Régularisation de l’insuffisante présentation des capacités financières : le TA d’Amiens se lance !

Par Maître Sébastien BECUE (Green Law Avocat) Aux termes d’un jugement du 29 mai 2018 (n°1601137), le Tribunal administratif d’Amiens a annulé l’arrêté d’autorisation d’exploiter une porcherie pour insuffisance de la présentation des capacités financières dans le dossier soumis à enquête publique. Ce motif d’annulation est devenu extrêmement courant depuis que le Conseil d’Etat a décidé, ex nihilo et sans laisser le temps aux porteurs de projet de s’adapter, que le pétitionnaire doit justifier d’engagements fermes dès le stade de la demande d’autorisation (CE, 22 fév. 2016, n°384821). Parallèlement, le Tribunal a délivré à l’exploitant une autorisation d’exploiter temporaire de 12 mois, le temps que l’instruction soit régularisée et qu’une nouvelle autorisation soit délivrée. La première originalité de cette décision réside dans le choix du Tribunal de la fonder sans aucune référence au nouveau régime contentieux issu de l’autorisation environnementale (1) ; la seconde, dans la prescription finale du Tribunal : le Préfet doit se prononcer à nouveau sur la demande d’autorisation, « après avoir rendu publics les documents permettant d’attester » les capacités financières (2). Une illustration des pouvoirs de plein contentieux « classiques » du juge des installations classées Le Tribunal décide d’annuler l’autorisation tout en délivrant une autorisation provisoire. Pourtant, tous les critères des dispositions issues du I du nouvel article L. 181-18 du code de l’environnement étaient satisfaits. Le Tribunal aurait ainsi pu : soit annuler partiellement l’autorisation en tant que la phase de l’enquête publique avait été viciée (comme l’avait fait le Tribunal administratif de Lille, 25 avril 2017, n°n°1401947, également pour une insuffisance de présentation des capacités financières), soit prononcer un sursis à statuer aux termes d’un jugement avant dire droit dans l’attente de la régularisation du dossier (solution préconisée par le Conseil d’Etat dans son récent avis du 22 mars 2018, n°415852, là aussi dans le cadre de la problématique capacités financières). De même, en complément de cette décision d’annulation partielle ou de sursis à statuer, le Tribunal aurait pu décider d’appliquer cette fois le II de l’article L . 181-18 précité. Il aurait ainsi décidé de ne pas suspendre l’exécution, respectivement : soit des parties non viciées de l’autorisation, soit de l’autorisation elle-même, dans l’attente de sa régularisation dans le cadre du sursis. Mais là encore, le Tribunal a préféré faire usage du pouvoir classique de délivrance d’une « autorisation provisoire » le temps de la régularisation, en se fondant sur l’article L. 171-7 du code de l’environnement tel qu’interprété par la jurisprudence (les modalités de mise en œuvre sont rappelées dans l’avis du 22 mars 2018 précité), et non sur les nouvelles dispositions. Dans les deux cas, le résultat aurait été le même puisque le Tribunal aurait eu la possibilité de préciser dans son jugement que le vice de l’information du public constaté peut être régularisé par la seule mise à disposition du public des documents, tout en permettant à l’exploitant de continuer à exploiter le temps de cette régularisation. Le Tribunal démontre ainsi le caractère en réalité peu novateur des dispositions de l’article L. 181-18 du code de l’environnement : le juge de plein contentieux disposait déjà de ces pouvoirs. 2. Un exemple de «  modalité de régularisation du vice de l’information autre que la reprise de l’ensemble de l’enquête publique » La véritable innovation provient en réalité de l’avis du 22 mars 2018 qui permet la régularisation du vice de l’information du public, jusque-là non régularisable, et non du nouveau texte. Notons néanmoins qu’il est probable que l’ajout dans le texte de l’article L . 181-18 de la possibilité d’une annulation au stade d’une « phase de l’instruction » a certainement joué en rôle dans cette levée de verrou. Nous le chroniquions sur le blog de Green Law Avocats, aux termes d’un récent avis (22 mars 2018, n°415852), le Conseil d’Etat a ainsi clairement précisé que le juge des installations classées, face à une irrégularité procédurale ayant eu pour effet de vicier l’information du public, est susceptible de « fixer des modalités de régularisation adaptées permettant l’information du public, qui n’imposent pas nécessairement de reprendre l’ensemble de l’enquête publique ». A la suite de cette décision, confronté au moyen tiré de l’absence d’autonomie de l’autorité environnementale ayant rendu l’avis sur l’étude d’impact du dossier, le Tribunal administratif d’Orléans (24 avr. 2018, n°1602358) a décidé d’interroger le Conseil d’Etat notamment sur ces modalités de régularisation du vice de l’information du public autres que la reprise de l’ensemble de l’enquête publique. Nous nous interrogions dans notre commentaire : quelles sont ces modalités de publicité qui peuvent se substituer à une nouvelle enquête publique ? Enquête publique complémentaire, simple affichage sur le site internet de la Préfecture, mise en ligne sur le site officiel du demandeur… Doivent-elles d’ailleurs avoir une base légale ou peut-il s’agir de modalités ad hoc ? Surtout, doivent-elles permettre simplement l’information du public, ou également sa participation ? Comment doit raisonner le juge du fond ? En l’espèce, le Tribunal administratif d’Amiens prend ses responsabilités et prescrit directement au Préfet de se prononcer à nouveau sur la demande d’autorisation, « après avoir rendu publics les documents permettant d’attester » les capacités financières. Le Tribunal ne semble ainsi pas juger nécessaire qu’il y ait participation du public, c’est à dire que celui-ci soit en mesure de commenter les documents : ceux-ci doivent simplement être rendus publics. Ce qui somme toute est fort logique : le public aura tout loisir de saisir le juge de la nouvelle autorisation s’il juge les capacités encore insuffisantes et en ce sens le principe de participation est sauf.  Remarquons également que pour le Tribunal les modalités précises du dévoilement des documents restent à l’appréciation du Préfet, sous le contrôle du juge.

Le juge civil des référés décomplexé face à l’ICPE causant un trouble anormal à son voisinage (Cass, 14 janv.2014, n°13-10167)

Dans un arrêt en date du 14 janvier 2014 (C.cass, 14 janvier 2014, pourvoi n° 13-10167), la Cour de cassation confirme un arrêt de Cour d’appel, statuant en référé, ordonnant l’arrêt de l’activité d’une centrale à béton, sous astreinte de 700 euros par jour de retard, au titre de l’existence des troubles anormaux de voisinage. La Cour de cassation relève ainsi : « Attendu qu’ayant relevé que les attestations produites faisaient état de graves nuisances, que des constats d’huissier établissaient l’importance des dépôts de ciment et graviers maculant l’environnement immédiat du restaurant et celle des nuages de poussières provoqués par le passage des camions et que la police municipale avait relevé de nombreuses infractions de voirie, la cour d’appel statuant en référé, qui a justement retenu que les sociétés exploitantes de la centrale à béton devaient répondre des conséquences d’une exploitation gravement préjudiciable aux intérêts des tiers, a pu déduire de ses constatations, abstraction faite d’un motif surabondant relatif à l’existence d’un dommage imminent pour la pérennité de la société Pito, que les conditions d’exploitation de la centrale créaient pour cette société des nuisances excédant les inconvénients normaux du voisinage et que le trouble causé justifiait que soit ordonné l’arrêt de l’exploitation ». Cet arrêt souligne tout le potentiel juridique de la théorie des troubles anormaux de voisinage générés par une installation classées, de surcroît lorsque le juge civil statue en référé. D’abord, cet arrêt rappelle que dès lors que le code de l’environnement réserve les droits des tiers, la compétence exclusive du préfet en matière d’installations classées ne fait pas obstacle à la mise en jeu de la responsabilité de l’exploitant ICPE pour troubles de voisinage devant le juge judiciaire (Cass. 2e civ., 22 janv. 1959 : Bull. civ. 1959, II, p. 46. – Cass. 2e civ., 29 mars 1962 : Bull. civ. 1962, II, p. 258. – Cass. 2e civ., 16 juill. 1969 : Bull. civ.1969, II, p. 184 Cass. 1re civ., 13 juill. 2004, n° 02-15.176, FS-P :      JurisData n° 2004-024670 ; Bull. civ. 2004, I, p. 174 ; Environnement 2004, comm. 111, obs. D. Gillig ; AJDA 2005, p. 1235, note M. Moliner-Dubost ; RD imm. 2005, p. 40, obs. F.-G. T. – Rép. min. n° 05959 : JO Sénat Q, 14 mai 2009, p. 1215) et donc, au cas particulier, à la constatation d’un trouble manifestement illicite par le juge des référés (Cass. 1re civ., 15 mai 2001, n° 99-20.339, P, Divanac’h c/ Rannou : JurisData n° 2001-009553 ; Bull. civ. 2001, I, n° 135 ; RD imm. 2001, p.360, obs. M. B. ; RD imm. 2002, p. 370, obs. F.-G. T. ; D. 2001, p. 2242). Dans le cadre de cette théorie jurisprudentielle qui date du 19ème siècle, il n’est pas nécessaire, pour la victime, de démontrer la faute de voisin industriel au regard de son autorisation pour obtenir la cessation du trouble anormal de voisinage. Ce qui importe comme le rappelle la Cour c’est la démonstration d’une « exploitation […] préjudiciable aux intérêts des tiers ». Confronté à une action en trouble anormal, l’auteur du trouble ne pourra pas s’exonérer de sa responsabilité par la preuve de son absence de faute. La responsabilité  est engagée de manière objective dès que le trouble présente un caractère anormal et que le lien de causalité est établi entre le dommage allégué et le fait générateur invoqué. En l’espèce l’exploitation préjudiciable de l’installation se concrétise par des méconnaissances grossières des prescriptions élémentaires de fonctionnement d’une centrale à bitume. Mais rappelons que le seul respect des prescriptions techniques n’est pas exonératoire de responsabilité si la victime parvient à démontrer des conséquences résiduelles de l’exploitation encadrée en termes de dommage (Cass. 2e civ., 17 févr. 1993, n° 91-16.928, P : JurisData n° 1993-000172 ; Bull. civ. 1993, II, n° 68. Pour un cas extrême concernant des éoliennes non classées : TGI Montpellier, 17 septembre 2013, commenté ici). Gageons néanmoins que « la tendance générale en matière d’installations classées est en définitive de ne retenir l’existence d’un trouble anormal de voisinage que lorsque la réglementation n’a pas été respectée » (F. NESI, « Trouble anormal de voisinage et nuisances industrielles », Revue juridique de l’économie publique n° 696, Avril 2012,  étude 3). Ceci doit en particulier être le cas lorsque les seuils de pollution sont définis par des prescriptions ICPE, mais lorsque la règle est formulée sous la forme d’une obligation de moyen et non de résultat, la responsabilité de l’industriel n’en sera que plus exposée. Enfin et surtout  le juge des référés peut aller jusqu’à suspendre l’activité même de l’installation classée. Et c’est justement ce que confirme ici la Cour de cassation. Cette solution pour relativiser la séparation des autorités administratives et judiciaires n’est pas nouvelle : même si en principe il est interdit au juge judiciaire de « contrarie[r] les prescriptions édictées par l’Administration dans l’intérêt de la sûreté et de la salubrité publique» (Tribunal des conflits, 23 mai 1927 : S.1927, 3, p. 94), la Cour de cassation admet – sans doute contra legem – que les juridictions civiles en référé et sur la base de l’article 809 CPC puissent suspendre l’activité industrielle objet même de la police administrative (Cass. 2e civ., 10 nov. 2010, n° 09-17.147). Ainsi les exploitants d’installations classées ne peuvent ignorer l’insécurité juridique dans laquelle peut se trouver leur installation puisque leur respect des prescriptions imposées au fonctionnement de leur installation classée ne fait pas obstacle à ce que leur responsabilité soit mise en cause si leur activité génère des nuisances excédant un seuil normal pour le voisinage. La question sera alors de déterminer l’anormalité du seuil, en fonction d’un faisceau d’indices. David DEHARBE Aurélien BOUDEWEEL Green Law avocat

Affaire AZF : carences fautives de l’inspection ICPE et perte de chance

Par deux arrêts (Cour administrative d’appel de Bordeaux, 24 janvier 2012, n°10BX02880 et n°10BX02881), le juge administratif a reconnu la responsabilité de l’Etat dans l’explosion de l’usine AZF le 21 septembre 2001 du fait des carences fautives de ses services dans la surveillance de cette installation classée.   Perte de chance Si cette reconnaissance de responsabilité est un évènement, on ne peut s’empêcher de remarquer que les montants – 1250 euros dans la première affaire et 2500 euros dans la seconde – des indemnités que l’Etat a été condamné à verser aux requérants sont bien dérisoires à côté des préjudices subis par ces habitants.   Même si le juge administratif a pour réputation –  justifiée ou non –  de n’accorder des dommages et intérêts que très limités en comparaison de ceux qu’octroie  le juge judiciaire, la faiblesse de ces montants dans ces deux affaires peut se justifier pour plusieurs raisons.   D’abord l’objet même de la demande était ici limité par les requérants respectivement à 10000 et 20 000 euros en réparation d’un préjudice moral et de trouble dans les conditions d’existence, tenant en particulier au fait que l’explosion a été à plusieurs titres une source d’angoisse (leur maison a été dévastée  et ils sont restés plusieurs heures sans nouvelle de leur enfant). En effet, les préjudices matériels avaient déjà été indemnisés par les compagnies d’assurances.   Ensuite, il ressort très clairement des deux arrêts que la caractérisation du lien de causalité entre les carences de l’Etat et l’explosion de l’usine AZF était malaisée et a obligé le juge administratif à recourir à la théorie de la perte de chance, théorie apparue en 1928 en droit administratif (CE, 03 août 1928, Bacon) et très utilisée dans le contentieux administratif de la responsabilité hospitalière.   C’est pourquoi, le juge relève à propos du bâtiment 221 que : « s’il n’est pas certain qu’aucune explosion ne se serait produite en l’absence de faute commise dans la surveillance de ce dernier entrepôt, il est établi que la mise en contact du mélange explosif avec des produits qui auraient été stockés dans des conditions régulières, et dont la réactivité aurait été ainsi très inférieure, n’aurait pas eu les mêmes conséquences ; que, dans ces conditions, la carence de l’État dans la surveillance de cette installation classée doit être regardée comme ayant fait perdre à M. B…une chance sérieuse d’échapper au risque d’explosion tel qu’il s’est réalisé et d’éviter tout ou partie des dommages qu’il a personnellement subis du fait de cette explosion » (affaire n°10BX02880).   Ainsi, au sens du juge administratif le seul lien de causalité établi est celui entre la faute de l’Etat et la perte de chance pour les requérants d’échapper au risque d’explosion de l’usine et d’éviter les dommages en découlant.   On comprend alors que les requérants ne pourront se voir indemniser non le préjudice « final » qu’ils ont subi (maison dévastée, angoisse d’avoir perdu un proche) mais seulement le préjudice « initial » que constitue la perte de chance d’échapper au risque d’explosion et d’éviter les dommages en découlant.   Ce préjudice « initial » correspond à une fraction du « préjudice final » qui est déterminée par le juge administratif en fonction du degré de certitude de la perte de chance. Et ici l’appréciation souveraine de la chance perdue conduit à imputer d’emblé  de moitié l’indemnité sollicitée.     C’est pourquoi, le juge administratif décide dans les deux affaires « qu’eu égard à l’importante probabilité de survenance d’une explosion du seul fait du croisement de produits hautement incompatibles entre eux, il y a lieu d’évaluer l’ampleur de cette perte de chance à 25 % et de mettre à la charge de l’Etat la réparation de cette fraction des dommages qu’a subis le requérant et qui sont restés non indemnisés ».     Le juge évaluant les préjudices « finaux » à 5000 euros pour la première affaire, et à 10 000 euros pour la seconde, il accorde en indemnisation du préjudice « initial », seul préjudice indemnisable, les sommes de 1250 et 2500 euros aux requérants.   Cette  reconnaissance de la responsabilité de l’Etat dans l’explosion de l’usine AZF à Toulouse par la juridiction administrative sera sans doute tenue pour  symbolique. Mais il n’est pas totalement déraisonnable de penser que les requérants recherchaient d’abord ici la reconnaissance de principe de la responsabilité de l’Etat pour ses carences fautives dans le contrôle des installations classées en cause. Il ne faut jamais perdre de vue les fonctions multiples de la responsabilité administrative (D. Lochak, « réflexions sur les fonctions sociales de la responsabilité administrative, In Le droit administratif en mutation, PUF, 1993, p. 275) ;  ce serait finalement l’insupportable impunité pénale de l’Etat personne morale qui  se trouve palliée par le pis allé d’une responsabilité administrative déclaratoire et « sanctionnatrice ».     Carences fautives Concernant la reconnaissance des carences fautives des services de l’Etat et tout particulièrement de celles du service de l’inspection des installations classées, le cheminement du juge bordelais est limpide et peut difficilement souffrir de contestation.   Celui-ci relève tout d’abord « qu’il ressort de l’arrêt précité de la cour d’appel de Toulouse du 24 septembre 2012, lequel est revêtu de l’autorité de la chose jugée quant aux faits constatés par le juge pénal (…) que l’explosion qui s’est produite le 21 septembre 2001, initiée dans le bâtiment 221 de l’usine AZF, a pour origine la réaction chimique accidentelle née du mélange de nitrates d’ammonium et de produits chlorés dans un environnement et des conditions d’entreposage qui ont favorisé cette réaction ».   Remarquant que « la procédure pénale a mis en évidence le non-respect des prescriptions réglementaires quant aux modes de stockage des nitrates d’ammonium déclassés », le juge administratif considère que « l’existence même de ces modes irréguliers de stockage de produits dangereux dans le bâtiment 221, pour des quantités importantes et sur une longue durée (…) révèle une carence des services de l’Etat dans son contrôle de cette installation classée ».   Au surplus, il s’avère que l’étude de danger relative aux ammonitrates et autres engrais réalisée par la société était « ancienne et partielle ». C’est pourquoi, un arrêté du…

EOLIEN: adoption par l’Assemblée Nationale de la proposition de la loi visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre : un nouveau souffle pour l’éolien !

 La proposition de loi instaurant une tarification progressive de l’énergie, déposée par M. François BROTTES et M. Bruno LE ROUX à l’Assemblée nationale début septembre 2012 a pour objectifs – d’une part « d’accélérer la transition énergétique », – et d’autre part « d’accompagner la hausse inéluctable des prix de l’énergie » (voir le dossier législatif).   Rebaptisée « Proposition de la loi visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre », la proposition a été adoptée en 1ère lecture par l’Assemblée dans la nuit du 4 au 5 octobre 2012, et recèle de nombreuses réformes législatives ayant des impacts sensibles sur la filière éolienne.   Plusieurs amendements ont été déposés en ce sens à l’initiative du gouvernement, lequel souhaite rapidement concrétiser ses engagements pris lors de la conférence environnementale des 14 et 15 septembre 2012.   Parmi les dispositions les plus significatives adoptées, il faut souligner :   La suppression de l’obligation d’implantation des éoliennes au sein d’une zone de développement de l’éolien terrestre (ZDE) pour pouvoir bénéficier de l’obligation d’achat ;   La création d’une dérogation au principe d’urbanisation en continuité en zone littorale dans les départements d’outre-mer ;   La possibilité d’autoriser les canalisations électriques souterraines dans les espaces remarquables du littoral ;   La suppression du seuil minimal de 5 éoliennes par unité de production.        En revanche, on peut regretter que l’amendement proposant le passage de l’autorisation à la déclaration ICPE pour les éoliennes ait été rejeté.   Prochaine étape : l’examen de la proposition de loi par le Sénat dans une dizaine de jours….      

Opérateurs éoliens : obtenez et participez à la prochaine consultation annoncée !

Nouvelle censure constitutionnelle de la non-conformité du processus d’élaboration des prescriptions techniques applicables aux ICPE sur la base de l’article 7 de la Charte de l’environnement (décision  n° 2012-262 QPC du 13 juillet 2012 « Association France Nature Environnement »)   Saisi le 17 avril 2012 par le Conseil d’Etat de la question prioritaire de constitutionnalité (« QPC »- art. 61-1 de la Constitution) soulevée par France nature environnement (FNE) relative à la conformité avec l’article 7 de la Charte de l’environnement des dispositions de l’article L. 512-5 du code de l’environnement – tel que modifié par l’article 97 de la loi Warsmann de simplification et d’amélioration de la qualité du droit en date du 17 mai 2011-, 2, le Conseil constitutionnel a censuré les dispositions de l’article L. 512-5 du code de l’environnement qui prévoient que « les projets de règles et prescriptions techniques font l’objet d’une publication, éventuellement par voie électronique, avant leur transmission au Conseil supérieur de la prévention des risques technologiques » en raison de l’absence de participation du public à l’élaboration des décisions publiques (décision n° 2012-262 QPC en date du 13 juillet 2012). Cependant, comme les y autorise l’article 62 de la Constitution, les juges de la rue de Montpensier  ont reporté la date d’abrogation de ces dispositions au 1er janvier 2013. Ce faisant, le législateur  devrait disposer du temps nécessaire pour adapter les dispositions juridiques afférentes aux installations classées à l’obligation de participation du public posée dans l’article 7 de la charte de l’environnement (dont les dispositions ont valeur constitutionnelle – cf. décision n°2008-564 DC du 19 juin 2008 «  Loi relative aux organismes génétiquement modifiés »).                         Cette décision s’inscrit dans le sillage de la décision n°2011-183/184 du 14 octobre 2011 « association France Nature Environnement » par laquelle il a invalidé – également à compter du 1er janvier 2013 –  les dispositions de l’article L. 511-2 du code de l’environnement ne prévoyant pas la publication du projet de décret de nomenclature pour les installations autorisées ou déclarées ainsi que les dispositions de l’ordonnance du 11 juin 2009 codifiées à l’article 512-7 III   suivant lesquelles « les projets de prescriptions générales font l’objet d’une publication, éventuellement par voie électronique, avant transmission pour avis au Conseil supérieur des installations classées. Après avis du Conseil supérieur des installations classées et consultation des ministres intéressés, ces prescriptions générales sont fixées par arrêté du ministre chargé des installations classées » :  le Conseil constitutionnel affirme qu’aucune disposition législative n’assure la mise en œuvre du principe de participation du public à l’élaboration des règles générales et prescriptions techniques applicables aux installations classées pour la protection de l’environnement  (ICPE). Effectivement, les dispositions de l’article L. 120-1 du code de l’environnement  qui prévoient que « les décisions ayant une incidence directe et significative sur l’environnement font l’objet soit d’une publication préalable du projet de décision par la voie électronique dans des conditions permettant au public de formuler des observations, soit d’une publication du projet de décision avant la saisine d’un organisme comportant des représentants des catégories de personnes concernées par la décision  en cause et dont la consultation est obligatoire »  s’appliquent sauf disposition particulière relative à la participation du public (décision n° 2012-262 QPC).  Ces dispositions ne pouvaient être qu’écartées par le Conseil constitutionnel dès lors que le législateur, avec les dispositions de l’article 97 de la loi du 17 mai 2011 (codifiées à l’article L. 512-5, al.1er, dernière phrase), a introduit dans le code de l’environnement une disposition particulière applicable aux installations classées soumises à autorisation. Or, avec la rédaction de l’article L. 512-5 du code de l’environnement  le législateur n’a pas permis  d’assurer la mise en œuvre effective du principe de participation.   Néanmoins, considérant que l’abrogation immédiate des dispositions litigieuses de l’article L. 512-5 du code de l’environnement « aurait pour seul effet de faire disparaître les dispositions permettant l’information du public sans satisfaire aux exigences de participation de ce dernier », le Conseil constitutionnel aligne la date d’abrogation des dispositions en cause sur celle choisie dans la décision n° 2011-183/184 QPC ( soit le 1er janvier 2013), ce qui devrait permettre au législateur de préciser dans un seul et même texte les conditions et les limites dans lesquelles doit être opérée la participation du public à l’élaboration des décisions du public conformément aux dispositions de l’article  7 de la charte de l’environnement  aux termes desquelles  « toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d’accéder aux informations relatives à l’environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement ».             On pourrait se féliciter de ces deux abrogations constitutionnelles de la loi pour méconnaissance du principe de participation, si elles ne réduisaient pas la constitutionnalisation de l’environnement à pas grand-chose au final. Deux critiques nous semblent ici essentielles. D’abord on aura compris que le juge constitutionnel n’assume pas les conséquences des abrogations qu’il prononce et désavantage de façon inadmissible certains justiciables. Ainsi ce n’est pas une vue de l’esprit pour les opérateurs éoliens qui ont saisi le Conseil d’Etat  de la légalité du décret de classement éolien en invoquant le principe de participation constitutionnalisé : ce dernier leur a opposé, le même jour, l’abrogation reportée par le Conseil constitutionnel du décret au 1er janvier 2013 (CE, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 13 juillet 2012, n° 353565 et 353577). Le praticien sourit sur ce qui justifie la modulation dans le temps de l’abrogation retenue par le Conseil constitutionnel… sachant qu’aucune autorisation ICPE n’a encore été délivrée à ce jour pour les éoliennes et que les procédures de PC imposent a minima une étude d’impact. Mais au final le décret est sauvé et c’est un véritable déni d’inconstitutionnalité dont aura été victime sinon la filière, au moins les opérateurs qui auront eu l’audace de saisir le juge. Heureusement nos confrères ne manquent pas d’imagination ; certains, comme notre confrère Carl Enckell, disent déjà avoir trouvé la parade dans un astucieux recours gracieux contre le décret dès qu’entre en vigueur l’abrogation constitutionnelle. ….Effectivement au regard de la jurisprudence il y a bien…