Par Frank ZERDOUMI, Juriste et Docteur en droit public (Green Law Avocats)
Dans le contentieux éolien, la cristallisation des moyens intervient automatiquement dans un délai de deux mois à compter du premier mémoire en défense, pour rendre irrecevable tout moyen nouveau passé ce délai (pour une application récente cf. par ex. Cour administrative d’appel de Toulouse, 4ème chambre, 25 avril 2024, req. n°22TL21408, téléchargeable sur Doctrine).
Dans un arrêt du 12 juillet 2024 (n°22NT01245, téléchargeable ici), la Cour administrative d’appel de Nantes a considéré, en qualité de juge de premier et dernier ressort de l’autorisation environnementale d’un parc éolien terrestre (cf. art. R. 311-5 du CJA), que les moyens, dont la précision, permettant d’évaluer leur portée et leur bien-fondé, n’est apportée qu’après l’expiration du délai de 2 mois prévu à l’article R. 611-7-2 du Code de justice administrative, doivent être considérés comme des moyens nouveaux invoqués tardivement ; ils sont donc irrecevables.
En l’espèce, la société Parc Eolien de Longuenée (SPEL) a déposé, le 8 avril 2019, une demande d’autorisation environnementale pour exploiter quatre éoliennes sur les communes de Grez-Neuville et de Longuenée-en-Anjou.
Après enquête publique, le Préfet du Maine-et-Loire a autorisé l’exploitation des éoliennes E1, E2 et E3, mais a rejeté celle de l’éolienne E4. Une association et plusieurs personnes physique ont ensuite demandé à la Cour administrative d’appel de Nantes d’annuler l’autorisation d’exploiter les éoliennes E1, E2 et E3.
Dans leur demande initiale, les requérants se sont limités à affirmer qu’ils :« entendront démontrer que l’étude d’impact présentée dans le dossier de demande d’autorisation comportait plusieurs lacunes, notamment en ce qui concerne l’étude de dangers, l’analyse écologique, l’analyse paysagère, en particulier la qualité des photomontages, ainsi que l’étude d’impact sur laquelle la SPEL base son projet » et qu’ils « soulèveraient tant les vices affectant la procédure et le déroulement de l’enquête publique que les irrégularités touchant la composition du dossier et le rapport du commissaire enquêteur ».
De plus, les requérants n’ont fourni les précisions nécessaires pour évaluer la portée et le bien-fondé de ces arguments que dans un mémoire enregistré le 27 février 2023, soit après l’expiration du délai de 2 mois suivant la communication aux parties, le 19 août 2022, du premier mémoire en défense de la société Parc Eolien de Longuenée.
Ces moyens, précisés tardivement, ont été considérés comme irrecevables en raison de leur introduction hors délai. De surcroît, tels qu’ils ont été initialement invoqués, ils manquaient, selon la Cour, de précisions suffisantes pour en évaluer la portée et le bien-fondé, et ont donc été rejetés.
« Ces moyens, qui n’ont été précisés qu’après le délai prévu par les dispositions de l’article R. 611-7-2 du code de justice administrative, doivent être regardés comme des moyens nouveaux irrecevables, car invoqués tardivement. Par ailleurs, tels qu’ils ont été invoqués avant l’expiration de ce délai, ils ne peuvent qu’être écartés comme dépourvus des précisions permettant d’en apprécier la portée et le bien-fondé. ».
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