Le projet ASAP : vers l’insécurité juridique du droit de l’environnement !

Par Maître Sébastien Bécue (Green Law Avocats) La solution qu’a trouvé le gouvernement pour accélérer le développement des projets susceptibles d’avoir des impacts sur l’environnement semble être de créer des dérogations au sein du code de l’environnement. Un peu étrange philosophiquement (cela voudrait-il que l’on pourrait se passer des règles que ce code prévoit, alors qu’elles ont pour objet la protection de l’environnement ?), cette idée néglige complètement le fait que les porteurs de projets, et leurs financeurs, ont besoin, avant de les lancer, d’être rassurés sur la solidité juridique du titre qu’il va leur être délivré. Ainsi, on peut désormais, depuis le décret n°2020-412 du 8 avril 2020, bénéficier d’une dérogation préfectorale, à condition que celle-ci : soit justifiée par un motif d’intérêt général et l’existence de circonstances locales (tout juriste sait que la notion d’intérêt général a des contours pour le moins flous) ait pour effet d’alléger les démarches administratives, de réduire les délais de procédure ou de favoriser l’accès aux aides publiques soit compatible avec les engagements européens et internationaux de la France (donc dont, soit dit en passant, le droit de l’Union européenne qui irrigue la quasi-totalité des dispositions du code de l’environnement) ne porte pas atteinte aux intérêts de la défense ou à la sécurité des personnes et des biens, ni une atteinte disproportionnée aux objectifs poursuivis par les dispositions auxquelles il est dérogé (peut-on faire plus large comme condition ?) Qui peut dire, sauf à faire preuve de témérité, qu’il est certain que la dérogation dont il bénéficie, à supposer qu’elle lui soit délivrée, ne sera pas annulée sur le fondement de l’un de ces nombreux motifs, si elle devait être attaquée devant le juge ? Et maintenant on soumet au Parlement un projet de loi « ASAP » (ne commentons pas l’acronyme, il parle de lui-même) qui prévoit en son article 25, entre autres, la possibilité : de se passer d’enquête publique, et d’y substituer une consultation du public « en fonction de ses impacts sur l’environnement ainsi que des enjeux socio‑économiques qui s’y attachent ou de ses impacts sur l’aménagement du territoire », en méconnaissance totale du principe d’information et de participation du public (art.25) d’exécuter les travaux sans avoir encore obtenu de l’autorisation environnementale (art.26), c’est-à-dire sans connaître l’avis de l’autorité environnementale (!) ou sans avoir recueilli les observations du public (!!), et pour le porteur de projet, sans aucune sécurité juridique ! de ne pas respecter, pour les installations existantes, des prescriptions ministérielles nouvelles « sauf motif tiré de la sécurité, de la santé ou de la salubrité publiques, de la protection de l’environnement ou du respect des engagements internationaux de la France, notamment du droit de l’Union européenne » (art. 21). Les prescriptions environnementales n’ont-elles pas pour objet la protection de l’environnement ? Même Outre qu’elles relèvent clairement de la paresse intellectuelle, ces tentatives sont parfaitement contreproductives au regard de l’objectif affiché de « simplification ». Nécessitant une interprétation complexe, qui peut être renversée par le juge, elles ne seront pas utilisées. Et seront au contraire sources d’insécurité juridique. La priorité du gouvernement, s’il veut accélérer la création de projets, devrait être de travailler à : la clarification des textes par des circulaires claires et détaillées – prenons l’exemple de la dérogation espèces protégées : à partir de quand doit-on la déposer (aujourd’hui selon le texte ce serait tout impact ?), qu’est-ce qu’une raison impérative d’intérêt public majeure ? une solution alternative raisonnable ? leur stabilisation (cf l’échec l’aller-retour sur la définition des zones humides, qui nécessite de refaire des études en cours d’instruction) la prise en compte de ses fameux engagements vis-à-vis de l’Union européenne (cf le ralentissement massif de l’instruction des projets lié à la non-transposition pourtant relevée depuis 2012 de l’exigence d’autonomie de l’autorité environnementale) le recrutement d’instructeurs et leur formation aux procédures qu’il crée Gageons qu’en supprimant, en particulier, la disposition (art. 25) qui permettait aux préfets de soumettre à simple consultation électronique, les projets relevant d’une autorisation environnementale mais ne nécessitant pas d’évaluation environnementale, les députés auteurs de l’amendement n° 785 adopté cette semaine à l’Assemblée Nationale, s’ils croient sauver le droit de l’environnement (cf. Actu-Environnement), rétablissent, sans doute malgré eux, la sécurité juridique…

Illégalité de la modification du périmètre d’un PPR après enquête publique

Par Maître David DEHARBE (Green Law avocats) Un jugement récemment rendu en matière de risques naturels par le du tribunal administratif de Lyon doit retenir l’attention (TA Lyon, 4 juillet 2019, n°1800153). Par un arrêté du 8 novembre 2017, les Préfets de la Loire et du Rhône ont approuvé le plan de prévention des risques naturels prévisibles d’inondation (PPRi). Cet arrêté a été contesté par une association des riverains du Giers qui a obtenu l’annulation de l’arrêté par le Tribunal. En vertu de l’article L. 562-1 du code de l’environnement « l’Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels de prévisibles tels que les inondations… » A ce titre, l’État peut engager sa responsabilité en n’élaborant pas et en ne mettant pas en œuvre dans une zone exposée aux risques naturels, un plan de prévention des risques naturels. (CE, 21 mars 2003, n° 248911). Pour ce faire, en application de l’article R. 562-2 du même code, « l’arrêté prescrivant l’établissement d’un plan de prévention des risques naturels prévisibles détermine le périmètre mis à l’étude et la nature des risques pris en compte » En l’espèce, l’association requérante considérait comme illégale l’exclusion de 11 communes du plan de prévention initialement prévues par le projet alors que ces dernières n’étaient pas couvertes par un autre plan de prévention des risques d’inondation. La préfecture se défendait sur ce point en affirmant que ces communes ont été exclues du plan objet du recours, en application du principe de subsidiarité dans la mesure où ces dernières étaient elles-mêmes protégées par un autre plan de prévention de gestion des eaux pluviales de la communauté d’agglomération Saint-Etienne métropole en cours d’adoption. Le tribunal annule l’arrêté d’approbation du PPRi en retenant une erreur de droit, au motif que l’arrêté initial datant de 2009 prescrivant l’élaboration du plan de prévention comprenait certaines communes qui n’apparaissaient pas dans le plan de prévention soumis à enquête publique. L’exclusion des communes du plan de prévention est illégale, quand bien même un plan de gestion des eaux pluviales d’un communauté urbaine compétente en application du principe de subsidiarité était en cours d’élaboration à la date de la décision attaquée. Certes le principe de subsidiarité implique que « les collectivités territoriales ont vocation à prendre les décisions pour l’ensemble des compétences qui peuvent le mieux être mises en œuvre à leur échelon. » (alinéa 2 de l’article 72 de la Constitution). Mais l’invocation de ce principe constitutionnel n’apparaît pas suffisante pour justifier en l’espèce l’exclusion des communes du périmètre du plan de prévention et ceci pour au moins deux raisons. D’une part, le PPRi est adopté par le préfet et le principe de subsidiarité ne joue ici que très indirectement dans les rapports entre l’EPCI et les communes. D’autre part, manifestement le plan de gestion des eaux pluviales n’a pas vu son articulation juridique organisée avec le PPRi et au demeurant il n’était pas adopté en l’espèce. Le tribunal, après avoir conclu à l’illégalité du plan de prévention uniquement au regard de l’exclusion des communes, procède à une illégalité dite « en tant que ne pas » : « et sans préjudice de l’appréciation que l’administration, pour l’exécution du présent jugement, portera sur l’ampleur des risques auxquels pourraient être exposées ces communes et la nécessité, le cas échant, de les maintenir dans le périmètre de ce plan, il y a lieu d’annuler l’arrêté du 8 novembre 2017  dans la mesure, seulement, où ces communes ne figurent pas de le périmètre du plan » (point 18). On comprend donc que le PPRI en 2017 qui avait fait l’objet d’une modification de périmètre devra faire l’objet d’une nouvelle enquête publique et les Préfets devront s’assurer que toutes les communes de leur ressort sont effectivement protégées pour le risque d’inondation par l’éventuel plan de gestion des eaux pluviales. Cette position se justifie parfaitement au vu de l’importances des objectifs d’un tel plan de prévention. Parmi eux, se trouve la délimitation des zones directement exposées aux risques. D’ailleurs, la jurisprudence considère que le plan de prévention des risques doit répondre à une logique de précaution et de prévention (TA Nice, 27 juin 2000, n° 99762). La même décision rejette encore toute une série de moyens bien plus classiques. En particulier, la juridiction rappelle qu’en vertu de l’article L. 600-1 du code de l’urbanisme, les PPRI sont des documents d’urbanisme (CE 30 déc. 2011, Cne de Neuilly-sur-Seine, req. n° 324310, Lebon  ; AJDA 2012. 6) dont on ne peut exciper l’illégalité après l’expiration d’un délai de six mois à compter de leur prise d’effet ; « l’association requérante n’est ainsi pas recevable à exciper, par la voie de l’exception, de l’illégalité des modalités de concertation prévues par l’arrêté du 9 septembre 2009 prescrivant l’élaboration du plan de prévention en litige, ni de ses conditions de publication ».

Autorisation environnementale : court-circuitage des instances consultatives ?

Par Maître Lucas DERMENGHEM, Green Law Avocats   Le Gouvernement s’apprête à faire évoluer, une fois de plus, le régime juridique de l’autorisation environnementale, dispositif pourtant fraîchement entériné en droit français par l’ordonnance n°2017-80 du 26 janvier 2017 et le décret n°2017-81 du 26 janvier 2017. Plusieurs modifications du régime ont déjà été effectuées en court laps de temps, par le décret n°2018-797 du 18 septembre 2018 (relatif au dossier de demande d’autorisation), le décret n°2018-1054 du 29 novembre 2018 ou encore par le décret n°2018-1217 du 24 décembre 2018 mettant en application des dispositions de la loi pour un Etat au service d’une société de confiance (ESSOC). Le 16 avril dernier, un projet de décret a été publié sur le site du Ministère de la Transition écologique dédié aux consultations publiques. Ce projet a vocation à apporter des modifications sur quatre axes différents : la dématérialisation de la procédure, la possibilité de « mieux proportionner les consultations », le lancement plus rapide l’enquête publique et la fluidification de la fin de la procédure. Ce n’est qu’à l’approche de la fin de la consultation en ligne, le 6 mai dernier, que le projet de texte a suscité de nombreuses réactions alors qu’il était passé jusqu’ici relativement inaperçu. Les principales critiques portent sur la modification des modalités de consultation des différentes instances pouvant être associées lors de la phase d’examen de l’autorisation environnementale. L’objectif affiché du Gouvernement étant sur ce point de mettre fin aux consultations systématiques, qui auraient pour effet « d’engorger les services instructeurs et les organismes consultés ». Ainsi, en premier lieu, s’agissant des demandes de dérogation à l’interdiction de porter atteinte aux espèces protégées prévue par l’article L. 411-1 du code de l’environnement, le texte prévoit de supprimer la consultation systématique du Conseil national de la protection de la nature (CNPN), et ce au profit du conseil scientifique régional du patrimoine naturel (CSRPN). Ce n’est que lorsque la demande de dérogation portera sur l’une des 37 espèces de vertébrés répertoriées par l’arrêté ministériel du 9 juillet 1999 que le CNPN sera consulté, ou sur l’une des espèces animales et végétales listées par…un futur arrêté ministériel dont l’édiction est annoncée par le décret, sans précisions sur le calendrier. Si les avis du CNPN ne sont que consultatifs, il s’agit cependant d’une modification majeure de la procédure actuelle qui suscite la critique, notamment de la part des associations de protection de l’environnement. En particulier, l’accent est mis sur la charge de travail déjà importante des CSRPN alors que ces instances manquent de moyens, ainsi que sur leur composition. De telle sorte qu’il existe un doute sur le fait que cette mesure œuvre véritablement en faveur d’une réduction des délais d’instruction lors de la phase d’examen de l’autorisation environnementale et d’une simplification administrative. La crainte d’un défaut d’indépendance à l’échelle locale est également mise en avant, les membres du CSRPN étant nommées par le Préfet de Région alors que c’est le ministre chargé de la protection de la nature qui nomme les membres du CNPN. Cette annonce « phare » du projet de décret n’a donc pas fini d’être commentée, alors que le 6 mai dernier, date de la fin de la consultation publique du texte, les scientifiques de l’IPBES rendaient leur rapport sur l’état de la biodiversité à l’échelle mondial ; c’est un bien mauvais timing, même pour des mesures de simplifications sans doute fondées. En second lieu, le décret réduit sensiblement le champ des consultations dans le domaine de l’eau. Ainsi, il est prévu que si la demande d’autorisation environnementale porte sur un projet relevant d’une autorisation « loi sur l’eau », seule l’avis de la commission locale de l’eau sera requis dans le cas où le projet est situé dans le périmètre d’un schéma d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE). Sont en revanche supprimées les consultations de la personne publique gestionnaire du domaine public, de l’établissement public territorial de bassin ou encore de l’organisme gestion collective des prélèvements d’eau pour l’irrigation (modification de l’article R. 181-22 du code de l’environnement). En troisième lieu, il importe également d’évoquer la suppression, par le projet de décret, de la consultation de l’Office National des Forêts (ONF) s’agissant d’un projet de défrichement d’un bois relevant du régime forestier (abrogation de l’article R. 181-31 du code de l’environnement). En quatrième et dernier lieu, d’autres instances risquent de voir leurs prérogatives nettement diminuées lors de la phase d’examen de l’autorisation. C’est ainsi que les Agences Régionales de Santé (ARS) ne seront consultées qu’en cas de projet soumis à évaluation environnementale ou lorsque le préfet de département l’estime nécessaire (modification de l’article R. 181-18 du code de l’environnement). Autre exemple, il ne sera plus nécessaire de consulter l’Institut national de l’origine et de la qualité lorsqu’un projet d’installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE) devra être implanté dans une commune comportant une aire de production d’un produit d’appellation d’origine (abrogation de l’article R. 181-23 du code de l’environnement). Si elles constituent à notre sens la principale nouveauté du projet de décret, les modifications affectant les différentes consultations requises lors de la phase d’examen de l’autorisation environnementale sont également accompagnées d’autres mesures. Tout d’abord, le Gouvernement entend passer une vitesse supérieure dans la dématérialisation des procédures : il est ainsi prévu de permettre le dépôt des demandes d’autorisation environnementale de manière électronique, sur le site service-public.gouv.fr. L’accusé de réception du dossier serait également délivré de manière électronique. A l’horizon 2023, cette téléprocédure deviendra obligatoire (modification des articles R. 181-12 et R. 181-13 du code de l’environnement). Par ailleurs, le décret prévoit une accélération de la phase de décision avec possibilité de ne pas engager à nouveau une procédure contradictoire lorsque celle-ci a été mise en œuvre dans le cadre du dernier alinéa de l’article R. 181-49 du code de l’environnement. L’objectif est de permettre aux pétitionnaires satisfaits du projet d’arrêté préfectoral issu du CODERST / de la CNDPS de voir l’autorisation délivrée plus rapidement (modification des articles R. 181-40 et R. 181-45 du code de l’environnement). Enfin, le texte adapte la procédure d’instruction…

Le risque d’émission de particules fines n’a pas systématiquement à être analysé par l’étude d’impact d’une installation de méthanisation (CE, 13 mars 2019, n°418949)

Un arrêt récent du Conseil d’Etat précise l’absence de nécessité d’analyser par principe le risque d’émission de particules fines dans l’étude d’impact d’une installation de méthanisation (CE, 13 mars 2019, n°418949) Aux termes d’un premier arrêt en date du 11 janvier 2018 (n°16LY00015), la Cour administrative d’appel de Lyon avait décidé d’annuler une autorisation d’exploiter une installation de méthanisation projetée en Isère au motif que l’étude d’impact n’analysait pas le risque d’émission potentielle de particules fines PM 2,5. Les termes de l’arrêt étaient particulièrement généralistes. Cet arrêt avait surpris les porteurs de projet comme les juristes environnementalistes : si l’article R. 122-5 du code de l’environnement, qui détermine le contenu de l’étude d’impact, indique que l’étude doit comporter « une estimation des types et des quantités de résidus et d’émissions attendus, tels que la pollution de (…) l’air », il ne précise pas que les particules PM 2,5, en particulier, aient obligatoirement à faire l’objet d’une analyse spécifique. Pour savoir quels types et quantités de résidus doivent être analysés, il convient de se référer au principe de proportionnalité qui gouverne l’interprétation du contenu de l’étude d’impact, prévue au I du même article R. 122-5, et qui indique en substance que ce contenu varie d’une part selon la sensibilité environnementale de la zone et d’autre part selon l’importance et la nature du projet ainsi que ses incidences prévisibles. Or sans faire référence à ce principe de proportionnalité, la Cour avait estimé de manière générale que « l’étude d’impact jointe à la demande d’autorisation d’une installation entraînant des rejets dans l’air doit notamment présenter une analyse précisant la quantité de particules “PM 2,5” émises par l’installation et la contribution de ces émissions à la pollution de l’air ». Ainsi rédigé, ce considérant portait en germe le danger de faire croire qu’il allait pouvoir s’appliquer à tout type d’installation susceptible de provoquer des émissions atmosphériques. La Cour fondait cette obligation sur les dispositions du code de l’environnement relatives à la surveillance de la qualité de l’air, qui ne prévoient pourtant aucune obligation pour les porteurs de projet : ces dispositions imposent à l’Etat de fixer un objectif national de réduction de l’exposition notamment aux particules fines. Juridiquement, la Cour a donc commis une erreur de droit qui a été sanctionnée par le Conseil d’Etat dans un arrêt du 13 mars 2019. Le Conseil d’Etat rappelle le principe de proportionnalité du contenu de l’impact et conclut que : « en jugeant que le défaut, dans l’étude d’impact, d’analyse spécifique relative aux particules PM 2,5 susceptibles d’être émises par l’installation projetée avait nui à l’information de la population et, par suite, entaché d’irrégularité la procédure d’adoption de l’arrêté attaqué, sans rechercher si les incidences prévisibles de ces émissions justifiaient une telle analyse, la cour a entaché son arrêt d’erreur de droit ». La nécessité d’étudier ce risque dépend donc du contexte : sensibilité de la zone, nature du projet ainsi que de ses incidences prévisibles. La décision de la Cour sera donc intéressante à étudier, car elle devra se justifier conformément à la décision du Conseil d’Etat, c’est-à-dire en recherchant si les incidences prévisibles des émissions de particules fines de l’installation justifiaient en l’espèce qu’il ait été procédé à une telle analyse sur les particules 2,5PM.

Légalité d’une autorisation unique expérimentale de construire et d’exploiter une installation de méthanisation (TA Caen, 10 juillet 2018, n°170087)

Une autorisation unique d’une installation de méthanisation / cogénération soumise à autorisation unique expérimentale (valant permis de construire et autorisation d’exploiter) était contestée par des voisins. Aux termes de cette décision (TA Caen, 10 juillet 2018, n°170087, jurisprudence du cabinet), le Tribunal a rejeté leur requête et écarté les nombreux moyens invoqués par les requérants. On peut retenir en particulier l’absence en l’espèce de nécessité d’une demande de dérogation “espèces protégées”; l’indépendance de l’autorité environnementale (le rôle d’autorité environnementale avait été joué par un service de la DREAL alors que le préfet de département avait délivré l’autorisation). Le Tribunal relève à juste titre que :”qu’eu égard à l’interprétation des dispositions de l’article 6 de la directive du 27 juin 2001 donnée par la CJUE dans son arrêt rendu le 20 octobre 2011 dans l’affaire C-474/10, et à la finalité identique des dispositions des deux directives relatives au rôle “des autorités susceptibles d’être concernées par le projet, en raison de leurs responsabilités spécifiques en matière d’environnement”, il résulte clairement des dispositions de l’article 6 de la directive du 13 décembre 2011 que, si elles ne font pas obstacle à ce que l’autorité publique compétente pour autoriser un projet ou en assurer la maîtrise d’ouvrage soit en même temps chargée de la  consultation en matière environnementale, elles imposent cependant que, dans une telle situation, une séparation fonctionnelle soit organisée au sein de cette autorité, de manière à ce qu’une entité administrative, interne à celle-ci, dispose d’une autonomie réelle, impliquant notamment qu’elle soit pourvue de moyens administratifs et humains qui lui sont propres, et soit ainsi en mesure de remplir la mission de consultation qui lui est confiée et de donner un avis objectif sur le projet concerné ;” la complétude et la suffisance des études d’impact et de dangers (risques relatif à l’eau, scénario de référence, mesures ERC, risque foudre, modalités d’évacuation des eaux pluviales, étude des impacts liés au poste d’injection, trafic routier). Les dispositions prises par l’exploitant ont été déterminantes là encore. la légalité du POS de la commune d’implantation; la suffisante prise en compte des risques de pollution des eaux, d’inondation, d’explosion, d’émissions de gaz dangereux, proximité ligne THT…Une vraie question de preuve à apporter par les requérants en matière de présence d’une source (ce qui serait valable pour les cours d’eau, la distance avec les tiers, ou des périmètres) a été abordée par le Tribunal. Ce dernier a retenu que les avis techniques d’un bureau d’études n’étaient pas utilement contredits par les opposants. Les mémoires de l’exploitant en réponse à l’avis de l’autorité environnementale, aux services consultés, et aux observations de l’enquête publique ont également permis de compléter et préciser le dossier initial. L’arrêté d’autorisation prévoyant des prescriptions exigeantes et adaptées a été également été retenu par la juridiction dans son appréciation. Le dossier de demande d’autorisation était en l’espèce solide et adapté aux enjeux, notamment sur les modalités de gestion des eaux.