Immobilier / illégalité du raccordement au réseau public d’assainissement : un dol peut être constitué à défaut de précisions suffisantes dans l’acte de vente

Par Aurélien BOUDEWEEL- Green Law Avocat   Par un arrêt publié au bulletin en date du 24 août 2016, la Cour d’appel de Bordeaux (ca-bordeaux-24-08-2016) rappelle dans le cadre de la vente d’un immeuble, que l’absence de précision suffisante dans l’acte d’informations relativement au raccordement au réseau public d’assainissement peut être constitutive d’un dol. En l’espèce, après qu’une vente fût signée, les acquéreurs ont sollicité par la voie judiciaire la réparation de leur préjudice tenant à l’absence de raccordement au réseau public d’assainissement sur le fondement de l’article 1641 du code civil relatif à la garantie contre les vices cachés et subsidiairement à l’article 1604 du code civil tenant au défaut de conformité de la chose vendue et à l’article 1116 du code civil sanctionnant le dol (nouvel article 1137 du Code civil). Les acquéreurs soutenaient que les anciens propriétaires n’avaient jamais installé de système d’assainissement individuel. Rappelons que l’article L 274-1 du Code de la construction et de l’habitation énonce qu’en « cas de vente de tout ou partie d’un immeuble bâti, un dossier de diagnostic technique, fourni par le vendeur, est annexé à la promesse de vente ou, à défaut de promesse, à l’acte authentique de vente (…). Le dossier de diagnostic technique comprend, dans les conditions définies par les dispositions qui les régissent, les documents suivants : 1° Le constat de risque d’exposition au plomb prévu aux articles L. 1334-5 et L. 1334-6 du Code de la santé publique ; 2° L’état mentionnant la présence ou l’absence de matériaux ou produits contenant de l’amiante prévu à l’article L. 1334-13 du même code ; 3° L’état relatif à la présence de termites dans le bâtiment prévu à l’article L. 133-6 du présent code ; 4° L’état de l’installation intérieure de gaz prévu à l’article L. 134-6 du présent code ; 5° Dans les zones mentionnées au I de l’article L. 125-5 du Code de l’environnement, l’état des risques naturels et technologiques prévu au deuxième alinéa du I du même article ; 6° Le diagnostic de performance énergétique prévu à l’article L. 134-1 du présent code ; 7° L’état de l’installation intérieure d’électricité prévu à l’article L. 134-7 ; 8° Le document établi à l’issue du contrôle des installations d’assainissement non collectif mentionné à l’article L. 1331-11-1 du Code de la santé publique (…) »  Par un jugement en date du 2 octobre 2014, le tribunal de grande instance de LIBOURNE avait rejeté la demande des acquéreurs aux motifs qu’un diagnostic technique et que l’acte notarié précisaient que l’immeuble était raccordé indirectement au réseau public d’assainissement. La juridiction civile a alors considéré que la garantie contre les vices cachés devait être écartée et que ne pouvait être retenue ni le défaut de conformité ni la manœuvre dolosive. Les acquéreurs ont alors interjeté appel du jugement. Dans le cadre de la procédure d’appel, la Cour d’appel censure l’appréciation portée par le tribunal aux motifs que le caractère illégal du raccordement n’avait pas été mentionné aux acquéreurs : «Il ressort de ces éléments et des clauses du contrat de vente susvisées que M. V. a certes été informé de ce que l’immeuble qu’il acquérait n’était pas équipé d’un système d’assainissement individuel, et qu’il était raccordé au tout-à-l’égout de la commune de manière indirecte, par l’intermédiaire d’une pompe de relevage située sur le fonds voisin. En revanche, il n’était nullement informé du caractère illégal de ce raccordement et du fait qu’il s’agissait d’un branchement « sauvage ». En effet, la mention relative à la possibilité pour la commune de procéder au contrôle de la conformité des installations de raccordement et d’exiger le cas échéant leur mise en conformité dans les conditions des articles L.1331-1 et suivants du code de la santé publique n’était pas de nature à l’informer de l’illicéité de la situation, mais avait pour seul effet de porter à sa connaissance l’existence d’une législation en matière de contrôle et de mise aux normes des installations de raccordement » (…). « Il résulte de ces éléments que les consorts D.-B. n’ont pas informé leur cocontractant d’une part du caractère sauvage du raccordement de l’immeuble au tout-à-l’égout, d’autre part de ce qu’ils devaient prendre en charge les frais de fonctionnement de la pompe de relevage non seulement pour leur propre consommation, mais aussi pour celle de leurs voisins. Les consorts D.-B. étaient parfaitement informés de cette situation dont ils étaient eux-mêmes à l’origine, afin de se soustraire au paiement de la taxe de raccordement et aux frais engendrés par une installation d’assainissement individuel. En ne portant pas ces éléments à la connaissance de leur acquéreur, ils ont fait preuve d’une réticence dolosive qui a eu pour conséquence de placer ce dernier, à son insu, dans une situation illégale susceptible d’être à tout moment dénoncée par la commune, avec les conséquences financières qui en seraient résultées ». L’enjeu était de taille puisque comme le souligne la Cour d’appel, l’article 1331-1 du Code de santé publique prévoit que «Le raccordement des immeubles aux réseaux publics de collecte disposés pour recevoir les eaux usées domestiques et établis sous la voie publique à laquelle ces immeubles ont accès soit directement, soit par l’intermédiaire de voies privées ou de servitudes de passage, est obligatoire dans le délai de deux ans à compter de la mise en service du réseau public de collecte ». Au visa de cette disposition, la commune peut procéder au contrôle de non-conformité des installations de raccordement privées au réseau de public d’assainissement et si nécessaire, ordonner leur mise en conformité voire même procéder d’office et aux frais du propriétaire les travaux indispensables. L’arrêt de la Cour d’appel est intéressant puisqu’il se fonde sur la notion de dol visée par l’article 1116 du code civil pour accueillir la demande de réparation des acquéreurs. La difficulté tenait à ce que l’acte de vente précisait que l’immeuble n’était relié qu’indirectement au réseau public d’assainissement. La cour considère ainsi que les mentions figurant dans l’acte tenant au réseau d’assainissement n’étaient pas suffisamment complètes, précises et avaient pour but de tromper les futurs acquéreurs. Notons que la jurisprudence a déjà eu l’occasion de rappeler que…

Absence de diagnostic obligatoire pour la détection de la mérule…… mais responsabilité accrue des vendeurs engagée par les juridictions judiciaires.

La mérule est aujourd’hui responsable de nombreux dégâts considérables au sein des habitations. Malgré une volonté accrue des collectifs d’intégrer « un diagnostic mérule » parmi les diagnostics obligatoires, le Gouvernement n’a aujourd’hui pas modifié la réglementation existante. Dans plusieurs réponses ministérielles (pour ne citer que les plus explicites : la réponse ministérielle du 17 mai 2011 et celle du 07 septembre 2010), il a été rappelé par le Gouvernement que l’institution d’un diagnostic concernant la mérule n’était pas d’actualités : “Le Gouvernement n’envisage pas, à court terme, de modifier la réglementation actuelle sur le dossier de diagnostic technique fourni en cas de vente pour y inclure un nouveau diagnostic relatif aux mérules”. Une telle attitude gouvernementale est pour le moins déroutante au regard des contentieux existants en la matière. En effet, la Cour de cassation dans plusieurs décisions marquantes (Cour de casssation, 3e civ., 19 novembre 2008, n°07-16.746 Bourlet c/Annough, n°2008-045889 ; Cour de cassation, 3e civ, 19 novembre 2008, n°07-17.880 Chardonnet c/Jumeaux n° 2008-045888) démontrent la sévérité à l’encontre des vendeurs de maisons infectées par le mérule. En l’absence de diagnostics obligatoires, la Cour de cassation n’a aujourd’hui d’autres moyens que de se fonder sur la théorie des vices cachées en vertu de l’article 1641 du Code civil selon lequel « Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus ». On comprendra aisément la nécessité pour les juges de rechercher l’existence du vice (existence du mérule) avant la transaction immobilière par exemple. Le recours à un diagnostic mérule diminuerait de manière certaine le contentieux entourant cette problématique. A la fois le vendeur et l’acheteur sécuriseraient leur transaction si un tel diagnostic était obligatoire, de sorte que le contentieux qui subsisterait concernerait uniquement à n’en pas douter celui des professionnels des transactions immobilières. Au regard des réformes gouvernementales annoncées en matière immobilière, il est à parier que la question de la nécessité du diagnostic mérule refera son apparition dans les débats à venir.

DPE : attention à la responsabilité du diagnostiqueur de performance énergétique !

Un arrêt récent rendu par la chambre commerciale de la Cour d’appel d’Angers le 13 décembre 2011 illustre le courant jurisprudentiel actuel tendant au renforcement de la responsabilité des professionnels notamment au niveau des diagnostics immobiliers (Cour_d’appel,_Angers,_Chambre_commerciale,_13 décembre 2011, n°10/02273, n° Juris-Data 2011-031787).   Un diagnostic manifestement erroné Dans cette espèce, les demandeurs avaient acquis de particuliers un ancien local professionnel réaménagé en immeuble à usage d’habitation. Le diagnostic de performance énergétique (DPE) relatif à ce bâtiment faisait état de frais énergétiques modérés pour le chauffage, à savoir une estimation annuelle à hauteur de 960 € TTC. Or, les acheteurs se sont rapidement trouvés confrontés à la difficulté de chauffer leur habitation à plus de 18 degrés ainsi qu’à un coût particulièrement élevé de chauffage. Etonnés de cette situation au vu du diagnostic qui leur avait été remis, ils ont alors fait appel à une autre société aux fins de faire réaliser un second DPE. Celui-ci a estimé le coût annuel du chauffage à hauteur de 5.689 €uros et relevé une isolation insuffisante voire inexistante de plusieurs parties de l’immeuble. Sur ce fondement, les acquéreurs ont donc assigné en référé les vendeurs, le diagnostiqueur technique et le notaire aux fins d’obtenir une expertise judiciaire. Celle-ci a été diligentée et l’expert judiciaire a mis en évidence l’absence totale d’isolation thermique de la maison à usage d’habitation et a évalué le montant des travaux de reprise à la somme conséquente de 195.515, 24 €uros. Les acheteurs ont dès lors introduit une action en responsabilité à l’encontre des différentes parties à l’expertise.   Une défense du diagnostiqueur axée sur les limites de sa mission Outre le débat relatif à la qualité de constructeur du particulier vendant, après réalisation de travaux d’envergure, un immeuble et celui relatif à la responsabilité du notaire en raison de l’absence de mention dans l’acte de vente de la souscription ou non d’une assurance dommages ouvrage et ce alors qu’il avait lui-même connaissance de l’ampleur des travaux effectués, s’est posée la question de la responsabilité du diagnostiqueur dans le cadre de l’élaboration de son diagnostic. En effet, et rappelons le, un tiers à un contrat peut parfaitement invoquer un manquement contractuel de l’une des parties cocontractante dès lors que celui-ci est à l’origine ou a participé à la réalisation de son préjudice. C’est bien évidemment ce qu’ont argué les acheteurs qui précisaient qu’ils n’auraient pas acquis la maison si le montant réel de la dépense énergétique leur avait été fourni. La société chargée du diagnostic soutenait, quant à elle, qu’elle n’avait commis aucune faute dans le cadre de l’élaboration du DPE dès lors qu’elle ne devait pas effectuer de démontage ou d’investigations destructrices et qu’elle ne procédait qu’à un simple examen de visu. Elle précisait que seule l’attitude des vendeurs, qui leur aurait caché volontairement la situation énergétique du bien, serait à l’origine de la difficulté. Il convient en effet de préciser que la production par ces derniers, durant les opérations d’expertise, des factures relatives aux frais énergétiques, révélait une consommation énergétique largement supérieure à celle mentionnée dans le diagnostic établi. Le diagnostiqueur estimait donc qu’il ne pouvait lui être reproché aucun manquement contractuel étant simplement tenu d’indiquer les composants et caractéristiques essentielles du bâtiment d’après son aspect visuel.   Une défense pertinente mais non adaptée aux faits de l’espèce. De tels moyens s’avèrent assurément pertinents s’agissant d’un litige portant sur la responsabilité d’un diagnostiqueur immobilier. En effet, que ce soit dans le cadre du diagnostic amiante, du constat de risque d’exposition au plomb, de l’état relatif à la présence de termites…, il s’agit le plus souvent d’un argumentaire développé par le professionnel incriminé, et suivi par les juridictions. Il convient alors de se reporter aux règles de l’art afférentes à chaque diagnostic (fixées par décret, guide de recommandations, pratiques…) et de constater que la mission du professionnel est encadrée dans certaines limites. Ainsi, un diagnostiqueur amiante ne peut être tenu pour responsable de toute présence d’amiante non détectée dès lors qu’il n’est également pas tenu de réaliser des sondages destructifs. Cependant, et en l’espèce, les juges de première instance, suivis en cela par la Cour d’appel, n’ont pas été sensibles à cet argumentaire. Et pour cause…il semble que le diagnostiqueur n’ait pas respecté les termes de sa mission, et ce indépendamment de la réalisation ou non d’investigations destructrices. La juridiction a ainsi pris le soin de relever que le second diagnostiqueur intervenu n’avait, lui-même, pas réalisé de sondage destructif et qu’il avait néanmoins abouti à une estimation de calcul des frais énergétiques radicalement différente et supérieure par rapport à celle mentionnée par la société assignée dans son DPE. De même, l’examen des factures énergétiques des vendeurs démontrait l’évaluation dérisoire et en contradiction avec la réalité effectuée par le diagnostiqueur mis en cause. Par ailleurs, il résultait du rapport d’expertise que la simple visite des combles par l’expert judiciaire avait suffi  pour qu’il soit mis en exergue une absence totale d’isolation thermique de l’immeuble à usage d’habitation. Ainsi, il ressort de ces éléments qu’un simple constat visuel ainsi qu’une demande de communication des informations nécessaires auprès des vendeurs auraient permis d’établir une estimation de la consommation énergétique plus réaliste. De surcroît, les juges d’appel ajoutent que, quand bien même seules des investigations  destructrices auraient permis de réaliser un diagnostic fiable, il appartenait alors au diagnostiqueur d’attirer l’attention, dans son rapport, sur les limites de sa mission et leur impact sur les conclusions présentées. On trouve ici la fameuse référence à l’obligation de conseil du professionnel, qui permet d’étendre sa responsabilité, au-delà même des limites de sa mission. Enfin, et s’agissant du préjudice et de son lien de causalité, la Cour d’appel d’Angers réforme la décision des juges de première instance et estime que l’obligation de réparation du diagnostiqueur à l’égard de l’acquéreur ne peut être limité à une simple perte de chance. Il doit donc être tenu solidairement avec les vendeurs et le notaire de la réparation de l’entier préjudice, le partage de responsabilité devant par la suite…

Photovoltaïque / devis de fourniture et d’installation : la responsabilité du professionnel (Cass. 1ère civ., 8 mars 2012, n° pourvoi 10-21239)

Aux termes d’un arrêt qui ne manquera pas d’engendrer un changement de pratique dans l’édiction de leurs devis par les vendeurs/installateurs, la 1ère chambre civile de la Cour de cassation a confirmé le principe de la condamnation de la société qui avait émis un devis inexact eu égard au crédit d’impôt susceptible de bénéficier au cocontractant (Cour_de_cassation_Chambre_civile_1_8_mars_2012_10-21 239_Publié_au_bulletin).   LES FAITS En l’espèce, une société avait établi, pour un particulier, un devis de fourniture et d’installation de panneaux photovoltaïques mentionnant le calcul prévisionnel du crédit d’impôt relatif à cette installation. Le cocontractant, ayant in fine bénéficié d’un crédit d’impôt bien moindre que celui indiqué dans le devis accepté (3.750 € de moins par rapport au montant annoncé), a diligenté une procédure en responsabilité contre le vendeur/installateur aux fins d’obtenir des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi de ce fait.   LA PROCEDURE La juridiction de proximité de Gap, dans un jugement du 25 mai 2010, lui a donné raison, sanctionnant le professionnel au titre d’un manquement à son devoir de conseil. La société spécialisée en matière de vente et de pose de panneaux solaires s’est, bien évidemment, pourvue en cassation, l’appel n’étant pas possible.   LES MOYENS DU POURVOI Au soutien de son pourvoi, la demanderesse alléguait qu’elle ne pouvait être tenue, sur le fondement de son devoir de conseil, que s’agissant des caractéristiques essentielles du bien, dont les avantages fiscaux éventuels ne font, selon elle, pas partie. Elle précisait également que son devoir de conseil ne serait susceptible de s’appliquer que s’agissant de ses propres compétences, à savoir la vente et l’installation de panneaux photovoltaïques, et non s’agissant des conséquences fiscales de celles-ci. Par ailleurs, la société indiquait que le devoir de conseil ne pouvait porter sur des informations connues ou réputées connues de tous, telles que l’application d’une loi fiscale et devait, au demeurant, s’apprécier par rapport aux connaissances particulières du client qui, au cas d’espèce, avait déjà bénéficié du mécanisme du crédit d’impôt pour une installation de chauffage Enfin et surtout, elle insistait sur le fait qu’elle avait pris la précaution de souligner que la mention du montant prévisionnel du crédit d’impôt n’était qu’indicative et qu’une lettre d’accompagnement du devis avait attiré l’attention du contractant sur la nécessité de se renseigner plus avant aux fins d’être fixer sur ce point, notamment auprès du centre des impôts.   LA DECISION DE LA COUR DE CASSATION Ces arguments n’ont cependant pas emporté la conviction de la Cour de cassation qui a approuvé le principe de la responsabilité du professionnel retenu par la juridiction de proximité. La décision de la Haute Juridiction est notamment motivée par le fait que l’information donnée au consommateur relative au crédit d’impôt avait déterminé le consentement de celui-ci, le crédit d’impôt étant évalué à plus du tiers du montant du devis. Elle ajoute également que la société aurait du, dès lors qu’elle mentionnait une évaluation du crédit d’impôt, recueillir toutes les renseignements nécessaires pour établir un juste calcul du montant de celui-ci. En revanche, les juges du droit cassent la décision de la juridiction de proximité en ce qu’elle a alloué au cocontractant un montant global à titre de dommages et intérêts sans ventiler entre le préjudice réclamé par celui-ci et la demande reconventionnelle de dommages et intérêts et d’intérêts de retard formulé par le vendeur/installateur. En effet, les juges se doivent de se prononcer distinctement sur chacune des demandes indemnitaires formulées avant que de procéder à une éventuelle compensation entre elles.   L’APPRECIATION Une telle solution s’inscrit dans la droite ligne de la jurisprudence relative à la protection du consommateur, au sens large du terme, à l’égard du professionnel qui ne peut mentionner des informations déterminantes du consentement de son cocontractant sans pour autant en assumer la responsabilité en se bornant à indiquer le caractère indicatif de celui-ci. A cet égard, il convient de rappeler la recommandation de la Commission des clauses abusives de considérer comme abusive toute clause destinée à rendre inopposables au professionnel les informations et documents publicitaires remis au non-professionnel ou consommateur, dès lors que leur précision est de nature à déterminer son consentement (recommandation  de synthèse n°91-02, BOCCRF 06/09/1991). En conséquence, les vendeurs/installateurs devront prendre le soin de ne mentionner dans leur devis le montant du crédit d’impôt afférent à une installation photovoltaïque que s’ils ont, au préalable, exactement évalué celui-ci en fonction des informations fournies par le client, dont il faudra, au surplus, qu’ils se ménagent une preuve en cas de difficulté éventuelle.

Pollution et réticence dolosive : à la recherche de la garantie de l’acquéreur

Dans le cadre d’un litige entre vendeur et acquéreur relatif à la présence en sous-sol de cuves polluées non dénoncées dans le contrat de vente, la Cour d’appel de Douai a rendu un arrêt, le 14 novembre 2011, qui peut en laisser plus d’un perplexe (CA Douai, 14 nov. 2011, n°06/02651) .  En effet, les juges d’appel ont retenu, aux termes de cette décision, une  appréciation plus qu’extensive de la réticence dolosive du vendeur, et plus précisément de l’intention dolosive. Cette solution semble avoir été gouvernée par la volonté de garantir l’acquéreur en présence d’une pollution d’ampleur et de toxicité certaine, à défaut d’autres fondements juridiques envisageables. De surcroît, et alors qu’ils ont très facilement prononcé la condamnation du vendeur, profane en la matière, les juges du fond ont, par ailleurs, limité la garantie due par le notaire en sa qualité de rédacteur de l’acte. Les faits En l’espèce, le vendeur avait vendu à un acquéreur une propriété à usage industriel aux termes d’un acte reçu par notaire le 28 avril 1997. A l’issue de travaux d’excavation pour la mise en place d’un réseau d’assainissement, l’acquéreur a découvert, sous un bâtiment, des citernes enterrées qui, après analyse, se sont avérées contenir des boues toxiques. A la suite d’une expertise judiciaire, l’acquéreur a alors diligenté une procédure au fond à l’encontre du vendeur et du notaire pour solliciter la condamnation de ceux-ci  à lui verser le montant des frais de dépollution. Il a obtenu gain de cause en première instance et un appel a été interjeté. La Cour d’appel de Douai, aux termes de son arrêt rendu le 14 novembre 2011, a condamné in solidum le vendeur et le notaire et opéré un partage de responsabilité entre ces derniers à hauteur des trois quarts pour le vendeur et d’un quart pour le notaire. Si la solution n’apparait pas en soi surprenante dans son principe, la lecture attentive des faits de l’espèce et la motivation des juges de fond suscitent, quant à elles, quelques interrogations. – Une appréciation particulièrement extensive de la réticence dolosive… L’acquéreur avait intenté, à titre principal, son action sur le fondement des articles 1116 et 1382 du Code civil en invoquant la réticence dolosive du vendeur.  La Cour d’appel de Douai se place donc sur ce terrain pour apprécier la responsabilité du vendeur. De l’oubli d’une mention à l’acte de vente à l’intention dolosive Elle relève que l’acte, par lequel le vendeur avait lui-même acquis l’immeuble litigieux, indiquait qu’une activité de vidange avait été exercée sur le site et que la présence de deux citernes dans le sous-sol était mentionnée. Or, si l’acte de vente du 28 avril 1997 rappelait bien les mentions de l’article 8-1 de la loi n°76-663 du 19 juillet 1976 (actuellement article L. 514-20 du Code de l’environnement), il était cependant précisé : « Le vendeur déclare qu’il n’a jamais exploité d’installations soumises à autorisation au sens de la loi précitée sur le terrain objet de la présente vente, hormis celles nécessaires à l’exercice d’une activité de fabrication d’éléments en béton sans danger ou inconvénient au sens de la loi ci-dessus. Il déclare également qu’il n’a jamais été déposé en fouilles, ni utilisé sur le terrain, directement ou dans les appareils ou installations, des déchets ou substances quelconques pouvant entraîner des dangers ou inconvénients pour la santé de l’environnement (tels que, par exemple, amiante, polychlorobiphényles, polychloroterphényles). De même, à sa connaissance, le vendeur déclare qu’il n’a jamais été exercé sur le terrain et les terrains voisins d’activités entraînant des dangers et inconvénients pour la santé, l’environnement et notamment aucune des activités visées par la loi du 19 juillet 1976 ». Et la Cour d’appel de déduire de l’absence de mention, dans l’acte de vente de 1997, de l’exploitation ancienne d’une activité de vidange et de la présence de cuves enterrées la caractérisation d’une réticence dolosive imputable au vendeur. Un raccourci surprenant… Un tel raccourci a de quoi surprendre. En effet, l’élément dommageable était constitué non par la présence de cuves elle-même mais par la pollution qu’elles contenaient, qui elle n’avait jamais été portée à la connaissance du vendeur. Dès lors, l’intention dolosive apparaît objectivement difficilement caractérisable. Cependant, les juges du fond estiment que le vendeur aurait nécessairement du savoir que les cuves avaient servi à usage de vidange et qu’elles étaient ainsi polluées. Cette appréciation des faits de l’espèce ne répond manifestement pas aux conditions requises et contrôlées par la Cour de Cassation pour retenir la réticence dolosive du vendeur. Il convient de rappeler que l’intention dolosive, tout comme la mauvaise foi, ne se présume pas et qu’elle doit être prouvée.  Or, en l’espèce, les juges du fond se fondent uniquement sur une absence de mention à l’acte, non de l’existence de la pollution elle-même, mais de l’activité relativement ancienne de vidange et de la présence de cuves enterrées pour retenir l’existence d’une intention dolosive. Cette position se révèle particulièrement sévère pour le vendeur et, en l’état, injustifiée.  …et contredit par les faits de l’espèce En effet, le vendeur insistait sur les éléments factuels suivants : – son propre vendeur n’avait pas exercé lui-même d’activité de vidanges, contrairement à une mention erronée dans l’acte d’acquisition du 27 décembre 1962, l’exercice d’une telle activité s’avérant en réalité bien antérieure ; – il avait purement et simplement oublié la présence des cuves enterrées, celles-ci ayant été simplement mentionnées au détour d’une phrase dans son propre acte de vente datant de presque 35 ans, et ces cuves étant de surcroît situées sous un bâtiment existant et donc parfaitement invisibles sans travaux d’excavation tels que ceux les ayant mises à jour ; – il ignorait totalement le fait que les citernes contenaient des boues polluées. En dépit de ces éléments, la Cour d’appel de Douai a estimé que le vendeur avait « volontairement dissimulé [à l’acquéreur] des éléments d’information qui l’aurait dissuadée de contracter si elle les avait connus ; que la réticence dolosive est établie et qu’en conséquence elle ne peut s’abriter derrière la clause de…

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