Pénal de l’urbanisme: la liquidation de l’astreinte relève bien du juge répressif ayant prononcé la condamnation (Cass, 24 mars 2015)

Par Aurélien Boudeweel Green Law Avocat Par un arrêt en date du 24 mars 2015 (C.cass, 24 mars 2015, n° 14-84300), la Cour de cassation confirme la compétence du juge répressif pour connaître de la liquidation d’une astreinte prononcée à l’occasion d’une condamnation pénale en urbanisme. En l’espèce, des particuliers et une société civile immobilière avaient été condamnés pour avoir édifié des immeubles en violation des règles d’urbanisme au paiement d’une amende en sus de l’obligation de démolition des constructions irrégulières. Une astreinte avait par ailleurs été prononcée au bénéfice de la commune. L’astreinte est une peine complémentaire permettant d’inciter financièrement l’exécution dans un certain délai de la condamnation à la démolition ou à la remise en état des lieux. La commune avait alors saisi la Cour d’appel d’Amiens dans sa formation correctionnelle afin d’en obtenir la liquidation. Saisie de l’affaire, la Cour d’appel s’est cependant déclarée incompétente au profit du juge de l’exécution. La Cour de cassation dans son arrêt du 24 mars 2015 casse l’arrêt de la Cour d’appel et rappelle que : « tous incidents contentieux relatifs à l’exécution sont portés devant le tribunal ou la cour qui a prononcé la sentence et du second que la juridiction qui impartit au bénéficiaire des travaux irréguliers ou de l’utilisation irrégulière du sol un délai pour l’exécution de l’ordre de démolition, de mise en conformité ou de réaffectation, peut assortir son injonction d’une astreinte ; Attendu que, pour décliner la compétence de la juridiction répressive pour liquider une astreinte prononcée par elle au titre de l’action civile, l’arrêt attaqué relève que l’article 710 du code de procédure pénale figure dans le titre premier du livre cinquième dudit code, intitulé ” De l’exécution des peines”, (…) Mais attendu qu’en se déterminant ainsi, alors que la créance d’une commune en liquidation du produit d’une astreinte assortissant l’arrêt de la chambre correctionnelle d’une cour d’appel condamnant un prévenu à une amende pour infraction aux règles de l’urbanisme et lui ordonnant la démolition des ouvrages édifiés irrégulièrement, trouve son fondement dans la condamnation, pénale et civile, prononcée par la juridiction répressive, le contentieux du recouvrement de l’astreinte prononcée ressortissant ainsi aux juridictions répressives, la cour d’appel a méconnu les textes susvisés ». Autrement dit : puisque c’est la Cour d’appel dans sa chambre correctionnelle qui a prononcé la condamnation pénale de démolition des ouvrages sous astreinte, c’est à cette même Cour que revient le soin de juger de la liquidation de l’astreinte. La commune avait donc eu raison de saisir cette formation, et non de saisir le juge de l’exécution. Cet arrêt de la Cour de cassation, publié au Bulletin a le mérite de rappeler la compétence du juge répressif pour connaître de la liquidation de l’astreinte, ce qui présente un intérêt certain pour l’efficacité des décisions de condamnations pénales en urbanisme. Rappelons que la liquidation de l’astreinte consécutivement à un jugement rendu en matière pénale obéit à un régime juridique particulier. En effet, l’article L. 480-7 du code de l’urbanisme dispose le Tribunal peut condamner le prévenu ayant réalisé des travaux non conformes ou sans autorisation à la démolition ou à la remise en état et qu’une astreinte journalière peut assortir la peine : « Le tribunal impartit au bénéficiaire des travaux irréguliers ou de l’utilisation irrégulière du sol un délai pour l’exécution de l’ordre de démolition, de mise en conformité ou de réaffectation; il peut assortir sa décision d’une astreinte de 7,5 à 75 euros par jour de retard Au cas où le délai n’est pas observé, l’astreinte prononcée, qui ne peut être révisée que dans le cas prévu au troisième alinéa du présent article, court à partir de l’expiration dudit délai jusqu’au jour où l’ordre a été complètement exécuté. »   Par ailleurs, le texte prévoit aujourd’hui que : « Si l’exécution n’est pas intervenue dans l’année de l’expiration du délai, le tribunal peut, sur réquisition du ministère public, relever à une ou plusieurs reprises, le montant de l’astreinte, même au-delà du maximum prévu ci-dessus. Le tribunal peut autoriser le reversement ou dispenser du paiement d’une partie des astreintes pour tenir compte du comportement de celui à qui l’injonction a été adressée et des difficultés qu’il a rencontrées pour l’exécuter ». Concrètement, si la personne condamnée ne démolit pas ou ne remet pas en état par rapport à l’état initial dans le délai octroyé par la juridiction pénale, l’astreinte éventuellement prévue va courir. Juridiquement, c’est la procédure de contestation à état exécutoire qui permet de contester le titre administratif procédant au recouvrement d’une astreinte prononcée sur le fondement de l’article L. 480-7 du code de l’urbanisme. La pratique veut qu’une phase de recouvrement amiable précède une phase de recouvrement contentieux. Ainsi, un titre de perception est tout d’abord adressé par pli simple au débiteur (D. n°2012-1246 du 07 nov. 2012, art. 115) auquel est jointe une lettre invitant le débiteur à régler sa dette dans un certain délai (généralement un mois). Si passé ce délai, le débiteur ne réagit pas, une lettre de rappel peut lui être adressée, suivie, si celle-ci ne produit toujours pas d’effet, d’un commandement de payer. Cependant, il n’est pas rare que l’administration envoie directement un commandement de payer au débiteur. Ce commandement de payer va constituer le premier acte de poursuite qui procède du titre de perception. S’agissant de la forme de la contestation, l’« opposition à état exécutoire » devra contester le bien fondé du titre exécutoire, à savoir : L’existence de la créance ; L’exigibilité de la créance ou ; Le montant de la créance. Cependant, avant de saisir la juridiction compétente, le débiteur devra absolument adresser dans les deux mois qui suivent la notification du titre de perception ou du premier acte de poursuite qui procède du titre en cause, une réclamation appuyée de toutes justifications utiles au comptable chargé du recouvrement de l’ordre de recouvrer (D. n°2012-1246 du 07 nov. 2012, art. 118 ; C. urb., art. R. 480-5). Au sens de l’article 116 du décret n°2012-1246 du 07 novembre 2012, le comptable chargé de la mise en œuvre de l’action en recouvrement « est le comptable public…

Prolongation exceptionnelle d’un permis de recherches d’hydrocarbures

Par Marie-Coline Giorno, Avocat (Green Law Avocat) Aux termes d’un arrêté du 23 février 2015, une prolongation exceptionnelle du permis exclusif de recherches de mines d’hydrocarbures a été accordée à une société. Ce permis exclusif de recherches de mines d’hydrocarbures (PERH) avait été accordé par arrêté du 23 juin 2000. Il avait fait ensuite l’objet de deux prolongations, la première en date du 17 décembre 2004 et la seconde en date du 28 janvier 2009. La loi n° 2011-835 du 13 juillet 2011 visant à interdire l’exploration et l’exploitation des mines d’hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique et à abroger les permis exclusifs de recherches comportant des projets ayant recours à cette technique fut promulguée lors de la seconde prolongation. Le 12 septembre 2011, la société a rendu le rapport exigé par cette loi exposant qu’elle n’aurait pas recours à la fracturation hydraulique dans le cadre de son PERH. Son permis n’a donc pas été abrogé. Toutefois, la société soutient qu’elle n’aurait pu mener à bien ses principaux projets d’exploration et a demandé une prolongation supplémentaire en invoquant des circonstances exceptionnelles de fait et de droit. – En ce qui concerne les circonstances de fait exceptionnelles, la société soutient qu’elle n’aurait pu mener à bien ses principaux projets d’exploration en raison du « contexte défavorable pour les activités pétrolières » de 2011 avec l’intervention de la loi interdisant la fracturation hydraulique précitée et les différentes tensions ayant entourées cette loi. – En ce qui concerne les circonstances de droit exceptionnelles, la société invoque une évolution notable du contexte réglementaire, imposant désormais une étude d’impact préalablement aux travaux d’exploration. L’abstract publié au journal officiel ne donne pas plus d’informations, « Par arrêté de la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie et du ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique en date du 23 février 2015, la validité du permis exclusif de recherches de mines d’hydrocarbures conventionnels liquides ou gazeux dit ….. est prolongée jusqu’au …… sur une surface inchangée. » Cette prolongation exceptionnelle suscite plusieurs interrogations. En premier lieu, la prolongation vise la prolongation d’un « permis exclusif de recherches de mines d’hydrocarbures conventionnels liquides ou gazeux ». L’utilisation du terme « conventionnels » est surprenante et, à notre sens, dénuée de valeur et d’intérêt juridique. D’une part, l’article L. 122-1 du nouveau code minier indique que « Le permis exclusif de recherches de substances concessibles confère à son titulaire l’exclusivité du droit d’effectuer tous travaux de recherches dans le périmètre qu’il définit et de disposer librement des produits extraits à l’occasion des recherches et des essais ». En l’espèce, le PERH accordé à la société aux termes de l’arrêté du 23 juin 2000 visait les « hydrocarbures liquides ou gazeux » et ne distinguait nullement leur origine conventionnelle ou non. La précision apportée dans l’arrêté ministériel nous paraît donc erronée D’autre part, la recherche d’hydrocarbures non-conventionnels ne semble pas pouvoir s’exonérer de l’utilisation de la fracturation hydraulique. Or, cette dernière est interdite depuis la loi du 13 juillet 2011 précitée. Par suite, la recherche d’hydrocarbures non-conventionnels était, de facto, exclue et la précision apportée sur le caractère « conventionnel » des hydrocarbures était superfétatoire. Dès lors, la précision selon laquelle la prolongation exceptionnelle concerne un « permis exclusif de recherches de mines d’hydrocarbures conventionnels liquides ou gazeux » est, selon nous, dépourvue de valeur juridique et superfétatoire : elle ne vise qu’à apaiser les esprits en réaffirmant à mots couverts que la France ne souhaite pas s’engager à ce jour sur la voie des hydrocarbures non-conventionnels. En deuxième lieu, la motivation de l’arrêté n’est pas disponible sur le site Légifrance : il est précisé que « Le texte complet de l’arrêté peut être consulté dans les locaux du ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, direction de l’énergie (bureau exploration et production des hydrocarbures), tour Séquoia, 1, place Carpeaux, 92800 Puteaux, ainsi que dans les bureaux de la direction régionale et interdépartementale de l’environnement et de l’énergie d’Ile-de-France, 10, rue Crillon, 75194 Paris Cedex 04. » La motivation retenue reste donc inconnue. Néanmoins, on peut s’interroger sur la légalité de cette décision. Aux termes de l’article L142-1 du code minier : « La validité d’un permis exclusif de recherches peut être prolongée à deux reprises, chaque fois de cinq ans au plus, sans nouvelle mise en concurrence. Chacune de ces prolongations est de droit, soit pour une durée au moins égale à trois ans, soit pour la durée de validité précédente si cette dernière est inférieure à trois ans, lorsque le titulaire a satisfait à ses obligations et souscrit dans la demande de prolongation un engagement financier au moins égal à l’engagement financier souscrit pour la période de validité précédente, au prorata de la durée de validité et de la superficie sollicitées. » A la lecture de cet article, deux prolongations paraissent pouvoir être, au maximum, accordées au détenteur du permis. En l’espèce, le PERH a été prolongé à titre exceptionnel une troisième fois. Il avait, en effet, déjà fait l’objet de deux prolongations auparavant. Il est donc possible de s’interroger sur la disposition sur laquelle se fonde l’autorité administrative pour accorder une troisième prolongation à titre exceptionnel. Nous ne sommes pas certains qu’elle agisse dans un cadre légal. En troisième et dernier lieu, aux termes de l’article L. 142-2 du code minier : « La superficie du permis exclusif de recherches d’hydrocarbures liquides ou gazeux, dit ” permis H “, est réduite de moitié lors du premier renouvellement et du quart de la surface restante lors du deuxième renouvellement. Ces réductions ne peuvent avoir pour effet de fixer pour un permis une superficie inférieure à une limite fixée par voie réglementaire. Les surfaces restantes sont choisies par le titulaire. Elles doivent être comprises à l’intérieur d’un ou de plusieurs périmètres de forme simple. En cas de circonstances exceptionnelles invoquées par le titulaire ou par l’autorité administrative, la durée de l’une seulement des périodes de validité d’un ” permis H ” peut…

Limites de rejets de tritium en INB : pas de manque de précaution selon le Conseil d’Etat

Par David DEHARBE Le Comité de réflexion d’information et de lutte anti-nucléaire (CRILAN) avait demandé au Tribunal administratif de Caen l’annulation de l’arrêté du 15 septembre 2010 du ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer et du ministre de l’économie, de l’industrie et l’emploi, portant homologation de la décision n° 2010-DC-0188 de l’autorité de sûreté nucléaire (ASN) du 7 juillet 2010 fixant les limites de rejets dans l’environnement des effluents liquides et gazeux pour l’exploitation des réacteurs “Flamanville 1” (INB n°108), “Flamanville 2” (INB n°109) et “Flamanville 3” (INB n°167). En vertu de l’article R. 351-2 du code de justice administrative la juridiction a transmis l’affaire au Conseil d’Etat qui s’est prononcé par un arrêt du 17 octobre 2014 (Conseil d’État, 6ème / 1ère SSR, 17/10/2014, 361315). Cette espèce retiendra l’attention des spécialiste du droit nucléaire en ce que le Conseil d’Etat se reconnaît compétent sur la base de la nouvelle rédaction de l’article R. 311-1 4° du Code de justice administrative pour connaître en premier et dernier ressort des recours, de plein contentieux, contre les arrêtés ministériels homologuant les décisions prises par l’Autorité de sûreté nucléaire. Cela n’allait pas de soi, l’article R. 311-1 du Code de justice administrative visant les décisions de l’ASN mais par leur homologation par arrêté Ministériel. Pour sa part, l’environnementaliste relève cet arrêt à deux autres titres. D’abord sur le terrain de la suffisance d’impact, le Conseil confirme qu’il n’est pas impossible de compléter dans des circonstances bien particulières une étude d’impact après enquête publique : « l’association requérante soutient que l’étude d’impact serait insuffisante, faute d’analyser les conséquences du rejet dans l’environnement de substances chimiques nocives, susceptibles notamment de provoquer de graves lésions oculaires, provenant de l’utilisation de six tonnes par an de produits dits désincrustants nécessaires au fonctionnement de l’unité de dessalement d’eau de mer de l’EPR, qui doit traiter environ 430 000 m3 d’eau par an ; que l’insuffisance de l’étude d’impact est démontrée, selon elle, par la production d’une étude d’impact complémentaire détaillée traitant ce point, réalisée deux ans après l’enquête publique ; que, toutefois, la circonstance qu’a été réalisée ultérieurement une étude complémentaire afin de préciser certaines modalités d’exécution du projet ne révèle pas par elle-même une insuffisance du dossier de demande d’autorisation ou de l’étude d’impact ; que figurait dans le dossier soumis à enquête publique une annexe B-6c relative à l’unité de dessalement mentionnant l’utilisation de produits désincrustants et comportant une appréciation de la consommation, de la fréquence et des rejets de ces produits ; que, par suite, aucune insuffisance du dossier de demande ou de l’étude d’impact initiale ne peut être regardée en l’espèce comme établie ». On le voit une fois de plus : c’est la vocation intrinsèquement et suffisamment informative (sur cette notion cf. notre commentaire sur le blog de Green Law sous Conseil d’Etat, 15 mai 2013, n°353010), le Conseil d’Etat a été amené, en tant que juge des) de l’étude initiale qui permet au juge d’écarter tout débat sur l’incomplétude prétendument déduite d’une production après enquête publique . L’environnementaliste retiendra encore ce nouveau refus du Conseil d’Etat de censurer un dispositif réglementaire sur la base du principe de précaution. Certes aux visas des articles 1er et 5 dé la Charte de l’environnement, l’arrêt décline en matière d’INB, le considérant initié dans l’espèce Association coordination interrégionale stop tht et autres (CE, 12 avril 2013, , n° 342409 – « La méthodologie du principe de précaution fixée par le Conseil d’Etat », Droit de l’environnement, n°216, octobre 2013) et appliqué en matière d’amiante (Conseil d’État, 1ère / 6ème SSR, 26/02/2014, 351514, note Deharbe AJDA 2014, p. 1566) : « qu’il incombe à l’autorité administrative compétente en matière d’installations nucléaires de base de rechercher s’il existe des éléments circonstanciés de nature à accréditer l’hypothèse de risques de dommages graves et irréversibles pour l’environnement ou d’atteintes à l’environnement susceptibles de nuire de manière grave à la santé, qui justifieraient, en dépit des incertitudes subsistant quant à leur réalité et à leur portée en l’état des connaissances scientifiques, l’application du principe de précaution ». Mais s’agissant de contrôler, l’augmentation des limites des rejets de tritium sous forme gazeuse ou liquide (” eau tritiée “) homologuée par le Ministre, le Conseil d’Etat rejette au fond le moyen en concluant que « l’administration n’a pas commis d’erreur d’appréciation dans l’évaluation des risques de l’installation » dès lors que « ces limites maximales demeurent très inférieures à celles qui sont prévues par la réglementation sanitaire en vigueur; que l’augmentation des limites de rejet du tritium s’accompagne d’une diminution des rejets d’autres substances radioactives ; qu’en outre, les études ou documents les plus récents versés au dossier, notamment le livre blanc du tritium publié le 8 juillet 2010, qui été rédigé sur la base des réflexions des groupes de travail mis en place en 2008 par l’ASN, et les travaux de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), s’ils soulignent la nécessité de poursuivre les recherches, confirment, en l’état des connaissances scientifiques et compte tenu des mesures prises, l’absence de risques graves pour l’environnement ou la santé publique ». On remarquera encore avec le plus grand intérêt,  que le Conseil d’Etat a pris lui-même le soin d’actualiser son appréciation sur le prétendu manque de précaution, dès lors que que l’arrêt précise : « qu’il ne résulte pas de l’instruction que des circonstances nouvelles seraient de nature à remettre en cause l’appréciation portée sur ceux-ci ».

Future déclaration I.C.P.E. : feu le récépissé papier ! (projet de décret)

Par David DEHARBE (Green Law Avocat) Le Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie a mis en ligne et soumet à consultation publique en vertu de l’article L120-1 du code de l’environnement, un projet de décret (téléchargeable via ce lien) visant à simplifier la procédure de déclaration des I.C.P.E. et à totalement la dématérialiser par voie électronique au 1er janvier 2016. Cette consultation est ouverte du 26 février 2015 au 19 mars 2015 (Consultation publique du Medde, “CSPRT du 24 mars 2015 : réforme de la dématérialisation de la procédure de déclaration des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE)”, du 26 février 2015). Objet de la consultation : la télédéclaration pour les installations de classe D Le présent projet s’inscrit dans le cadre de la dématérialisation de la procédure de déclaration des installations classées pour la protection de l’environnement (I.C.P.E.) qui est l’une des mesures de simplification décidée par le Gouvernement lors du comité interministériel pour la modernisation de l’action publique (CIMAP) du 2 avril 2013. La date opérationnelle de mise en place est fixée au 1er janvier 2016. Ce projet doit faciliter les échanges entre les entreprises et les administrations, réduire les délais de procédures et permettre la constitution d’une base de données nationale unique des installations classées relevant du régime de la déclaration. Il comporte deux volets complémentaires : – une adaptation de la procédure de déclaration des installations classées relevant du régime de la déclaration, objet du présent projet de décret modifiant diverses dispositions du code de l’environnement concernant la procédure de déclaration des installations classées pour la protection de l’environnement relevant du régime de la déclaration, – une dématérialisation du processus de déclaration (télédéclaration), avec la mise à disposition d’un outil national harmonisant la procédure et assurant un rôle pédagogique auprès des déclarants. Prenons bien la mesure de la masse de documents qui seront ainsi à termes dématérialisés : aujourd’hui la France comporte environ 440 000 installations soumises à déclaration pour un bon millier d’inspecteurs I.C.P.E.. Le projet de décret comporte notamment les dispositions suivantes : – la mise en œuvre de la procédure dématérialisée à compter du 1er janvier 2016 et la suppression de la possibilité de déclaration « papier » à compter du 1er janvier 2021 ; – la mise en place de formulaires homologués (Cerfa) ; – la délivrance immédiate d’une preuve de dépôt de la déclaration par voie électronique. Cette preuve de dépôt informe le déclarant des prescriptions générales applicables à l’installation ; – la mise à disposition des arrêtés de prescriptions générales sur le site internet de la préfecture ; – la mise à disposition de la preuve de dépôt de la déclaration sur le site internet de la préfecture pendant une durée minimale de 3 ans – une procédure de télédéclaration pour l’édiction de prescription spéciales aux installations de classe D ; – une procédure de télédéclaration pour le changement d’exploitant de classe D. La “preuve de dépôt immédiate” remplacera le “récépissé” On remarquera surtout que ce nouveau dispositif imposerait au préfet un délai de 15 jours à compter de la date de délivrance de la preuve de dépôt pour « demander des compléments » au télédéclarant (nouveau dernier alinéa de l’article R.512-48). La possibilité de solliciter d’énigmatiques « compléments » est dangereuse. Sur quoi portent ces compléments ? Seraient-ils à comprendre comme s’ajoutant à la liste des documents exigibles au titre du formulaire qui doit préciser par un arrêté ministériel les éléments requis du télédéclarant ? Sachant que le projet décret ne liste plus limitativement les pièces actuellement exigées par l’actuel article R. 512-47 du code l’environnement. Rappelons que selon le droit en vigueur, « Lorsqu’il estime que la déclaration est en la forme irrégulière ou incomplète, le préfet invite le déclarant à régulariser ou à compléter sa déclaration ». Et la compétence du Préfet est ici liée : selon la jurisprudence non seulement le Préfet ne peut exiger une pièce non requise par l’article R512-47 mais de surcroit le Préfet ne peut refuser un récépissé motif pris de ce que l’installation ne serait pas en mesure de respecter ses prescriptions générales ICPE ou même celles d’urbanisme (CAA Nancy, 25 juill.2014, n°13NC01649, MEDDE, AJDA novembre 2014, p.222 – cf. également : CAA Marseille 7 février 2012, Association avenir d’Alet, req. n° 09MA04671 et CAA Nancy 26 juin 2012, M.B, req. n° 11NC00636). Ce qui importe c’est le caractère complet de la déclaration pour une activité dont la rubrique relève d’un tel classement : comme le rappelle le Conseil d’Etat « le préfet est tenu de refuser de donner récépissé d’une déclaration irrégulière ou incomplète » (CE, 23 mars 1990, n° 62644, M. et Mme Montagne). En fait on peut sans doute se rassurer sur l’intention des auteurs du décret par la délivrance « immédiate » de la preuve de dépôt accompagnée des prescriptions techniques générales d’origine préfectorales et/ou ministérielles. Sans doute la demande de « complément » doit-elle être accompagnée d’un accusé réception assorti des prescriptions, sauf à ce que le classement ou sa rubrique soient en eux-mêmes contestés par l’administration. Mais le danger de demandes abusives de compléments pouvant anticiper un débat sur le respect des prescriptions n’est pas non plus à exclure… On soulignera enfin que le futur  II de l’article R. 512-50 du code de l’environnement avalise l’hypothèse que certaines installations déclarées puissent être régies par le régime de la la déclaration au sein d’un même établissement comportant une installation classée soumise à autorisation, ceci au-delà de l’effet attractif du régime aggravant posé en principe par l’article R512-32 (c. env.)  : “les dispositions des arrêtés relatifs aux prescriptions générales prévus à l’article L.512-10 sont applicables aux installations classées soumises à déclaration incluses dans un établissement qui comporte au moins une installation soumise au régime de l’autorisation dès lors que ces installations ne sont pas régies par l’arrêté préfectoral d’autorisation”. Toutes ces questions trouveront une réponse après la consultation publique et plus précisément à compter du 1er janvier 2016, date d’entrée du…

Parutions de deux analyses par Green Law Avocat dans “Droit de l’environnement”: l’expert en contentieux environnemental et l’annulation d’une ZDE pour détournement de pouvoir

L’équipe de Green Law Avocat a publié deux analyses parues dans la revue Droit de l’environnement en Décembre 2014. A l’occasion d’un colloque organisé par le CERDACC le 20 mai 2014 ayant pour thème “l’expert au banc des accusés”, David DEHARBE est intervenu pour évoquer le sujet de l’expert en contentieux administratif de l’environnement. Les actes du colloque sont publiés dans un Hors-Série spécial en décembre. La mission est quasi vue comme impossible dans des domaines aujourd’hui sensibles (OGM, antennes relais, lignes THT…), car elle implique pour l’expert de se voir, tout d’abord, confier une mission. C’est là un effort que doivent fournir les juristes en environnement : admettre le besoin d’un tiers expert et convaincre le juge administratif de son utilité dans des contentieux où la vérité scientifique n’existe pas. Par ailleurs, la jurisprudence administrative relative aux (feu) Zones de Développement Eolien (ZDE) est l’occasion pour Green Law Avocats de revenir sur le risque juridique caractérisé par le détournement de pouvoir. La Cour administrative d’appel de Douai a en effet annulé un arrêté préfectoral approuvant une ZDE car il était entaché d’un détournement de pouvoir. Une telle décision constitue une intéressante contribution à la théorie du détournement de pouvoir, dont les illustrations demeurent malheureusement rares par rapport à la pratique.