Dans un arrêt en date du 06 novembre 2013 (C.cass, Chambre civile 3, 6 novembre 2013, n°12.15-673) la Cour de cassation casse l’arrêt de Cour d’appel ne reconnaissant pas la responsabilité de l’architecte, chargé d’une mission de maîtrise d’œuvre complète, qui demandait à un entrepreneur de procéder à une démolition sans permis de démolir.
En l’espèce, la Cour d’appel de Bordeaux avait refusé de reconnaître l’action d’une SCI (maître d’ouvrage) contre l’architecte tendant à faire reconnaître la responsabilité de ce dernier.
La Cour de cassation casse l’arrêt rendu en appel et reconnaît la responsabilité de l’architecte en relevant ainsi :
« Que le maître d’œuvre ayant accepté une mission globale comprenant notamment la direction des travaux et la vérification de leur conformité aux pièces du marché engage sa responsabilité envers le maître de l’ouvrage s’il demande à l’entrepreneur principal de procéder à une démolition non autorisée par le permis de construire ; qu’en jugeant que la démolition illicite avait été réalisée sur les « instructions du maître d’œuvre qui presse l’entreprise de procéder à la démolition dans (sic) ses visites de chantier des 13 janvier, 20 janvier, 3 février, 10 février et 17 février 2006 » (arrêt, p.5§5) et que ledit maître d’œuvre a effectivement commis une « faute » (ibid. p.6§1), mais que sa responsabilité ne pourrait pas être engagée à l’égard du maître de l’ouvrage au motif que celui-ci savait qu’il ne disposait pas de l’autorisation administrative de procéder à la démolition, la Cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant ainsi l’article 1147 du Code civil ».
Cet arrêt souligne la responsabilité accrue de l’architecte dans le cadre de sa mission de maître d’œuvre et ce, même si en l’espèce, la SCI qui a signé un marché de démolition savait pertinemment qu’il n’avait pas été obtenu ni sollicité de permis de démolir.
La Haute juridiction interprète donc de manière très stricte le régime de responsabilité de l’architecte en tant que maître d’œuvre d’un marché de travaux. Aucune cause exonératoire n’est en effet retenue par la Cour de cassation, laquelle se borne simplement à constater la violation des règles d’urbanisme par le professionnel.
Au demeurant cet arrêt n’est pas sans mettre en avant l’infraction que constitue en droit de l’urbanisme la démolition sans permis de démolir.
Rappelons que le permis de démolir voit son champ défini positivement par les articles R. 421-27 et R. 421-28 du code de l’urbanisme et les dispenses fixées par l’article R. 421-29 du même code.
Des règles très strictes sont à respecter avant toute action de démolition d’un ouvrage :
En vertu de l’article L 451-1 du Code de l’urbanisme, la demande de permis de démolir précise :
– L’identité du ou des demandeurs ;
– En cas de démolition partielle, les constructions qui subsisteront sur le terrain et, le cas échéant, les travaux qui seront exécutés sur cette construction
– La date approximative à laquelle le ou les bâtiments dont la démolition est envisagée ont été construits.
– La demande comporte également le document attestant que le ou les demandeurs sont habilités à déposer une demande de permis de démolir.
En vertu de l’article R 450-2 du même Code, le dossier joint à la demande doit par ailleurs comprendre:
– Un plan permettant de connaître la situation du terrain à l’intérieur de la commune ;
– Un plan de masse des constructions à démolir ou, s’il y a lieu, à conserver ;
– Un document photographique faisant apparaître le ou les bâtiments dont la démolition est envisagée et leur insertion dans les lieux environnants.
A réception du dossier de permis de démolir, l’autorité compétente dispose alors du délai classique de de deux mois pour instruire la demande.
Un strict respect des règles relatives à la démolition contenues dans le Code de l’urbanisme rappellent doivent donc être respectées par les pétitionnaires ou leurs mandataires.
Analyse proposée par Me Aurélien BOUDEWEEL (Green Law Avocat)