Urbanisme: le bénéficiaire d’un permis attaqué ne peut se prévaloir d’une date antérieure à celle mentionnée dans la déclaration d’achèvement pour opposer une irrecevabilité (CAA Lyon, 13 nov. 2014)

Par un arrêt en date du 13 novembre 2014 (CAA Lyon, 1re ch., 13 nov. 2014, n° 13LY01881), la Cour administrative d’appel de LYON considère que le bénéficiaire d’un permis de construire ne peut se prévaloir d’une date d’achèvement antérieure à celle mentionnée dans sa déclaration d’achèvement de travaux pour opposer une irrecevabilité à un requérant. C’est là une application équilibrée du texte. Rappelons que pour les décisions d’urbanisme, le délai de recours est fixé par les dispositions combinées des articles R600-2 et R600-3 du Code de l’urbanisme : Deux mois à compter de l’affichage continu de la décision sur le terrain, Un an à compter de l’achèvement de la construction faute de preuve de l’affichage. L’article R600-3 du code de l’urbanisme prévoit en effet qu’aucune action en vue de l’annulation d’une autorisation d’urbanisme n’est recevable à l’expiration d’un délai d’un an à compter de l’achèvement de la construction ou de l’aménagement. Cette disposition, applicable aux recours introduits à compter du 1er octobre 2007, précise que la date de cet achèvement est celle de la réception en mairie de la déclaration d’achèvement mentionnée à l’article R462-1 du code de l’urbanisme, sauf preuve contraire. En l’espèce, le ministre de l’égalité des territoires et du logement ainsi que la société, bénéficiaire du permis de construire attaqué soutenaient qu’il devait être opposé un délai de forclusion au demandeur à l’instance. A l’appui de ses prétentions, la société indiquait que si la déclaration d’achèvement et de conformité des travaux mentionnait la date du 10 novembre 2009 et reçue en mairie le 24 novembre 2009, il n’en demeurait pas moins que les travaux avaient été terminés bien avant cette date. Saisie du litige, la Cour administrative d’appel de LYON censure cette argumentation et rappelle:  « Considérant toutefois que le ministre de l’égalité des territoires et du logement et la société X soutiennent que doit être opposé à ces conclusions le délai de forclusion d’un an prévu par l’article R. 600-3 du code de l’urbanisme ; qu’aux termes de cet article : ” Aucune action en vue de l’annulation d’un permis de construire ou d’aménager ou d’une décision de non-opposition à une déclaration préalable n’est recevable à l’expiration d’un délai d’un an à compter de l’achèvement de la construction ou de l’aménagement. / Sauf preuve contraire, la date de cet achèvement est celle de la réception de la déclaration d’achèvement mentionnée à l’article R. 462-1. ” ; qu’aux termes de ce dernier article : ” La déclaration attestant l’achèvement et la conformité des travaux est signée par le bénéficiaire du permis de construire (…) ou par l’architecte ou l’agréé en architecture, dans le cas où ils ont dirigé les travaux. / Elle est adressée par pli recommandé avec demande d’avis de réception postal au maire de la commune ou déposée contre décharge à la mairie. (…). / Le maire transmet cette déclaration au préfet lorsque (…) le permis a été pris au nom de l’Etat (…). ” ; Considérant qu’il résulte de la combinaison de ces dispositions que, lorsqu’une autorisation de construire relative à des travaux achevés à compter du 1er octobre 2007 est contestée par une action introduite à compter de la même date, celle-ci n’est recevable que si elle a été formée dans un délai d’un an à compter de la réception par le maire de la commune de la déclaration attestant l’achèvement et la conformité des travaux ; qu’une telle tardiveté ne peut être opposée à une demande d’annulation que si le bénéficiaire de l’autorisation produit devant le juge l’avis de réception de la déclaration prévue par les dispositions précitées de l’article R. 462-1 du code de l’urbanisme ; que, pour combattre la présomption qui résulte de la production par le bénéficiaire de cet avis de réception, le demandeur peut, par tous moyens, apporter devant le juge la preuve que les travaux ont été achevés à une date postérieure à celle de la réception de la déclaration ; Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que la déclaration attestant l’achèvement et la conformité des travaux, qui indique comme date d’achèvement des travaux le 10 novembre 2009, a été reçue en mairie le 24 novembre 2009 ; que, si la société X soutient que les travaux ont en réalité été terminés avant la date ainsi indiquée, le bénéficiaire de l’autorisation ne peut toutefois se prévaloir d’une date antérieure à celle mentionnée dans sa propre déclaration ; que, par suite, la demande devant le tribunal administratif de Grenoble ayant été enregistrée le 8 novembre 2010, soit moins d’un an après ladite date du 24 novembre 2009, la forclusion prévue par l’article R. 600-3 précité du code de l’urbanisme ne peut être opposée à M.D… ;». Cet arrêt est intéressant puisqu’il rappelle que la date figurant sur la déclaration d’achèvement et de conformité des travaux et son accusé de réception en mairie constitue le point de départ du délai prévu par l’article R600-3 du code de l’urbanisme. Surtout, on retiendra que la cour censure le bénéficiaire de l’autorisation d’urbanisme qui soutenait que la date d’achèvement des travaux est antérieure à celle indiquée dans sa déclaration. Notant toutefois que pour combattre la présomption qui résulte de la production par le bénéficiaire de cet avis de réception, le demandeur à l’action peut pour sa part et par tous moyens, apporter devant le juge la preuve que les travaux ont été achevés à une date postérieure à celle de la réception de la déclaration (CE, 6 déc. 2013, n° 358843). C’est dire que la présomption simple de la date d’achèvement de l’installation, qui peut être renversée par toute preuve contraire aux termes de l’article R 600-3 du code de l’urbanisme, ne bénéficie en réalité qu’au requérant, et non à celui qui a obtenu le permis. Ce déséquilibre qui peut paraitre injuste à première vue, s’explique selon nous par le fait que la déclaration d’achèvement de travaux est présumée porter sur des faits exacts (c’est à dire que la construction n’est pas censée avoir été achevée avant ou après la date indiquée). Admettre  que la présomption de…

La durée de validité des autorisations d’urbanisme à nouveau allongée, mais de façon temporaire (décret du 29 décembre 2014)

Le 29 août 2014, le Premier ministre Manuel Valls, et la Ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité, Sylvia Pinel, ont présenté un plan de relance du logement visant à : Libérer le foncier privé ; Augmenter l’offre de logements neufs intermédiaires et sociaux ; Favoriser l’acquisition de logements neufs ; Améliorer l’habitat ; Poursuivre la simplification des normes de construction ; Simplifier et recentrer les dispositions de la loi Alur. Le dossier de presse de ce plan de relance peut être consulté ici. Afin d’atteindre son objectif de poursuite de la simplification des normes de construction, ce plan de relance prévoyait notamment de prolonger les délais de validité des permis de construire de deux à trois ans, dès cet automne. Le calendrier semble avoir pris légèrement du retard mais la prolongation des délais de validité des permis de construire est désormais actée depuis un décret du 29 décembre 2014, publié dès le lendemain au Journal Officiel de la République Française (décret n°2014-1661 du 29 décembre 2014 prolongeant le délai de validité des permis de construire, des permis d’aménager, des permis de démolir et des décisions de non-opposition à une déclaration préalable). Ce décret s’adresse à un public très large dans la mesure où il concerne : l’Etat, les collectivités territoriales, les particuliers, les entreprises et enfin les professionnels de l’aménagement et de la construction, c’est-à-dire toutes les personnes concernées par la relance de la construction de logements. Il a pour objet d’allonger la durée de validité des permis de construire, d’aménager ou de démolir et des décisions de non-opposition à une déclaration. Notons à cet égard qu’il n’est plus question de prolonger la seule validité des permis de construire, comme annoncé dans le dossier de presse communiqué à la fin du mois d’août 2014. Le décret prévoit que le délai de validité des permis de construire, d’aménager ou de démolir et des décisions de non-opposition à une déclaration est porté à trois ans au lieu de deux ans. Cette prolongation est automatique et n’a nul besoin d’être demandée par le pétitionnaire (contrairement à la prolongation qui peut être demandée, mais n’est pas automatique pour les permis éoliens, voir notre analyse ici). Cette prolongation de la durée de validité des autorisations n’est que temporaire. En effet, le régime prévu par le décret du 29 décembre 2014 est provisoire dans la mesure où il concerne les autorisations d’urbanisme (ou de non opposition à déclaration) actuellement en cours de validité et celles qui interviendront au plus tard le 31 décembre 2015. Il est donc valable uniquement un an. Rappelons qu’un régime assez similaire avait été prévu par le décret n° 2008-1353 du 19 décembre 2008 prolongeant le délai de validité des permis de construire, d’aménager ou de démolir et des décisions de non-opposition à une déclaration préalable (aussi appelé décret “anti-crise”). Les dispositions auxquelles il est dérogé par le décret du 29 décembre 2014 sont les premier et troisième alinéas de l’article R.* 424-17 et à l’article R.* 424-18 du code de l’urbanisme. A cet égard, il convient de rappeler les dispositions de ces articles.  L’article R.*424-17 du code de l’urbanisme dispose : « Le permis de construire, d’aménager ou de démolir est périmé si les travaux ne sont pas entrepris dans le délai de deux ans à compter de la notification mentionnée à l’article R. 424-10 ou de la date à laquelle la décision tacite est intervenue. Il en est de même si, passé ce délai, les travaux sont interrompus pendant un délai supérieur à une année. Les dispositions du présent article sont applicables à la décision de non-opposition à une déclaration préalable lorsque cette déclaration porte sur une opération comportant des travaux. » Aux termes de l’article R.*424-18 du code de l’urbanisme : « Lorsque la déclaration porte sur un changement de destination ou sur une division de terrain, la décision devient caduque si ces opérations n’ont pas eu lieu dans le délai de deux ans à compter de la notification mentionnée à l’article R*424-10 ou de la date à laquelle la décision tacite est intervenue. Il en est de même lorsque la déclaration ne comporte pas de travaux et porte sur l’installation d’une caravane en application du d de l’article R*421-23 ou sur la mise à disposition des campeurs de terrains ne nécessitant pas de permis d’aménager en application de l’article R*421-19. »   Il ressort de la lecture du décret que le deuxième alinéa de l’article R.*424-17 du code de l’urbanisme que ne sont pas concernées par une augmentation du délai de deux à trois ans les opérations qui font l’objet d’une interruption de travaux supérieure à un an. En outre, le décret du 29 décembre 2014 précise que le régime transitoire ne fait pas obstacle à la prorogation de ces autorisations dans les conditions définies aux articles R.* 424-21 à R.* 424-23 du même code. Il est, par conséquent, toujours possible d’obtenir des prorogations sur demande, conformément à ces textes. Certaines de ces prorogations sont d’ailleurs bien plus intéressantes que celle autorisée par le présent décret dans la mesure où, à titre d’exemple, pour les éoliennes, la demande de prorogation peut être présentée, tous les ans, dans la limite de dix ans à compter de la délivrance de l’autorisation (article R.*424-21 du code de l’urbanisme, alinéa 2). Enfin, lorsque les autorisations concernées par le décret du 29 décembre 2014 ont fait l’objet, avant cette date, d’une prorogation dans les conditions définies aux articles R.* 424-21 à R.* 424-23, le délai de validité résultant de cette prorogation est majoré d’un an. En conclusion, en premier lieu, en dépit du but louable dans lequel le décret s’inscrit, le plan de relance du logement, il n’est pas certain qu’il parvienne à atteindre son objectif de poursuite de la simplification des normes de construction. En effet, le décret du 29 décembre 2014 ajoute un régime dérogatoire et provisoire à un régime existant ce qui ne simplifie guère la situation actuelle. Le gouvernement est coutumier des faits comme en témoigne le nouveau régime des décisions implicites (le silence valant désormais acceptation) qui…

Urbanisme / construction d’une maison dont le chantier est abandonné : attention à la péremption du permis en application de l’article L480-4 du code de l’urbanisme !

Par une réponse ministérielle en date du 16 septembre 2014 (réponse ministérielle, 16 septembre 2014 suite à la Question écrite n°62840 de la Députée Marie-Jo ZIMMERMANN), le ministre de l’écologie rappelle que le permis de construire est périmé si les travaux sont interrompus pendant un délai supérieur à une année, de sorte que les travaux déjà exécutés avant l’abandon du chantier peuvent être constitutifs d’une infraction pénale devant être constatés par l’établissement d’un procès-verbal dans les conditions prévues par l’article L480-1 du code de l’urbanisme. Rappelons que la réponse du ministre de l’écologie repose sur l’interprétation qui doit être faite de l’article R424-17 du code de l’urbanisme, lequel prévoit que : Le permis de construire est périmé si les constructions ne sont pas entreprises dans le délai de 2 ans à compter de la notification visée à l’article R421-34 du code de l’urbanisme ou de la délivrance tacite du permis de construire ; Le permis est également périmé si les travaux sont interrompus pendant un délai supérieur à une année. La jurisprudence rendue en la matière rappelle que les deux causes de caducité ne sont absolument pas liées. Le Conseil d’État considère ainsi que l’interruption des travaux pendant une durée de plus d’un an rend caduc le permis de construire alors même que le délai de 2 ans n’est pas expiré (CE, 8 nov. 2000, n° 197505). Attention donc au début de travaux avant l’expiration du délai de deux ans qui seraient ensuite interrompus pendant plus d’une année. Les nombreux jugements et arrêts permettent de se rendre compte que les juges apprécient souverainement la notion de “commencement de travaux” ou celle “d’interruption des travaux” au sens des dispositions du code de l’urbanisme : Un permis de construire est ainsi considéré comme périmé dès lors que les travaux ont commencé mais ont été interrompus depuis plus de deux ans dans la mesure où un permis a été accordé pour 500 maisons individuelles mais qu’en 4 ans il n’a été construit qu’un pavillon (CE, 2 déc. 1987, n° 56789) ou encore lorsque seuls des travaux de terrassement et quelques travaux de débroussaillement et de défrichement ont été effectués quelques jours seulement avant le délai de validité du permis (CE, 21 juin 2002, n° 211864). Un permis de construire dont le chantier est interrompu depuis plus d’un an est ainsi considéré comme périmé dès lors que l’on constate l’arrêt du chantier pendant plus d’un an après l’arasement de l’ancien bâtiment (CE, 8 nov. 2000, n° 19750). La réponse ministérielle du 16 septembre 2014 est aussi l’occasion de rappeler la procédure de constatations des infractions prévue par le code de l’urbanisme. On rappellera brièvement que :  Les infractions aux dispositions concernant le permis de construire sont constatées par tous officiers ou agents de police judiciaire ainsi que par tous les fonctionnaires et agents de l’État et des collectivités publiques commissionnés à cet effet par le maire ou le ministre chargé de l’Urbanisme, suivant l’autorité dont ils relèvent, et assermentés (C. urb., art. L. 480-1, al. 1er et R. 480-3) ; Lorsque l’autorité administrative et, au cas où il est compétent pour délivrer les autorisations, le maire ou le président de l’EPCI compétent ont connaissance d’une infraction de la nature de celles que prévoit l’article L. 480-4, ils sont tenus d’en faire dresser procès-verbal (C. urb., art. L. 480-1, al. 3) ; Sur sa forme, le procès-verbal doit contenir la date, le lieu et la nature de l’infraction, la référence aux textes de loi concernés. Plans et photos peuvent être annexés au PV. Les procès-verbaux dressés par les agents autorisés font foi jusqu’à preuve contraire (C. urb., art. L. 480-1, al. 1er). Copie du procès-verbal constatant une infraction est transmise sans délai au ministère public (C. urb., art. L. 480-1, al. 4). Une vigilance particulière doit donc être portée par les maîtres d’ouvrages sur les risques de péremption de permis de construire et notons enfin qu’aucun délai n’est imparti au maître d’ouvrage pour achever les travaux. Par ailleurs, rappelons qu’il est envisageable d’échelonner les travaux dans le temps à la double condition : – Que l’interruption soit inférieure à un an ; – Que les travaux exécutés d’une année sur l’autre soient suffisamment importants pour ne pas être considérés par la juridiction administrative comme un simulacre destiné à éviter la péremption.     Aurélien BOUDEWEEL Avocat

Inondations … Attention les Ministres sortent les parapluies ! (instructions ministérielles du 22 sept. et 6 oct. 2014)

Le Gouvernement semble très mal à l’aise sur la question de la gestion du risque inondation dans les zones à risque. Il s’agit pourtant d’une question au cœur de l’actualité : en effet, le procès « Xynthia » est actuellement en délibéré, le bilan à mi-parcours du plan « Submersions rapides » vient d’être dressé et les récentes inondations dans le sud de la France ont encore fait des victimes… Le Gouvernement encourt un risque de voir sa responsabilité engagée pour carence fautive dans les zones où il existe un risque d’inondation. Afin de se couvrir, il a sorti les parapluies : deux instructions ministérielles sont venues donner des consignes aux Préfets afin qu’ils agissent de façon à ne pas pouvoir se faire reprocher une quelconque carence dans la gestion du risque inondation. La première instruction ministérielle date du 22 septembre 2014. Elle émane de Madame la Ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. Cette instruction ministérielle est relative aux thèmes prioritaires d’actions nationales en matière de risques naturels et hydrauliques pour 2014-2015. Comme l’indique son titre, elle a pour objectif d’établir des priorités d’actions pour les deux années à venir, dans le domaine de la prévention des risques naturels et hydrauliques. Le titre de cette instruction est d’ailleurs un peu trompeur dans la mesure où l’instruction concerne essentiellement le risque d’inondations. Elle établit des priorités pour « assurer le meilleur fonctionnement possible des services de prévision des crues et d’hydrométrie et des services de contrôle de sécurité des ouvrages hydrauliques ». L’instruction prévoit en outre des actions prioritaires sur quatre thèmes : –        la poursuite de la mise en œuvre de la directive européenne 2007/60/CE du 23  octobre  2007 relative à l’évaluation et à la gestion des risques d’inondation, afin de mieux identifier les territoires prioritaires et de faire émerger les stratégies des acteurs locaux ; –        l’accompagnement des projets portés par les collectivités territoriales, notamment les programmes de travaux de confortement des digues pour les territoires touchés par la tempête Xynthia ; –        la poursuite de l’élaboration des plans de prévention des risques naturels (PPRn) sur les secteurs à forts enjeux, en terminant notamment l’élaboration des PPR littoraux prioritaires ; –        l’accompagnement des collectivités dans la mise en œuvre du volet prévention des inondations de la compétence GEMAPI (gestion des eaux et des milieux aquatiques et prévention des inondations) créée par la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’information des métropoles. Hormis le risque inondation, cette instruction rappelle qu’il faut également tenir compte des autres risques naturels. A cet égard, elle invite les Préfets à mettre en œuvre une gouvernance partenariale avec les différents acteurs de la prévention des risques naturels et insiste sur le partage impératif des informations sur les risques naturels entre les différents acteurs. Elle ajoute que les projets d’urbanisme importants doivent être exemplaires en ce qui concerne la gestion des risques et que des priorités locales peuvent être établies. Enfin, Madame le Ministre attire l’attention des préfets sur l’une des recommandations du rapport d’évaluation à mi-parcours du plan « submersions rapides » concernant la responsabilité de l’Etat dans les campings à risque. Pour ces campings, elle souligne qu’il est nécessaire d’adopter des plans d’actions en insistant sur le fait que les situations les plus critiques peuvent aboutir à la fermeture. Elle rappelle à cet effet que la mise en œuvre de cette action leur avait été demandée par une lettre du 17 février 2011 et une circulaire interministérielle du 7 avril 2010. C’est sur ce point que les parapluies sont grands ouverts : l’instruction ministérielle mentionne en effet très clairement la responsabilité de l’Etat dans les campings à risque et la nécessité d’agir pour éviter tout dommage. La seconde instruction ministérielle date du 6 octobre 2014. Elle émane de Madame la Ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie et de Monsieur le Ministre de l’Intérieur. Cette instruction est relative à l’application de la réglementation spécifique aux terrains de camping et de caravanage situés dans les zones de submersion rapide. Elle tire le bilan de l’évaluation à mi-parcours du plan de « submersions rapides » et vient compléter l’instruction du mois de septembre sur cette question.  Elle a pour objet de rappeler la réglementation relative aux terrains de camping et de caravanage situés dans les zones à risque prévisible. A cet égard, elle exige le recensement de l’ensemble des campings situés en zone à risque. Pour les campings existants, elle demande que soit vérifié le respect des prescriptions d’information, d’alerte et d’évacuation arrêtées en application de l’article L. 443-2 du code de l’environnement. Cette instruction impose également aux Préfets de département de vérifier la validité des autorisations accordées. Outre ces mesures, elle insiste sur la nécessité de prendre en compte les autres risques naturels et technologiques lors de l’instruction du permis d’aménager et du contrôle de légalité. Elle précise également les conditions d’évacuation des campings dans les zones à risque lorsque la vigilance orange ou rouge pour crue est déclenchée. Par ailleurs, elle invite les gestionnaires de camping à prendre en compte ses recommandations en présence d’un risque de tempête (élagage des arbres, surveillance, regroupement des campeurs dans des abris en dur). Elle demande aussi à ce que des inspections des campings soient réalisées. Enfin, un modèle de cahier des prescriptions est annexé à cette instruction. Ce modèle comporte plusieurs rubriques : –        sur les risques existants ; –        sur les mesures d’information ; –        sur les dispositifs d’alerte ; –        sur la procédure d’évacuation et de mise à l’abri ; –        sur le rôle du gestionnaire du camping. Les gestionnaires des campings se voient donc imposer de nombreuses mesures de prévention des risques, à croire que ce sont eux les responsables des dommages causés par les inondations. Certes, ils ont demandé l’autorisation d’implanter un camping dans une zone à risque. Cependant, l’autorisation est, in fine, délivrée par l’administration, sous le contrôle du Préfet. Il est assez maladroit pour l’Etat d’imposer de nombreuses obligations aux gestionnaires des campings existants alors qu’il peut être considéré que c’est lui, à l’origine, qui a commis une faute en ne s’opposant…

Contentieux administratif des antennes relais : ce qu’il reste à démontrer.

La position du Conseil d’Etat en la matière est déormais assez bien fixée (cf. par ex.CE, 2ème et 7ème sous-sections réunies, 21/10/2013, 360481) depuis qu’il admet l’opposabilité du principe de précaution aux autorisations d’urbanisme (CE 19 juill. 2010, Assoc. du quartier Les Hauts de Choiseul, req. no 328687: AJDA 2010. 1453, note Y. J.; AJDA 2010. 2114, note Dubrulle; Constitutions 2010, no 4, p. 107, note Carpentier; Envir. 2010, no 135, note Trouilly; Dr. envir. 2010, no 185, p. 396, note Duhamel; JCP A 2011, no 2119, note Billet – CE 8 oct. 2012, Cne de Lunel, req. no 342423: Dr. envir. 2012. 333). Elle vient d’être rappelée par une espèce lue le 27 août 2014 ( n°364525), le juge considérant que “s’il appartient à l’autorité administrative compétente de prendre en compte le principe de précaution, énoncé par l’article 5 de la Charte de l’environnement et auquel se réfère l’article L. 110-1 du code de l’environnement, lorsqu’elle se prononce sur l’octroi d’une autorisation délivrée en application de la législation sur l’urbanisme, les dispositions de l’article 5 de la Charte ne permettent pas, indépendamment des procédures d’évaluation des risques et des mesures provisoires et proportionnées susceptibles, le cas échéant, d’être mises en œuvre par les autres autorités publiques dans leur domaine de compétence, de refuser légalement la délivrance d’une autorisation d’urbanisme en l’absence d’éléments circonstanciés sur l’existence, en l’état des connaissances scientifiques, de risques, même incertains, de nature à justifier un tel refus d’autorisation“. Et l’on sait que le maire ne peut pour cette même raison et eu égard à la police spéciale des télécommunications qui lui échappe interdire sur le territoire de sa commune, fut-ce au nom de la police générale, les antennes relais (CE , ass., 26 oct. 2011, Cne de Saint-Denis, req. no 326492: AJDA 2011. 2039, note Grand; AJDA 2011. 2219, Chron. Stahl et Domino; Dr. envir. 2011. 316; RD publ. 2013. 477, chron. Pauliat. – CE , ass., 26 oct. 2011, Cne de Pennes-Mirabeau, req. no 329904: AJDA 2011. 2219, chron. Stahl et Domino – CE , ass., 26 oct. 2011, SFR, req. no 341767: AJDA 2011. 2039, note Grand). Très prudemment la Haute juridiction garde donc une position contingente sur l’absence de nocivité des antennes et pour ainsi dire fixée jusqu’à preuve du contraire. Pour cette seule raison les justiciables exposés ne doivent certainement pas renoncer à se réclamer du principe de précaution qui, en cours d’instance, peut toujours trouver à s’appliquer si la sciences livre des études répliquées moins favorables aux opérateurs. L’arrêté commenté démontre par ailleurs que demeurent  à juger ces deux moyens qui nous semblent fort pertinents et en particulier le deuxième qui est affaire d’espèce : “si le requérant fait valoir que le respect du principe de précaution exigerait également la réalisation d’un bilan des coûts et des avantages d’une bonne couverture du territoire par le réseau de téléphonie mobile au regard des risques sanitaires et environnementaux, la délivrance d’une information sincère, complète et continue aux riverains de l’antenne relais et l’organisation d’une consultation du public, le tribunal ne s’est pas prononcé sur ces questions, qui n’étaient pas soulevées devant lui et qu’il n’avait pas à examiner d’office. Par suite, le requérant ne peut utilement se prévaloir de ce que le principe de précaution impliquerait le respect de telles exigences procédurales pour soutenir que le tribunal aurait commis une erreur de droit et inexactement qualifié les faits de l’espèce“. Rappelons au demeurant que l’implantation de l’antenne relais peut également être discutée sur le terrain de son intégration paysagère en vertu de l’article R. 111-21, le Conseil d’Etat l’ayant encore rappelé dans son arrêt précité du 21 octobre 2013 : “Considérant, en troisième lieu, que l’article R. 111-21 du code de l’urbanisme permet de s’opposer à un projet : ” si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l’aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l’intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu’à la conservation des perspectives monumentales ” ; qu’il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que le projet d’installation en cause, qui a fait l’objet d’un traitement particulier, qui s’inscrit dans un environnement urbain et qui n’est pas situé dans le champ de visibilité de ” la tour aux figures ” de Dubuffet ou de l’église Notre Dame des Pauvres, serait de nature à porter atteinte au caractère ou à l’intérêt des lieux avoisinants ; que, dès lors, le maire d’Issy-les-Moulineaux ne pouvait légalement s’opposer aux travaux déclarés pour ce motif “