Vices cachés: le dernier exploitant d’un garage automobile ne peut ignorer les vices affectant les locaux

Par Me Graziella Dode – Green Law Avocats La Cour de cassation vient de juger que la clause de non-garantie des vices cachés ne peut être invoquée par le vendeur qui, en sa qualité de dernier exploitant d’un garage automobile, ne pouvait ignorer les vices affectant les locaux (Cass. Civ. 3e, 29 juin 2017, n° 16-18.087, FS-P+B+R+I). En l’espèce, le vendeur a vendu le rez-de-chaussée d’un immeuble où avait été exploité un garage automobile. L’acquéreur (une SCI) avait exprimé dans l’acte notarié l’intention d’affecter ce bien à l’habitation. La SCI acquéreuse a fait réaliser une expertise qui a démontré la présente dans le sous-sol d’hydrocarbures et de métaux lourds provenant de cuves enterrées et rendant la dépollution nécessaire. Ainsi, l’acquéreur a assigné les vendeurs, les notaires et l’agent immobilier en garantie des vices cachés et indemnisation de son préjudice. La Cour d’appel de Toulouse avait jugé inopérante la clause de non garantie des vices cachés présente dans le contrat de vente en retenant que le vendeur, en sa qualité de dernier exploitant des lieux du garage précédemment exploité par son père, ne pouvait avoir ignoré les vices affectant les locaux (CA Toulouse, 25 janvier 2016, n° 14/06209). Le vendeur a formé un pourvoi en cassation en soulevant les arguments suivants : L’activité de garagiste impliquait que l’exploitant ait eu connaissance de l’existence des cuves mais nullement d’une pollution des sols, le vendeur niant avoir eu connaissance de ce vice ; La Cour d’appel aurait dû justifier en quoi elle décidait de s’écarter du rapport d’expertise qui, s’il relevait une pollution « avérée », indiquait également que « les différents intervenants au moment de la vente ne pouvaient diagnostiquer cette pollution » ; L’acquéreur connaissant l’affectation des lieux au moment de la signature de l’acte de vente et était par conséquent en mesure d’apprécier le risque de pollution. La Cour de cassation rejette son pourvoi : « ayant retenu à bon droit qu’en sa qualité de dernier exploitant du garage précédemment exploité par son père, M. X… ne pouvait ignorer les vices affectant les locaux et que l’existence des cuves enterrées qui se sont avérées fuyardes n’avait été révélée à l’acquéreur que postérieurement à la vente, la cour d’appel, appréciant souverainement la portée du rapport d’expertise, en a exactement déduit que le vendeur ne pouvait pas se prévaloir de la clause de non-garantie des vices cachés ». En l’espèce, la responsabilité des notaires est écartée car ni le vendeur, ni l’agent immobilier, ne les avaient informés de la présence de cuves enterrées sous le garage. Celle de l’agence immobilière est retenue en revanche puisque celle-ci avait admis avoir eu connaissance de la présence des cuves et n’en n’avait pas informé les notaires. Par conséquent, le vendeur et l’agence immobilière sont condamnés in solidum à payer à l’acquéreur la somme de 155.710 euros. Dans cet arrêt, la Cour de cassation assimile le vendeur à un vendeur professionnel sur lequel pèse en principe une présomption de connaissance du vice caché (Voir par exemple Cass. Civ. 3e, 7 oct. 2014, n° 13-21.957). La Cour de cassation a posé ce principe il y a longtemps : si le vendeur est un professionnel, pèse sur lui une présomption irréfragable de mauvaise foi, même pour des vices indécelables (Com., 15 novembre 1971, pourvoi n° 70-11.036, Bull. 1971, IV, n° 276), et même s’il contracte avec un professionnel. La connaissance du vice doit cependant être prouvée pour les intermédiaires à la vente tels que les agents immobiliers ou les notaires. En l’espèce, la responsabilité de l’agent immobilier est retenue car il avait admis avoir eu connaissance de la présence des cuves. Par ailleurs, en application des principes de la responsabilité civile, l’acheteur peut réclamer réparation de tout préjudice lié au vice (Civ. 1re, 30 janvier 1996, pourvoi n° 94-10.861, Bull. 1996, I, n° 46). Dans l’arrêt du 29 juin 2017, la Haute juridiction apprécie de manière restrictive cette présomption de connaissance du vice caché par le vendeur puisque celui-ci n’avait pas lui-même exercé d’activité dans le garage automobile. C’est le père du vendeur qui avait exploité le bien vendu. Pour autant, le vendeur avait la qualité de dernier exploitant en titre et par conséquent, il ne pouvait ignorer le vice affectant ce bien.

Affichage électoral : le TA de Grenoble rappelle les règles de mise en demeure préalable à un titre exécutoire

Par Fanny ANGEVIN – Green Law Avocats Le Tribunal administratif de Grenoble a récemment eu à traiter de la question de l’affichage sauvage en matière électorale (jugement en date du 4 avril 2017 n°1502189). Une commune avait en effet émis un titre exécutoire à l’encontre de l’association F… sans l’avoir préalablement mis en demeure de procéder à la remise en état des lieux. Le Tribunal administratif de Grenoble considère qu’en ayant omis cette mise en demeure, le titre exécutoire devait être annulé. Ce jugement évoque notamment les règles d’affichage en matière électorale, en cette période d’élections présidentielles. Rappel des règles applicables. Le fait d’apposer ou bien de faire apposer ou encore de maintenir après mise en demeure administrative, une enseigne ou une préenseigne, en l’absence de déclaration du dispositif (articles L. 581-6 et L. 581-26 du code de l’environnement) peut faire l’objet d’une procédure administrative (amende de 1500 euros) (articles L. 581-26 à L. 581-33 du code de l’environnement). Par ailleurs, le fait d’apposer, de faire apposer ou de maintenir après mise en demeure une publicité, une enseigne ou une préenseigne en l’absence d’autorisation de l’autorité administrative, ou pour affichage dans certains lieux ou encore sans avoir observé les dispositions particulières prévues par le règlement local de publicité (article L. 581-34 du code de l’environnement) peut également faire l’objet de sanctions pénales (amende de 7500 euros). L’article L. 581-35 du code de l’environnement, prévoit que : « Est puni des mêmes peines que l’auteur de l’infraction, celui pour le compte duquel la publicité est réalisée, lorsque la publicité ou le dispositif publicitaire ne comporte pas les mentions visées à l’article L. 581-5 ou lorsque celles-ci sont inexactes ou incomplètes.    Dans le cas d’une publicité de caractère électoral, l’autorité administrative compétente met en demeure celui pour le compte duquel cette publicité a été réalisée de la supprimer et de procéder à la remise en état des lieux dans un délai de deux jours francs. Si cette mise en demeure est suivie d’effet, les dispositions de l’alinéa précédent ne sont pas applicables. » Ainsi, en cas d’affichage sauvage de caractère électoral, l’autorité administrative compétente doit mettre en demeure la personne pour le compte duquel la publicité a été réalisée, de supprimer cette publicité et de remettre en état les lieux sous deux jours francs. C’est cette règle de l’obligation de mise en demeure qu’une commune a omis d’effectuer avant de procéder à l’exécution d’office des travaux d’enlèvement des affiches contestées. Une commune avait en effet émis un titre exécutoire à l’encontre de l’association F… national sans l’avoir préalablement mis en demeure de procéder à la remise en état des lieux. Le Tribunal administratif de Grenoble considère donc qu’en ayant omis cette mise en demeure, le titre exécutoire devait être annulé : « Considérant que l’association F…N… soutient que la commune d’E. n’a pas effectué la mise en demeure prévue par les dispositions précitées avant de procéder à l’exécution d’office des travaux d’enlèvement des affiches contestées ; que la commune ne conteste pas cette absence de mise en demeure ; qu’il s’ensuit qu’elle a méconnu les dispositions précitées en émettant un titre exécutoire à l’encontre de l’association Front national sans préalablement la mettre en demeure de procéder à la remise en état des lieux ; que le titre ainsi contesté doit être annulé et ce, sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ; » (TA Grenoble, 4 avril 2017, n°1502189). Une attention tout particulière devra donc être maintenue sur la question de l’affichage électoral sauvage et des modalités de mise en demeure, par les communes en cette période d’élections présidentielles, pendant laquelle ces dernières sont évidemment très souvent confrontées à ce type de situation.

Installations Classées : En cas d’indication de délais contradictoires au sein d’un courrier de notification, le délai le plus favorable bénéficie à l’exploitant

Par Jérémy TAUPIN – GREEN LAW AVOCATS Par un arrêt en date du 13 décembre 2016, la Cour administrative d’appel de Bordeaux a estimé (CAA de Bordeaux, 13 décembre 2016, 15BX01145) que dans le cas où le rapport d’inspection et son courrier de notification laissaient à l’exploitant un mois pour faire ses observations sans quoi il serait mis en demeure, et où le même courrier l’invitait à faire sa réponse sous 15 jours, l’administration devait respecter le délai le plus favorable pour l’exploitant. En l’espèce, une société de transport par autocar, a fait l’acquisition des éléments corporels et incorporels d’une société tierce, laquelle était notamment titulaire d’un récépissé de déclaration pour l’exploitation d’une station de distribution de carburant que le préfet de La Réunion lui avait délivré le 27 juillet 2005 au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE). Cette station-service a fait l’objet d’une visite de contrôle effectuée le 21 janvier 2013 par l’inspecteur des ICPE, visite à la suite de laquelle l’inspecteur rédigeait, le 6 février 2013, un rapport au terme duquel il proposait au préfet d’adresser à la société une mise en demeure de respecter les prescriptions générales de l’arrêté ministériel fixant les prescriptions générales applicables à ce type d’ICPE Le rapport communiqué, impartissait à l’exploitant un délai d’un mois pour adresser à l’administration le détail des actions à entreprendre en vue de se conformer à la règlementation applicable. Ce délai d’un mois figurait également dans le courrier de notification auquel était annexé le rapport de l’inspecteur des ICPE. Néanmoins, ce même courrier invitait la société à répondre aux observations formulées à son encontre dans un délai de quinze jours, sans quoi un arrêté de mise en demeure serait pris en application de l’article L. 514-5 du code de l’environnement. Le 4 mars 2013, le préfet de La Réunion mettait en demeure la société, en application de l’article L. 514-1 du code de l’environnement alors en vigueur, de déclarer à ses services le changement d’identité de l’exploitant, d’établir un plan à jour de ses installations existantes et de soumettre celles-ci à un contrôle périodique par des organismes agréées. Ainsi, le rapport et sa lettre d’accompagnement comportaient des mentions contradictoires en ce qui concerne le délai dont disposait la société pour faire valoir ses observations. La société relevait ici appel du jugement du tribunal administratif de le Saint-Denis qui a rejeté sa demande d’annulation de l’arrêté préfectoral du 4 mars 2013. La Cour note que : « dans de telles conditions, il appartient à l’administration de respecter le délai le plus favorable pour l’administré parmi ceux qu’elle mentionne. Il en résulte que le préfet de La Réunion ne pouvait, sans commettre d’irrégularité, prendre son arrêté de mise en demeure tant que le délai d’un mois, qui était mentionné aussi bien dans le rapport de l’inspecteur que dans la lettre de notification, n’était pas expiré. Il est constant que tel n’a pas été le cas dès lors que l’arrêté a été signé le 4 mars 2013, soit moins d’un mois après la notification du rapport de l’inspecteur des installations classées laquelle est intervenue, comme dit précédemment, le 8 février 2013. Par suite, l’arrêté de mise en demeure du 4 mars 2013 a été pris à l’issue d’une procédure irrégulière dès lors qu’il a privé la société START OI d’une garantie liée à la possibilité qui lui avait été laissée de présenter ses observations jusqu’au terme du délai d’un mois prévu ». Les exploitants d’ICPE seront donc bien avisés de vérifier les délais leur étant laissé pour répondre aux rapports de visite de l’inspection, notamment lorsque l’inspection préconise une mise en demeure. En tout état de cause, seul le délai le plus favorable doit être pris en compte. Cet arrêt doit être rapproché du principe selon lequel l’erreur de l’administration profite à l’administré, ce qui a déjà été rappelé par le Conseil d’Etat en ce qui concerne les conséquences de l’erreur de l’administration dans l’indication des voies et délais de recours (CE 21 décembre 2007, Groupement d’irrigation des prés de la forge et autres, n°280195).

Air – Un Etat membre de l’UE peut exiger la restitution des quotas d’émission de GES indument attribués à une entreprise (CJUE 8 mars 2017)

Par Jérémy TAUPIN- GREEN LAW AVOCATS Par un arrêt n°C‐321/15 en date du 8 mars 2017, la Cour de Justice de l’Union Européenne (ci-après « CJUE ») a estimé qu’un Etat membre peut exiger la restitution des quotas d’émission de GES (ci-après « GES ») non utilisés, et ce sans indemnité, dans le cas où ces quotas ont été attribués de manière indue au bénéficiaire, qui n’a pas respecté son obligation d’informer en temps voulu l’autorité compétente de la cessation de l’exploitation de son installation. Les faits Dans cette affaire, l’entreprise ArcelorMittal Rodange et Schifflange SA (ci-après « Arcelor ») était opposée au Grand­Duché de Luxembourg. En l’espèce, le 2 février 2008, le ministre de l’Environnement du Grand­Duché de Luxembourg avait alloué à Arcelor à titre gratuit, pour son usine sidérurgique de Schifflange (Luxembourg), un total de 405 365 quotas d’émission de GES, pour la période comprise entre le 1 er janvier 2008 et le 31 décembre 2012. Le 19 octobre 2011, l’assemblée Arcelor a décidé de suspendre l’activité de l’aciérie. Cette décision n’a pas été notifiée à l’administration luxembourgeoise. Le 22 février 2012, Arcelor a donc reçu les quotas qui lui avaient été alloués pour l’année 2012. Le 21 décembre 2012, le ministre délégué au Développement durable et aux Infrastructures a communiqué à Arcelor sa décision de modifier rétroactivement le Plan national d’allocation des quotas pour les années 2008-­2011 et d’exiger la restitution de quotas délivrés pour l’année 2012 à l’aciérie de Schifflange. Arcelor ne souhaitant pas procéder à la restitution des quotas, le ministre a enjoint à Arcelor, par un arrêté du 6 juin 2013, de restituer 80 922 quotas d’émission de GES avant le 31 juillet 2013. Arcelor a formé un recours contre cette décision devant le Tribunal administratif, qui a lui-même saisi la Cour constitutionnelle (Luxembourg) d’une demande de décision préjudicielle portant sur la conformité à la Constitution de la disposition de la loi luxembourgeoise transposant la directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 2003 établissant un système d’échange de quotas d’émission de GES dans la Communauté, disposition permettant d’exiger la restitution totale ou partielle, sans indemnité, des quotas délivrés mais non utilisés. Dans le cadre de cette procédure préjudicielle, la Cour constitutionnelle a saisi la Cour de justice du présent renvoi préjudiciel. En l’espèce, Arcelor soutenait que les quotas devaient être considérés comme des biens et non comme des autorisations administratives, et qu’il avait ainsi subi une expropriation indue, non conforme à la directive précitée.   La question préjudicielle La question préjudicielle posée à la CJUE contenait en réalité 2 points de droit. Ceux-ci étaient les suivants : La loi établissant un système d’échange de quotas d’émission de GES au Luxembourg, dans la mesure où elle permet au ministre compétent d’exiger la restitution sans indemnité totale ou partielle des quotas délivrés conformément la même loi, mais non utilisés, est­elle conforme à la directive 2003/87/CE ce plus particulièrement à l’économie du système d’échange des quotas ? Dans l’affirmative, quid de la qualification juridique de la restitution de quotas délivrés, mais non utilisés, de même que celle des quotas en eux-mêmes ? » L’appréciation de la Cour L’avocat général Manuel Campos Sanchez­Bordona, après avoir largement rappelé le cadre juridique applicable aux quotas de GES, que ce soit au sein de l’UE ou au Luxembourg, ainsi que la philosophie et le but du système, a estimé, dans ses conclusions en date du 5 juillet 2016, que « le souci d’exactitude des chiffres et des circonstances entourant les quotas répond à la volonté de l’Union d’améliorer le fonctionnement du marché, en évitant les distorsions qui résulteraient de tout doute en ce qui concerne la validité des quotas, eu égard à leur rôle de monnaie d’échange sur ce marché ». De plus, « au‑delà de l’intérêt purement économique ou mercantile du maintien de sa fiabilité et de sa solvabilité, on trouve l’objectif poursuivi par le marché en lui­-même, à savoir sa mission d’instrument de lutte contre la pollution. Garantir la concordance entre les émissions réelles et les émissions autorisées grâce aux quotas constitue, pour cette raison, une priorité impérative du système dans son ensemble » (point 65). La CJUE a largement suivi les conclusions de l’avocat général, en estimant que : “La directive 2003/87/CE doit être interprétée en ce sens qu’elle ne s’oppose pas à une législation nationale qui permet à l’autorité compétente d’exiger la restitution sans indemnité, totale ou partielle, de quotas non utilisés qui ont été indûment délivrés à l’exploitant, en conséquence de la violation par ce dernier de l’obligation d’informer en temps voulu l’autorité compétente de la cessation de l’exploitation d’une installation.  Les quotas délivrés après qu’un exploitant a cessé les activités exercées dans l’installation concernée par ces quotas, sans en avoir informé au préalable l’autorité compétente, ne peuvent être qualifiés de « quotas » d’émission, au sens de l’article 3, sous a), de la directive 2003/87“. Ainsi, la Cour ne se prononce en réalité pas sur la qualification juridique des quotas, estimant en l’espèce que les quotas indument délivrés « ne peuvent être qualifiés de quotas ». En réalité, une telle restitution implique non pas l’expropriation d’un bien qui ferait déjà partie intégrante du patrimoine de l’exploitant, mais simplement le retrait de l’acte allouant des quotas. En effet, si une installation a cessé ses activités à une date antérieure à celle de l’allocation de quotas d’émission, ces derniers ne pourront pas, de toute évidence, être utilisés en vue de comptabiliser les émissions de GES qui ne sont plus susceptibles d’être produites par celle­ci. Ainsi, l’injonction de restitution était légitime. Dans ces conditions, le défaut de restitution des quotas litigieux porterait atteinte aux exigences de comptabilité stricte, d’exactitude et de concordance entre les émissions réelles et les émissions autorisées. En effet, la CJUE rappelle, après l’avocat général, que « l’économie générale de la directive 2003/87 repose sur une stricte comptabilité des quotas délivrés, détenus, transférés et annulés, dont le cadre est fixé à l’article 19 de celle-ci. Cette comptabilité précise est inhérente à l’objet même de ladite directive, à savoir l’établissement d’un système communautaire d’échange de quotas…

Zones prioritaires pour la biodiversité : le décret est paru au JO

Par Fanny ANGEVIN- Green law avocats Le décret n°2017-176 du 13 février 2017 relatif aux zones prioritaires pour la biodiversité est paru au JO du 15 février dernier. Rappelons-nous que le projet de décret était en consultation jusqu’au 18 novembre 2016 (voir l’article sur ce blog). Le texte définitif est pris en application du II de l’article L. 411-2 du code de l’environnement qui a été introduit par l’article 74 de loi n°2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages et qui prévoit : « Un décret en Conseil d’Etat détermine également les conditions dans lesquelles, lorsque l’évolution des habitats d’une espèce protégée au titre de l’article L. 411-1 est de nature à compromettre le maintien dans un état de conservation favorable d’une population de cette espèce, l’autorité administrative peut : 1° Délimiter des zones où il est nécessaire de maintenir ou de restaurer ces habitats ; 2° Etablir, selon la procédure prévue à l’article L. 114-1 du code rural et de la pêche maritime, un programme d’actions visant à restaurer, à préserver, à gérer et à mettre en valeur de façon durable les zones définies au 1° du présent II ; 3° Décider, à l’expiration d’un délai qui peut être réduit compte tenu des résultats de la mise en œuvre du programme mentionné au 2° au regard des objectifs fixés, de rendre obligatoires certaines pratiques agricoles favorables à l’espèce considérée ou à ses habitats. Ces pratiques peuvent bénéficier d’aides lorsqu’elles induisent des surcoûts ou des pertes de revenus lors de leur mise en œuvre. » Le décret vient dont déterminer les conditions dans lesquelles le Préfet a la possibilité de mettre en place des « zones prioritaire pour la biodiversité » (ZPB), lorsque l’évolution des habitats d’une espèce protégée est de nature à compromettre le maintien dans un état de conservation favorable d’une population de cette espèce. Il convient de noter que le décret n°2017-176 a majoritairement repris les dispositions présentes dans le projet de décret, à l’exception de la définition des zones prioritaires pour la biodiversité, ce qui paraît logique étant donné que cette définition reprenait pour l’essentiel les termes de l’article L. 411-1 du code de l’environnement. En premier lieu, le décret prévoit les modalités de délimitation des zones. En effet, le décret fait valoir que les zones prioritaires pour la biodiversité sont délimitées par arrêté du préfet, qui doit être pris après avis : la commission départementale de la nature, des paysages et des sites ; du conseil scientifique régional du patrimoine naturel ; de la chambre départementale d’agriculture ; du commandant de la zone terre compétent lorsque ces zones comportent des emprises relevant du ministère de la défense. Le décret précise que les avis sont réputés rendus s’ils n’interviennent pas dans un délai de deux mois à compter de la transmission du projet. Surtout, ce ne sont que des avis simples, qui ne lient pas le Préfet. Ce sont cependant des indices qui pourront, dans un sens ou dans un autre, conduire à modifier le périmètre de la zone. En deuxième lieu, le décret prévoit également un programme d’actions pour chaque zone prioritaire pour la biodiversité. A ce titre, le décret précise que le projet de programme d’actions est élaboré par le préfet en concertation avec les collectivités territoriales et leurs groupements ainsi qu’avec les représentants des propriétaires et exploitants des terrains concernés. Il est ensuite arrêté par le préfet après la mise en œuvre d’une procédure de consultation. Là encore, le caractère consultatif de la procédure ne liera pas le Préfet. La concertation avec les propriétaires et/ou exploitants restera cependant une étape importante pour faire valoir certains arguments. Le programme arrêté définit en effet les actions que les propriétaires et exploitants sont incités à mettre en œuvre au titre des pratiques agricoles, en rapport avec l’espèce pour laquelle la zone est délimitée. Les actions précitées sont les suivantes : Maintien d’une couverture végétale du sol, permanente ou temporaire ; Travail du sol, gestion des résidus de culture, apports de matière organique ; Gestion des intrants, notamment des fertilisants, des produits phytosanitaires et de l’eau d’irrigation ; Diversification des cultures par assolement et rotations culturales ; Maintien ou création de haies ou d’autres éléments du paysage, de fossés d’infiltration et aménagements ralentissant ou déviant l’écoulement des eaux ; Restauration ou entretien d’un couvert végétal spécifique ; Restauration ou entretien de mares, plans d’eau ou zones humides. Le programme détermine également les objectifs à atteindre pour chaque action. A ce titre le décret précise que les objectifs doivent si possible être quantifiés et assortis de délais. Par ailleurs, le programme présente les moyens prévus afin d’atteindre ces objectifs. Il expose les effets escomptés sur le milieu et précise les indicateurs quantitatifs qui permettront de les évaluer. En outre, le programme rappelle les autres mesures qui sont prises au titre du code de l’environnement visant la protection de l’espèce pour laquelle la zone est délimitée. Il est également indiqué que le contenu du programme peut être précisé par arrêté. En troisième et dernier lieu, le décret prévoit des obligations nouvelles pour les agriculteurs. En effet, en fonction des résultats de la mise en œuvre du programme d’actions, le préfet pourra rendre obligatoires certaines actions en matière de pratiques agricoles, à l’expiration d’un certain délai. La décision du préfet doit être cependant prise seulement après la mise en œuvre d’une procédure de consultation. Elle doit également avoir été affichée et notifiée aux propriétaires et exploitants concernés. Enfin, il est important de noter que le décret prévoit qu’en cas de non-respect par le propriétaire ou l’exploitant d’un terrain, de l’une des actions du programme d’action rendues obligatoires, une amende de cinquième classe peut être infligée. Si le caractère dissuasif de cette peine peut poser question, c’est surtout les effets concrets que de telles zones de protection de biodiversité vont avoir sur les activités actuelles et venir de certaines parcelles qui devront être scrutées.