Maire et prise illégale d’intérêts : la protection fonctionnelle, c’est non !

Maire et prise illégale d’intérêts : la protection fonctionnelle, c’est non !

Par Mathieu DEHARBE, juriste (Green Law Avocats)

Par un arrêt n°22-82.229 du 8 mars 2023, la Cour de cassation juge qu’un maire poursuivi pénalement pour prise illégale d’intérêt ne peut bénéficier de la protection fonctionnelle et obtenir à ce titre le remboursement de ses frais d’avocat.

Le juge administratif des référés et le COVID-19 : maigre bilan pour la suspension !

Par Maître David DEHARBE (Green Law Avocats) En cette période de crise sanitaire où l’on ne peut constater que le Conseil d’Etat n’est guère enclin à suspendre les mesures d’exceptions prises par le Gouvernement, on se rassure de retrouver le juge administratif dans son rôle de gardien des libertés publiques au moins contre le risque d’arbitraire des édiles locaux ! Certes nos Conseillers d’Etats semblent particulièrement dévoués à la vision que se fait l’exécutif et ses administrations déconcentrées de la bonne façon de gérer la crise sanitaire. D’abord ce sont les demandes d’injonction de mesures incombant à l’Etat pour mieux protéger les libertés publiques de citoyens qui sont finalement rejetées in abstracto par le juge des référés au Conseil d’Etat (CE ord. 4 avril 2020, Mme E. et autres, n° 439816). Certains ont voulu d’emblée durcir le confinement en sollicitant du Conseil d’Etat qu’il enjoigne au premier Ministre de prendre les mesures suivantes : – isolement et mise en quarantaine systématique de tous les nouveaux arrivants sur le territoire ; – mise en place des dépistages au départ dans les aéroports et les ports internationaux, tout en réduisant au minimum les perturbations du trafic international ; – fourniture de masques et de matériels de santé nécessaires pour la lutte contre l’épidémie en quantité et en qualité au personnel de santé dans les plus brefs délais ; – instauration d’un couvre-feu sur l’ensemble du territoire à compter de 22 heures jusqu’à 5 heures du matin, sauf pour des motifs qui devront être précisés, notamment pour la continuité des services publics ; – réquisition de tous locaux nécessaires à la protection et au confinement de l’ensemble des personnes sans domicile fixe sur tout le territoire ; – mise en place de points de contrôle dans les grands axes des villes, au besoin en recourant à l’armée ; – mise en quarantaine systématique des récidivistes contrevenant aux règles de confinement ; – réquisition des hôtels ou de tout bâtiment pouvant offrir des conditions d’hébergement dignes pour les personnels soignants et l’ensemble des agents publics particulièrement exposés aux personnes contaminées à proximité des hôpitaux privés ou publics, ou des cliniques ; – confinement strict des personnels soignants ; – organisation pour le personnel hospitalier des tests généralisés et automatiques en vue de lutter efficacement contre la pandémie à l’hôpital ; – organisation d’un service d’acheminement de la nourriture et des produits de première nécessité dans les hôpitaux afin de permettre aux personnels soignants de ne pas sortir de l’hôpital pour réaliser ces achats ; – prise en charge, aux frais de l’Etat, du coût de l’ensemble de ces mesures ; – mise en place dans chaque hôpital ou clinique d’une télé-cérémonie funéraire pour les proches d’un patient décédé du coronavirus et d’une prise en charge des frais funéraires par l’Etat ; – interdiction des rassemblements de plus de deux personnes ; – mise à disposition de tous les hôpitaux du matériel adéquat pour assurer la possibilité des proches de rester en contact visuellement avec leurs proches ; Mais pour le Conseil d’Etat « les requérants ne peuvent utilement se prévaloir à ce titre de l’atteinte susceptible d’être portée aux libertés fondamentales qu’ils invoquent au motif qu’un confinement insuffisamment rigoureux risquerait de durer plus longtemps ». Plus largement toutes les tentatives en référé pour obtenir une censure des décisions administratives prises par l’Etat au titre de la crise sanitaire ont été vaines ou presque. C’est ainsi sans succès que le Syndicat des avocats de France, d’une part, et l’Union des jeunes avocats de Paris, de l’Association des avocats pénalistes et du Conseil national des barreaux, d’autre part, demandaient de suspendre l’exécution des plusieurs dispositions de l’ordonnance n° 2020-303 du 25 mars 2020 ainsi que l’exécution de la circulaire du 26 mars 2020 (CE ord. 3 avril 2020, Syndicat des avocats de France, n° 439894 ; CE ord. 3 avril 2020, Union des jeunes avocats de Paris et autre, n° 439877). On demeure néanmoins très dubitatif de voire le Conseil d’Etat juger que les articles 13 et 14 de l’ordonnance qui dérogent à la présence de l’avocat durant une garde à vue ou une rétention douanière ainsi que la prolongation de la durée des gardes à vue, y compris de mineurs « ne portant, eu égard aux circonstances actuelles, pas d’atteinte manifestement illégale à une liberté fondamentale »… D’ailleurs la tentation des tribunaux administratifs d’enjoindre à l’Etat de prendre des mesures auxquelles il se refuse ne passe pas au Conseil d’Etat. Ainsi le syndicat de l’Union générale des travailleurs de Guadeloupe (UGTG) avait obtenu des juges des référés du tribunal administratif de Guadeloupe qu’il soit enjoint au centre hospitalier universitaire et à l’agence régionale de la santé de la Guadeloupe de passer commande de tests de dépistage du Covid-19 et des doses nécessaires au traitement de l’épidémie de Covid-19 par l’hydroxychloroquine et l’azithromycine, comme défini par l’IHU Méditerranée infection, pour être capable de diagnostiquer et traiter la population guadeloupéenne. Mais par une ordonnance du 4 avril 2020, le juge des référés du Conseil d’Etat (CE ord. 4 avril 2020, Centre hospitalier universitaire de la Guadeloupe et autre, n° 439904) a affirmé que si l’autorité administrative est en droit, lorsque des incertitudes subsistent quant à l’existence ou à la portée de risques pour la santé des personnes, de prendre des mesures de protection sans avoir à attendre que la réalité et la gravité de ces risques soient pleinement démontrées, en revanche, l’existence de telles incertitudes fait, en principe, obstacle à ce que soit reconnue une atteinte grave et manifestement illégale d’une liberté fondamentale, justifiant que le juge des référés fasse usage de ses pouvoirs. Même si l’ordonnance rendue au Palais royal est particulièrement motivée, le risque que l’on fait prendre à la population locale depuis paris expose sans doute moins celui qui juge … Et d’ailleurs les conseillers d’Etat sont pour ainsi dire obéis. Ainsi le juge des référés du Tribunal administratif de Marseille juge par une ordonnance du 6 avril 2020, considère qu’il n’y a pas de carence dans la constitution de…

Municipales 2020 : premier tour d’horizon des règles applicables

Par Maître Lucas DERMENGHEM (Green Law Avocats) Le rôle des communes et des intercommunalités dans la gestion au quotidien des questions environnementales n’est plus à démontrer. Les maires tentent de se saisir des questions sanitaires contemporaines via la police générale ; les communes et les EPCI planifient la gestion des sols et les déplacements urbains, gèrent des services public à objet environnemental (collecte et traitement des déchets, distribution de l’eau, assainissement). Les maires et les intercommunalités sont encore des facilitateurs de l’implantation des Enr. Les élections municipales approchent, et auront lieu le dimanche 15 mars 2020 pour le premier tour et le dimanche 22 mars 2020 pour le second. Les environnementalistes doivent être très attentifs à la formation des nouvelles majorités locales. Nul doute que ces élections occasionneront de nouveau un abondant contentieux. Le cabinet GREEN LAW AVOCATS se propose par une série d’articles sur son blog de dresser un tour d’horizon des principes traditionnels et des règles nouvelles qui régiront cette prochaine consultation. Dans l’immédiat rappelons les règles encadrant les candidatures (I°) et les principes   applicables aux scrutins (II°). I – Sur les règles applicables aux candidats aux élections municipales L’élection à la fonction de conseiller municipal suppose de réunir cinq conditions cumulatives : Etre de nationalité française ou ressortissant de l’Union européenne ; Avoir 18 ans révolus au jour du scrutin ; Etre électeur de la commune ou inscrit au rôle des contributions directes de la commune ou justifier devoir y être inscrit au 1er janvier 2020 ; Etre candidat dans une seule circonscription électorale ; Avoir satisfait aux obligations militaires. Les ressortissants de l’Union européenne ont ainsi la possibilité d’être élus au sein d’un conseil municipal. Ils ne peuvent en revanche prétendre à devenir maire ou adjoint et ne participent pas à la désignation des électeurs sénatoriaux et à l’élection des sénateurs. En ce sens, le « Brexit » aura un effet direct sur les ressortissants britanniques résidant en France, qui ne pourront plus voter ou de présenter aux élections municipales. Notons que pour les élections municipales de 2020, la réglementation impose désormais que chaque candidat fournisse une mention manuscrite marquant son engagement : la déclaration de candidature. Cette disposition, applicable dans chaque commune quelle que soit sa taille, a pour objet d’éviter que des candidats puissent être enrôlés malgré eux sur des listes. Une nuance toutefois : la déclaration de candidature est valable pour les deux tours dans les communes de moins de 1000 habitants et devra à l’inverse être renouvelée au second tour dans les communes de plus de 1000 habitants. De plus, chaque élection municipale connaît son lot d’inéligibilités et d’incompatibilités, dont le régime juridique est régulièrement modifié par le législateur. Sur ce point, il convient de rappeler que les inéligibilités interdisent à la personne concernée de se présenter à l’élection alors que les incompatibilités obligent les candidats à faire un choix entre leur mandat et la fonction incompatible avec celui-ci. L’inéligibilité doit être distinguée selon qu’elle s’attache à la personne ou à sa fonction : Parmi les cas d’inéligibilité tenant à la personne, on peut par exemple mentionner les conseillers municipaux ayant refusé de remplir une des fonctions qui leur sont dévolues et déclarés démissionnaires par le tribunal administratif dans l’année qui suit la notification de cette décision (cf. art. L235 du code électoral) ; Parmi les cas d’inéligibilité tenant à la fonction, citons par exemple l’article L231 du code électoral, qui empêche un certain nombre de professionnels d’être élus conseillers municipaux dans les communes situées dans le ressort où ils exercent ou ont exercé leurs fonctions depuis moins de six mois (magistrats des cours d’appel, membres des tribunaux administratifs et des chambres régionales des comptes, magistrats des tribunaux de grande instance et d’instance, fonctionnaires des corps actifs de la police nationale, etc.) ; S’agissant des incompatibilités affectant les candidats aux élections municipales, celles-ci sont définies par les articles L46 et L237 et suivants du code électoral. A titre d’exemple, nul ne peut cumuler plus des deux mandats électoraux suivants : conseiller régional, conseiller à l’Assemblée de Corse, conseiller départemental, conseiller de Paris, conseiller à l’assemblée de Guyane, conseiller à l’assemblée de Martinique, conseiller municipal (cf. art. L46-1 du code électoral). Mais cette incompatibilité est « régularisable » puisque la personne concernée bénéficie d’un délai de trente jours à compter de la date de l’élection pour démissionner de l’un des mandats qu’il détenait antérieurement. Autre exemple d’incompatibilité : le mandat de conseiller municipal est incompatible avec l’exercice d’un emploi salarié au sein du centre communal d’action sociale (C.C.A.S) de la commune (cf. art. L237 du code électoral). II – Sur les règles applicables aux scrutins Avant d’évoquer le mode de scrutin, dont les modalités varient selon le nombre d’habitants de la commune, il convient de s’attarder sur les nouvelles règles applicables à l’ensemble des municipalités. Outre la règle de la déclaration de candidature susmentionnée, les élections municipales seront pour la première fois concernées par la comptabilisation du vote blanc. Cette nouveauté électorale est issue de la loi n° 2014-172 du 21 février 2014, issue d’une proposition déposée à l’Assemblée Nationale le 24 juillet 2012. L’esprit de ladite proposition repose sur l’idée que « le vote blanc est un acte citoyen. Il se distingue de l’abstention – l’électeur s’étant déplacé jusqu’à son bureau de vote – et exprime au contraire un choix, une volonté politique de participer au scrutin pour dire son refus de choisir entre les candidats en lice » (Texte n° 107 de M. François Sauvadet, déposé à l’Assemblée Nationale le 24 juillet 2012, disponible ici). La loi prévoit désormais que : « les bulletins blancs sont décomptés séparément et annexés au procès-verbal. Ils n’entrent pas en compte pour la détermination des suffrages exprimés, mais il en est fait spécialement mention dans les résultats des scrutins. Une enveloppe ne contenant aucun bulletin est assimilée à un bulletin blanc ». Pour mémoire, le vote blanc consiste à déposer dans l’urne une enveloppe comportant soit un bulletin blanc, dépourvu pour ce faire de toute inscription, soit une enveloppe vide. Le vote blanc doit ainsi être distingué de l’abstention et…

Urbanisme: précisions sur l’autorité compétente pour refuser le raccordement aux réseaux au titre de l’article L. 111-12 du code de l’urbanisme (Cass, 15 juin 2017)

Par Jérémy TAUPIN- Green Law Avocat Par un arrêt en date du 15 juin 2017 (C.Cass., Civ. 3, 15 juin 2017, n°16-16838) la Cour de cassation est venue apporter une précision importante relative à la mise en œuvre de la disposition prévoyant que les constructions soumises à autorisations ne peuvent être raccordées définitivement aux réseaux que si elles ont été édifiées de façon régulière. La question se posait dans l’affaire commentée de savoir si un concessionnaire de distribution d’électricité pouvait de lui-même opposer un refus de raccordement, pour une construction ayant fait l’objet d’arrêtés interruptifs de travaux. Après avoir rappelé le principe posé par cet article, nous nous intéressons plus précisément à l’apport de l’arrêt de la Cour de cassation. Le principe : l’interdiction de raccordement aux réseaux d’une construction irrégulière L’actuel article L. 111-12 du Code de l’urbanisme (dont la rédaction est issue de l’ancien article L.111-6, accompagnée d’un toilettage marginal) prévoit que les constructions soumises à autorisations ne peuvent être raccordées définitivement aux réseaux que si elles ont été édifiées de façon régulière : « Les bâtiments, locaux ou installations soumis aux dispositions des articles L. 421-1 à L. 421-4 ou L. 510-1, ne peuvent, nonobstant toutes clauses contractuelles contraires, être raccordés définitivement aux réseaux d’électricité, d’eau, de gaz ou de téléphone si leur construction ou leur transformation n’a pas été, selon le cas, autorisée ou agréée en vertu de ces dispositions. ». Cette disposition institue ainsi une police spéciale de l’urbanisme, parfois encore méconnue, destinée à assurer le respect des règles d’utilisation des sols. Elle permet d’opposer un refus de raccordement aux réseaux d’électricité, d’eau, de gaz ou de téléphone (à l’exclusion des réseaux d’assainissement, cf. Rép. min. n° 12735, JO Sénat 5 août 2010, p. 2034) d’une construction soumise à autorisation (permis de construire, d’aménager, de démolir ou encore déclaration préalable), qui ne serait pas en possession de ladite autorisation ou ne respecterait pas celle-ci. Le refus de raccordement peut être prononcé alors même que l’infraction pénale constituée par la construction sans autorisation est prescrite (CE, 7 oct. 1998, L’Hermite, n° 140759; CE 23 mars 2016, M. Liegeois, n° 392638), ou encore cette infraction n’est pas constituée (CAA Bordeaux, 4 mars 2010, n°09BX00990). Sa mise en œuvre : la nécessité d’une décision de refus de raccordement émanant du maire au titre de ses pouvoirs de police spéciale De manière classique, il est admis que le titulaire du pouvoir de police spéciale établi par l’article L.111-12 du code de l’urbanisme est le maire (bien que le conseil municipal ai aussi pu être jugé compétent, cf. CE, 23 juill. 1993, n° 125331). La décision prise par le maire de s’opposer au raccordement définitif d’un bâtiment en application de ses pouvoirs peut être notifiée tant à l’intéressé lui-même qu’au gestionnaire du réseau à l’occasion de l’avis que celui-ci sollicite dans le cadre de la procédure d’extension du réseau d’électricité. Le refus de la commune opposé dans ce dernier cas ne constitue alors pas un simple avis mais une décision susceptible d’un recours pour excès de pouvoir (CE, 24 mars 2014, n° 359554). Dans l’affaire commentée, la question se posait de savoir si un concessionnaire de distribution d’électricité pouvait de lui-même opposer un refus de raccordement, pour une construction ayant fait l’objet d’arrêtés interruptifs de travaux. Sur cette question, la Cour de Cassation estime que : « pour rejeter la demande de raccordement de la SCI P…, l’arrêt retient que l’immeuble a fait l’objet de deux arrêtés municipaux ordonnant l’arrêt des travaux qui n’étaient pas conformes au permis de construire, que l’adjudication de la maison au profit de la SCI P…ne lui rendait pas inopposables ces arrêtés et qu’aucune demande de régularisation n’a été faite ; Qu’en statuant ainsi, sans constater l’existence d’une décision de refus de raccordement prise par l’autorité administrative compétente, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision » Ainsi, si aucune décision de refus de raccordement n’a été prise par le maire, et quand bien même il est établi que la construction serait irrégulière, il n’est pas possible pour un concessionnaire de distribution d’électricité d’opposer, de lui-même, un refus de raccordement. A l’inverse, une décision de refus de raccordement prise par le maire s’impose au concessionnaire, qui ne peut alors procéder au raccordement de la construction.

Nuisance: la subtile appréciation de la Cour de cassation au sujet des bruits d’activités et des bruits de comportement !

Par Aurélien BOUDEWEEL – GREEN LAW AVOCATS Dans un arrêt en date du 8 mars 2016 (C.cass, Chambre criminelle 8 mars 2016, n°15-85503), la Cour de cassation souligne que les bruits générés par la clientèle d’un  établissement de restauration constituaient des bruits de comportements et non des bruits rattachables à l’activité professionnelle du restaurateur. Cela n’est pas sans incidence sur les possibilités de recours afin de faire cesser ce genre de nuisances. En l’espèce, un restaurateur était poursuivi par-devant la juridiction de proximité de FREJUS sur le fondement des articles R1334-1, R1334-32 et R1337-10 du Code de la santé publique consécutivement à la plainte de riverains. Ces plaintes avaient pour objet un important bruit de musique, des rires et des éclats de voix. Par un jugement en date du 28 avril 2015, la juridiction de proximité avait débouté les riverains au motif que l’article R1334-1 du Code de santé publique n’était pas applicable aux établissements exerçant une activité professionnelle. Au demeurant, la juridiction justifie la relaxe du restaurateur compte-tenu de l’absence de mesure acoustique permettant de caractériser l’atteinte à la tranquillité du voisinage. Rappelons que l’article R.1337-7 du Code de la santé publique dispose : « Est puni de la peine d’amende prévue pour les contraventions de la troisième classe le fait d’être à l’origine d’un bruit particulier, autre que ceux relevant de l’article R. 1337-6, de nature à porter atteinte à la tranquillité du voisinage ou à la santé de l’homme dans les conditions prévues à l’article R. 1334-31 ». Pour rappel, l’article R.1337-6 du Code de la santé publique prévoit : « Est puni de la peine d’amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe : 1° Le fait, lors d’une activité professionnelle ou d’une activité culturelle, sportive ou de loisir organisée de façon habituelle ou soumise à autorisation, et dont les conditions d’exercice relatives au bruit n’ont pas été fixées par les autorités compétentes, d’être à l’origine d’un bruit de voisinage dépassant les valeurs limites de l’émergence globale ou de l’émergence spectrale conformément à l’article R. 1334-32 ; 2° Le fait, lors d’une activité professionnelle ou d’une activité culturelle, sportive ou de loisir organisée de façon habituelle ou soumise à autorisation, dont les conditions d’exercice relatives au bruit ont été fixées par les autorités compétentes, de ne pas respecter ces conditions ; 3° Le fait, à l’occasion de travaux prévus à l’article R. 1334-36, de ne pas respecter les conditions de leur réalisation ou d’utilisation des matériels et équipements fixées par les autorités compétentes, de ne pas prendre les précautions appropriées pour limiter le bruit ou d’adopter un comportement anormalement bruyant ». S’agissant de la démonstration du trouble visé à l’article R.1337-6 du Code de la santé publique, l’article R1334-32 du Code de la santé publique dispose que : « Lorsque le bruit mentionné à l’article R. 1334-31 a pour origine une activité professionnelle autre que l’une de celles mentionnées à l’article R. 1334-36 ou une activité sportive, culturelle ou de loisir, organisée de façon habituelle ou soumise à autorisation, et dont les conditions d’exercice relatives au bruit n’ont pas été fixées par les autorités compétentes, l’atteinte à la tranquillité du voisinage ou à la santé de l’homme est caractérisée si l’émergence globale de ce bruit perçu par autrui, telle que définie à l’article R. 1334-33, est supérieure aux valeurs limites fixées au même article (…) ». Dans l’espèce qui lui est soumise, la Cour de cassation casse le jugement rendu par la juridiction de proximité aux motifs suivants : «Vu les articles R.1337-7 et R.1334-31 du code de la santé publique ; Attendu qu’il résulte du premier de ces textes qu’est puni de la peine d’amende prévue pour les contraventions de la troisième classe le fait d’être à l’origine d’un bruit particulier, autre que ceux résultant d’une activité professionnelle, de nature à porter atteinte à la tranquillité du voisinage ou à la santé de l’homme ; que, selon le second de ces textes, aucun bruit particulier ne doit, par sa durée, sa répétition ou son intensité, porter atteinte à la tranquillité du voisinage ou à la santé de l’homme, dans un lieu public ou privé, qu’une personne en soit elle-même à l’origine ou que ce soit par l’intermédiaire d’une personne, d’une chose dont elle a la garde ou d’un animal placé sous sa responsabilité ; Attendu que, pour relaxer la société X, le jugement attaqué retient que la prévenue, exploitante d’un restaurant à Saint-Tropez, est poursuivie sur le fondement des articles R. 1337-10, R. 1334-31 et 32 du code de la santé publique, que l’article R. 1334-31 n’est pas applicable aux établissements exerçant une activité professionnelle, que l’article R. 1334-32 du même code dispose que l’atteinte à la tranquillité du voisinage est caractérisée si le bruit est supérieur à certaines valeurs, et qu’aucune mesure acoustique n’a été effectuée ; Mais attendu qu’en se déterminant ainsi, alors que la prévenue était poursuivie pour un important bruit de musique, des rires et des éclats de voix constituant non pas des bruits d’activités, mais des bruits de comportement relevant de l’article R. 1337-7 du code de la santé publique visé à la prévention, et ne nécessitant pas la réalisation de mesure acoustique, la juridiction de proximité a méconnu les textes susvisés ; D’où il suit que la cassation est encourue». L’arrêt rendu par la Cour de cassation est très intéressant en ce qu’il se démarque de la jurisprudence particulièrement foisonnante reconnaissant que les nuisances sonores ne sont répréhensibles que lorsque des mesures précises, effectuées avec un sonomètre, démontrent qu’elles ont dépassé en intensité et en durée les normes admises (CA Aix-en-Provence, 7e ch., 28 oct. 1991 : Juris-Data n° 1991-050150 ; CA Agen, ch. appels corr., 22 mars 1999 : Juris-Data n° 1999-042454). Par une appréciation novatrice mais de bon sens, la Cour de cassation censure le jugement de la juridiction de proximité estimant que les nuisances qui étaient reprochées en l’espèce soit « un important bruit de musique, des rires et des éclats de voix » ne relevaient pas de la catégorie de bruits d’activités mais des bruits de comportements. De fait, l’infraction n’avait pas selon la Haute…