P.P.R.N. SANS LE PUBLIC NI LA CHARTE … LE CONSEIL SIFFLE LA FIN DE LA PARTICIPATION

Par Me Marie-Coline Giorno (Green Law Avocat) En vertu du paragraphe I de l’article L. 562 1 du code de l’environnement, « L’État élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations, les mouvements de terrain, les avalanches, les incendies de forêt, les séismes, les éruptions volcaniques, les tempêtes ou les cyclones ». Toutefois, l’article L. 562-2 du code de l’environnement permet au préfet de rendre immédiatement opposables certaines dispositions du projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles sur le territoire d’une commune, lorsque l’urgence le justifie et après la seule consultation du maire des communes intéressées. Le Conseil Constitutionnel était saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) sur ces dispositions. Il devait notamment déterminer si la décision de rendre opposable par anticipation certaines dispositions du projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles était conforme aux dispositions de l’article 7 de la Charte de l’environnement. D’autres moyens tirés de la méconnaissance du principe de libre administration des collectivités locales et de l’atteinte aux conditions d’exercice du droit de propriété étaient également invoqués mais, d’un point de vue strictement environnemental, ils ne présentent qu’un intérêt limité : ils ne seront donc pas étudiés. Aux termes de l’article 7 de la Charte de l’environnement : « Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d’accéder aux informations relatives à l’environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement ». Le champ de l’article 7 de la Charte de l’environnement est limité aux décisions publiques « ayant une incidence sur l’environnement ». Le juge constitutionnel n’hésite pas à censurer les décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement qui méconnaissent le principe de participation (pour ne citer qu’un exemple, voir : Conseil constitutionnel, 14 octobre 2011, décision n° 2011-183/184 QPC). Pour ce faire, il est toutefois nécessaire que la décision publique en question ait une incidence « significative » (pour ne citer qu’un exemple, voir : Conseil constitutionnel, 23 novembre 2012, n°2012-282 QPC) ou, tout au moins, qui ne soit pas « indirecte » sur l’environnement (pour ne citer qu’un exemple, voir : Conseil constitutionnel, 24 mai 2013, n°2013-317 QPC) Il appartenait donc aux Sages de vérifier que la décision de rendre opposable par anticipation certaines dispositions du projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles avait une incidence significative ou directe sur l’environnement. En l’espèce, le Conseil constitutionnel s’est prononcé par une décision n°2014-411 QPC du 9 septembre 2014. Sa décision est assez surprenante : il a considéré que le grief tiré de la méconnaissance de cet article était inopérant : en effet, selon son analyse, cette décision « ne constitue pas une décision publique ayant une incidence sur l’environnement au sens de l’article 7 de la Charte de l’environnement ». Il ne se prononce donc ni sur le caractère direct ni sur le caractère significatif de l’incidence sur l’environnement de la décision et constate uniquement que la décision n’a pas d’incidence sur l’environnement. Pour étayer son raisonnement, le Conseil constitutionnel : – Fait primer l’objectif de sécurité des personnes et des biens sur le droit à l’information et à la participation du public ; – Rappelle la condition d’urgence prévue par l’article L.562-2 du code de l’environnement ; – Mentionne la finalité de cette disposition, c’est-à-dire « d’interdire ou de restreindre, à titre provisoire et conservatoire, des constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations ». Cette décision est étonnante dans la mesure où, que cette incidence soit positive ou négative, la mise en œuvre anticipée d’un plan de prévention des risques naturels prévisibles a tout de même une incidence sur l’environnement, en régissant les règles de constructibilité au regard des risques encourus. Par ailleurs, au regard des motifs retenus par le Conseil constitutionnel dans son analyse, on le soupçonne d’avoir voulu faire prévaloir la sécurité publique, dans une situation d’urgence, sur les exigences de la Charte de l’environnement. D’un point de vue de priorités, il est compréhensible, en situation d’urgence, de faire prévaloir la sécurité publique sur l’environnement. Toutefois, il est possible de se demander si l’ombre de Xynthia ne pesait pas au-dessus de la tête des Sages, telle une épée de Damoclès, lors de l’examen de cette QPC. S’ils avaient tranché différemment, auraient-ils voulu prendre la responsabilité d’un dommage causé aux personnes et aux biens durant une éventuelle participation publique qui aurait précédé une application anticipée d’un plan de prévention des risques naturels prévisibles ? Toutefois, sans pour autant prendre ce risque, les Sages auraient pu tout à fait dire que l’incidence d’une application anticipée du plan sur l’environnement n’était pas significative ou qu’elle était indirecte : cela aurait été, à notre sens, plus exact juridiquement et aurait aussi permis de faire primer la sécurité publique. En conséquence, par cette décision, le Conseil constitutionnel tenterait-il, à mots couverts, de limiter le champ de l’article 7 de la Charte aux décisions ayant une incidence négative sur l’environnement ? Cela n’irait-il pas alors à l’encontre de la lettre du texte ? La doctrine la plus autorisée en la matière n’hésite pour sa part à prendre  cette posture critique (B. DELAUNAY, “Une nouvelle limitation du champ de l’article 7 de la Charte de l’environnement” AJDA n°8/2015, p. 468 et ss.). A tout le moins on peut penser que le Conseil constitutionnel a décidé de siffler la fin de  la partie pour le public, sa participation érigée en principe exposant le code de l’environnement à des coupes claires …

Reconstruction à l’identique après sinistre : précisions du Conseil d’Etat sur la prescription

Par Maître Aurélien BOUDEWEEL (Green Law Avocat) Par un arrêt en date du 21 janvier 2015 (CE, 1ère, 21 janvier 2015 n°382902) le Conseil d‘Etat rappelle que la prescription de dix ans relativement au droit de reconstruction d’un bâtiment détruit par un sinistre ne court qu’à compter de l’entrée en vigueur de la loi n°2009-526 du 12 mai 2009 lorsque le sinistre est antérieur à celle-ci. Rappelons que l’article L. 111-3 du code de l’urbanisme prévoit aujourd’hui (dans sa version en vigueur depuis la loi du 12 mai 2009) les conditions d’obtention d’une autorisation pour une reconstruction à l’identique : « La reconstruction à l’identique d’un bâtiment détruit ou démoli depuis moins de dix ans est autorisée nonobstant toute disposition d’urbanisme contraire, sauf si la carte communale, le plan local d’urbanisme ou le plan de prévention des risques naturels prévisibles en dispose autrement, dès lors qu’il a été régulièrement édifié. Peut également être autorisée, sauf dispositions contraires des documents d’urbanisme et sous réserve des dispositions de l’article L. 421-5, la restauration d’un bâtiment dont il reste l’essentiel des murs porteurs lorsque son intérêt architectural ou patrimonial en justifie le maintien et sous réserve de respecter les principales caractéristiques de ce bâtiment. » S’agissant d’une autorisation de reconstruction à l’identique, l’autorité d’urbanisme se doit néanmoins de vérifier au sens de l’article L. 111-3 du code de l’urbanisme : – Que le bâtiment détruit pour lequel est sollicité une reconstruction était régulièrement édifié (Cour administrative d’appel de Nantes, 15 février 2013, n°11NT01834) ; – Que la démolition du bâtiment pour lequel est sollicité une reconstruction soit intervenue il y a moins de 10 ans (Conseil d’Etat, 9 mai 2012, n°341259 ; Cour administrative d’appel de Lyon, 31 juil. 2012, n°12LY00839) ; – Que le projet de reconstruction est identique au bâtiment démoli (Cour administrative d’appel de Marseille, 7 févr. 2008, n° 05MA00811 ; CAA Douai, 5 juill. 2007, n° 06DA01662 ; Cour administrative d’appel de Lyon 2 févr. 2006, n° 02LY02286) ; – Que les dispositions de la carte communale ou du plan local d’urbanisme applicables ne s’y opposent pas. – Le cas échéant, un dernier considérant mentionne si le projet de reconstruction à l’identique est soumis ou pas à un risque certain et prévisible de nature à mettre en danger la sécurité des occupants. Précisons que même dans le cas d’une reconstruction à l’identique, le pétitionnaire est tenu de respecter les formalités requises pour la présentation d’un dossier de demande de permis : « [l’article L. 111-3, alinéa 1] n’a ni pour objet ni pour effet de dispenser le pétitionnaire et l’autorité d’urbanisme du respect des formalités prévues par les textes en ce qui concerne la présentation et l’instruction des demandes de permis de construire, quand bien même elles avaient été accomplies lors de la délivrance du permis initial et ce dernier fût-il récent » (Cour administrative d’appel de Lyon, 19 mars 2013, n°12LY01618). De fait, la demande de permis de construire doit respecter les prescriptions prévues par les articles R431-5 à R431-12 du Code de l’urbanisme. En l’espèce, une société avait saisie la juridiction administrative aux fins d’obtenir l’annulation de la décision du maire d’une commune lui refusant un permis de construire en vue d’une reconstruction à l’identique. Sa demande avait été rejetée successivement par le tribunal administratif et la Cour administrative d’appel. La particularité du litige tenait au fait que le sinistre avait été causé antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi nouvelle. Saisi du litige le Conseil d’Etat censure l’arrêt d’appel aux motifs qu’une erreur de droit a été commise relativement à l’interprétation de l’article L111-3 du code de l’urbanisme et rappelle: « Considérant que l’article L. 111-3 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction issue de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, disposait que : « La reconstruction à l’identique d’un bâtiment détruit par un sinistre est autorisée nonobstant toute disposition d’urbanisme contraire, sauf si la carte communale ou le plan local d’urbanisme en dispose autrement, dès lors qu’il a été régulièrement édifié »; que la loi du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d’allègement des procédures a modifié ces dispositions pour prévoir que : ” La reconstruction à l’identique d’un bâtiment détruit ou démoli depuis moins de dix ans est autorisée nonobstant toute disposition d’urbanisme contraire, sauf si la carte communale ou le plan local d’urbanisme en dispose autrement, dès lors qu’il a été régulièrement édifié. (…) Considérant que lorsqu’une loi nouvelle institue, sans comporter de disposition spécifique relative à son entrée en vigueur, un délai de prescription d’un droit précédemment ouvert sans condition de délai, ce délai est immédiatement applicable mais ne peut, à peine de rétroactivité, courir qu’à compter de l’entrée en vigueur de la loi nouvelle ; que si, en adoptant les dispositions de la loi du 13 décembre 2000 insérées à l’article L. 111-3 du code de l’urbanisme, le législateur n’a pas entendu permettre aux propriétaires d’un bâtiment détruit de le reconstruire au-delà d’un délai raisonnable afin d’échapper à l’application des règles d’urbanisme devenues contraignantes, les modifications apportées à cet article par la loi du 12 mai 2009 ont notamment eu pour objet de créer expressément un délai ayant pour effet d’instituer une prescription extinctive du droit, initialement conféré par la loi du 13 décembre 2000 aux propriétaires d’un bâtiment détruit par un sinistre, de le reconstruire à l’identique ; qu’il résulte de ce qui précède que le délai qu’elle instaure n’a commencé à courir, dans tous les autres cas de destruction d’un bâtiment par un sinistre, qu’à compter de la date d’entrée en vigueur de la loi du 12 mai 2009 ; que, dès lors, la société requérante n’est pas fondée à soutenir que les dispositions de l’article L. 111-3 du code de l’urbanisme issues de cette loi, qui n’ont pas d’effet rétroactif, méconnaîtraient le principe de sécurité juridique ainsi que celui d’égalité devant la loi garantis par la Déclaration des droits de l’homme et du…

Limites de rejets de tritium en INB : pas de manque de précaution selon le Conseil d’Etat

Par David DEHARBE Le Comité de réflexion d’information et de lutte anti-nucléaire (CRILAN) avait demandé au Tribunal administratif de Caen l’annulation de l’arrêté du 15 septembre 2010 du ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer et du ministre de l’économie, de l’industrie et l’emploi, portant homologation de la décision n° 2010-DC-0188 de l’autorité de sûreté nucléaire (ASN) du 7 juillet 2010 fixant les limites de rejets dans l’environnement des effluents liquides et gazeux pour l’exploitation des réacteurs “Flamanville 1” (INB n°108), “Flamanville 2” (INB n°109) et “Flamanville 3” (INB n°167). En vertu de l’article R. 351-2 du code de justice administrative la juridiction a transmis l’affaire au Conseil d’Etat qui s’est prononcé par un arrêt du 17 octobre 2014 (Conseil d’État, 6ème / 1ère SSR, 17/10/2014, 361315). Cette espèce retiendra l’attention des spécialiste du droit nucléaire en ce que le Conseil d’Etat se reconnaît compétent sur la base de la nouvelle rédaction de l’article R. 311-1 4° du Code de justice administrative pour connaître en premier et dernier ressort des recours, de plein contentieux, contre les arrêtés ministériels homologuant les décisions prises par l’Autorité de sûreté nucléaire. Cela n’allait pas de soi, l’article R. 311-1 du Code de justice administrative visant les décisions de l’ASN mais par leur homologation par arrêté Ministériel. Pour sa part, l’environnementaliste relève cet arrêt à deux autres titres. D’abord sur le terrain de la suffisance d’impact, le Conseil confirme qu’il n’est pas impossible de compléter dans des circonstances bien particulières une étude d’impact après enquête publique : « l’association requérante soutient que l’étude d’impact serait insuffisante, faute d’analyser les conséquences du rejet dans l’environnement de substances chimiques nocives, susceptibles notamment de provoquer de graves lésions oculaires, provenant de l’utilisation de six tonnes par an de produits dits désincrustants nécessaires au fonctionnement de l’unité de dessalement d’eau de mer de l’EPR, qui doit traiter environ 430 000 m3 d’eau par an ; que l’insuffisance de l’étude d’impact est démontrée, selon elle, par la production d’une étude d’impact complémentaire détaillée traitant ce point, réalisée deux ans après l’enquête publique ; que, toutefois, la circonstance qu’a été réalisée ultérieurement une étude complémentaire afin de préciser certaines modalités d’exécution du projet ne révèle pas par elle-même une insuffisance du dossier de demande d’autorisation ou de l’étude d’impact ; que figurait dans le dossier soumis à enquête publique une annexe B-6c relative à l’unité de dessalement mentionnant l’utilisation de produits désincrustants et comportant une appréciation de la consommation, de la fréquence et des rejets de ces produits ; que, par suite, aucune insuffisance du dossier de demande ou de l’étude d’impact initiale ne peut être regardée en l’espèce comme établie ». On le voit une fois de plus : c’est la vocation intrinsèquement et suffisamment informative (sur cette notion cf. notre commentaire sur le blog de Green Law sous Conseil d’Etat, 15 mai 2013, n°353010), le Conseil d’Etat a été amené, en tant que juge des) de l’étude initiale qui permet au juge d’écarter tout débat sur l’incomplétude prétendument déduite d’une production après enquête publique . L’environnementaliste retiendra encore ce nouveau refus du Conseil d’Etat de censurer un dispositif réglementaire sur la base du principe de précaution. Certes aux visas des articles 1er et 5 dé la Charte de l’environnement, l’arrêt décline en matière d’INB, le considérant initié dans l’espèce Association coordination interrégionale stop tht et autres (CE, 12 avril 2013, , n° 342409 – « La méthodologie du principe de précaution fixée par le Conseil d’Etat », Droit de l’environnement, n°216, octobre 2013) et appliqué en matière d’amiante (Conseil d’État, 1ère / 6ème SSR, 26/02/2014, 351514, note Deharbe AJDA 2014, p. 1566) : « qu’il incombe à l’autorité administrative compétente en matière d’installations nucléaires de base de rechercher s’il existe des éléments circonstanciés de nature à accréditer l’hypothèse de risques de dommages graves et irréversibles pour l’environnement ou d’atteintes à l’environnement susceptibles de nuire de manière grave à la santé, qui justifieraient, en dépit des incertitudes subsistant quant à leur réalité et à leur portée en l’état des connaissances scientifiques, l’application du principe de précaution ». Mais s’agissant de contrôler, l’augmentation des limites des rejets de tritium sous forme gazeuse ou liquide (” eau tritiée “) homologuée par le Ministre, le Conseil d’Etat rejette au fond le moyen en concluant que « l’administration n’a pas commis d’erreur d’appréciation dans l’évaluation des risques de l’installation » dès lors que « ces limites maximales demeurent très inférieures à celles qui sont prévues par la réglementation sanitaire en vigueur; que l’augmentation des limites de rejet du tritium s’accompagne d’une diminution des rejets d’autres substances radioactives ; qu’en outre, les études ou documents les plus récents versés au dossier, notamment le livre blanc du tritium publié le 8 juillet 2010, qui été rédigé sur la base des réflexions des groupes de travail mis en place en 2008 par l’ASN, et les travaux de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), s’ils soulignent la nécessité de poursuivre les recherches, confirment, en l’état des connaissances scientifiques et compte tenu des mesures prises, l’absence de risques graves pour l’environnement ou la santé publique ». On remarquera encore avec le plus grand intérêt,  que le Conseil d’Etat a pris lui-même le soin d’actualiser son appréciation sur le prétendu manque de précaution, dès lors que que l’arrêt précise : « qu’il ne résulte pas de l’instruction que des circonstances nouvelles seraient de nature à remettre en cause l’appréciation portée sur ceux-ci ».

P.P.R.T. : nouveau toilettage sur ordonnance

Par David DEHARBE A la suite de la catastrophe AZF, c’est par la loi n°2003-699 du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages que l’obligation pour l’Etat de créer des PPRT a été instituée aux articles L. 515-15 à L. 515-26 du code de l’environnement du Code de l’environnement. Le décret n°2005-1130 du 7 septembre 2005 définit les modalités et les délais d’élaboration de ces plans (cf. ses dispositions codifiées aux articles R. 515-39 à R. 515-50 du code de l’environnement). Un PPRT est constitué d’un plan de zonage réglementaire, d’un règlement, d’un cahier de recommandations et d’une note de présentation. En localisant son bien sur le plan le riverain pourra identifier les prescriptions de travaux et les recommandations qui s’y appliquent. Le guide d’élaboration des PPRT, en ligne sur le site Internet du ministère, donne les outils méthodologiques d’élaboration des plans, de l’examen des études de dangers à la définition de la stratégie du plan, combinant réglementation de l’urbanisme, de la construction et des usages, mesures foncières et actions de réduction des risques à la source. Ces plans doivent délimiter un périmètre d’exposition aux risques technologiques à l’intérieur duquel peuvent être instituées dans certaines zones prévues par l’article L. 515-16 du Code de l’environnement, des prescriptions relatives à la construction, à l’utilisation ou à l’exploitation d’ouvrages, un droit de délaissement des bâtiments existants, un droit d’expropriation pour les communes à l’encontre des immeubles et droits réels immobiliers. Le dispositif a du subir plusieurs modifications tant la mise en œuvre des PPRT a posé problème, au-delà de la difficulté de les élaborer. Leurs mesures foncières devant être financées par l’Etat, les collectivités territoriales et l’exploitant, à des parts de contribution déterminées par convention négociée entre ces parties, il n’était pas rare qu’aucun accord ne soit trouvé. Une circulaire du 3 mai 2007 de la Ministre de l’écologie adressée aux préfets tentait de résoudre ce problème en fixant la part de contribution de l’état entre 25 et 40% du coût total des mesures foncières en fonction de certains critères. Cependant, le rapport du Sénat n°107 pour la période 2011-2012 note que seulement trois conventions de financement ont étaient signées fin 2011 … Pour tenter de remédier à ce problème, la loi de finance pour 2012 (loi n°2011-1977 du 28 décembre 2011) est venue prévoir expressément la part de contribution de chaque partie aux mesures foncières (un tiers du coût total). En tout état de cause si l’absence de signature des conventions n’empêche pas l’approbation des PPRT, les réticences des collectivités et des exploitants à supporter la charge de ces plans expliquent sans aucun doute que 10 ans après l’entrée en vigueur de la loi “Risques”, faussement flatteur le bilan par le avancé Ministère de l’Ecologie. Certes en 2013 les PPRT « concernent 407 bassins industriels et plus de 800 communes et 99% d’entre eux sont désormais prescrits et 73 % approuvés. Plus de 10 000 personnes sont concernées par des mesures foncières, dont le coût s’élève à environ 2 Md€, et plus de 100 000 par des travaux de renforcement. Par ailleurs, les investissements réalisés par les industriels afin de réduire les risques de leurs établissements se sont élevés à des montants annuels compris entre 200 et 300 M€ et ont permis de réduire les zones soumises aux mesures foncières d’environ 350 km ² ». Mais derrière ce bilan se cache une toute autre réalité : celle du financement, à penser comme à trouver. D’abord le Conseil constitutionnel (Décision n° 2012-662DCLoi de finances pour 2013 Article104 (ex 64 bis) Financement des travaux prescrits dans le cadre d’un plan de prévention des risques technologiques (PPRT)) a censuré le dispositif d’aide aux riverains des établissements soumis à PPRT contenu dans la loi de finances pour 2013, cette disposition étant jugée étrangère au domaine des lois de finances et donc constitutive d’un censure des «cavalier budgétaires ». Le dispositif visait à porter à 90% la prise en charge du coût des travaux de renforcement du bâti dans les habitations des riverains des sites concernés : l’Etat accordant un crédit d’impôt porté de 30 à 40%, et la loi rendait obligatoire l’engagement auparavant volontaire intervenu d’un cofinancement des travaux par les collectivités et les industriels à hauteur de 25% chacun – solution tendant à généraliser l’accord national établi entre les représentants de l’Association des maires de France, Amaris et les principales fédérations d’industriels concernées.. Puis c’est la loi n°2013-619 du 16 juillet 2013, portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union Européenne dans le domaine de l’environnement qui a du lever les freins à l’élaboration et à l’approbation des Plans de Préventions des Risques Technologiques (PPRT) en prévoyant : – Un délai de 6 ans à compter du bouclage financier du PPRT pour les riverains pour exercer le droit de délaissement lorsque celui-ci leur a été accordé par le PPRT. On notera que pour les plans approuvés avant le 30 juin 2013, les riverains ont jusqu’au 30 juin 2020 pour exercer ce droit (loi n°2013-619, art. 4); – Une clarification des travaux prescrits par le PPRT éligibles au crédit d’impôt à hauteur de 40% de leur coût total en y intégrant expressément le diagnostic préalable aux travaux (loi n°2013-619, art. 6) ; – L’harmonisation du plafonnement du montant des travaux prescrits aux riverains par le PPRT avec le plafond prévu pour le crédit d’impôt au bénéfice des personnes physiques, fixé à l’article 200 quater A du code général des impôts . Ainsi désormais, le plafond du montant des travaux prescrits par le PPRT à un riverain est de 20 000 euros (loi n°2013-619, art. 8); – La participation à hauteur de 50% répartie à parts égales entre d’une part les exploitants à l’origine des risques et d’autre part les collectivités territoriales dans le financement des travaux prescrits aux riverains par le PPRT (loi n°2013-619, art. 9); – L’inclusion des dépenses liées à la limitation de l’accès et à la démolition éventuelle des biens…

Mise à distance des éoliennes pour les générations futures : suspense au Parlement

Par Marie-Coline Giorno (Green Law Avocat) Tous les jours, les médias répètent qu’il faut abandonner l’énergie nucléaire et les énergies fossiles, qu’il faut multiplier le recours aux énergies renouvelables, que le projet de loi sur la transition énergétique doit constituer une avancée fondamentale pour l’environnement, qu’il est nécessaire d’agir pour le climat et qu’à cette fin, la 21ème conférence sur le climat qui se déroulera fin 2015 à Paris doit être un succès… Dans un contexte où les préoccupations environnementales reviennent manifestement sur le devant de la scène, le Sénat semble pourtant en avoir décidé autrement en mettant un frein au développement de l’énergie éolienne terrestre. Pourtant, le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte présenté au nom de M. Valls par Mme Royal affichait initialement des objectifs ambitieux. Ainsi, l’exposé de ses motifs précisait notamment que : « Le projet de loi fixe les objectifs, trace le cadre et met en place les outils nécessaires à la construction par toutes les forces vives de la nation – citoyens, entreprises, territoires, pouvoirs publics – d’un nouveau modèle énergétique français plus diversifié, plus équilibré, plus sûr et plus participatif. Il vise à engager le pays tout entier dans la voie d’une croissance verte créatrice de richesses, d’emplois durables et de progrès. Une croissance qui lutte contre le réchauffement climatique, combat le chômage et réduit la facture énergétique de la France, qui s’élève à près de 70 milliards d’euros au détriment de notre balance commerciale et de nos finances publiques. Une croissance non prédatrice qui protège la biosphère et nous permet de vivre en harmonie avec ses écosystèmes dont nous sommes partie intégrante. Une croissance qui valorise de nouvelles technologies et permet de conquérir de nouveaux marchés dans le domaine des énergies renouvelables et des transports propres. […] Ce texte exprime la conviction que la France dispose de puissants atouts pour réussir une mutation énergétique qui n’est pas une contrainte à subir mais une chance à saisir. » Son article 38 devait notamment procéder au toilettage et à la clarification de diverses dispositions du code de l’énergie. Ce projet de loi a été déposé par le Gouvernement devant l’Assemblée nationale et, dans un premier temps, examiné par elle. Le texte adopté par l’Assemblée Nationale le 14 octobre 2014 a ajouté après cet article 38 un article 38 bis A concernant l’implantation des éoliennes au regard des documents d’urbanisme et un article 38 bis concernant le moment auquel doit s’apprécier la compatibilité d’une installation classée avec les documents de planification d’urbanisme. Il n’était toutefois nullement question de modifier la distance d’implantation entre les habitations et les éoliennes. Dans un second temps, le projet de loi dans sa version adoptée par l’Assemblée nationale a été transmis au Sénat. Avant d’être examiné en séance plénière, le projet de loi a été transmis à une commission chargée de l’étudier, de proposer des modifications (amendements) et d’élaborer le « texte de la commission ». Un amendement a été déposé sur le texte de la Commission par plusieurs sénateurs dont M. Germain. Cet amendement visait à ajouter un nouvel article après l’article 38 bis A afin d’imposer une distance de 1000 mètres entre les habitations et les éoliennes industrielles, contre 500 mètres actuellement. Aux termes de cet amendement, la deuxième phrase du cinquième alinéa de l’article L.553-1 du code de l’environnement devait désormais être rédigée ainsi : « La délivrance de l’autorisation d’exploiter est subordonnée à l’éloignement des installations d’une distance de 1000 mètres par rapport aux constructions à usage d’habitation, aux immeubles habités et aux zones destinées à l’habitation définies dans les documents d’urbanisme en vigueur à la date de publication de la même loi. » L’exposé des motifs de cet amendement faisait état du fait que la distance de 500 mètres actuellement retenue était « largement sous-évaluée ». A cet égard, l’exposé des motifs se faisait l’écho des protestations « rapportées quasiment rapportées quotidiennement dans la presse régionale, de la part de populations rurales ou périurbaines qui manifestent leur désarroi. Les recours sont presque systématiques. » Pour justifier l’insuffisance de la distance actuelle, étaient aussi invoqués « une atteinte substantielle au droit de propriété et au droit de jouissance des riverains », l’impact sur la santé et la dévalorisation des biens immobiliers. Cet amendement avait donc pour objectif de concentrer les éoliennes industrielles dans les zones inhabitées et ce, afin de « préserver le point de départ des vocations écologistes : la beauté de la nature et de nos paysages qui participent de notre exception culturelle ». Cet amendement a été discuté en séance publique le 17 février dernier. M. Germain, qui défendait l’amendement, a alors justifié sa position par les considérations suivantes : « En définitive, c’est un sujet de biodiversité : nous souhaitons protéger le périurbain et le rural. Évidemment, l’urbain de passage qui voit au loin ces éoliennes les trouve belles et majestueuses. C’est vrai ! Mais, pour ceux qui vivent à côté, ces éoliennes géantes sont parfaitement intolérables, sans parler de la dévalorisation de leurs biens immobiliers. » M. Nègre, au nom de la Commission du développement durable, a déplacé le débat en soulignant un point très intéressant sur les distances entre les éoliennes et les habitations : Il a ainsi énoncé : « J’ai ainsi découvert que l’Académie nationale de médecine a recommandé en 2006 une distance de protection de 1 500 mètres et que la Royal Society of Medecine a mis en évidence un impact des éoliennes sur la santé perceptible jusqu’à 10 000 mètres de distance. J’ai également appris que le land de Bavière a décidé, après réflexion, que la distance par rapport à l’éolienne devait être égale à la hauteur de celle-ci multipliée par dix. […] Au Danemark, la distance doit être égale à trois fois la hauteur totale de l’éolienne.[…] En revanche, en Espagne, il n’existe pas de distance minimale, c’est étudié au cas par cas. Aux États-Unis, les comtés de Californie ont instauré des distances variant de une à quatre…