Eolien/ICPE : après les décrets, les précisions ministérielles !

Installations classées pour la protection de l’environnement depuis la mi-juillet 2011 (cf. art. 90 de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 – art. L. 553-3 du code de l’environnement),  deux décrets en date du 23 août 2011 (décret n° 2011-984 modifiant la nomenclature des installations classées ; décret n° 2011-985 pris pour l’application de l’article L ; 553-3 du code de l’environnement), publiés au JORF du 25 août 2011 et  applicables depuis le 26 août 2011, ont non seulement soumis les éoliennes au régime de l’autorisation  ou, à défaut, de la déclaration  mais encore déterminé les conditions de constitution des garanties financières liées à la mise en service des éoliennes soumises à autorisation (visant à couvrir la défaillance de l’exploitant lors de la remise en état du site). Une nouvelle rubrique a ainsi été introduite à  la  nomenclature ICPE: la rubrique 2980. Sans entrer dans les détails, l’on rappellera que le principe est celui de l’autorisation pour les installations dont les mâts dépassent 50 mètres ou pour les installations  comprenant des aérogénérateurs d’une hauteur évoluant entre 12 et 50 mètres et d’une puissance supérieure ou égale à 20 MW. Le régime de la déclaration vaut, quant à lui, pour les aérogénérateurs dont la hauteur varie entre 12 et 50 mètres et dont la puissance est inférieure à 20 MW (décret n° 2011-984). De nombreuses critiques ont déjà été émises sur ce blog quant à la teneur de ces décrets (D. Debarbe, Classement ICPE des éoliennes : la parution des décrets mais par encore des arrêtés, 25/08/11) ou projets de décrets (D. Deharbe Le classement des éoliennes : l’été sera chaud et venteux, 08/06/2011). Suivant la position officielle du Ministère de l’Ecologie, les nouveaux textes doivent assurer une meilleure lisibilité des procédures et améliorer l’acceptation des éoliennes par les populations locales. Pour ce faire,  les décrets ont rapidement été précisés par des arrêtés ministériels en date du 26 août 2011 (publiés au JORF du 27 août 2011), à savoir :  L’arrêté  du 26 août 2011 relatif aux installations classées relatif aux installations de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent au sein d’une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l’environnement (lequel revient sur la règle des 500 mètres d’éloignement pour les constructions à usage d’habitation et celle des 300 mètres d’éloignement de toute installation nucléaire ainsi que sur la nécessité de ne pas perturber le fonctionnement des  installations radars,  de navigation aérienne ou météorologique ) ;  L’arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent au sein d’une installation soumise à déclaration au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l’environnement ; L’arrêté du 26 août 2011 relatif à la remise en état et à la constitution de garanties financières pour les installations de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent.  Les dispositions en question sont entrées en application dès le 28 août 2011, soit le lendemain de la publication des arrêtés au JORF, pour les demandes d’autorisation, d’extension ou de modification des installations existantes régulières. Néanmoins, pour les installations ayant fait l’objet d’une mise en service industrielle avant le 13 juillet 2011, celles ayant obtenu un permis de construire avant cette même date ainsi que celles pour lesquelles l’arrêté d’ouverture d’enquête publique a été pris avant cette même date,  certaines dispositions relatives au suivi environnemental  de l’installation, aux consignes de sécurité et aux émissions sonores  n’entreront en vigueur qu’à compter du 1er janvier 2012 ! Enfin, pour boucler le nouveau dispositif juridique « éolien », une circulaire  en date du 29 août 2011 relative aux conséquences et orientations des éoliennes dans le régime des installations classées (NOR : DEVP1119997C) signée du ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement tend à « éclairer » les services de l’Etat dans la mise en oeuvre de cette nouvelle réglementation et procédure  pour l’instruction des dossiers individuels relatifs aux éoliennes terrestres. Après avoir rappelé les enjeux  des arrêtés ministériels – soit la limitation du contentieux contre les autorisations relatives aux champs éoliens ! -, la circulaire énonce les enjeux techniques en cause  (Revus à la baisse pour les services de l’Etat)  dans les domaines suivants :  – La coexistence avec les radars de l’aviation civile, de la Défense ou de Météo-France (instauration de relations directes entre les pétitionnaires et les opérateurs radars) : par exemple, un accord explicite de l’opérateur radar est requis pour obtenir une autorisation ou démarrer l’exploitation d’un parc soumis à déclaration) ;   – Les règles relatives au bruit (avec la simplification de l’étude d’impact) ;  – Les distances d’éloignement des habitations (dont le rappel de la règle des 300 mètres d’éloignement des installations Seveso et des installations nucléaires de base) ;  – Les études de danger (sachant qu’une étude de dangers-type doit  être lancée dès l’automne par le syndicat des énergies renouvelables afin d’alléger la charge d’instruction des inspecteurs des installations classées). Se prévalant des règles  posées au niveau réglementaire national, la circulaire suggère aux représentants de l’Etat dans les départements d’éviter la fixation par arrêtés préfectoraux de prescriptions complémentaires !   Ceci étant,  dans l’attente d’une « doctrine nationale » (dont le contenu ne nous laissera probablement indifférent !), la circulaire insiste immédiatement sur la nécessité, pour les services de l’Etat, de s’assurer du respect, au cas par cas,  du  principe de proportionnalité dans les exigences relatives aux  atteintes aux paysages et à la préservation de la biodiversité, sachant  que les parcs éoliens soumis à autorisation devront faire l’objet d’une première visite d’inspection dans un délai de 6 mois suivant leur mise en service. Au delà de ces rappels, un point particulier est développé dans la circulaire quant à la question de l’articulation  de la nouvelle procédure avec celle du permis de construire.   Pour les projets dispensés de la procédure d’autorisation ou de déclaration pour lesquels une ouverture d’enquête publique a été faite avant…

Antenne relais et précaution : (pour) un regard profane sur le risque …

Monsieur Gabriel Chagnon a engagé depuis deux années une thèse sous ma direction sur l’appréhension de la notion de risque en jurisprudences administrative et judiciaire. Il me signale (et je l’en remercie vivement) cette espèce toute fraiche qui mérite une diffusion immédiate (CA Montpellier 15 septembre 2011, n° 140/04612§ ). Au demeurant, on se risque, en attendant des commentaires plus « scientifiques », à cette brève remarque sur le blog de Green law.  En matière d’antennes relais, le juge judiciaire aura pleinement rempli son office là où le juge administratif n’a pas osé l’exercer entièrement. Certes le Conseil d’Etat a finalement admis que le principe de précaution était opposable aux autorisations d’urbanisme, justement à l’occasion du contentieux occasionné par les DP afférentes aux antennes relais (CE 19 juillet 2010, n° 328687, ASSOCIATION DU QUARTIER LES HAUTS DE CHOISEUL). Mais on le sait, le juge administratif considère aujourd’hui les preuves scientifiques comme insuffisantes pour remettre en cause la légalité des déclarations de travaux. Pour sa part, le juge judiciaire n’a pas hésité sur le terrain des troubles anormaux du voisinage à conclure à «l’anormalité» en scrutant la même littérature scientifique que celle en possession du juge administratif … Mais surtout, comme nous le rappelle l’espèce reproduite, il a regardé cette littérature scientifique avec un autre oeil : non pas celui d’un juge qui se prendrait pour un expert capable de séparer le bon grain de l’ivraie au sein de la controverse scientifique, mais celui du profane désorienté car exposé par les opérateurs de téléphonie mobile sinon à un danger du moins à un risque controversé et surtout imposé. Et plus que jamais il faut saluer le courage de juges qui acceptent de prendre finalement en compte la relativité sociale des opinions scientifiques majoritaires pour le profane et le spécialiste …  L’espèce reproduite et si dessous téléchargeable (CA Montpellier, 15 septembre 2011, n° 140/04612), à l’instar de la piste défrichée par la Cour d’appel de Versailles sur le sujet (CA Versailles, 4 févr. 2009, n° 08/08775, SA Bouygues Télécom c/ Lagouge et a., Environnement n° 4, Avril 2009, comm. 51) comme le Tribunal de Grande Instance de Nanterre (TGI Nanterre, 27 mai 2010, n° RG06/09412) est en la matière sans ambigüité : alors qu’ici l’opérateur avait les moyens de respecter la zone des 100 mètres il a délibérément décidé de descendre en dessous de ce seuil d’exposition bien que la controverse scientifique persiste au moins à la marge sur le risque sanitaire ainsi créé.

Le décret relatif à l’évaluation environnementale des chartes des parcs naturels nationaux

A  la suite de la consultation du public sur le projet de décret relatif aux chartes des parcs nationaux, lancée jusqu’au 12 juillet 2010, le  décret n°2011-1030 du 29 août 2011, publié au JORF du 31 août 2011, soumet à une évaluation environnementale les chartes des parcs naturels nationaux. La charte qui « définit un projet de territoire traduisant la solidarité écologique entre le coeur du parc et ses espaces environnants » présente, pour les espaces dits du coeur, les objectifs de protection du patrimoine naturel, culturel et paysager ainsi que, pour l’aire d’adhésion, les orientations de protection, de mise en valeur et de développement durable (art. L. 331-3 du code de l’environnement – art. 37 de la loi n°2010-788 du 12 juillet 2010). Désormais, en conformité avec les objectifs de la directive communautaire 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001 relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement, le décret prévoit l’obligation d’une évaluation environnementale au moment de l’élaboration de la charte par un groupement d’intérêt public, lors de l’extension de périmètre  et aussi  de modification de la charte. Concrètement,  concernant la charte élaborée  par le groupement d’intérêt public préfigurant  l’établissement public national ou l’établissement public national lui-même, le projet de charte  et le rapport environnemental doivent  être transmis pour avis à la formation d’autorité environnementale du Conseil général de l’Environnement et du développement durable (« CGEDD », art. R 331-7 du Code de l’environnement) ainsi qu’aux collectivités territoriales intéressées et à leurs groupements.  Quant au dossier soumis à  enquête publique par l’autorité préfectorale, il doit contenir non seulement le projet de charte, le rapport environnemental, l’avis émis par la formation d’autorité environnementale du Conseil général de l’environnement et du développement durable  mais aussi le projet de composition du conseil d’administration de l’établissement public du parc (art. R.331-8 du code de l’environnement). Relativement au décret de création du parc, il doit – tout comme la déclaration environnementale –  être transmis, dans un délai de 2 mois,  à la formation d’autorité environnementale du Conseil général de l’environnement et du développement durable par le ministre de la protection de la nature et mis à la disposition du public sur le site internet de l’établissement public pendant au moins 6 mois (art. R 331-12 du code de l’environnement). Enfin, les nouvelles règles d’extension et de modification de la charte, introduites par le décret du 29 août 2011, prévoient que le projet doit être accompagné d’une actualisation de l’évaluation environnementale de la charte ou d’une nouvelle évaluation environnementale de celle-ci et soumis à la formation d’autorité environnementale du Conseil général de l’environnement et du développement durable. Le projet est également soumis à enquête publique avant qu’un décret en Conseil d’Etat ne décide de l’extension et, éventuellement, de la modification de la charte. Les dispositions du décret sont entrées en application le 1er septembre 2011 pour les parcs existants ou en cours de création, sauf en ce qui concerne les mentions  inscrites à l’article R. 331-7, alinéa 3 du code de l’environnement : dans le cadre de la procédure de création d’un parc, l’article 4 du décret reporte au 1er janvier 2012 l’entrée en vigueur des dispositions prévoyant que les GIP (groupements d’intérêt public) joignent aux collectivités territoriales et à leurs groupements le rapport environnemental accompagnant le projet de charte lorsqu’ils les sollicitent pour avis. Patricia Demaye-Simoni Maître de conférences en droit public

Les infractions environnementales épargnées par le Conseil constitutionnel

A la suite de la décision du Conseil constitutionnel sur les jurés populaires, la spécificité des délits environnementaux a encore une fois été reconnue. GREEN LAW fait ici état du point de vue d’une pénaliste, avocate au Barreau de Rouen. « Considérant (…) que toutefois, les infractions prévues au livre IV du Code pénal et celles prévues au Code de l’environnement sont d’une nature telle que leur examen nécessite des compétences juridiques spéciales qui font obstacles à ce que des personnes tirées au sort y participent (…) » (Conseil constitutionnel, décision n°2011-635 DC du 4 août 2011). La loi du 10 août 2011 (n°2011-939)  sur l’entrée de jurés populaires dans les tribunaux correctionnels et sur la refonte de la justice des mineurs a consacré le souhait de l’exécutif d’adjoindre aux magistrats professionnels des jurés dits citoyens au sein, notamment, des Tribunaux correctionnels. Le Conseil constitutionnel a cependant censuré le projet de loi qui lui était soumis en soustrayant à la réforme un certain nombre de délits parmi lesquels ceux figurant au Code de l’environnement. Il s’agit là d’une nouvelle manifestation de défiance à l’égard des magistrats siégeant dans les juridictions pénales, en affectant cette fois la composition de ces dernières. Nous pouvons douter de l’apport véritable de cette réforme et nous réjouir que les infractions environnementales soient passées entre les mailles du filet répressif… En septembre 2010, Nicolas SARKOZY émettait l’idée d’introniser des jurés dits « citoyens » au sein, notamment, des Tribunaux correctionnels et des Chambres de l’application des peines. D’aucuns avaient perçu cette idée comme un nouveau coup de boutoir contre le laxisme imaginaire des magistrats. Alors qu’était remise en cause la présence des juges non professionnels au sein des Cours d’assises (notamment par Michèle ALLIOT-MARIE pour les crimes les moins graves), l’idée paraissait suffisamment incongrue pour nous faire espérer qu’elle n’était qu’un nouvel effet d’annonce caressant une partie de l’opinion publique dans le sens du poil… Las, sans que ce ne soit demandé ni par professionnels de la justice, ni par le peuple, un projet de loi était déposé en ce sens et a été finalement adopté définitivement par l’Assemblée nationale cet été (loi n° 2011-939 du 11 août 2011 sur l’entrée de jurés populaires dans les tribunaux correctionnels et sur la refonte de la justice des mineurs). Objectif affiché de la loi, rapprocher les français de leur justice. Mais beaucoup n’y voient qu’un nouveau moyen d’encadrer l’action des magistrats par la sévérité supposée – et peut-être aussi mythique que le laxisme des juges – des jurés « citoyens » ; HORTEFEUX l’a affirmé, MERCIER s’en défend. Ce qui permet de donner crédit à cette dernière thèse, ce sont les efforts déployés par le pouvoir pour encadrer toujours davantage l’activité des magistrats, lesquels pour beaucoup y voit une nouvelle marque de défiance à leur égard. Les dernières évolutions du droit positif ont en effet comme conséquence première de réduire la liberté des magistrats. – D’abord par le renforcement de la légalité formelle, en encadrant tant que faire se peut la décision des magistrats. En ce sens, nous citerons dans le domaine du droit de la peine  la loi du 10 août 2007 (n° 2007-1198) réintroduisant dans le droit pénal français la notion de peine plancher pour les infractions commises en état de récidive légale et plus récemment, la loi du 14 mars 2011 instituant des peines minimales cette fois pour les primo délinquants… – Aujourd’hui par l’adjonction de jurés dits « citoyens » (les magistrats, comme les greffiers ou les avocats, ne sont-ils pas des citoyens concourant à l’oeuvre de justice ?) ailleurs que dans les procès criminels, censés être plus répressifs que nos complaisants magistrats. Ce projet n’est pas bon, il est inutile, il est couteux. Il n’a été sollicité ni par le corps judiciaire, ni par le peuple. Mais surtout, l’une des préoccupations que soulève cette réforme est celle de l’aptitude des citoyens populaires à exercer la mission de juger. La mission du juré d’Assises n’a rien de comparable avec la mission de juger des prévenus comparaissant devant le Tribunal correctionnel. Aux Assises la présence de représentants du peuple répond à une tradition séculaire, éprouvée par la pratique. On demande aux jurés des procès criminels de se forger une intime conviction. Et en choisissant un quantum de peine, ils sont avant tout juges du trouble à l’ordre public. Aux Assises le luxe de prendre le temps, au Tribunal correctionnel l’exigence de rapidité, voire de rendement et donc de technicité, de spécialisation et de professionnalisme. Il faut tout de même acter que le parlement a limité l’intervention des jurés populaires aux questions relatives à la qualification des faits, à la culpabilité et à la détermination de la peine. Notons d’emblée que la qualification juridique des faits ainsi que le droit des peines correctionnelles peuvent poser de véritables difficultés juridiques, ce qui nous autorise à nourrir l’espoir que dans de telles hypothèses, les magistrats seront en réalité maîtres de la décision. Il est alors permis de douter fortement de l’utilité des jurés. C’est également la raison pour laquelle d’aucuns, nombreux, pensent que derrière la volonté affichée de rapprocher le peuple de ses juges se cache en réalité l’espoir que les jurés compensent par leur sévérité le laxisme des magistrats. Au moins pouvons-nous nous réjouir que le Conseil constitutionnel ait retiré du champ d’application de la loi notamment les délits prévus par le Code de l’environnement. Ainsi, en la matière environnementale, est reconnu aux juges le mérite de leur fonction et de leur compétence. La motivation du Conseil n’est autre que ce que nous avancions en amont : la question de la compétence des jurés pour juger. Sa décision n’est en effet que la reconnaissance d’une évidence, celle qu’il faut un savoir et de l’expérience pour juger. Est il nécessaire de rappeler que les délits environnementaux nécessitent systématiquement une appréciation du juge des conditions techniques de l’activité industrielle en cause ? Un jugement récent du Tribunal correctionnel de Lille (JugementTrib Correctionnel LILLE17.12.2010) vient d’ailleurs de relaxer une…

Eau potable, modulation des aides financières: le Conseil constitutionnel censure certaines dispositions législatives

Dans une décision n°2011-146 QPC du 8 juillet 2011 (« Département des Landes »), le Conseil constitutionnel saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité a invalidé les dispositions législatives adoptées en 2006 interdisant toute modulation des aides publiques accordées aux communes et aux groupements de collectivités territoriales en fonction du mode de gestion des services d’eau potable et d’assainissement (art. L. 2224-11-5 du CGCT).    Ce faisant, cette décision est favorable au Conseil général des Landes qui, en dépit de l’interdiction législative formulée à l’article 54 de la loi n°2006-1772 du 30 décembre 2006 sur l’eau et les milieux aquatiques (art. L. 2224-11-5 du CGCT), avait maintenu, dans son ressort géographique, le principe de la modulation à la hausse des subventions accordées aux communes et à leurs groupements dès lors que les services publics de l’eau potable et de l’assainissement étaient gérés en régie.   Cette décision constitue, en outre, l’aboutissement d’un bras de fer contentieux dans lequel le département des Landes se trouvait impliqué et qui avait débuté en 1996 par l’adoption d’une délibération décidant de faire varier les aides aux communes et à leurs groupements soit à la hausse soit à la baisse en fonction du mode de gestion de ces services (en régie ou en gestion déléguée).     Si, en cassation, le Conseil d’Etat avait pu admettre que le principe de libre administration n’empêchait pas que les régions et les départements modulent le montant de leurs subventions versées aux communes et à leurs groupements selon le mode de gestion du service (CE, 12 décembre 2003, Département des Landes, aff. 236442, conclusions François Séners, RFDA 2004, p. 518), les parlementaires s’étaient saisis de la question lors de la discussion portant sur le projet de loi sur l’eau et les milieux aquatiques pour, au final, interdire toute variation des aides publiques locales selon le mode de gestion des services de distribution de l’eau et de l’assainissement.    L’adoption d’une délibération  du Conseil général des Landes, le 7 novembre 2008, directement contraire aux dispositions de l’article L. 2224-11-5 du CGCT, objet d’un recours contentieux, va mener le juge administratif à introduire une question préjudicielle de constitutionnalité relative à la conformité de ces dispositions législatives avec le principe de libre administration des collectivités territoriales posé à l’article 72 de la Constitution.    La  position retenue par le Conseil constitutionnel a été révélée dans la décision n° 2011-146 QPC du 8 juillet 2011 : après avoir souligné que « si le législateur peut, sur le fondement des articles 34 et 72 de la Constitution, assujettir les collectivités territoriales ou leurs groupements à des obligations, ou les soumettre à des interdictions, c’est à la condition, notamment, que les unes et les autres répondent à des fins d’intérêt général », le Conseil constitutionnel  déclare les dispositions législatives comme étant contraires à la Constitution en ce qu’elles restreignent la liberté d’administration des départements au point de méconnaître  les articles 72 et 72-2 de la Constitution. En conséquence, depuis la publication de la décision au JORF (soit le 9 juillet 2011), les collectivités  régionales et départementales peuvent légalement introduire un régime différencié d’aides publiques aux communes et à leurs groupements pour la gestion des services publics de l’eau potable et de l’assainissement.   Désormais, aucune disposition législative n’interdit à  l’une de ces collectivités d’inciter financièrement les communes et les intercommunalités à opter pour une gestion directe de ces services plutôt que pour une gestion déléguée.    L’usager devrait pouvoir se satisfaire de cette censure constitutionnelle puisque le prix de l’eau est moindre en présence d’un service géré en régie par les communes et les intercommunalités !    Patricia Demaye-Simoni  Maître de conférences en droit public