Antenne relais sur un bâtiment existant : la soumission à déclaration préalable ou permis de construire ne dépend pas de la hauteur de l’antenne (CE, 30 avril 2014)

Par une décision en date du 30 avril 2014 (CE, 30 avril 2014, n°366712, mentionné dans les Tables du recueil Lebon) le Conseil d’Etat a jugé que l’implantation d’une antenne de radiotéléphonie mobile sur la terrasse d’un immeuble existant constitue une « opération de travaux exécutés sur une construction existante », de sorte que la hauteur de l’antenne relais est sans incidence sur la détermination du régime juridique applicable.  En l’espèce, un opérateur de téléphonie mobile avait déposé une déclaration préalable en vue de l’installation de 3 antennes de moins de douze mètres de hauteur et d’une armoire technique sur la terrasse d’un immeuble existant. Une association de riverains avait saisi le juge administratif contre la décision de non-opposition du maire au projet. Le Tribunal administratif de Rennes avait tout d’abord annulé la décision jugeant que la hauteur totale du projet qui dépassait le seuil de 12 mètres prévus par la réglementation sur les constructions nouvelles rendait nécessaire l’obtention du permis de construire au sens de l’article R421-1 et R 421-9 a) du Code de l’urbanisme. Saisi du litige par l’opérateur, le Conseil d’Etat censure le Tribunal administratif de Rennes pour erreur de droit. Rappelons en effet qu’aux termes de l’article R. 421-14 du code de l’urbanisme alors applicable, il était prévu que « sont soumis à permis de construire les travaux suivants, exécutés sur des constructions existantes, à l’exception des travaux d’entretien ou de réparations ordinaires : a) Les travaux ayant pour effet la création d’une surface hors oeuvre brute supérieure à vingt mètres carrés ; b) […] c) […] d) […] Pour l’application du b du présent article, les locaux accessoires d’un bâtiment sont réputés avoir la même destination que le local principal». Ainsi, dès lors que l’implantation d’une antenne sur la toiture d’un immeuble est qualifiée de « travaux sur une construction existante », seuls les critères posés par l’article R 421-14 doivent être pris en compte pour déterminer si une déclaration préalable ou un permis de construire est nécessaire. Or, la hauteur des travaux sur l’immeuble existant est indifférente selon l’article R 421-14. La Haute juridiction rappelle ainsi peu importe la hauteur de l’antenne dans l’hypothèse où elle est implantée sur un immeuble existant : « Considérant que l’implantation d’une antenne de radiotéléphonie mobile sur la terrasse d’un immeuble constitue une opération de travaux exécutés sur une construction existante ; que si ce type d’ouvrage, pour être soumis à simple déclaration préalable, doit respecter les critères fixés par les articles R. 421-14 et R. 421-17 précités et, notamment, avoir pour effet, pour l’ensemble constitué par la ou les antennes-relais et par l’armoire technique, la création d’une surface hors œuvre brute comprise entre deux et vingt mètres carrés, en revanche, sa hauteur est sans incidence sur la détermination du régime applicable ; que, par suite, en jugeant que l’implantation d’une antenne de radiotéléphonie sur le toit d’un immeuble devait respecter les règles relatives aux constructions nouvelles et faire l’objet d’un permis de construire en vertu des dispositions combinées des articles R. 421-1 et R. 421-9 du code de l’urbanisme lorsque la hauteur de l’ouvrage au-dessus du sol est supérieure à 12 mètres et la surface hors œuvre brute créée supérieure à 2 mètres carrés, le tribunal administratif de Rennes a commis une erreur de droit ; que, dès lors et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi, le jugement attaqué doit être annulé ; » On notera que la version de l’article R. 421-14 alors applicable prévoyait une « surface hors œuvre brute » (SHOB) supérieure à vingt mètres carrés, tandis qu’il s’agit aujourd’hui d’évaluer l’emprise au sol ou la surface de plancher, qui ne doivent pas excéder vingt mètres carrés. Néanmoins, ce changement de terminologie ne change en l’espèce rien au raisonnement ici adopté par le Conseil d’Etat : il faut tenir compte de la surface cumulée de tous les éléments (pylône, dalle de béton, local technique…), dans la mesure où ceux-ci entretiennent un lien fonctionnel impliquant de les considérer comme une seule construction, et ce peu importe la hauteur de l’antenne. En définitive, cette décision du Conseil d’Etat, qui a les mérites d’une publication aux Tables, confirme la simplicité de la formalité d’urbanisme pour les opérateurs, pour lesquels l’implantation en toiture des immeubles sera privilégiée. Néanmoins, ce type d’implantation soulève des questions de sécurité bien différentes d’une implantation au sol, ainsi que des questions propres au droit de la copropriété qu’i convient de ne pas négliger pour les propriétaires concernés. Aurélien Boudeweel Green Law Avocat

Classement en zone inondable du PLU: le contrôle du juge est restreint à l’erreur manifeste d’appréciation (CAA Douai, 13 fév.2014)

Par un arrêt en date du 13 février 2014 (CAA de DOUAI, 13 février 2014, n°12DA00941) la Cour administrative d’appel de DOUAI rappelle le contrôle allégé opéré par le juge sur la qualification en zone “inondable ou humide”. C’est l’occasion de se pencher sur les critères retenus… et de regretter qu’il n’y ait pas davantage d’éclairages jurisprudentiels sur la détermination juridique des “zones humides”. Rappelons qu’il appartient aux auteurs du plan local d’urbanisme de déterminer la partie d’aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d’avenir, et de fixer, en conséquence, le zonage et le classement des terrains en secteur inondable ou humide et ainsi d’encadrer les possibilités de construction. En l’espèce, lors d’une révision du plan local d’urbanisme d’une commune, une parcelle appartenant à un M.B avait été classé en « zone UA, secteur inondable ou humide ». Ce dernier avait alors saisi le Tribunal administratif en vue de faire annuler la délibération par laquelle le Conseil municipal avait approuvé le PLU révisé. Le Tribunal administratif de Rouen avait rejeté sa demande. Dans son arrêt en date du 13 février 2014, la Cour administrative d’appel de DOUAI confirme le jugement de première instance et considère : « … que la parcelle D 951 appartenant à M. B…a été classée, lors de la révision du plan local d’urbanisme de la commune de Fontaine-Le-Bourg, en zone UA dans le secteur inondable ou humide où sont interdits les sous-sols et les constructions ou installations à l’exception de celles autorisées en UA2 ; que le caractère inondable du terrain a été mis en évidence par le bureau d’études Ingétec qui a été chargé, dans le cadre de la procédure de révision du plan local d’urbanisme, de recueillir des informations précises sur les hauteurs d’eau maximales atteintes dans les zones urbanisées lors des dernières inondations et de recenser les habitations et tout autre bâtiment concernés par celles-ci ; que ce caractère inondable s’explique, en l’espèce, par la présence du ruisseau ” la Caplette “, à proximité immédiate de la maison de M.B…, qui communique avec la rivière ” Le Cailly ” ayant débordé à plusieurs reprises et notamment en 1981 ; que M. B… ne conteste, d’ailleurs, pas sérieusement que le bâtiment agricole qu’il a transformé en maison d’habitation a été inondé lors des crues de 1981 ; qu’ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que la commune de Fontaine-Le-Bourg aurait commis une erreur manifeste d’appréciation en classant le terrain de M. B… dans le secteur inondable ou humide de la zone UA, alors même qu’il présenterait une altimétrie supérieure à la cote de 85,50 dont il n’est d’ailleurs pas établi qu’elle aurait constitué, pour les auteurs de la modification du plan, le seuil pris en compte pour établir le classement des terrains en secteur inondable ou humide ; ». Au regard de ces éléments factuels, dont la Commune avait connaissance lors de son approbation du PLU, la Cour en déduit que le classement en zone inondable ou humide n’était pas entaché d’erreur manifeste d’appréciation (c’est-à-dire d’une erreur manifeste). Contrairement à ce qu’il pourrait laisser penser, cet arrêt ne traite pas du classement par un plan local d’urbanisme en « zone humide » (mais se prononce seulement sur le classement en zone inondable). Mais c’est pourtant un aspect qu’il aurait été intéressant d’aborder, tant le besoin de sécurité juridique quant à cette problématique de délimitation de la zone humide est prégnant. En effet, en l’état actuel du droit, en l’absence de zonage, les pétitionnaires sont placés dans la délicate situation de devoir déterminer d’eux-mêmes si le terrain est constitutif ou non d’une « zone humide ». Or, les critères législatifs de détermination d’une zone humide offrent une marge d’appréciation, ce qui tend à placer les pétitionnaires en situation d’insécurité juridique. La notion de zone humide a été définie par le législateur aux termes de l’article L 211-1-I du Code de l’environnement comme « les terrains, exploités ou non, habituellement inondés ou gorgés d’eau douce, salée ou saumâtre de façon permanente ou temporaire ; la végétation, quand elle existe, y est dominée par des plantes hygrophiles pendant au moins une partie de l’année » (C. envir., art. L. 211-1, I). La définition est fondée sur deux critères alternatifs que constituent : les sols hydromorphes (sols gorgés d’eau) et les plantes hygrophiles (plantes adaptées à la vie dans des milieux très humides ou aquatiques). Définition qui s’imposent aux pétitionnaires et à laquelle doivent répondre les différents inventaires et cartes de zones humides, qu’ils soient établis à des fins de connaissance, de localisation pour la planification ou d’action à titre contractuel ou réglementaire (Circ. 18 janv. 2010, NOR : DEVO1000559C, § 4 : BO min. Écologie n°2010/2, 10 févr.). Or, l’appréciation de ces critères est souvent complexe, et peut engendrer des débats scientifiques. Rappelons que compte-tenu de la difficulté à déterminer une zone humide, le juge lui-même a recours à un faisceau d’indices concordants pour mettre en œuvre la qualification de zone humide. A titre d’exemples, notons que ne répondent pas aux exigences de la définition des zones humides, des bois, prairies sèches, d’anciennes cultures et des prés de fauche (TA Orléans, 31 mai 2001, n°002330), de même que des terrains anciennement humides mais qui ne présentent plus ce caractère compte tenu des aménagements tenant à la pose de drains et à la plantation de résineux (TA Besançon, 1re ch., 31 mai 2012, n°1100090). En revanche, des terrains inondables peuvent présenter le caractère de zone humide (TA Strasbourg, 11 avr. 2003, n°99-03578), tout comme une prairie humide située sur une île dans une dépression topographique naturelle et une prairie mésophile (CAA Nantes, 2e ch., 8 oct. 2010, n°09NT01117), ou un marais bordé de fossés et de roselières (TA Caen, 2e ch., 4 févr. 2003, n°011455). Me Aurélien BOUDEWEEL Green Law Avocat

Eoliennes/radar météo: le juge administratif annule des refus de permis, faute d’enjeu pour la sécurité publique (TA Amiens, 18 février 2014)

Le Tribunal administratif d’Amiens vient de rendre sa décision quant à la compatibilité d’éoliennes avec un radar météorologique de bande C en zone de coordination et ceci après expertise. Cette décision attendue par les opérateurs ne déçoit pas : elle annule des refus de permis de construire pour des machines situées à 16km du radar d’Avesnes s/ Helpe (TA Amiens, 18 février 2014, « Ecotera c/ Préfet de Région Picardie », jurisprudence cabinet: jugement BTN 18.02.14). Notre analyse synthétique est publiée par le site spécialisé actu-environnement. De manière plus approfondie, il est nécessaire de mettre en perspective les deux considérants essentiels du jugement en question. A l’aune d’une démocratie des risques très exigeante avec la participation du public et d’une démarche préventive n’hésitant plus à se saisir des situations de précaution, le juge administratif ne peut demeurer béat face aux avis techniques des services et autres établissements publics qui se réclament de la sécurité publique dans le cadre de procédures d’autorisation préalables. Il y a certes un dilemme pour le juge administratif : d’un côté il ne peut ignorer que les avis techniques servent d’appui à la décision administrative et la fondent en scientificité, de l’autre il ne peut renoncer à s’assurer de la matérialité des faits, ce qui est exigible même d’un contrôle juridictionnel restreint sur la décision attaquée. Subrepticement, ces avis techniques sont dès lors acceptés par le juge administratif comme des données faisant foi, jusqu’à preuve du contraire. Or, même si traditionnellement les juridictions administratives s’avèrent naturellement perméables aux argumentaires de l’Etat se réclamant de la sécurité publique, le Tribunal administratif d’Amiens vient de donner raison à un opérateur éolien contestant les thèses de l’établissement public Météo-France quant à la perturbation par les aérogénérateurs des radars météorologiques et aux enjeux de sécurité civile. Avec son jugement Sté Ecotera /Préfet de Région Picardie (n°0903355-4), lu le 18 février 2014, le juge administratif dévoile au grand jour la véritable comédie jouée par Météo-France à l’autorité de police en charge de la délivrance des permis de construire, pour faire systématiquement interdire par les préfets tout développement éolien dans les zones dites « de coordination » autour de ses radars. Cette zone de coordination a jusqu’ici été imposée aux demandes de permis de construire avec pour seule base légale l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme sachant que cette disposition interdit la délivrance du permis portant atteinte à la sécurité publique. Or pour fonder en scientificité le risque de perturbation et l’évaluer, Météo-France fait reposer ses avis défavorables sur le rapport de la commission consultative de la compatibilité électromagnétique de l’Agence nationale des fréquences (ANFR) en date du 19 septembre 2005, dit « rapport CCE5 n°1 » et sur le guide relatif à la problématique de la perturbation du fonctionnement des radars par les éoliennes, élaboré par la même commission consultative de la compatibilité électromagnétique le 3 juillet 2007. Aux termes de ce que le juge administratif avait fini par qualifier de « données acquises de la science », il est ainsi considéré que l’implantation, d’éoliennes dans un rayon de 20 kilomètres autour d’un radar météorologique fonctionnant en fréquence « bande C », est susceptible de perturber le fonctionnement de ce dernier par le blocage de son faisceau, par des échos fixes ou par la création, en raison de la rotation des pales, de zones d’échos parasites au sein desquelles les données recueillies par « mode Doppler » sont inexploitables. En conséquence, il est « recommandé » : –        D’une part, de n’implanter aucune éolienne à moins de 5 kilomètres d’un tel radar et de subordonner leur installation, dans un rayon d’éloignement de 5 à 20 kilomètres, dite distance de coordination, â des conditions relatives à leurs caractéristiques techniques, et notamment leur «surface équivalent radar» (SER), à leur visibilité avec le radar, ainsi qu’à leur nombre et leur disposition ; –        D’autre part, s’agissant des risques de création d’échos parasites affectant les données recueillies par mode Doppler, ces conditions sont destinées à ce que l’exploitant du radar puisse s’assurer que la taille de la zone de perturbation engendrée par les éoliennes ne soit pas supérieure, dans sa plus grande dimension, à 10 kilomètres. Guidé par la volonté de mettre à bonne distance de leurs radars les éoliennes par précaution commerciale, dans une logique de R&D et avec « toujours un temps d’avance », la stratégie de l’établissement public était simple : il rendait des avis défavorables en zone de coordination sur la base d’une perturbation exagérée des radars météorologiques et dont les conséquences pour les missions de sécurité civile étaient tout simplement postulées. Englué dans cette stratégie systématisée par Météo-France, l’Etat a fini par se faire prendre en flagrant délit d’exagération de la perturbation quand le juge a décidé d’en passer par une expertise judiciaire. Ladite expertise ruine les thèses de Météo-France, tant au regard de l’évaluation de la perturbation (1) que sur le terrain de ses impacts sur la sécurité civile (2). La relativité de la perturbation révélée en expertise par les productions de Météo-France Le jugement du Tribunal administratif d’Amiens se réclame d’abord d’une expertise qui semble relativiser en fait l’appréciation par Météo-France de la zone d’impact Doppler : « Considérant d’une part, que le projet de parc présenté par la société Ecotera au préfet de l’Aisne est constitué de six éoliennes, d’une hauteur de 150 mètres chacune et comprenant des pales d’une longueur de 50 mètres, dont la plus proche se situe à 16,3 kilomètres du radar d’Avesnes, soit, dans la zone dite de coordination sus décrite ; qu’il ne se situe à proximité d’aucun autre parc autorisé dans la zone de coordination de 20 kilomètres autour de ce radar, en sorte que sa zone d’impact, même calculée sur le fondement d’une surface équivalent radar de 200 m2 ne se superpose à aucune autre ; que la plus grande dimension de cette zone d’impact, calculée par Météo France sur le fondement de cette surface, est égale à 11,9 km, soit un dépassement limité de la dimension maximale de 10 km recommandée par l’ANFR ; que ce projet respectait par ailleurs les huit autres points d’analyse des projets éoliens,…

Vente de terrain: le notaire ne peut se dispenser de conseiller même en cas de certificat d’urbanisme positif ! (Cass, 20 mars 2014)

Par un arrêt en date du 20 mars 2014 (C cass, 20 mars 2014, n° de pourvoi 13-14121) la Cour de cassation rappelle que le notaire est tenu à un devoir de conseil dans le cadre d’une vente avant l’obtention d’un permis de construire. Les faits et la procédure En l’espèce, un notaire avait rédigé un acte authentique de vente d’une parcelle de terrain sur la base d’un certificat d’urbanisme indiquant que le terrain pouvait être utilisé pour la réalisation d’un projet de construction situé en zone littoral. Cependant, le certificat était assorti d’une série d’observations sur les réglementations applicables à la zone Par la suite, le juge administratif avait annulé le permis de construire délivré par le maire au motif de la violation de la loi littoral précisément. L’acquéreur du terrain ayant vu son permis annulé et estimant que le notaire avait manqué à son obligation de conseil, a recherché sa responsabilité devant les juridictions civiles.  La Cour d’appel rejeta l’argumentation de l’acquéreur au motif que l’acte authentique se fondait sur un certificat d’urbanisme positif révélant la possibilité de mener sur la parcelle un projet de construction. Toutefois, dans son arrêt en date du 20 mars 2014, la Cour de cassation censure l’arrêt de la Cour d’appel et rappelle : « […] que pour rejeter les demandes de M. Z…, l’arrêt énonce que M. X…a reçu l’acte authentique de vente sur la base d’un certificat d’urbanisme positif indiquant que le terrain pouvait être utilisé pour la réalisation du projet de construction, cette mention étant précédée d’observations selon lesquelles le terrain était situé ” en partie en zone UB destinée à l’habitation et en partie zone NC protégée en raison de sa valeur agricole ” et ” concerné par les dispositions de la loi du 3 janvier 1986 dite loi littoral en plus de celles du document d’urbanisme applicable de la commune (POS/ PLU) “, que si le permis de construire obtenu le 14 mars 2006 a ensuite été annulé pour violation des dispositions de l’article L. 146-4-1 du code de l’urbanisme en ce que la construction projetée ne s’inscrivait ni en continuité avec les agglomérations et villages existants, ni dans un hameau nouveau intégré à l’environnement, cette circonstance n’induit pas pour autant un manquement de M. X…à son obligation de conseil, dès lors que présumé légal, le certificat d’urbanisme délivré était réputé prendre en compte les restrictions au droit de construire imposées par la loi littoral à laquelle ce document faisait expressément référence ; Qu’en statuant ainsi, alors qu’un certificat d’urbanisme, document purement informatif, n’ayant pas pour objet d’autoriser une construction ou la réalisation d’une opération immobilière, le notaire, informé d’un projet de construction concerné par la loi du 3 janvier 1986 dite loi littoral, se devait d’attirer l’attention de l’acquéreur sur les risques qu’il encourait en s’engageant avant que le permis de construire requis n’ait acquis un caractère définitif, et de l’informer de la possibilité d’insérer une condition résolutoire dans l’acte de vente, la cour d’appel a violé le texte susvisé ; » La Cour de cassation rappelle les obligations du notaire en cas de vente d’un terrain, fut il l’objet d’un CU positif En tant que professionnel, le notaire aurait donc du en l’espèce attirer l’attention de l’acquéreur sur la situation de la parcelle et la soumission de cette dernière au régime restrictif de la loi Littoral. L’arrêt de la Cour de cassation est intéressant à double titre puisqu’il rappelle :  Que le certificat d’urbanisme est un acte administratif qui n’autorise ni n’interdit rien. A cet égard, la jurisprudence de la Cour de cassation est constante puisque de nombreux arrêts ont déjà pu souligner qu’un certificat d’urbanisme même positif s’analyse comme un acte d’information qui n’a pas pour objet d’autoriser une construction ou la réalisation d’une opération immobilière (en ce sens C.cass, 1ère civ. 9 juin 2010, n°09-12.995). Que le devoir de conseil est un devoir professionnel obligatoire auquel le notaire ne peut se soustraire sous aucun prétexte et quelle que soit la nature de son intervention (C.cass, 3ème civ. 18 octobre 2005, juris-data n°2005-030336). Le devoir de conseil du notaire est donc un devoir absolu. En vertu de ce devoir de conseil, le notaire doit  s’assurer de la validité, de l’utilité, l’efficacité de son acte, éclairer les parties, attirer leur attention sur les conséquences et les risques des actes qu’il authentifie (C.cass, 1ère civ, 26 novembre 1996, bull. civ 2001, 3ème partie n°20). A noter que l’arrêt de Cour de cassation en date du 20 mars 2014 confirme un courant jurisprudentiel selon lequel il appartient au notaire de se renseigner sur la possibilité de construire sur le terrain au regard du POS ou du PLU en vigueur et mettre en garde les acheteurs contre les conséquences d’un refus d’autorisation de construire (C.cass 1ère civ., 21 février 1995). La Cour de cassation va même encore plus loin en estimant que le notaire « se devait d’attirer l’attention de l’acquéreur sur les risques qu’il encourait en s’engageant avant que le permis de construire requis n’ait acquis un caractère définitif, et de l’informer de la possibilité d’insérer une condition résolutoire dans l’acte de vente ». A noter qu’une vigilance particulière doit donc être portée par ces derniers sur la rédaction de l’ensemble des clauses de l’acte authentique puisque seules les carences matérielles de l’acte pourront être sanctionnées par les juridictions judicaires. Les acquéreurs qui sont confrontés à des difficultés en cas de vente avant l’obtention d’un permis de construire ont donc la possibilité de se retourner contre le notaire qui n’aurait pas été suffisamment précis dans l’acte authentique sur les risques entourant l’obtention du permis de construire. Me Aurélien BOUDEWEEL Green Law Avocat

Un nouvel exemple de l’attitude « décomplexée » du juge des référés face à une construction irrégulière

Dans un arrêt du 11 mars 2014 (C.cass, 3ème civ, 11 mars 2014, pourvoi n°13-12361), la Cour de cassation confirme un arrêt de Cour d’appel statuant en référé où la juridiction  reconnaissait sa compétence à l’endroit d’un litige relevant normalement, au fond, du juge répressif. Une commune avait saisi le juge des référés, sur le fondement de l’article 809 du code de procédure civile, afin de faire cesser le trouble manifestement illicite causé par des constructions irrégulières. La décision de la Cour de cassation suscitée par cette action  n’est pas sans rappeler un précédent arrêt du 14 janvier 2014 (C.cass, 14 janvier 2014, pourvoi n°13-10167, commenté ici) confirmant même en matière de police ICPE les pouvoirs étendus du juge des référés, lequel avait ordonné l’arrêt d’une centrale à béton, sous astreinte de 700 euros par jour de retard, au titre de l’existence des troubles anormaux de voisinage. En l’espèce, un particulier avait installé sur son terrain situé en zone naturelle une caravane et réalisé diverses constructions. Il reprochait à la Cour d’appel statuant en référé de s’être reconnue compétente aux motifs que « Les infractions aux règles de l’urbanisme sont de la compétence exclusive du juge pénal judiciaire ; que l’interruption des travaux peut être ordonnée soit sur réquisition du ministère public agissant à la requête du maire, du fonctionnaire compétent ou de l’une des associations visées à l’article L. 480-1, soit, même d’office, par le juge d’instruction saisi des poursuites ou par le tribunal correctionnel ; qu’en estimant cependant que le juge des référés était compétent pour ordonner l’enlèvement des caravanes et autres implantations installées sur le terrain litigieux situées sur la parcelle litigieuse, la Cour d’appel a violé les articles L. 480-1 et L. 480-2 du code de l’urbanisme ». La Cour de cassation ne fait pas droit à l’argumentation du requérant et relève ainsi : « Attendu que la cour d’appel, statuant en référé, s’est reconnue à bon droit compétente, dès lors que la connaissance du litige dont elle était saisie relevait au fond du juge répressif, lequel appartient au même ordre de juridiction (…). Attendu qu’ayant relevé que le terrain de M. X… se situait en zone 1 NCP du plan d’occupation des sols de la commune de Sorgues, zone agricole inconstructible dans le polygone d’isolement de la Société nationale de poudres et explosifs et que sont interdits dans cette zone notamment les terrains de camping et caravaning, les caravanes isolées et toute forme d’abris provisoires, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de répondre à de simples arguments inopérants, a pu retenir que l’installation, irrégulière au regard de la réglementation d’urbanisme existante, de caravanes ou d’habitation sur ce terrain situé dans une zone protégée et à risque, constituait un trouble manifestement illicite qu’il appartenait au juge des référés de faire cesser ». Cet arrêt souligne la grande liberté dont dispose le juge des référés en présence de « troubles manifestement illicites » au sens de l’article 809 du Code de procédure civile, lequel dispose : « Le président peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire » Plus concrètement, la Cour de cassation confirme une nouvelle fois que l’illicéité, telle que conçue par l’article 809 du Code de procédure civile, tend à dépasser le sens étymologique et de celui-ci. Il peut s’agir comme elle l’a déjà reconnue de la méconnaissance d’une norme juridique obligatoire, que son origine soit délictuelle ou contractuelle (Cass. 2e civ., 7 juin 2007, n° 07-10.601 ; Cass. 1re civ., 8 déc. 1987 ; Cass. 1re civ., 9 mai 1990 ), législative ou réglementaire (Cass. 1re civ., 12 déc. 1978 : Bull. civ. 1978, I, n° 299 ; Cass. soc., 4 déc. 1980 ; Cass. com., 15 juin 1982 ) de nature civile ou pénale. En l’espèce, force est de relever que les faits qui étaient reprochés au requérant constituaient des infractions, relevant normalement de la compétence du juge pénal au titre des articles L 480-1 et L 480-2 du Code de l’urbanisme (constructions irrégulières en zone naturelle). En présence d’une infraction au Code de l’urbanisme, le juge des référés dispose donc de la possibilité de faire interrompre et cesser des travaux dès lors que ceux-ci contreviennent aux règles d’urbanisme applicables. Compte-tenu des délais très courts dans lesquels le juge des référés statue, il semble acquis que de nombreuses autorités saisiront à l’avenir ce juge pour faire cesser les infractions réprimés par les articles L 480-1 et L480-2 du Code de l’urbanisme.   Me Aurélien BOUDEWEEL (Green LAW Avocat)