Par circulaire du 25 octobre 2011 (circulaire éolien 25nov.2011: NOR : DEVR1128562C), le ministre de l’écologie a décliné les hypothèses se présentant aux autorités préfectorales quant à la définition des zones de développement de l’éolien (ZDE).
Dans un contexte où l’attentisme des préfets est décrié alors que l’adoption des SRCAE a pris un retard évident compte-tenu de l’intervention très tardive des textes d’application (cf. Brève du 20/11/2011, « Etat d’avancement de la mise en oeuvre du Grenelle de l’environnement : troisième rapport annuel), la circulaire rappelle l’absence de mesures transitoires relatives aux propositions de ZDE formulées par les communes et les intercommunalités avant la promulgation de la loi 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement (ENE).
Ainsi que nous avons pu le souligner dans plusieurs brèves publiées sur ce blog (« projet de décret SRCAE – schéma régional éolien et après la consultation » du 14/02/2011 ; « publication du décret SRCAE au JORF : mieux vaut tard que jamais », 21/06/2011 ; « Eolien : le schéma régional éolien terrestre de Haute-Normandie adopté », 21/07/2011), la définition des ZDE pâtit des nouvelles règles issues de la loi Grenelle II.
Le rapport n° 007442-02 du conseil général de l’environnement et du développement durable (GGDD) relatif à l’instruction administrative des projets éoliens, récemment mis en ligne, en date de mai 2011, rappelle que de nombreuses ZDE et parcs éoliens existants ne sont pas positionnés dans les zones propices au développement de l’éolien (p.51). Des instructions adressées aux services de l’Etat y sont déjà inscrites pour ne pas bloquer la définition des ZDE en cours (p.51).
C’est une évidence : les ZDE – telles qu’issues de l’article 37 de la loi n° du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique -, qui conditionnent l’obligation d’achat de l’électricité produite, n’ont pas produit l’effet escompté.
Au terme de procédures lourdes tant au niveau administratif que financier, les ZDE ont été définies sans la vision prospective souhaitable ou encore en l’absence de toute mise en place d’un mode gouvernance adéquat.
Les critiques – déjà évoquées sur ce blog (cf. brèves précédentes) – ont par ailleurs été clairement formulées dès 2010 dans le rapport parlementaire du député Franck REGNIER n° 2398 du 31 mars 2010 relatif à l’énergie éolienne.
Au vu des nouveaux impératifs posés dans la loi Grenelle II du 12 juillet 2010, l’adaptation de la circulaire du Ministre de l’Ecologie en date du 19 juin 2006 (sur les dispositions relatives à la création des zones de développement de l’éolien terrestre) était nécessaire afin de rappeler aux autorités préfectorales les enjeux et les moyens dont elles disposent en matière de définition des ZDE conditionnant l’obligation de rachat de l’électricité produite.
Dans la circulaire du 25 octobre 2011, et suite à la publication du décret relatif aux SRCAE n° 2011-678 en date du 16 juin 2011 qui précise les modalités d’élaboration des nouveaux schémas régionaux de l’éolien (SRE), le ministère revient sur les différentes les hypothèses entourant les propositions de ZDE émises par les communes et les intercommunalités et leur articulation avec les schémas régionaux éoliens.
Annexé au SRCAE (schéma régional du climat, de l’air et de l’énergie) qui doit être coproduit par les autorités déconcentrées et décentralisées régionales, le SRE (schéma régional éolien) détermine les zones favorables à l’implantation des fermes éoliennes (art. L. 222-1 du code de l’environnement).
En application de l’art. 90 de la loi ENE, les ZDE créées ou modifiées postérieurement à la publication du SRE doivent être situées au sein des parties du territoire régional favorables au développement de l’énergie éolienne définies par le schéma ! Aussi, des précisions sur l’articulation entre les ZDE et ces schémas devaient être adoptées.
Suivant les termes de la circulaire :
– Les ZDE adoptées avant la promulgation de la loi ENE ne sont pas remises en cause.
– Pour les ZDE proposées et déclarées recevables avant l’entrée en vigueur de la loi Grenelle II mais n’ayant pas donné lieu à une décision définitive du préfet, la situation est plus complexe : le préfet arrête la ZDE, avant la publication du SRE, mais la commune ou l’intercommunalité doit se conformer aux nouvelles obligations posées par la loi du 12 juillet 2010 (notamment fournir des éléments d’appréciation sur leur potentiel éolien ; sur les possibilités de raccordement aux réseaux électriques ; sur la possibilité pour les projets à venir de préserver la sécurité publique, les paysages, la biodiversité, les monuments historiques et les sites remarquables et protégés ainsi que le patrimoine archéologique – art. L 314-9 du code de l’énergie).
– Pour les ZDE dont la proposition a été formulée après le 14 juillet 2010 (soit après la promulgation de la loi ENE) et déclarée recevable, comme précédemment, dès lors que la publication du SRE n’est pas envisagée dans le délai d’instruction de 6 mois de la ZDE (délai souvent dépassé en pratique), le préfet dispose d’une marge d’appréciation pour créer la ZDE au vu des éléments complétés par la loi ENE.
Dans ces deux hypothèses, la circulaire précise expressément que le fait que la ZDE se situe en dehors d’une zone favorable pressentie dans le SRE ne peut être retenu comme motif de refus de création d’une ZDE.
– Pour la définition des ZDE, intervenant suite à la publication du SRE qui doit être annexé au SRCAE, alors qu’une déclaration de recevabilité est obtenue, le préfet devra s’assurer que le périmètre des la ZDE est bien inclus dans des territoires favorables au SRE. Et lorsque le SRE sera publié (soit au plus tard le 30 juin 2012 pour une élaboration coconsentie par les autorités régionales déconcentrées et décentralisées, soit au plus tard le 30 septembre 2012 pour une élaboration diligentée par le préfet de région), toute proposition émanant des collectivités listées en zone favorable de développement de l’éolien devra être strictement conforme au contenu du schéma régional.
Le contenu de la circulaire atteste de la difficulté à mettre en oeuvre la nouvelle réglementation de l’éolien compte-tenu de la nécessité d’assurer une articulation cohérente entre les différents documents de planification de l’éolien alors qu’une production éolienne terrestre de 19.000 MW est espérée d’ici 2020 (contre 5.500 MW en 2010).
La nouvelle hiérarchie entre ces documents de planification introduite par la loi ENE a induit un net ralentissement dans la définition des ZDE qui hypothèque la réalisation de cet objectif. Un certain flottement, en la matière, peut être observé puisque parfois les préfectures ont attendu la publication de cette circulaire pour instruire les dossiers de ZDE déposés alors que d’autres attendent la publication du SRE pour ce faire (CGEDD, « Instruction administrative des projets éoliens », rapport n°007442-02, mai 2011, p. 19). Le tout se déroulant dans un contexte où nombre de permis de construire sont bloqués par les avis défavorables émis par Météo France ou l’Armée sur les projets de parcs éoliens situés autour des radars.
Enfin, l’état d’avancement des SRE est fort variable d’une région à l’autre, les services de la DREAL et les services décentralisés de la région nourrissant parfois des points de vue différenciés sur la prise en compte des projets de petite dimension portés par les communes et les intercommunalités.
Certes, la circulaire du 25 octobre 2011 tente de lever les obstacles à la définition des ZDE en ce qu’elle décline les différentes hypothèses d’articulation entre les ZDE et les SRE tout en précisant les nouvelles conditions d’instruction des dossiers au vu des modifications apportées par la loi ENE ( avec les nouveaux critères et avis à prendre en compte). Mais elle ne règle pas la question de la gouvernance au coeur du développement de l’éolien !
Patricia Demaye-Simoni
Maître de conférence en droit public