Parc solaire en zone agricole: seule une révision générale du PLU est possible

C’est ce qu’a jugé la Cour administrative d’appel de Nantes le 30 septembre 2011 (Cour administrative d’appel de Nantes, 30 septembre 2011, Préfet de la Mayenne, n°11NT01176: CAANantes_30_09_2011_11NT01176_centralePV). Par cet arrêt, la Cour administrative d’appel suspend en référé spécial (fondé sur les dispositions de l’article L. 554-1 du code de justice administrative) l’exécution d’une délibération ayant approuvé une modification du plan d’occupation des sols portant sur la création d’un sous-secteur NCer en zone NC (ancienne dénomination des zones agricoles). La Commune avait en effet approuvé la simple modification de la zone NC en vue de permettre l’implantation de la centrale photovoltaïque. Le doute sérieux sur la légalité de l’acte est caractérisé par : – la contrariété au plan d’occupation des sols – l’irrégularité du choix de la procédure de modification (méconnaissance des articles L. 123-13 et L. 123-19 du code de l’urbanisme) “Considérant que le PREFET DE LA MAYENNE soutient que la création d’un sous-secteur NCer, autorisant l’implantation d’une activité industrielle de production d’énergie solaire en zone agricole du POS de Vaiges, constitue une atteinte à la destination des sols et a pour effet la réduction des espaces agricoles, en méconnaissance des objectifs d’aménagement initialement définis dans le rapport de présentation et consistant à préserver les terres et l’activité agricole en zone NC ; qu’eu égard à la superficie et à la nature du projet, la modification opérée est de nature à porter atteinte à l’économie générale du plan et à restreindre l’espace agricole […]” Rappelons qu’au terme de l’article L. 123-13 du code de l’urbanisme qui s’applique aux anciens POS comme le rappelle l’arrêt, la procédure de modification ne peut être mise en oeuvre qu’à condition que la modification envisagée : « a) Ne porte pas atteinte à l’économie générale du projet d’aménagement et de développement durables mentionné à l’article L. 123-1-3 ; b) Ne réduise pas un espace boisé classé, une zone agricole ou une zone naturelle et forestière, ou une protection édictée en raison des risques de nuisance, de la qualité des sites, des paysages ou des milieux naturels ; c) Ne comporte pas de graves risques de nuisance. » En l’espèce, une modification du PLU destinée à autoriser l’implantation d’un parc photovoltaïque en zone A est irrégulière, dès lors qu’au regard de la superficie et de la nature du projet, cette modification est de nature à porter atteinte à l’économie générale du plan et à restreindre l’espace agricole. C’est ce qu’a jugé la CAA de Nantes: “que, dès lors, la délibération contestée a été prise en méconnaissance des dispositions susmentionnées des articles L. 123-13 et L. 123-19 du code de l’urbanisme ; qu’il s’ensuit que les changements ainsi approuvés ne relevaient pas de la procédure de la modification, mais exigeaient la mise en oeuvre de la procédure de la révision générale, comme l’a relevé le commissaire enquêteur.” Malgré la formule utilisée, la nature et de la superficie du projet ne semblent pas constituer des critères déterminants : un projet de moindre envergure aurait lui aussi entraîné une réduction de l’espace agricole. Une modification simplifiée du PLU n’était pas non plus envisageable, l’article R. 123-20-2 du code de l’urbanisme n’autorisant la mise en oeuvre de la procédure que pour les centrales photovoltaïques implantées en zone N. Même obstacle s’agissant d’une révision simplifiée, celle-ci n’étant autorisée par l’article L 123-13 alinéa 9 du code de l’urbanisme que pour la « réalisation d’une construction ou d’une opération, à caractère public ou privé, présentant un intérêt général notamment pour la commune ou toute autre collectivité ». L’intérêt général d’une centrale photovoltaïque, édifiée pour le compte d’un opérateur privé, et dont l’électricité n’est pas dédiée directement à des équipements publics, ne pourrait, à notre sens, être caractérisé. En définitive, l’unique solution réside dans la mise en oeuvre d’une procédure de révision générale du PLU, procédure plus contraignante. Alors que des allégements procéduraux avaient été spécifiquement prévus en 2009 pour les centrales solaires en zone N (cf article  R123-20-2 CU). Cette solution doit être retenue avec attention par les professionnels du secteur qui, s’ils sont incités à utiliser les friches mêmes agricoles (au delà des anciens CET, carrières etc…), n’en sont pas mons soumis au classement de la zone sur le plan de l’urbanisme. Anaïs DE BOUTEILLER Avocat au Barreau de Lille Green Law Avocat

Bail emphytéotique, bail à construction: sur la modicité du prix

Un arrêt récent rendu par la 3ème chambre de la Cour de cassation le 21 septembre dernier (Cass. 3ème civ., 21 sept. 2011, n°10-21.900 : Juris-Data n°2011-019517) invite à se pencher sur la détermination de la redevance dans le cadre de la conclusion d’un bail à construction. Un parallèle peut être fait avec le bail emphytéotique, dès lors qu’il s’agit des contrats de longue durée couramment usités par les opérations photovoltaïques et éoliens pour asseoir leurs installations. Dans l’arrêt précité, un bailleur tentait notamment de se prévaloir de la nullité pour absence de cause du bail à construction qu’il avait consenti en raison du caractère qu’il estimait dérisoire de la redevance prévue. Il invoquait à ce titre les dispositions de l’article 1131 du Code civil. En effet, la jurisprudence a déjà considéré que la stipulation d’un prix dérisoire voire vil peut être de nature à créer un déséquilibre contractuel tel qu’il confine à l’absence de cause et doit être sanctionné par la nullité du contrat. En l’espèce, la Cour de Cassation a cependant approuvé la cour d’appel d’avoir rejeté la demande du bailleur estimant que celle-ci était prescrite. La Haute juridiction a retenu que la nullité soulevée étant une nullité relative destinée à protéger un intérêt privé, elle se prescrivait par 5 ans à compter de la conclusion du contrat. Il s’avère donc nécessaire d’apporter la plus grande précaution à la détermination de la redevance aux fins de ne pas encourir, dans le délai quinquennal précité, une nullité du contrat qui remettrait en cause l’exploitation du parc éolien ou photovoltaïques, et ce alors que les frais conséquents d’installation et d’exploitation auraient été exposés. La même réflexion s’impose dans le cadre du bail emphytéotique même si la modicité de la redevance a longtemps été perçue comme un élément déterminant de ce type de contrat. En effet, traditionnellement il était considéré que la redevance versée dans le cadre d’un bail emphytéotique se devait d’être modique. Cette modicité se concevait notamment par l’obligation qui était souvent impartie au preneur d’améliorer le bien loué et la propriété des constructions édifiées qui était acquise en fin de bail par le bailleur. Cependant, le nouvel essor que connaît depuis quelques années le bail emphytéotique, utilisé comme titre foncier dans le cadre d’opérations d’installations photovoltaïques ou éoliennes, a détourné quelque peu celui-ci de sa vocation initiale. Il n’est pas rare dans les baux emphytéotiques conclus aujourd’hui de ne plus voir nécessairement de clause mettant à la charge du bailleur l’obligation d’améliorer le fonds loué, cette obligation n’étant pas imposée par les textes, et de prévoir le démantèlement des installations en fin de bail. Or, la modicité, que la Cour de Cassation et les juges du fond se refusent d’ailleurs de retenir comme élément déterminant de la qualification du bail emphytéotique, doit s’apprécier eu égard aux charges pesant sur le preneur. En l’absence de toute clause imposant une amélioration des lieux loués et un transfert de propriété des constructions en fin de bail, il convient de prendre garde au quantum de la redevance prévue. Une redevance pouvant être perçue comme modique en présence de charges imposées au preneur et d’avantage obtenu par le bailleur à l’expiration du contrat, pourra être perçue comme vile ou dérisoire en l’absence de toute obligation du preneur…et, comme il l’a été mentionné ci-dessus, l’action en nullité pour absence de cause est susceptible de venir sanctionner le déséquilibre constaté. Prudence donc dans la fixation de la redevance. Mieux vaut renoncer à une réduction de celle-ci aux fins de sécuriser le titre foncier, support de l’installation…. Marie LETOURMY Avocat au Barreau de Lille Green Law Avocat

Etat d’avancement de la mise en oeuvre du Grenelle de l’environnement : troisième rapport annuel

Quatre ans après la tenue du Grenelle de l’environnement, le commissariat général au développement durable (CGDD) a publié son rapport (3ème rapport CGDD surlamiseenoeuvredu Grenelle) relatif à la mise en oeuvre des engagements pris lors du Grenelle de l’environnement.   L’état d’avancement analysé par le CGDD   L’article 1er de la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l’environnement a, en effet, prévu que « le Gouvernement transmet à celui-ci, au plus tard avant le 10 octobre, un rapport annuel sur la mise en oeuvre des engagements prévus par la présente loi, son incidence sur les finances et la fiscalité locales et son impact sur les prélèvements obligatoires au regard du principe de stabilité de la pression fiscale pesant sur les particuliers et les entreprises ».   Le rapport constate l’effort accompli par le Gouvernement pour adopter les décrets d’application de la loi Grenelle II n°2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement. Alors qu’au 20 juin 2011, seulement 38 décrets d’application avaient été publiés (cf. notre brève, « Grenelle II de l’environnement : bilan des décrets d’application, un an après. », 13/07/2011), le rapport souligne qu’au 3 octobre 2011, 121 décrets sur les 197 attendus étaient publiés, à la signature ou au Conseil d’Etat.   Plus précisément, 68 des décrets  attendus (soit 36 %) étaient publiés, le ministère affichant le souhait d’une publication de tous les décrets au plus tard au début de l’année 2012 !      Cependant, 10  décrets sur les 197 attendus ne seront pas publiés sous cette législature  car, soit  ils s’avèrent inutiles, soit leur publication est elle-même différée par la loi Grenelle II.  Un avancement variable selon les domaines   L’état d’avancement de la publication des décrets est variable selon les domaines concernés : au début du mois d’octobre 2011:   En matière de gouvernance ou encore dans le domaine de l’énergie, plus des ¾ des décrets avaient été publiés.    Parmi eux :   – le décret n° 2011-678 du 16 juin 2011 relatif aux schémas régionaux du climat, de l’air et de l’énergie,    – le décret n°2011-829 du 11 juillet 2011 relatif au bilan des émissions de gaz à effet de serre (GES) et au plan climat-énergie territorial (PCET) (cf. notre brève du 18/07/2011, Bilans des émissions de gaz à effet de serre et plans climat-énergie territoriaux (PCET) : des précisions parues au JO),   – le décret n°2011- 984 du 23 août 2011 modifiant la nomenclature des installations classées ou celui le décret n° 2011-985 du 23 août 2011 pris pour l’application de l’article L. 553-3 du code de l’environnement (cf. la brève du 25 août 2011, Classement ICPE des éoliennes: la parution des décrets mais pas encore des arrêtés), se trouvaient  soumis à signature ou au Conseil d’Etat ;   Dans le domaine des risques, de la santé et des déchets, ce sont les 2/3 des décrets qui l’étaient  (celui sur les ZAPA restant à élaborer);    Enfin, dans les domaines de la biodiversité, des transports et des bâtiments-Urbanisme, le CGDD en recensait respectivement 40, 60 et 50 %.    Reste que si le bilan semble positif puisqu’il atteste de la volonté du gouvernement d’assurer la mise en oeuvre du Grenelle de l’environnement,  il n’est guère facile de rattraper le retard pris dans l’application de la loi.    Par exemple, si  toutes les régions sont engagées dans la procédure d’élaboration des SRCAE, dont la loi  Grenelle II avait prévu la publication dans le délai d’un an suivant son entrée en vigueur (art. L. 222-3 du code de l’environnement), l’on doit constater que suite à la publication tardive  du décret d’application n° 2011-678 du 16 juin 2011 relatif aux schémas régionaux du climat, de l’air et de l’énergie au JORF du 18 juin 2011 (ainsi que du décret n° 2011-1554 du 16 novembre 2011 relatif aux données permettant d’élaborer et d’évaluer les schémas régionaux du climat, de l’air et de l’énergie et les plans climat-énergie territoriaux au JORF du 18 novembre 2011, lequel confirme que les données dont disposent les concessionnaires des réseaux d’électricité et de gaz doivent être transmises  aux collectivités territoriales annuellement et au plus tard le 30 juin, cf. notre brève du 31 mai 2011, Evaluation SRCAE et PCET : des précisions attendues par les CTI et les préfectures), seulement une dizaine d’entre eux devraient être publiés d’ici la fin de l’année.    Le retard des SRCAE En effet, contrairement aux consignes adressées dans l’instruction du 29 juillet 2011 relative aux schémas régionaux du climat, de l’air et de l’énergie (NOR : DEVR1118472J) tendant à ce que les schémas soient adoptés avant 2012 (afin d’éviter l’adoption par le préfet seul du schéma régional éolien ou toute interférence avec le calendrier électoral), rares sont les régions parvenues à rédiger leur avant-projet de SRCAE et l’ayant mis en consultation (Nord-Pas-de-Calais, Picardie ou Bourgogne).   Patricia Demaye-Simoni  Maître de conférences en droit public

Cartographie des PPRI :la norme doit être intelligible !

Voici un jugement (jurisprudence cabinet, jugement TA Lille PPRI norme intelligible) qui doit retenir l’attention en ce qu’il censure d’un double point de vue l’insuffisance de l’échelle cartographique d’un document de planification réglementaire, qui ne permet de connaître les effets fonciers des contours d’une zone rouge, en l’espèce non constructible. La censure est d’abord formelle : « Considérant, d’une part, qu’il ressort des pièces du dossier que les documents cartographiques joints à l’arrêté attaqué ne permettent pas, compte tenu de l’échelle retenue et de la « texture » utilisée pour délimiter les différents zonages, d’apprécier avec précision la situation des parcelles situées en limite des zones de risque ; que cette insuffisance avait d’ailleurs été relevée au cours de l’enquête tant par le public que par les membres de la commission d’enquête ; que le rapport de la commission d’enquête retient en particulier que « l’échelle des plans n’est pas suffisamment précise pour discerner les zones constructibles ou non et de ce fait provoque de nombreuses réclamations qui n’en sont peut-être pas dans la réalité » et que le plan « présenté à l’enquête publique est difficilement applicable en l’état » ; que les membres de la commission soulignent qu’ils sont « particulièrement dubitatifs sur les possibilités de réponses explicites lors de l’instruction des demandes de certificats d’urbanisme et de permis de construire » ; que l’avis favorable a été émis sous réserve que plusieurs communes fassent l’objet d’examens plus approfondis ; que, compte tenu de ces imprécisions importantes, les requérants sont, dès lors, fondés à soutenir que l’insuffisance du dossier soumis à enquête publique n’a pas permis au public d’avoir une connaissance complète du projet afin de lui permettre de présenter ses appréciations, suggestions et contre-propositions ». Non seulement le Tribunal administratif de Lille y décèle une illégalité externe (insuffisance du dossier soumis à enquête publique) mais surtout et fort logiquement la juridiction admet que le principe d’accessibilité et d’intelligibilité de la norme  s’en trouve dès lors méconnu : « Considérant, d’autre part, que le plan de prévention des risques de la vallée de la Lawe vaut servitude d’utilité publique ainsi que le prévoit l’article L. 562-4 du code de l’environnement précité ; que l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la norme, suppose, notamment ici à travers le document graphique annexé au plan de prévention des risques naturels d’inondation, de pouvoir identifier le plus précisément possible au niveau des parcelles, les risques d’inondation et, par suite, l’application de la servitude d’utilité publique ; qu’ainsi qu’il a été dit, le document cartographique n’est pas suffisamment précis et ne permet pas dès lors d’atteindre cet objectif ; que, par suite, les requérants sont fondés à soutenir que pour ce motif également, la décision attaquée est entachée d’illégalité ». Ainsi le P.P.R.I. (Plan de Prévention du Risque d’Inondation) de la Lawe (59) se voit annulé. On peut inscrire cette annulation dans celle déjà opérée au nom du principe de sécurité juridique (sur la positivité de ce Principe général du droit : CE 24 mars 2006, n° 288460, rec. 154 ; CE, 14 octobre 2011, n° 343662). Et on relèvera que cette annulation pour méconnaissance du principe de sécurité juridique  n’est pas tout à fait une première mais presque. Elle s’inscrit dans la lignée de celle prononcée par la Cour administrative de Marseille à propos du P.P.R.I. de la vallée du Gapeau (83) : «Considérant […] dans la mesure où le plan de prévention des risques naturels prévisibles d’inondation institue des servitudes d’utilité publique, le document graphique que comprend le plan doit permettre d’identifier précisément chaque parcelle afin de déterminer les éventuelles servitudes dont chacune des parcelles est grevée, afin de ne pas porter atteinte au principe de sécurité juridique ; que contrairement à ce qu’indique le ministre, les seules cartes incluses dans le projet de plan, qui sont à l’échelle 1/5000ème agrandie au1/2500ème, ne permettent pas d’identifier les parcelles cadastrales au regard des délimitations des zones inondables ; que, par suite, le préfet ne pouvait légalement approuver un plan de prévention des risques naturels prévisibles d’inondation dont les documents graphiques sont trop imprécis pour permettre l’identification de chaque parcelle cadastrale et le niveau des risques d’inondation qui concernent chacune d’entre-elles » (CAA Marseille, 15 janvier 2010, n° 07MA00918). Le raisonnement a d’ailleurs été décliné a contrario par la même juridiction à propos d’un plan de prévention des risques d’incendie (CAA Marseille, 21 octobre 2010, n° 08MA03190). Mais il faut encore s’arrêter sur la singularité de la norme de référence invoquée devant le Tribunal administratif et censurée par ce dernier : «l’objectif de valeur constitutionnelle d’intelligibilité et d’accessibilité de la norme». Certes le principe avait déjà été invoqué devant les juges du fond et son invocabilité admise, même si un PPRM en l’espèce y avait été jugé conforme par la CAA de Nancy (CAA Nancy, 8 octobre 2009,n° 08NC01110 , 08NC01111 et 08NC01112). Plusieurs remarques s’imposent ici. La généalogie de ce principe paie un tribut évident à ce que le juge interne appelle « l’objectif conventionnel d’intelligibilité et d’accessibilité de la norme », découvert très tôt la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH, arrêt Sunday Times c/ Royaume-Uni, 26 avril 1979, A/30) et issues d’une interprétation constructive de la Convention (LETURCQ, « Standards et droits fondamentaux devant le Conseil constitutionnel français et la Cour européenne des droits de l’homme, LGDJ, tome 125, 2005. »). En le rappelant, on perçoit immédiatement que la conception concrète et opérante que l’on se fait des droits de l’homme toilette heureusement celle bien plus déclaratoire et abstraite valant en France. Il est vrai que le Conseil constitutionnel a emboité le pas de la CEDH lorsqu’il a décidé d’en référer à l’objectif de valeur constitutionnelle d’intelligibilité et d’accessibilité de la loi (entre autres cf. Cons const., 13 janv. 2005, déc. n° 2004-509DC : Rec. Cons const. p. 3). Mais non seulement le juge administratif lui conteste toute invocabilité dans le cadre strict de la Q.P.C. (par ex CE 10 juin 2011, n° 335584) mais surtout…

Projet d’ordonnance sur les documents d’urbanisme : la clarification des règles applicables aux documents d’urbanisme

Mis en ligne le 23 septembre 2011 sur le site du ministère de l’Ecologie, le projet d’ordonnance relative à l’élaboration et à l’évolution des documents d’urbanisme  est ouvert à  consultation publique jusqu’au 21 octobre 2011 (Projet_d_ordonnance urbanisme). En effet, en application de l’article 25 de la loi n° 2010-788 Grenelle II, le Gouvernement a été autorisé à opérer une réforme des procédures d’élaboration et d’évolution des documents d’urbanisme dans un délai de 18 mois, soit avant le 12 janvier 2012 (pour une entrée en vigueur fixée en principe au 1er mars 2012 sauf pour les procédures en cours). Comportant 50 pages, le projet d’ordonnance relative à l’élaboration et l’évolution des documents d’urbanisme réorganise les dispositions législatives  du livre Ier du code de l’urbanisme afin d’en faciliter la lecture et la compréhension en même temps qu’il assure la mise en oeuvre du Grenelle de l’environnement. Des dispositions liminaires (posées aux articles L. 1 et L. 2) révisent  la formule de principe posée à l’article L. 110 du code de l’urbanisme. Gestionnaires et garantes du territoire français, dans le cadre de leurs compétences respectives, il est précisé que les collectivités publiques «harmonisent leurs prévisions et leurs décisions d’utilisation de l’espace dans le respect réciproque de leur autonomie et en prenant en compte l’occupation des sols dans les territoires des Etats limitrophes» (art. L.1). Les objectifs communs, poursuivis par les collectivités publiques en matière d’urbanisme, dans le respect des objectifs de développement durable, sont  déclinés à l’article L. 2, à savoir : 1. L’équilibre entre le renouvellement urbain, l’utilisation économe des espaces et la sauvegarde  des ensembles urbains et du patrimoine bâti remarquables ; 2. La diversité des fonctions urbaines et rurales et la mixité sociale dans l’habitat ; 3. La sécurité et la salubrité publiques ; 4. La réduction des émissions de gaz à effet de serre… ; 5. La lutte contre le changement climatique et l’adaptation à ce changement. En dehors de ces dispositions liminaires, quatre domaines de l’urbanisme  sont affectés  par les dispositions de l’ordonnance : la concertation, les schémas de cohérence territoriale (SCOT), les plans locaux d’urbanisme (PLU) et les cartes communales. Relativement aux règles entourant les modalités de la concertation , l’ordonnance reprend la liste des cas actuels dans lesquels la consultation est obligatoire, à savoir pour l’élaboration d’un SCOT (schéma de cohérence territoriale) ou d’un PLU (plan local d’urbanisme), pour toute création de zone d’aménagement concerté ou pour toute opération d’aménagement ayant pour effet de modifier de façon substantielle le cadre de vie ou l’activité économique dont la liste est arrêtée par décret en conseil d’Etat.  Une concertation facultative peut encore être organisée soit par le préfet (s’il a pris l’initiative de la révision d’un document d’urbanisme ou d’une opération) soit par l’organe délibérant de la collectivité ou du groupement compétent (cf. art. L. 4 à L. 6). Concernant le SCOT , au delà de d’une plus grande  recherche de clarté et d’intelligibilité dans la nouvelle présentation des procédures existantes déjà renouvelées par la loi Grenelle II (cf. P. Galan, «La réforme des documents d’urbanisme  par la loi portant engagement national pour l’environnement», JCP ACT n° 43, 25/10/2010, 2232), quelques modifications sont introduites.  Parmi ces modifications, l’on relèvera l’extension  des hypothèses dans lesquelles le préfet peut demander, dans un délai de 2 mois,  la révision du SCOT (pour incompatibilités manifestes avec l’utilisation des sols ou l’affectation des sols des communes voisines ;  pour contrariété avec un programme d’actions précisant les aménagements et les orientations de gestion destinés à favoriser l’exploitation agricole, la gestion forestière, la préservation et la valorisation des espaces naturels et des paysages ; pour incompatibilités manifestes avec l’organisation des transports prévue par l’autorité organisatrice des transports territorialement compétente) (art. L. 145-46 du CU) ou encore l’extension du champ d’application de la mise en révision du SCOT ( celle-ci peut intervenir en cas de changement des orientations du PADD – projet d’aménagement et de développement durable – mais aussi et désormais en cas de changement du DOO – document d’orientation et d’objectifs – pour les dispositions relatives aux objectifs chiffrés de consommation économe de l’espace et de lutte contre l’étalement urbain et celles concernant la protection des espaces fragiles ou encore lorsque l’établissement décide de changer les dispositions du DOO de la politique de l’habitat pour en diminuer l’objectif global concernant l’offre de logement) (art.  L. 154-49 du CU). Quant aux PLU , eux-aussi déjà réformés par la loi Grenelle II (cf. H. Jacquot et J.-P. Lebreton, « La réforme du plan local d’urbanisme », AJDA 2010, p. 1697), dont la vocation intercommunale a été accentuée  en 2010  (cf. A. Graboy-Grobesco, « La loi Grenelle II et les documents de planification territoriale, DA n°2, février 2011, étude 4 ; cf. notre brève du 7 mars 2011, « SCOT/PLU, projet de décret : de nouvelles obligations en perspective ») et se trouve ajustée par le projet d”ordonnance (art. L. 164-5 du CU), la réécriture des dispositions du code de l’urbanisme y touchant s’opère essentiellement mais pas uniquement à droit constant. Ainsi, tout comme pour les SCOT (avec la procédure de modification simplifiée requérant uniquement une mise à disposition du public pour une durée d’un mois (art. L. 154-73 à L. 154-75 du CU)), la procédure de modification est révisée pour distinguer entre la procédure de droit commun pour laquelle une enquête publique s’impose et la procédure simplifiée qui passe par une mise à disposition du public pour une durée d’un mois (art. L. 164-57 à L. 164-62 du CU).  Par ailleurs,  dans le sillage de la jurisprudence du 18 février 2010 « Lille Métropole, Communauté urbaine (req. n° 318234),  l’article L. 164-31 du CU précise, qu’à la suite de l’enquête publique, le PLU peut être modifié pour tenir compte des avis qui ont été joints au dossier ainsi que le résultat de l’enquête. Et les prérogatives préfectorales sont également sensiblement renforcées puisque le  préfet peut demander  des modifications aux PLU dont  l’adoption conditionne son caractère exécutoire en cas d’absence de réponse aux objectifs de répartition…