Energie: vers des lettres de cachet contre les opérateurs photovoltaïques ?

[dropcap]L[/dropcap]a publication au Journal officiel d’hier d’un décret limitant le montant de l’indemnisation due par les gestionnaires de réseau de distribution d’électricité a pu faire croire à une partie de la filière photovoltaïque qu’un nouvel obstacle venait d’être dressé contre la possibilité de faire valoir ses droits (Décret n° 2012-38 du 10 janvier 2012 fixant le barème des indemnités dues en cas de dépassement des délais d’envoi de la convention de raccordement ou de réalisation du raccordement des installations de production d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelable d’une puissance inférieure ou égale à trois kilovoltampères ). Cependant, s’il fait incontestablement penser à une réduction supplémentaire du sentiment d’Etat de droit (1), il faut en relativiser juridiquement la portée (2). 1) Un sentiment d’affaiblissement de l’Etat de droit Indéniablement, les opérateurs photovoltaïques auront été déçus par l’Etat de droit, trompés par le Ministère de l’Ecologie et le Gouvernement et sacrifiés par la perception à court terme que se fait le Conseil d’Etat de l’intérêt général (ordonnance de référé du 28 janvier 2011 et arrêt “ciel et terre” du 18 novembre 2011). Le décret ci-dessous téléchargeable leur donnera probablement le sentiment d’un retour à l’Ancien régime et au règne de l’arbitraire. Ce décret_n°2011-2020_du_29_décembre_2011 établit un barème dérisoire des préjudices causés aux producteurs d’installations photovoltaïques d’une “puissance installée” de 3kVA par l’envoi tardif des conventions de raccordement par les gestionnaires de réseau d’électricité, et par le raccordement pouvant lui-même être tardif. Après avoir malmené le principe de non rétroactivité (dont il avait pourtant été mis en garde par plusieurs parlements: voir les débats parlementaires de la Loi Grenelle II, et notamment les discussion en Commission des Affaires économqiues sur l’article 33 du texte devant l’Assrbmlée Nationale…devenu l’article 88), le Gouvernement et sa Ministre de l’Environnement sacrifient celui de la réparation du sur l’autel des besoins de financement du tout nucléaire. 2) Une portée du barème à relativiser Cependant, à bien lire le décret, qui revient finalement à un décret d’application de l’article 88 V de la Loi Grenelle II codifié à l’article L342-3 du Code de l’énergie, il convient de voir qu’il n’a pour objet – que de garantir légalement une indemnisation minimale – aux producteurs d’une installation de moins de 3kVA. Il serait erroné d’y voir là l’exclusion légale ou réglementaire du régime d’inmnisation de droit commun pour les installations d’une puissance supérieure: cela ne ressort ni directement du texte, ni indirectement des débats parlementaires. Et s’agissant d’un exception, elle s’interprète strictement. En tout état de cause, certains avaient fort heureusement anticipé ce type de manoeuvre et pourront se contenter d’arguer de l’antériorité de leur recours juridictionnel contre le gestionnaire … ils ne seront pas privés du procès en réparation auquel ils pouvaient légitiment prétendre à moins que le Gouvernement entende méconnaître (comme il l’a déjà fait pour le même article 88 de la loi grenelle II, mais en son III° : TC, 13 décembre 2010, “Green Yellow) le droit à un procès équitable garanti par l’article 6,§1 de la CEDH. Rappelons en effet que le gestionnaire a des obligations dont le non respect est d’ores et déjà reconnu (voir les décisions du CoRDIS du cabinet commentées ici) Pour les attentistes, l’exception d’illégalité voire d’inconstitutionnalité du décret, si tant est que le gestionnaire entende l’invoquer au contentieux, sera indispensable avec les aléas que l’on sait. David DEHARBE Avocat au Barreau de Lille Green Law Avocat

Electricité: les nouveaux dispositifs de comptage LINKY précisés

Un arrêté qui ne porte pas son nom:  Il faut noter la publication au JO de ce jour de l’Arrêté du 4 janvier 2012 modifiant les dispositifs de comptage sur les réseaux d’électricité (Arrêté pris en application de l’article 4 du décret n° 2010-1022 du 31 août 2010 relatif aux dispositifs de comptage sur les réseaux publics d’électricité, JORF n°0008 du 10 janvier 2012 page 468, texte n° 31).  Il y est précisé que les modifications concernent trois domaines:  1° Les fonctionnalités des dispositifs de comptage aux différents 2° Les conditions d’interopérabilité des dispositifs de comptage déployés sur le territoire ; 3° Les modifications à apporter aux documentations techniques de référence des gestionnaires Bien que l’arrêté ne le mentionne pas explicitement, il s’agit là d’une généralisation du nouveau dispositif de comptage LINKY. En effet, l’arrêté est pris en application du décret du 31 août 2010 (Décret n° 2010-1022 du 31 août 2010 relatif aux dispositifs de comptage sur les réseaux publics d’électricité en application du IV de l’article 4 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité ) qui prévoit quant à lui que: “Pour l’application des dispositions du IV de l’article 4 de la loi du 10 février 2000 susvisée et en vue d’une meilleure utilisation des réseaux publics d’électricité, les gestionnaires de réseaux publics de transport et de distribution d’électricité mettent en oeuvre des dispositifs de comptage permettant aux utilisateurs d’accéder aux données relatives à leur production ou leur consommation et aux tiers autorisés par les utilisateurs à celles concernant leurs clients. Les dispositifs de comptage doivent comporter un traitement des données enregistrées permettant leur mise à disposition au moins quotidienne. Les utilisateurs des réseaux et les tiers autorisés par les utilisateurs y ont accès dans des conditions transparentes, non discriminatoires, adaptées à leurs besoins respectifs et sous réserve des règles de confidentialité définies par le décret du 16 juillet 2001 susvisé. Les résultats de l’expérimentation Bien que l’arrêté est pris au visa d’une “proposition” de la CRE de juillet 2011, modifiée en novembre, il s’agit en réalité d’une délibération de la CRE accessible sur le site (Délibération de la CRE du 7 juillet 2011 portant communication sur les résultats de l’expérimentation d’ERDF relative au dispositif de comptage évolué Linky) qui précise justement que : “Le projet d’ERDF s’inscrit dans le cadre de l’article 4-IV de la loi du 10 février 2000, récemment codifié à l’article L. 341-4 du code de l’énergie, qui précise que les dispositifs de comptage mis en oeuvre par les gestionnaires de réseaux de distribution doivent permettre aux fournisseurs de « proposer à leurs clients des prix différents suivant les périodes de l’année ou de la journée et incitant les utilisateurs de réseaux à limiter leur consommation pendant les périodes où la consommation de l’ensemble des consommateurs est la plus élevée “ Une mise en oeuvre imparfaite Les critiques à l’encontre de ce nouveau dispositif de comptage doivent être entendues: qu’il s’agisse de l’efficacité alléguée des compteurs pour une meilleur maîtrise des consommations, que de son coût sur le long terme. Il est patent à cet égard de constater le fossé existant entre l’évaluation du cabinet mandaté par la CRE (3,8 milliards d’euros) et celui d’ERDf (4,3 milliards d’euros). Certes, la transposition de la directive communautaire (Directive 2006/32/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2006 relative à l’efficacité énergétique dans les utilisations finales et aux services énergétiques et abrogeant la directive 93/76/CEE) doit effectivement être faite. Mais il reste que les économies d’énergie qui motivent officiellement ce nouveau compteur ne doit pas conduire à une augmentation indue de la facture d’électricité ni à une opacité des informations recueillies.

Parcs nationaux: observations sur la modernisation de la réglementation applicable

Deux textes intéressant les parcs nationaux ont été récemment publiés au Journal officiel: l’occasion de revenir sur les principales modifications apportées à la réglementation de ces parcs. – Arrêté du 31 décembre 2011 relatif aux travaux dans les coeurs de parcs nationaux; – Décret n° 2011-2020 du 29 décembre 2011 relatif aux parcs nationaux. Entré en vigueur le 31 décembre 2011 et applicable pour l’élaboration ou la révision d’une charte aux partes existants au 31 août 2011 (sauf en ce qui concerne la transmission du rapport environnemental et l’obligation d’accompagner les demandes d’autorisation d’urbanisme pour les travaux projetés dans un coeur du parc qui sont applicables au 1er janvier 2012),  un décret n° 2011-2020 du 29 décembre 2011 relatif aux parcs nationaux rénove  la réglementation applicable dans les parcs nationaux. La création des parcs nationaux accuse quelques modifications afin d’aligner le droit français avec la directive 2001/42/CE du 27 juin 2001 relative à l’évolution des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement. Désormais, le projet de charte est élaboré par le  groupement d’intérêt public  de préfiguration qui procède à son évaluation environnementale. Le projet de charte et le rapport environnemental sont transmis aux communes et EPCI intéressées, aux départements, aux régions, éventuellement à d’autres personnes (dont la liste est fixée par le président du GIP après avis du préfet de région) ainsi qu’à la formation d’autorité environnementale du Conseil général de l’environnement et du développement durable (art. R 331-7 du code de l’environnement). La nouvelle rédaction de l’article R. 331-4 du code de l’environnement précise, en outre,  que les avis doivent être rendus dans un délai de 2 mois (à défaut, ils sont réputés favorables). Prenant en compte la réforme des enquêtes publiques du Grenelle II, l’enquête publique organisée par l’autorité préfectorale est modifiée par référence aux nouveaux articles R.123-1 à R 123-27 du code de l’environnement (cf. le décret n° 2011-2018 du 29 décembre 2011). La liste des documents  compatibles ou rendus compatibles avec la charte est élargie au plan régional de l’agriculture durable (prévu par l’art. 51 de la loi  n° 2010-4 du 27 juillet 2010) et au schéma régional de développement de l’aquaculture (établis dans les régions comportant une façade maritime dont l’objet est de recenser les sites existants et les sites propices au développement d’une aquaculture marine durable – art. 85 de la loi n° 2010-874). Dans la nouvelle procédure, le préfet de région (et non plus de département-cf. art L. 331-2 du code de l’environnement modifié par la loi n° 2010-788 dite loi Grenelle II) constate par arrêté les adhésions à la charte après avoir recueilli, dans un délai de 4 mois, les délibérations des communes intéressées et l’avis de leur EPCI, sachant que l’établissement public du parc doit élaborer et tenir à jour une carte du périmètre effectif de la charte (art. R.331-10 du code de l’environnement). En cas d’extension et de modification du périmètre de la charte, le projet est soumis pour avis aux EPCI à fiscalité propre auxquels les communes appartiennent, aux départements et à la région (art. R.331-15 du code de l’environnement), l’extension de périmètre et la modification de la charte  étant, après enquête publique, décidées par décret (en Conseil d’Etat) tout comme l’est la création du parc  (art. R. 331-11 du code de l’environnement). Ensuite, au niveau de la réglementation des activités humaines au coeur du parc, des précisions sont apportées : – Pour les travaux et activités situés dans le coeur du parc, l’autorisation d’urbanisme  doit être complétée par différents éléments tels que ceux qui permettent d’apprécier les conséquences de l’opération sur l’espace protégé et son environnement ; – Le ministre chargé de la protection de la nature fixe par arrêté le contenu du dossier de demande d’autorisation lorsque celle-ci n’est pas soumise à autorisation d’urbanisme et celui du dossier permettant d’apprécier les conséquences des travaux et autres sur l’espace protégé et son environnement ; Notons qu’un arrêté de la ministre de l’Ecologie en date du 31 décembre 2011 relatif aux travaux dans les coeurs des parcs nationaux, publié au JORF du 6 janvier 2012,  a d’ores et déjà  établi les formulaires à remplir pour les demandes de travaux au coeur du parc   ou l’appréciation des conséquences de travaux pour les demandes de travaux au coeur  d’un parc national dès le 1er janvier 2012. De surcroît, une notice, applicable au 1er juin 2012,  est présentée pour apprécier les conséquences de travaux pour les demandes de travaux dans un coeur de parc national en instance de classement. – Egalement, pour les manifestations publiques ou encore les demandes d’autorisation spéciale de survol motorisé sur le coeur du parc, ce même ministre doit préciser, par arrêtés,  la composition du dossier de demande d’autorisation spéciale. Les peines encourues pour les infractions motorisées dans le coeur du parc  sont, en outre,  harmonisées (qu’elles soient terrestres, aériennes ou maritimes) par une contravention de 5e classe. Par ailleurs, dans le cadre de cette brève présentation, l’on peut ajouter que les projets de conventions pluriannuelles d’exploitation agricole ou de pâturage doivent désormais être adressés pour avis simple au directeur de l’établissement public national qui dispose d’un délai d’un mois pour faire connaître aux cocontractants les stipulations contractuelles susceptibles de méconnaitre la réglementation du parc ou les intérêts protégés du parc (art. R.480-1 du code rural et de la pêche). Ce nouveau décret s’inscrit dans un contexte de  renouveau du régime juridique des parcs naturels nationaux (cf. sur ce blog, « Le décret relatif à l’évaluation environnementale des chartes des parcs naturels nationaux », 12/09/2011) mais également régionaux ( cf. sur ce blog, « PNR et parc naturel marin : la consultation relative au projet de décret terminée, 24/02/2011). Patricia Demaye-Simoni Maître de conférences en droit public

Le quadeur, une nouvelle espèce en voie de disparition

On pourra télécharger ci-dessous l’instruction du Gouvernement du 13 décembre 2011 complétant la circulaire du 6 septembre 2005 relative à la circulation des quads et autres véhicules à moteur dans les espaces naturels et donnant des orientations pour le contrôle de la réglementation en vigueur. Ce texte doit être diffusé car il a une vocation pédagogique certaine. circulaire 34284 Ce texte complète la circulaire Olin très partiellement annulée par le Conseil d’Etat (CE 10 janvier 2007,COLLECTIF POUR LA DEFENSE DES LOISIRS VERTS  et FEDERATION FRANCAISE DE MOTOCYCLISME). Le caractère interprétatif de la circulaire. Après analyse, l’instruction du 13 décembre 2011 complétant la circulaire du 6 septembre 2005 ne semble manifestement pas présenter un caractère interprétatif de la règlementation en vigueur opposable à la circulation des quads et autres véhicules à moteur. Dénuée de caractère impératif, elle n’est donc pas susceptible de recours devant le juge de l’excès de pouvoir (Conseil d’Etat, 18 décembre 2002, n°233618, Mme Duvignières) …  le Ministre a prudemment cette fois évité le contentieux de ses actes. Finalement cette circulaire fait quelques rappels heureux. L’interdiction de principe figurant à l’article L. 362-1 du code de l’environnement L’article L. 362-1 du code de l’environnement prévoit l’interdiction de circulation des véhicules à moteur en dehors du domaine public routier, des chemins ruraux et voies privées ouvertes à la circulation publique. Il n’y a pas d’obligation de matérialiser cette interdiction de principe (Cour d’appel de Dijon, Chambre correctionnelle Arrêt du 24 mars 2010 nos 10/234, 10/269) : L’article R. 362-2 du code de l’environnement prévoit que le fait, pour tout conducteur, de contrevenir aux dispositions des articles L. 362-1 et L. 362-3 est puni de l’amende prévue pour les contraventions de la 5e classe (soit 1 500 euros au plus). L’étendue du pouvoir de police du maire dans la règlementation de la circulation sur les chemins ruraux Là encore la circulaire prend grand soin de souligner que le maire est compétent pour interdire, à titre temporaire ou permanent, l’usage de tout ou partie du réseau des chemins ruraux aux catégories de véhicules et de matériels dont les caractéristiques sont incompatibles avec la constitution de ces chemins (articles L. 2213-1 et L. 2215-3 du code général des collectivités territoriales ;  Conseil d’Etat, 9 nov. 1992, no 94372,  Denard). L’interdiction de circulation ne peut toutefois présenter un caractère trop général … Bizarrement le Ministre ne procède pas à ce rappel. Ainsi, le Maire ne peut interdire, de façon générale et permanente, la circulation des véhicules à moteur sur toute l’étendue du territoire de la commune non desservi par une voie bitumée (CAA Bordeaux, 28 mai 2002, no 99BX00597,  Nelias). Mais l’arrêté municipal n’est pas obligatoirement limité dans le temps (Conseil d’Etat, 12 décembre 1997 n°173231). Il semble toutefois à la lecture de la jurisprudence, qu’une discrimination entre les différents types de véhicules puisse être envisagée dès lors qu’elle apparaît justifiée, notamment en raison des spécificités des véhicules et des désordres qu’ils occasionnent (Conseil d’Etat, 29 déc. 1997, no 173042,  Fougerouse ;  CAA Bordeaux, 2e ch., 23 juill. 2002, no 99BX01413,  Assoc. départementale de défense de la propriété privée). De même, les conditions d’utilisation des véhicules agricoles étant différentes de celles des autres véhicules de transport, il est loisible au maire de laisser la possibilité aux véhicules agricoles de circuler sur un <chemin> ayant fait l’objet d’une interdiction de circulation sans porter une atteinte illégale au principe d’égalité devant la loi (CAA Nantes, 24 juillet 2007, n° 04NT01171,  Seillery). Obligation de signalisation Si comme le rappelle la circulaire ce n’est pas le cas sur une voie privée, une interdiction de circulation de véhicules motorisés sur un chemin rural, nécessairement prescrite par un arrêté de police, devra faire l’objet d’une signalisation pour être opposable aux usagers. Le droit écrit est ici très net (cf. les articles L161-13 du code rural, ;L. 113-1 du code de la voirie routière, ; R411-25 code de la route ;  Instruction interministérielle sur la signalisation routière (IISR), 4e partie, signalisation de prescription, novembre 2008, article 56-1). Sachant que la violation des arrêtés de police réglementant la circulation localement n’est pas un risque négligeable. L’article R. 362-3 du code de l’environnement prévoit que le fait, pour tout conducteur, de contrevenir aux mesures édictées en application des articles L. 2213-4 et L. 2215-3 du code général des collectivités territoriales est puni de l’amende prévue pour les contraventions de la 5e classe (soit 1 500 euros au plus). Des plans départementaux des itinéraires de randonnée motorisée ? Si l’on ajoute à cela, comme le fait la circulaire que les plages, les chemins de halages, les chemins forestiers et tout autre chemin non carrossé ou temporaire sont interdits sous peine d’amende et parfois de confiscation du matériel, une conclusion s’impose : les quadeurs et autres amateurs de trial ou d’enduro sur voies ouvertes ne pourront pas dire qu’ils ne savaient pas ce qu’ils encouraient ! Nul ne doutera que la pression écologique est ici tout aussi forte que légitime : il en va de la protection des espèces et surtout de leurs habitats, à l’aune de Natura 2000 et du développement durable. Demeure néanmoins cette question politiquement très incorrecte : où garantir le libre  loisir motorisé amateur ? On voudrait juste rappeler un dernier oubli de la circulaire : le plan départemental des itinéraires de randonnée motorisée pourtant prévu à l’article L361-2 du code de l’environnement. C’est un intéressant baromètre de la garantie de la liberté d’aller de venir et accessoirement de déranger les espèces pour celles et ceux qui ne sont pas aussi électoralement influents que les chasseurs français ou désormais les randonneurs: si l’on dénombre quelques 80 plans pédestres de même nature juridique, il suffit d’une main pour compter à l’échelle du territoire les plans motorisés. On peut alors sinon comprendre du moins s’expliquer que le dimanche certains bravent l’interdit et prennent le maquis au guidon de leurs terrible engin … Attention, les gendarmes vous attendent (là aussi) au coin du bois !

Pollution et réticence dolosive : à la recherche de la garantie de l’acquéreur

Dans le cadre d’un litige entre vendeur et acquéreur relatif à la présence en sous-sol de cuves polluées non dénoncées dans le contrat de vente, la Cour d’appel de Douai a rendu un arrêt, le 14 novembre 2011, qui peut en laisser plus d’un perplexe (CA Douai, 14 nov. 2011, n°06/02651) .  En effet, les juges d’appel ont retenu, aux termes de cette décision, une  appréciation plus qu’extensive de la réticence dolosive du vendeur, et plus précisément de l’intention dolosive. Cette solution semble avoir été gouvernée par la volonté de garantir l’acquéreur en présence d’une pollution d’ampleur et de toxicité certaine, à défaut d’autres fondements juridiques envisageables. De surcroît, et alors qu’ils ont très facilement prononcé la condamnation du vendeur, profane en la matière, les juges du fond ont, par ailleurs, limité la garantie due par le notaire en sa qualité de rédacteur de l’acte. Les faits En l’espèce, le vendeur avait vendu à un acquéreur une propriété à usage industriel aux termes d’un acte reçu par notaire le 28 avril 1997. A l’issue de travaux d’excavation pour la mise en place d’un réseau d’assainissement, l’acquéreur a découvert, sous un bâtiment, des citernes enterrées qui, après analyse, se sont avérées contenir des boues toxiques. A la suite d’une expertise judiciaire, l’acquéreur a alors diligenté une procédure au fond à l’encontre du vendeur et du notaire pour solliciter la condamnation de ceux-ci  à lui verser le montant des frais de dépollution. Il a obtenu gain de cause en première instance et un appel a été interjeté. La Cour d’appel de Douai, aux termes de son arrêt rendu le 14 novembre 2011, a condamné in solidum le vendeur et le notaire et opéré un partage de responsabilité entre ces derniers à hauteur des trois quarts pour le vendeur et d’un quart pour le notaire. Si la solution n’apparait pas en soi surprenante dans son principe, la lecture attentive des faits de l’espèce et la motivation des juges de fond suscitent, quant à elles, quelques interrogations. – Une appréciation particulièrement extensive de la réticence dolosive… L’acquéreur avait intenté, à titre principal, son action sur le fondement des articles 1116 et 1382 du Code civil en invoquant la réticence dolosive du vendeur.  La Cour d’appel de Douai se place donc sur ce terrain pour apprécier la responsabilité du vendeur. De l’oubli d’une mention à l’acte de vente à l’intention dolosive Elle relève que l’acte, par lequel le vendeur avait lui-même acquis l’immeuble litigieux, indiquait qu’une activité de vidange avait été exercée sur le site et que la présence de deux citernes dans le sous-sol était mentionnée. Or, si l’acte de vente du 28 avril 1997 rappelait bien les mentions de l’article 8-1 de la loi n°76-663 du 19 juillet 1976 (actuellement article L. 514-20 du Code de l’environnement), il était cependant précisé : « Le vendeur déclare qu’il n’a jamais exploité d’installations soumises à autorisation au sens de la loi précitée sur le terrain objet de la présente vente, hormis celles nécessaires à l’exercice d’une activité de fabrication d’éléments en béton sans danger ou inconvénient au sens de la loi ci-dessus. Il déclare également qu’il n’a jamais été déposé en fouilles, ni utilisé sur le terrain, directement ou dans les appareils ou installations, des déchets ou substances quelconques pouvant entraîner des dangers ou inconvénients pour la santé de l’environnement (tels que, par exemple, amiante, polychlorobiphényles, polychloroterphényles). De même, à sa connaissance, le vendeur déclare qu’il n’a jamais été exercé sur le terrain et les terrains voisins d’activités entraînant des dangers et inconvénients pour la santé, l’environnement et notamment aucune des activités visées par la loi du 19 juillet 1976 ». Et la Cour d’appel de déduire de l’absence de mention, dans l’acte de vente de 1997, de l’exploitation ancienne d’une activité de vidange et de la présence de cuves enterrées la caractérisation d’une réticence dolosive imputable au vendeur. Un raccourci surprenant… Un tel raccourci a de quoi surprendre. En effet, l’élément dommageable était constitué non par la présence de cuves elle-même mais par la pollution qu’elles contenaient, qui elle n’avait jamais été portée à la connaissance du vendeur. Dès lors, l’intention dolosive apparaît objectivement difficilement caractérisable. Cependant, les juges du fond estiment que le vendeur aurait nécessairement du savoir que les cuves avaient servi à usage de vidange et qu’elles étaient ainsi polluées. Cette appréciation des faits de l’espèce ne répond manifestement pas aux conditions requises et contrôlées par la Cour de Cassation pour retenir la réticence dolosive du vendeur. Il convient de rappeler que l’intention dolosive, tout comme la mauvaise foi, ne se présume pas et qu’elle doit être prouvée.  Or, en l’espèce, les juges du fond se fondent uniquement sur une absence de mention à l’acte, non de l’existence de la pollution elle-même, mais de l’activité relativement ancienne de vidange et de la présence de cuves enterrées pour retenir l’existence d’une intention dolosive. Cette position se révèle particulièrement sévère pour le vendeur et, en l’état, injustifiée.  …et contredit par les faits de l’espèce En effet, le vendeur insistait sur les éléments factuels suivants : – son propre vendeur n’avait pas exercé lui-même d’activité de vidanges, contrairement à une mention erronée dans l’acte d’acquisition du 27 décembre 1962, l’exercice d’une telle activité s’avérant en réalité bien antérieure ; – il avait purement et simplement oublié la présence des cuves enterrées, celles-ci ayant été simplement mentionnées au détour d’une phrase dans son propre acte de vente datant de presque 35 ans, et ces cuves étant de surcroît situées sous un bâtiment existant et donc parfaitement invisibles sans travaux d’excavation tels que ceux les ayant mises à jour ; – il ignorait totalement le fait que les citernes contenaient des boues polluées. En dépit de ces éléments, la Cour d’appel de Douai a estimé que le vendeur avait « volontairement dissimulé [à l’acquéreur] des éléments d’information qui l’aurait dissuadée de contracter si elle les avait connus ; que la réticence dolosive est établie et qu’en conséquence elle ne peut s’abriter derrière la clause de…