanisme un nouvel article L. 111-18-1 au sein de la section « Performances environnementales et énergétiques » du Règlement national d’urbanisme. Il s’agit d’une reprise partielle des dispositions du second alinéa de l’ancien article L. 111-19 du code de l’urbanisme, abrogées par la loi, et qui prévoyaient que la construction des projets soumis à autorisation d’exploitation commerciale était subordonnée à la mise en œuvre de certaines obligations en matière de performance énergétique des bâtiments. Cet article s’appliquait aux permis de construire dont la demande avait été déposée à compter du 1er mars 2017. Le nouvel article L. 111-18-1 élargit considérablement les catégories de constructions concernées par ces obligations de performance énergétique (I) en précise le contenu (II) et prévoit des possibilités de dérogation motivées sous conditions strictes (III). I/ Le champ d’application des obligations de performance énergétique La première condition de soumission à l’obligation est que la construction projetée crée plus de 1.000 m² d’emprise au sol. La seconde est que la construction projetée appartienne à l’une des catégories listées. Sont ainsi concernés : Les magasins de commerce de détail, les ensembles commerciaux et les « drives » Il s’agit des constructions soumises à autorisation d’exploitation commerciale au titre des 1°, 2°, 4°, 5° et 7° de l’article L. 752-1 du code de commerce – précisées aux articles R. 752-1 et suivants du même code : La création ou l’extension d’un magasin de commerce de détail ou d’un ensemble commercial d’une surface de vente supérieure à 1.000 m² La création ou l’extension d’un « drive» (ou plutôt, selon sa poétique qualification par le code de commerce : d’un « point permanent de retrait par la clientèle d’achats au détail commandés par voie télématique, organisé pour l’accès en automobile ») Rappelons que l’ancien article L. 111-19 du code de l’urbanisme soumettait à l’obligation toutes les constructions soumises à autorisation d’exploitation commerciale. Certaines opérations soumises à autorisation d’exploitation commerciale ne sont donc plus soumises à l’obligation : la catégorie 3° : changement de secteur d’activité d’un commerce d’une surface de vente supérieure à 2 000 m², ou supérieure à 1.000 m² si l’activité nouvelle est à prédominance alimentaire ; et la catégorie 6° : la réouverture au public, sur le même emplacement, d’un magasin de commerce de détail d’une surface de vente supérieure à 2 500 mètres carrés dont les locaux ont cessé d’être exploités pendant trois ans. Les locaux à usage industriel ou artisanal, d’entrepôts, de hangars non ouverts au public faisant l’objet d’une exploitation commerciale (de plus de 1.000 m² d’emprise au sol, donc) Il s’agit d’une extension considérable du champ d’application des obligations de performance énergétique. Notons que cette liste semble reprise de l’article L. 331-12 du code de l’urbanisme qui prévoit un abattement de 50% de taxe d’aménagement pour ces mêmes constructions. II/ Le contenu des obligations de performance énergétique Les constructions soumises à l’obligation doivent comporter : soit un procédé de production d’énergies renouvelables On note qu’il n’est pas fixé de seuil minimal de production. Rien ne semble s’opposer à ce que l’énergie produite soit vendue à l’acheteur obligé ou sur la marché, ou encore qu’elle soit utilisée en autoconsommation pour la consommation du bâtiment. Le dispositif pourrait avoir un effet incitatif pour l’utilisation de l’autoconsommation collective, dont le régime a également été modifié par la loi Energie Climat (ce sera l’objet d’un prochain article sur ce blog). soit une toiture végétalisée (ou plutôt, selon sa poétique qualification par le code de l’urbanisme : d’un « système de végétalisation basé sur un mode cultural garantissant un haut degré d’efficacité thermique et d’isolation et favorisant la préservation et la reconquête de la biodiversité») Sur ce point, nous attirons l’attention des parties prenantes sur le débat en cours concernant la nature de la toiture végétalisée au regard des obligations de garantie du constructeur : ouvrage ? élément d’équipement ? autre ? Rappelons par exemple que la Cour de cassation a considéré que le constructeur ne doit pas la garantie de bon fonctionnement pour le revêtement végétal (Civ. 3, 18 fév.  2016, n°15-10.750). soit tout autre dispositif aboutissant au même résultat On devine, mais sans certitude, que le « même résultat » en question vise le « haut degré d’efficacité thermique et d’isolation et favorisant la préservation et la reconquête de la biodiversité » que doit permettre la toiture végétalisée. Il est précisé que la mise en œuvre de ces obligations se fait sur la toiture ou sur les ombrières de parking. Un minimum de 30% de la surface de la toiture ou des ombrières est imposé. On comprend donc qu’en réalité, l’énergie renouvelable à laquelle il est fait référence est a priori pour l’heure seulement photovoltaïque, la seule qui peut en pratique est générée en toiture ou sur ombrière. Par ailleurs, si la construction prévue prévoit la création d’une aire de stationnement associée, celle-ci doit inclure « des revêtements de surface, des aménagements hydrauliques ou des dispositifs végétalisés favorisant la perméabilité et l’infiltration des eaux pluviales ou leur évaporation et préservant les fonctions écologiques des sols ». III/ Les possibilités de dérogation aux obligations Il existe d’une part trois motifs de dérogation générale à l’obligation, sous réserve de l’obtention d’une décision motivée de l’autorité compétente en matière d’urbanisme. En pratique cela signifie que le permis de construire délivré devra comporter dans ses visas la justification de l’application de la dérogation à la construction projetée. Cela signifie également que le dossier de demande de permis de construire devra justifier de manière détaillée pourquoi il entre dans l’une des hypothèses de dérogation prévues. Attention le texte précise que l’autorité peut « écarter tout ou partie de l’obligation », ce qui veut dire que ce n’est pas par exemple parce qu’une partie du bâtiment est exposée à un risque particulier ou visible depuis un monument historique que les obligations ne peuvent pas s’appliquer pour le reste du bâtiment. Les motifs de dérogation sont les suivants : Lorsque l’ensemble des procédés, systèmes et dispositifs mentionnés sont de…

ANTENNE RELAIS : LE PAYSAGE DERNIER REMPART CONTRE LES ONDES ?

Par Maître Thomas RICHET (GREEN LAW AVOCATS) A l’heure de l’ultra-connexion et de l’avènement de la 5G, le gouvernement français s’attache à mettre fin aux « zones blanches » d’ici 2020. Les opérateurs de téléphonie mobile sont les partenaires privilégiés de ce développement et bénéficie, à ce titre, d’un régime juridique favorable pour implanter les pylônes de radiotéléphonie ou « antenne relais » nécessaires à la transmission des ondes. La multiplication de ces « tours de métal » suscite une vive résistance des habitants qui vivent à proximité et qui sont particulièrement inquiets pour leur cadre de vie notamment d’un point de vue sanitaire et paysager. C’est dans ce contexte anxiogène que de nombreux riverains multiplient les actions : mobilisation de la presse locale, pétitions, formation de collectifs, manifestations et pour un nombre croissant d’entre eux, recours au juge administratif en vue de contester l’autorisation d’urbanisme. Il convient d’ailleurs de rappeler que cette autorisation prend désormais la forme d’une simple décision de non-opposition à déclaration préalable en lieu et place d’un permis de construire (sur ce point voir notre article Loi ELAN et décret du 10 décembre 2018 : un nouvel assouplissement des contraintes applicables aux antennes relais). Ces décisions peuvent, à l’occasion d’un recours en excès de pouvoir devant le juge administratif, faire l’objet de plusieurs griefs. En premier lieu, les risques sanitaires sont régulièrement invoqués devant le juge au travers d’une part, de la violation des dispositions de l’article R. 111-2 du Code de l’urbanisme (sécurité publique) et, d’autre part, de la méconnaissance de l’article 5 de la Charte de l’environnement (principe de précaution). Actuellement, le juge administratif rejette de manière constante ces moyens considérant qu’il n’existe, en l’état des connaissances scientifiques, aucun risque lié à l’exposition aux champs électromagnétiques (voir par exemple Conseil d’Etat, 30 janvier 2012, req. n° 344992). Bien que les moyens tenant à la contestation du risque sanitaire aient été « neutralisés » devant le juge administratif, le débat ne semble pas totalement arrêté d’un point de vue scientifique. Ainsi le rapport international BioInitiative réalisé en 2007 met en évidence l’existence de risques pour la santé humaine (les conclusions sont consultables ici). Dès lors, et malgré la jurisprudence actuelle, il nous semble donc tout à fait pertinent de continuer à soulever les moyens tenant à dénoncer les risques sanitaires qu’impliquent les antennes relais. En deuxième lieu, les riverains des projets de pylônes de radiotéléphonie peuvent également contester la légalité de la décision de non-opposition à déclaration préalable au regard du document d’urbanisme en vigueur qui sera, le plus souvent, un Plan Local d’Urbanisme (PLU). Le projet d’antenne relais doit en effet respecter le règlement du PLU et sa méconnaissance est susceptible d’être sanctionnée par le juge administratif. Cependant, là encore, ce moyen jouit d’une efficacité relative dès lors que les antennes sont qualifiables de « constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs ou à des services publics » et peuvent ainsi déroger à certaines règles du règlement précité (exemples : hauteur des constructions, implantation au sein d’une zone « naturelle » ou encore « agricole », etc.). Le moyen s’il reste pertinent nécessitera en tout état de cause une instruction approfondie du PLU et du dossier de déclaration préalable de l’opérateur de téléphonie mobile. En troisième et dernier lieu, le moyen qui nous semble être le plus à même d’emporter l’annulation de la décision de non-opposition à déclaration préalable concerne la méconnaissance des dispositions de l’article R. 111-27 du Code de l’urbanisme, à savoir l’atteinte « au caractère ou à l’intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu’à la conservation des perspectives monumentales ». Il apparaît en effet incontestable que ces installations, qui peuvent atteindre une quarantaine de mètres de hauteur et qui prennent la forme d’une structure métallique dite en « treillis » ou d’un monotube, sont particulièrement disgracieuses et peuvent donc porter atteinte à la beauté des paysages locaux. Saisi d’un tel moyen le juge procèdera en deux temps : il appréciera d’abord la qualité paysagère du site puis l’impact qui lui est porté par le projet de construction. Ce moyen a d’ores et déjà fait ses preuves, notamment, en vue d’obtenir la suspension de la construction dans le cadre d’un référé suspension formé sur le fondement des dispositions de l’article L. 521-1 du Code de justice administrative (voir par exemple, Tribunal administratif de Lille, ord. du 11 février 2019, req. n° 1900166, jurisprudence cabinet). Une récente décision a également attiré notre attention : par une ordonnance du 3 octobre 2019, le juge des référés du Tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de suspension formulée par un opérateur de téléphonie contre une décision d’opposition à déclaration préalable en considérant que : « La commune fait valoir que le terrain d’assiette du projet, bien que séparé par plusieurs parcelles du marais d’Olonne dont certaines sont bâties, se situe, d’une part, dans une zone de co-visibilité majeure, identifiée par le schéma de cohérence territoriale et qualifiée de « très sensible aux évolutions de plantations et construction, infrastructures et clôtures » et, d’autre part, au sein d’un corridor écologique où les équipements d’intérêt général ne peuvent être implantés que sous réserve de l’impossibilité de les implanter en d’autres lieux. (…) En conséquence les moyens tirés de ce que le projet litigieux ne méconnaîtraient pas l’article R. 111-27 du code de l’urbanisme (…) ne sont pas de propres, en l’état de l’instruction à créer un doute sérieux quant à la légalité de l’arrêté contesté ». (Tribunal administratif de Nantes, ord. du 3 octobre 2019, req. n° 1909388). Pour conclure, même si les moyens tirés du risque sanitaire et de la méconnaissance du PLU restent pertinents, le moyen tiré de l’atteinte portée au paysage semble être, en l’état de la jurisprudence, le plus efficace pour obtenir l’annulation de la décision de non-opposition à déclaration préalable. Précisons encore que certains PLU peuvent prévoir au sein de leur règlement des dispositions en vue de limiter l’impact paysager des antennes et qu’il conviendra alors d’invoquer ces dispositions en lieu et place de l’article R. 111-27 du Code de l’urbanisme.