Droit à l’information du public en matière de pesticides : la Cour de justice de l’Union européenne se prononce dans deux décisions du 23 novembre 2016

Par Fanny Angevin – Green Law Avocats La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) vient de se prononcer sur la question de l’information du public en matière de pesticides dans deux décisions en date du 23 novembre 2016. En effet, dans ces décisions, la Cour inclut l’information sur la nature ainsi que les effets des pesticides dans la notion de “droit à l’information du public” en matière de pesticides. Dans l’instance C-673-13, deux associations avaient saisi le Tribunal de l’Union européenne en demandant l’annulation de la décision de refus qui leur avait été opposée par la Commission européenne, leur refusant l’accès à certains documents. Ce refus était notamment justifié par la Commission au vu des informations confidentielles sur les droits de propriété intellectuelle des demandeurs d’une autorisation du glyphosate. Le Tribunal de l’Union européenne, par une décision en date du 8 octobre 2013, avait fait droit aux demandes des deux associations requérantes. En effet, selon ce dernier, la Commission ne pouvait invoquer pour justifier son refus, la protection de la confidentialité des informations commerciales ou industrielles, car des parties des documents ayant fait l’objet de la demande de communication comportaient des informations liées à des émissions dans l’environnement. La Commission a ensuite effectué un pourvoi de cette décision devant la CJUE. La seconde affaire présentée devant la CJUE C-442/14, relève d’une question préjudicielle posée par les juridictions néerlandaises. Dans cette affaire, une association néerlandaise pour la protection des abeilles avait demandé la communication à l’autorité néerlandaise compétente, de certains documents portant notamment sur des autorisations de mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques. Les questions posées à la Cour portaient principalement sur la notion « d’émissions dans l’environnement » et « d’informations relatives aux émissions dans l’environnement », au sens de la directive 2003/4/CE du Parlement européen et du Conseil, du 28 janvier 2003, concernant l’accès du public à l’information en matière d’environnement (pour l’instance C-442/14) et du règlement n°1367/2006 du Parlement et du Conseil du 6 septembre 2006 concernant l’application aux institutions et organes de la Communauté européenne des dispositions de la convention d’Aarhus sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement (pour l’instance C-673/13). De première part, la Cour précise que la notion « d’émissions dans l’environnement » comprend « le rejet dans l’environnement de produits ou de substances, tels que les produits phytopharmaceutiques ou biocides et les substances actives que ces produits contiennent, pour autant que ce rejet soit effectif ou prévisible dans des conditions normales ou réalistes d’utilisation du produit ou de la substance ». La Cour énonce que cette notion couvre les émissions qui résultent de la pulvérisation d’un produit dans l’air ou bien de l’application de ce produit sur les plantes, dans l’eau ou sur le sol. Par ailleurs, la Cour précise également que le règlement et la directive précités, comprennent les informations se rapportant à des émissions effectives, mais aussi à des informations concernant les émissions prévisibles du produit dans l’environnement. De seconde part, la Cour énonce que la notion « d’informations relatives à des émissions dans l’environnement », comprend : –        les informations en tant que telles (nature, composition, quantité, date et lieu des émissions dans l’environnement) ; –        les données relatives aux incidences à plus ou moins long terme des émissions sur l’environnement ; –        les informations permettant au public de contrôler si l’évaluation des émissions effectives ou prévisibles, est correcte. Il convient de noter néanmoins, que dans l’instance C-673/13, la Cour a annulé la décision du Tribunal de l’Union européenne, au motif que le règlement porte sur la notion d’informations qui « ont trait à des émissions dans l’environnement », notion qui comporte les informations qui « concernent ou qui sont relatives à de telles émissions, et non les informations présentant un lien, direct ou indirect, avec les émissions dans l’environnement ». La Cour renvoie donc l’affaire au Tribunal afin que ce dernier effectue une nouvelle appréciation des faits à la lumière des éléments énoncés dans la décision. Au vu des éléments précités, l’apport de la Cour dans ces deux instances est particulièrement intéressant. En effet, dans ces décisions, la Cour inclut l’information sur la nature ainsi que les effets des pesticides dans la notion de droit à l’information du public en matière de pesticides. Or, la portée de ces arrêts pourrait éventuellement être étendue à d’autres domaines du droit de l’environnement, notamment en matière d’air et atmosphère, où il peut être pensé que la notion de protection du secret industriel et commercial est souvent invoquée. Partant, il convient de suivre avec attention les répercussions de ces décisions en ce qui concerne le droit à l’information du public en matière environnementale.  

ICPE / Liquidateurs judiciaires : les mesures de cessation d’activité d’une ICPE vous incombent en cas d’inertie de l’exploitant (CE 28 septembre 2016)

Par Graziella DODE- GREEN LAW AVOCATS Dans un arrêt du 28 septembre 2016, le Conseil d’Etat rappelle les obligations des liquidateurs judiciaires en matière d’installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE). En l’espèce, la société mise en liquidation judiciaire avait exploité des installations classées d’élevage et de fabrication d’engrais (rubriques 2111-1 et 2170-1). Le liquidateur désigné par un jugement du tribunal de commerce n’avait pas rempli ses obligations au titre de l’article R. 512-39-1 du code de l’environnement. Pour rappel, cet article dispose que : « I.-Lorsqu’une installation classée soumise à autorisation est mise à l’arrêt définitif, l’exploitant notifie au préfet la date de cet arrêt trois mois au moins avant celui-ci. Ce délai est porté à six mois dans le cas des installations visées à l’article R. 512-35. Il est donné récépissé sans frais de cette notification. II.-La notification prévue au I indique les mesures prises ou prévues pour assurer, dès l’arrêt de l’exploitation, la mise en sécurité du site. Ces mesures comportent, notamment : 1° L’évacuation des produits dangereux, et, pour les installations autres que les installations de stockage de déchets, gestion des déchets présents sur le site ; 2° Des interdictions ou limitations d’accès au site ; 3° La suppression des risques d’incendie et d’explosion ; 4° La surveillance des effets de l’installation sur son environnement. III.-En outre, l’exploitant doit placer le site de l’installation dans un état tel qu’il ne puisse porter atteinte aux intérêts mentionnés à l’article L. 511-1 et qu’il permette un usage futur du site déterminé selon les dispositions des articles R. 512-39-2 et R. 512-39-3. » En cas de procédure collective, il revient au liquidateur désigné de remplir ces obligations si l’exploitant ne les a pas accomplies. En effet, « le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l’administration et de la disposition de ses biens même de ceux qu’il a acquis à quelque titre que ce soit tant que la liquidation judiciaire n’est pas clôturée. Les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur » (Com. art. L. 641-9, I). En conséquence, selon le Conseil d’Etat, « lorsque les biens du débiteur comprennent une installation classée pour la protection de l’environnement dont celui-ci est l’exploitant, il appartient au liquidateur judiciaire qui en assure l’administration, de veiller au respect des obligations découlant de la législation sur les installations classées pour la protection de l’environnement ». Le liquidateur doit notifier la cessation d’activité au préfet et prévoir les mesures permettant d’assurer la mise en sécurité du site. Il doit également apporter les éléments de preuve permettant de s’assurer que le site est dans un état qui ne peut porter atteinte aux intérêts protégés par l’article L. 511-1 et faire des propositions d’usage futur du site. En l’espèce, le liquidateur s’était borné à fournir des courriers de l’exploitant à la préfecture dans lequel l’exploitant refusait de déclarer le site en cessation d’activité et affirmait, sans apporter de preuve, que la mise en sécurité du site était effective. Le liquidateur a ensuite fait obstacle à la visite du site par l’inspection des installations classées. Il a ainsi fait l’objet d’un arrêté préfectoral de mise en demeure en date du 20 octobre 2010 lui demandant d’adresser dans un délai d’un mois la déclaration de cessation d’activité relative au site exploité par l’entreprise, en précisant les mesures prises ou prévues pour assurer la mise en sécurité du site, et de transmettre ses propositions, dans un délai de deux mois, au maire et au propriétaire du terrain sur le type d’usage futur envisagé dans le cadre de la remise en état du site. Dans sa décision du 28 septembre 2016, le Conseil d’Etat a rejeté le pourvoir formé par le liquidateur, estimant que la Cour administrative d’appel n’avait commis aucune erreur de droit (CAA Versailles, 5 juin 2014, n° 12VE01136) en confirmant le rejet de sa demande d’annulation de l’arrêté de mise en demeure dont il avait fait l’objet (TA Montreuil, 26 janvier 2012, n° 1013329). Le liquidateur s’était défendu sur le fondement de l’article L. 622-17 du code de commerce, alinéa IV, selon lequel « les créances impayées perdent leur privilège si elles n’ont pas été portées à la connaissance de l’administrateur et, à défaut, du mandataire judiciaire ou, lorsque ces organes ont cessé leurs fonctions, du commissaire à l’exécution du plan ou du liquidateur, dans le délai d’un an à compter de la fin de la période d’observation ». En l’espèce, le liquidateur estimait que la mise en demeure de prendre des mesures de dépollution n’avait pas été portée à sa connaissance dans le délai imparti. Pour autant, dans cette décision, le Conseil d’Etat démontre que l’administration garde son pouvoir de police administrative, et plus précisément de police des installations classées. L’arrêté préfectoral de mise en demeure de prendre des mesures de dépollution est légal même lorsqu’il est pris au-delà du délai d’un an précité.

Biodiversité: un projet de décret relatif aux zones prioritaires pour la biodiversité en consultation

Par Fanny ANGEVIN – GREEN LAW AVOCATS Un projet de décret relatif aux zones prioritaires pour la biodiversité était en consultation jusqu’au 18 novembre. http://www.consultations-publiques.developpement-durable.gouv.fr/texte-d-application-de-la-loi-biodiversite-projet-a1581.html Il prévoit les modalités de mise en œuvre pouvant être établies en faveur des espèces menacées protégées au titre de l’article L. 411-1 du code de l’environnement. Pour rappel, la loi n°2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages a modifié l’article L. 411-2 du code de l’environnement (par le biais de son article 74) en y ajoutant la possibilité pour l’autorité administrative de : Délimiter des zones prioritaires pour la biodiversité ; D’établir un programme d’action afin de restaurer ces zones, les préserver, gérer et de les mettre en valeur de façon durable ; Si cela s’avère nécessaire, à l’expiration d’un délai, de rendre obligatoire certaines pratiques agricoles au sein de ces zones. Définition des zones prioritaire pour la biodiversité Afin de mettre en œuvre ces nouvelles obligations, le projet de décret définit tout d’abord la notion de « zones prioritaires pour la biodiversité » comme : « […] les zones mentionnées au II. de l’article L. 411-2 et dans lesquelles il est nécessaire de maintenir ou de restaurer les habitats d’une espèce protégée au titre de l’article L. 411-1 lorsque l’évolution de ces habitats est de nature à compromettre le maintien dans un état de conservation favorable d’une population de cette espèce. » Modalités de délimitation des zones Le projet de décret détaille ensuite la procédure relative à la délimitation des zones prioritaires pour la biodiversité. Il prévoit que cette délimitation est faite par arrêté du préfet, après avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites, du conseil scientifique régional du patrimoine naturel, de la chambre départementale d’agriculture et de l’autorité militaire compétente lorsque ces zones concernent des emprises relevant du ministère de la défense. En outre, il est précisé que les avis sont réputés favorables si ces derniers n’interviennent pas dans un délai de deux mois à compter de la transmission du projet. Un programme d’action pour chaque zone Le projet de décret prévoit aussi que le préfet établit un programme d’action pour chaque zone prioritaire pour la biodiversité. L’établissement de ce programme d’action est effectué en concertation avec les collectivités territoriales et leurs groupements et les représentants des propriétaires et des exploitants de terrains. Ce programme définit les mesures favorables à mettre en œuvre et tout particulièrement, les pratiques agricoles à promouvoir (à ce titre, le projet de décret établit une liste). Par ailleurs, le programme d’action détermine les objectifs à atteindre selon le type d’action pour chacune des parties de la zone concernées et présente les moyens afin d’atteindre ces objectifs. En outre, le programme expose les effets escomptés sur le milieu ainsi que les indicateurs quantitatifs qui permettent de les évaluer. Ce programme d’action est ensuite soumis à diverses consultations. De nouvelles obligations pour les agriculteurs En ce qui concerne les obligations des agriculteurs, le projet de décret prévoit que le préfet peut à l’expiration d’un certain délai, en fonction des résultats de la mise en œuvre du programme d’action, rendre obligatoire certaines pratiques agricoles préconisées par le programme. Par ailleurs, il convient de relever que ce projet de décret comporte la possibilité, en cas de non-respect, par le propriétaire ou l’exploitant d’un terrain, de l’une des pratiques agricoles du programme d’action rendue obligatoire, d’infliger une amende prévue pour les contraventions de 5e classe. Une grande vigilance est donc de mise quant à ce projet de décret et à son entrée en vigueur.  

Contentieux administratif: le recours gracieux par voie électronique (Décret du 20 octobre 2016 relatif aux modalités de saisine de l’administration par voie électronique)

Par Fanny ANGEVIN – GREEN LAW AVOCATS Le recours gracieux est défini par le code des relations entre le public et l’administration comme « le recours administratif adressé à l’administration qui a pris la décision contestée » (article L. 410-1 du code des relations entre le public et l’administration). Il est précisé dans ce même code que « Toute décision administrative peut faire l’objet, dans le délai imparti pour l’introduction d’un recours contentieux, d’un recours gracieux ou hiérarchique qui interrompt le cours de ce délai. » (article L. 411-2 du code des relations entre le public et l’administration). Ce recours est particulièrement utilisé, celui-ci permettant à l’autorité administrative de remédier aux illégalités dont pourrait être entachée la décision de l’administration sans avoir besoin de l’intervention du juge et ayant la particularité d’interrompre le délai de recours contentieux contre une décision de l’administration. Le décret n°2016-1411 du 20 octobre 2016 relatif aux modalités de saisine de l’administration par voie électronique a été publié au journal officiel le 22 octobre 2016. Ce décret prévoit notamment la codification ainsi que la modification des dispositions relatives au droit des usagers de saisir l’administration par voie électronique. Il comporte comme nouveauté principale le droit de saisir une administration par voie électronique pour toute personne. A ce titre, il prévoit que l’administration doit informer le public des téléservices qu’elle met en place. A défaut d’information, le public peut saisir l’administration par tout type d’envoi électronique. Il est particulièrement intéressant de noter que ce décret prévoit que l’administration doit émettre un accusé de réception électronique, qui indique lorsqu’il s’agit d’une demande, « si la demande est susceptible de donner lieu à une décision implicite d’acceptation ou à une décision implicite de rejet ainsi que la date à laquelle, à défaut d’une décision expresse, et sous réserve que la demande soit complète, celle-ci sera réputée acceptée ou rejetée ». En outre, cet accusé de réception doit mentionner la date de réception de l’envoi, la désignation du service chargé du dossier, et en cas de refus de d’une demande, les voies de recours à l’encontre de la décision. Il peut donc être suggéré qu’un recours gracieux pourra désormais être introduit par voie électronique. Un recours gracieux étant une demande, les modalités relatives à l’accusé de réception et aux mentions à citer dans ce dernier lui seront applicables. Enfin, il reste néanmoins à clarifier sous quelle forme cette saisine de l’administration par voie électronique sera effectuée, d’autant plus que ce décret est entré en vigueur depuis le 7 novembre dernier. Les services administratifs devront en tout état de cause rapidement s’adapter à ce nouveau régime, qui a le mérite de faciliter la saisine des autorités.

Immobilier / illégalité du raccordement au réseau public d’assainissement : un dol peut être constitué à défaut de précisions suffisantes dans l’acte de vente

Par Aurélien BOUDEWEEL- Green Law Avocat   Par un arrêt publié au bulletin en date du 24 août 2016, la Cour d’appel de Bordeaux (ca-bordeaux-24-08-2016) rappelle dans le cadre de la vente d’un immeuble, que l’absence de précision suffisante dans l’acte d’informations relativement au raccordement au réseau public d’assainissement peut être constitutive d’un dol. En l’espèce, après qu’une vente fût signée, les acquéreurs ont sollicité par la voie judiciaire la réparation de leur préjudice tenant à l’absence de raccordement au réseau public d’assainissement sur le fondement de l’article 1641 du code civil relatif à la garantie contre les vices cachés et subsidiairement à l’article 1604 du code civil tenant au défaut de conformité de la chose vendue et à l’article 1116 du code civil sanctionnant le dol (nouvel article 1137 du Code civil). Les acquéreurs soutenaient que les anciens propriétaires n’avaient jamais installé de système d’assainissement individuel. Rappelons que l’article L 274-1 du Code de la construction et de l’habitation énonce qu’en « cas de vente de tout ou partie d’un immeuble bâti, un dossier de diagnostic technique, fourni par le vendeur, est annexé à la promesse de vente ou, à défaut de promesse, à l’acte authentique de vente (…). Le dossier de diagnostic technique comprend, dans les conditions définies par les dispositions qui les régissent, les documents suivants : 1° Le constat de risque d’exposition au plomb prévu aux articles L. 1334-5 et L. 1334-6 du Code de la santé publique ; 2° L’état mentionnant la présence ou l’absence de matériaux ou produits contenant de l’amiante prévu à l’article L. 1334-13 du même code ; 3° L’état relatif à la présence de termites dans le bâtiment prévu à l’article L. 133-6 du présent code ; 4° L’état de l’installation intérieure de gaz prévu à l’article L. 134-6 du présent code ; 5° Dans les zones mentionnées au I de l’article L. 125-5 du Code de l’environnement, l’état des risques naturels et technologiques prévu au deuxième alinéa du I du même article ; 6° Le diagnostic de performance énergétique prévu à l’article L. 134-1 du présent code ; 7° L’état de l’installation intérieure d’électricité prévu à l’article L. 134-7 ; 8° Le document établi à l’issue du contrôle des installations d’assainissement non collectif mentionné à l’article L. 1331-11-1 du Code de la santé publique (…) »  Par un jugement en date du 2 octobre 2014, le tribunal de grande instance de LIBOURNE avait rejeté la demande des acquéreurs aux motifs qu’un diagnostic technique et que l’acte notarié précisaient que l’immeuble était raccordé indirectement au réseau public d’assainissement. La juridiction civile a alors considéré que la garantie contre les vices cachés devait être écartée et que ne pouvait être retenue ni le défaut de conformité ni la manœuvre dolosive. Les acquéreurs ont alors interjeté appel du jugement. Dans le cadre de la procédure d’appel, la Cour d’appel censure l’appréciation portée par le tribunal aux motifs que le caractère illégal du raccordement n’avait pas été mentionné aux acquéreurs : «Il ressort de ces éléments et des clauses du contrat de vente susvisées que M. V. a certes été informé de ce que l’immeuble qu’il acquérait n’était pas équipé d’un système d’assainissement individuel, et qu’il était raccordé au tout-à-l’égout de la commune de manière indirecte, par l’intermédiaire d’une pompe de relevage située sur le fonds voisin. En revanche, il n’était nullement informé du caractère illégal de ce raccordement et du fait qu’il s’agissait d’un branchement « sauvage ». En effet, la mention relative à la possibilité pour la commune de procéder au contrôle de la conformité des installations de raccordement et d’exiger le cas échéant leur mise en conformité dans les conditions des articles L.1331-1 et suivants du code de la santé publique n’était pas de nature à l’informer de l’illicéité de la situation, mais avait pour seul effet de porter à sa connaissance l’existence d’une législation en matière de contrôle et de mise aux normes des installations de raccordement » (…). « Il résulte de ces éléments que les consorts D.-B. n’ont pas informé leur cocontractant d’une part du caractère sauvage du raccordement de l’immeuble au tout-à-l’égout, d’autre part de ce qu’ils devaient prendre en charge les frais de fonctionnement de la pompe de relevage non seulement pour leur propre consommation, mais aussi pour celle de leurs voisins. Les consorts D.-B. étaient parfaitement informés de cette situation dont ils étaient eux-mêmes à l’origine, afin de se soustraire au paiement de la taxe de raccordement et aux frais engendrés par une installation d’assainissement individuel. En ne portant pas ces éléments à la connaissance de leur acquéreur, ils ont fait preuve d’une réticence dolosive qui a eu pour conséquence de placer ce dernier, à son insu, dans une situation illégale susceptible d’être à tout moment dénoncée par la commune, avec les conséquences financières qui en seraient résultées ». L’enjeu était de taille puisque comme le souligne la Cour d’appel, l’article 1331-1 du Code de santé publique prévoit que «Le raccordement des immeubles aux réseaux publics de collecte disposés pour recevoir les eaux usées domestiques et établis sous la voie publique à laquelle ces immeubles ont accès soit directement, soit par l’intermédiaire de voies privées ou de servitudes de passage, est obligatoire dans le délai de deux ans à compter de la mise en service du réseau public de collecte ». Au visa de cette disposition, la commune peut procéder au contrôle de non-conformité des installations de raccordement privées au réseau de public d’assainissement et si nécessaire, ordonner leur mise en conformité voire même procéder d’office et aux frais du propriétaire les travaux indispensables. L’arrêt de la Cour d’appel est intéressant puisqu’il se fonde sur la notion de dol visée par l’article 1116 du code civil pour accueillir la demande de réparation des acquéreurs. La difficulté tenait à ce que l’acte de vente précisait que l’immeuble n’était relié qu’indirectement au réseau public d’assainissement. La cour considère ainsi que les mentions figurant dans l’acte tenant au réseau d’assainissement n’étaient pas suffisamment complètes, précises et avaient pour but de tromper les futurs acquéreurs. Notons que la jurisprudence a déjà eu l’occasion de rappeler que…