La réception, même avec réserves met fin au contrat d’entreprise

Par Maître Valentine SQUILLACI (Green Law Avocats) L’articulation entre les garanties légales du droit de la construction et la responsabilité contractuelle de l’entrepreneur n’est pas toujours aisée. La Cour de Cassation (Cass. 3ème, civ., 6 septembre 2018, n°17-21.155) vient d’apporter une clarification à ce régime en précisant que la réception de l’ouvrage objet du contrat d’entreprise qu’elle soit intervenue avec ou sans réserves, met fin audit contrat. Les faits de l’espèce sont les suivants : Le Maître d’Ouvrage a conclu avec l’entrepreneur un contrat de construction portant sur la réalisation d’une piscine. L’ouvrage est réceptionné avec réserves le 30 juin 2014. Puis, l’entrepreneur est placé en liquidation et son activité est cédée à un repreneur. Suite à l’apparition de nouveaux désordres, le Maître d’ouvrage assigne en référé le repreneur afin d’obtenir sa condamnation à réaliser, sous astreinte : Les travaux de levée des réserves, Les travaux nécessaires à la réfection des désordres apparus suite à la réception des travaux. Le Tribunal et la Cour d’appel avaient fait droit à la première demande, considérant que dans la mesure où les réserves n’étaient pas levées, le contrat était toujours en cours et avait ainsi été cédé au repreneur devenu titulaire des « contrats en cours » en application du jugement ordonnant la cession. Les premiers juges avaient cependant débouté le Maître d’Ouvrage de son autre demande au motif que les désordres apparus après réception relevaient quant à eux de la garantie des constructeurs, et non de l’exécution du contrat. La Cour de Cassation aligne quant à elle le régime des travaux de levée des réserves sur celui des travaux à réparer les désordres apparus postérieurement à la réception. Elle affirme en effet sans ambiguïté aux termes de son arrêt du 6 septembre 2018 que « le contrat d’entreprise prend fin à la réception de l’ouvrage, avec ou sans réserves » de sorte qu’à compter de cette date, seules les garanties légales peuvent être mobilisées par le Maître de l’Ouvrage. Il est intéressant de noter que la position de la Cour de Cassation diffère sur ce point de celle du Conseil d’Etat qui considère que lorsque la réception est prononcée avec réserves, le contrat se poursuit au titre des travaux ou des parties de l’ouvrage ayant fait l’objet de réserves (CE, 16 janvier 2012, n°352122). Il convient malgré tout de rappeler que, si conformément à cette récente décision le contrat prend fin au moment de la réception, la responsabilité contractuelle de droit commun de l’entrepreneur subsiste quant à elle avant la levée des réserves concurremment avec la garantie de parfait achèvement due par celui-ci. En effet selon une jurisprudence constante de la Cour de Cassation (voir notamment Cass. Civ. 3ème, 6 mai 2014, n°13-14300), le Maître d’Ouvrage qui a dépassé le délai d’un an de la garantie de parfait achèvement peut engager la responsabilité contractuelle de l’entrepreneur s’agissant de ces désordres, sous réserve de démontrer l’existence d’une faute, d’un lien de causalité et d’un préjudice.  Dans l’espèce soumise à la Cour de Cassation, une telle action n’était pas possible dans la mesure où le passif de l’entrepreneur, et donc sa responsabilité contractuelle au titre des désordres apparents à la réception, n’avaient pas été repris par le cessionnaire, seuls les contrats en cours ayant été cédés.  

Amiante : la Cour de cassation précise l’étendue du repérage (Cass, 14 sept.2017)

Par Maître Fanny ANGEVIN (Green Law Avocats) La troisième chambre civile de la Cour de cassation s’est prononcée dans un arrêt en date du 14 septembre 2017 n°16-21.942, sur l’étendue de l’obligation du diagnostic amiante. Pour rappel, le diagnostic amiante correspond à la phase de repérage d’amiante au sein d’un bâtiment. Le vendeur d’un immeuble dont le permis de construire a été délivré avant le 1er juillet 1997 a l’obligation d’effectuer ce diagnostic (article R. 1334-14 du code de la santé publique ; article L. 271-4 du code de la construction et de l’habitation). Dans l’arrêt du 14 septembre 2017, la Cour de cassation était saisie d’un pourvoi à l’encontre d’une décision de la Cour d’appel d’Amiens rejetant les prétentions de requérants, acheteurs d’une maison, dans laquelle ils avaient découvert la présence d’amiante sur les cloisons et doublages des murs non relevée dans le diagnostic. La Cour d’appel d’Amiens avait considéré que l’ensemble des parois des murs et cloisonsétait recouvert de papier peint et que les plaques de revêtements muraux n’étaient ni visibles, ni accessibles et qu’ainsi, le bureau d’études ayant effectué le diagnostic avait réalisé sa mission. La Cour d’appel indiquait ensuite dans sa décision que la méthode dite « par sondages sonores » n’est pas prévue par la norme NFX 46-020, relative au repérage de matériaux et produits susceptibles de contenir de l’amiante dans les immeubles bâtis.   La Cour d’appel motivait aussi son arrêt en faisant valoir que les grattages ponctuels au niveau des extrémités de papiers peints ne constituent pas une méthode d’investigation prévue par les dispositions réglementaires applicables ni celles du contrat liant les parties. La Cour de cassation casse la décision de la Cour d’appel en soutenant que l’opérateur ayant effectué le repérage ne pouvait pas limiter son intervention à un simple contrôle visuel mais devait mettre en œuvre les moyens nécessaires à la bonne exécution de sa mission : « Qu’en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions soutenant que l’opérateur ne pouvait pas limiter son intervention à un simple contrôle visuel mais devait mettre en œuvre les moyens nécessaires à la bonne exécution de sa mission, tout en relevant que le diagnostiqueur s’était abstenu d’effectuer des sondages non destructifs, notamment sonores, et sans rechercher, comme il le lui était demandé, si, dès lors qu’il n’avait effectué de repérage que dans les parties visibles, il pouvait conclure à l’absence d’amiante dans les autres parties sans émettre de réserves, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ; » (Cass. Civ. 3e, 14 septembre 2017, n°16-21.942). La question de l’étendue du repérage amiante a déjà été posée devant la Cour de cassation. En effet, il a déjà été considéré que « le professionnel chargé d’un repérage d’amiante doit rechercher la présence de celle-ci dans toutes les parties visitées et effectuer toutes vérifications n’impliquant pas de travaux destructifs ; que le contrôle qui lui incombe n’est pas exclusivement visuel ; » (Cass. Civ. 3e, 19 mai 2016, n°15-16586). Cette décision vient donc confirmer et préciser la jurisprudence antérieure de la Cour de cassation au sujet de l’étendue des obligations de repérage amiante et doit retenir l’attention des acteurs concernés par une obligation de repérage amiante, qui devront redoubler de vigilance dans la mise en œuvre de ce repérage. Enfin, cette décision intervient également corrélativement à un renforcement des modalités de repérage amiante au sein de l’actualisation de la norme NF X 46-020 (qui a été publié par l’AFNOR en août 2017 et qui vise à remplacer la version datant de 2008), modalités qui sont applicables depuis le 1er octobre 2017. La nouvelle version de la norme NF X46-020 présente quatre principales évolutions : une définition adaptée des responsabilités incombant au donneur d’ordre et à l’opérateur de repérage ; l’apparition, en annexe A, de la notion de zones présentant des similitudes d’ouvrage (« ZPSO ») permettant d’optimiser le déroulement de la mission de repérage, voire de réduire le nombre de prélèvements à effectuer ; des possibilités, pour l’opérateur de repérage, de conclure à la présence ou à l’absence d’amiante, selon les différentes situations rencontrées ; un descriptif plus exhaustif  des sondages et prélèvements à effectuer pour les différents ouvrages ; une présentation des techniques à utiliser pour les sondages, et notamment les outils susceptibles d’être utilisés. fanny.angevin@green-law-avocat.fr

Diagnostic immobilier en matière de termite: le préjudice matériel et de jouissance est entièrement indemnisable (Cour de cassation, 8 juill.2015)

Par Aurélien BOUDEWEEL (Green Law Avocat)   Par un arrêt en date du 8 juillet 2015 (C.cass., Chambre mixte, n°13-26.686) la Cour de cassation rappelle que le diagnostiqueur termites est responsable des investigations insuffisantes effectuées et qu’il doit en conséquence répondre de la réparation de totale des préjudices matériels et de jouissance subis par les acquéreurs. La Cour de cassation rejette dès lors l’argument tiré de ce que seule une perte de chance serait indemnisable. En l’espèce, des particuliers avaient acquis un bien immobilier. Un état parasitaire avait été annexé à l’acte de vente, lequel mentionnait « des traces de termites et d’insectes xylophages sans activité ». Après l’achat, les acquéreurs constatèrent que la maison est en réalité infestée de termites et autres insectes. S’estimant lésés, ils avaient demandé une expertise judiciaire puis avaient assigné la société de diagnostic technique en responsabilité et sollicité en réparation de leur préjudice le paiement des travaux de désinfestation et les conséquences du trouble de jouissance. Rappelons que le législateur contemporain a multiplié les diagnostics obligatoires avant toute vente immobilière, qui donnent donc lieu à des diagnostics effectués par des organismes agréés, devant figurer en annexe de la promesse de vente ou, à défaut de promesse, dans l’acte authentique. La plupart de ces annexes sont contenues dans le dossier de diagnostic technique prévu par l’ordonnance n° 2005-655 du 8 juin 2005 (art. L. 271-4-I du Code de la construction et de l’habitation et Décret n° 2006-1114, 5 sept. 2006).   Dans le cadre du litige soumis à la Cour de cassation, l’assureur de la société de diagnostic (tombée en liquidation judiciaire) reprochait à la Cour d’appel d’avoir reconnu sa responsabilité et d’avoir fait droit à la demande de réparation totale des préjudices, alors que selon l’assureur, seule une perte de chance pouvait être indemnisée. Toute la question est ici de savoir si, dans l’hypothèse où les acheteurs avaient eu une connaissance totale du problème ils auraient quand même acheté; ou s’ils auraient simplement négocié le prix de vente à la baisse.   On comprend bien que l’enjeu pour les assureurs des sociétés de diagnostics techniques (amiante, plomb, termite etc…) est de voir leur condamnation moins lourde en faisant valoir que les acheteurs auraient probablement quand même contracté, et qu’ils ont simplement perdu la chance de négocier un prix de vente à la baisse. Saisie du litige, la Cour de cassation confirme l’appréciation portée par la Cour d’appel et considère:  «  qu’il résulte de l’article L. 271-4 du code de la construction et de l’habitation que le dossier de diagnostic technique annexé à la promesse de vente ou à l’acte authentique de vente d’un immeuble garantit l’acquéreur contre le risque mentionné au 3° du deuxième alinéa du I de ce texte et que la responsabilité du diagnostiqueur se trouve engagée lorsque le diagnostic n’a pas été réalisé conformément aux normes édictées et aux règles de l’art, et qu’il se révèle erroné ; qu’ayant relevé que les investigations insuffisantes de la société HDI n’avaient pas permis que les acquéreurs soient informés de l’état véritable d’infestation parasitaire de l’immeuble et retenu que ceux-ci avaient été contraints de réaliser des travaux pour y remédier, la cour d’appel a déduit exactement de ces seuls motifs que les préjudices matériels et de jouissance subis par M. et Mme X… du fait de ce diagnostic erroné avaient un caractère certain et que la société MMA, assureur de la société HDI, leur devait sa garantie ; que le moyen n’est pas fondé ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi».   L’arrêt rendu par la Cour de cassation confirme le courant jurisprudentiel rendu ces dernières années qui souligne qu’en matière de vente d’immeubles l’obligation du contrôleur technique est de résultat (Cass. 3e civ., 27 sept. 2006, n° 05-15.924 : Bull. civ. 2006, III, n° 194).   L’arrêt permet surtout d’apporter des solutions aux particuliers puisque rappelons que lorsqu’un état dressé par un professionnel certifiant l’absence d’amiante ou de termites a été annexé à l’acte de vente et lorsque la mauvaise foi des vendeurs profanes, qui ont rempli leur devoir d’information, n’est pas établie, la clause d’exonération de garantie des vices cachés, souvent prévue dans les actes de vente, est applicable (Cass. 3e civ., 6 juill. 2011, n° 10-18.882 : JurisData n° 2011-013576). La Haute juridiction par son arrêt du 8 juillet 2015 permet donc aux particuliers de rechercher la responsabilité et d’obtenir la réparation du diagnostiqueur en cas de diagnostic erroné et/ou insuffisant et d’être indemnisé en totalité. Notons par ailleurs que les sociétés de diagnostics sont logiquement assurées de leurs activités de sorte qu’en cas de procédure collective des ces dernières, les compagnies d’assurances concernées permettront aux particuliers, souvent en situation de détresse, d’obtenir réparation de leurs préjudices. Cela étant dit, il revient à celui qui en fait la demande de prouver les désordres. A cette fin, il ne peut qu’être recommandé non seulement de faire établir les faits par huissier, mais compte tenu de la technicité de certains désordres, l’expertise judiciaire préalable à une demande indemnitaire demeure un pré-requis stratégique.            

Le droit à l’eau bientôt mis au régime sec ?

Par David DEHARBE (Green Law Avocat) La Cour de cassation vient de renvoyer en ces termes une question prioritaire de constitutionnalité sur la compatibilité du dispositif législatif anti-coupures d’eau avec les libertés contractuelles, d’entreprendre et l’égalité devant les charges publiques : “Attendu que, saisi d’une demande de réouverture du branchement en eau de la résidence principale de M. X…, le juge des référés du tribunal de grande instance d’Amiens a transmis la question prioritaire de constitutionnalité suivante : “La dernière phrase de l’alinéa 3 de l’article L. 115-3 du code de l’action sociale et des familles, introduite par l’article 19 de la loi n° 2013-312 du 15 avril 2013, est-elle conforme aux principes constitutionnels de liberté contractuelle, de liberté d’entreprendre, d’égalité des citoyens devant les charges publiques et d’intelligibilité de la loi ?” ; Attendu que la disposition contestée est applicable au litige et n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel ; Attendu que la question ne portant pas sur l’interprétation d’une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n’aurait pas encore eu l’occasion de faire application, n’est pas nouvelle ; Mais attendu que la question posée présente un caractère sérieux dès lors que la disposition contestée, qui interdit, dans une résidence principale, l’interruption, y compris par résiliation du contrat, pour non-paiement des factures, de la distribution d’eau tout au long de l’année, est susceptible de porter une atteinte excessive à la liberté contractuelle, à la liberté d’entreprendre et à l’égalité des citoyens devant les charges publiques, en ce qu’elle interdit aux seuls distributeurs d’eau, à la différence des fournisseurs d’électricité, de chaleur ou de gaz, de résilier le contrat pour défaut de paiement, même en dehors de la période hivernale, sans prévoir aucune contrepartie et sans que cette interdiction générale et absolue soit justifiée par la situation de précarité ou de vulnérabilité des usagers bénéficiaires ; D’où il suit qu’il y a lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel” (Cass. 1ère civ., 25 mars 2015, n° 446 (14-40.056) – Cour de cassation – Première chambre civile) Les pauvres se voient ainsi exposés au risque de devoir à nouveau justifier administrativement de leur détresse pour continuer à accéder à l’eau courante. Ceux qui sont à l’origine de cette Q.P.C. ne devraient pas oublier que l’on peut avoir juridiquement raison mais politiquement tort … en tout état de cause, la justice constitutionnelle est désormais sommée de passer.

Vente d’immeuble sans réel raccordement au réseau public d’assainissement : un défaut de conformité, non un vice caché

Par Maître Aurélien BOUDEWEEL (Green Law Avocat) A l’heure où le ministère de l’écologie envisage de mettre en place un système d’information systématique des SPANC (services publics d’assainissement non collectif) sur les transactions immobilières comprenant un assainissement non collectif (Réponse du ministère de l’écologie, publiée au JO Sénat du 19 mars 2015 page 609), l’arrêt de la Cour de cassation en date du 28 janvier 2015 retiendra toute notre attention. Dans cet arrêt publié au bulletin en date du 28 janvier 2015  (C.cass., 3ème civ, 28 janvier 2015 n°13-19945 et 13-27050) la Cour de cassation rappelle dans le cadre du litige qui lui est soumis relativement à la vente d’un immeuble, que l’absence de raccordement au réseau public d’assainissement n’est pas un vice caché mais un défaut de conformité. En l’espèce, après qu’une vente fût signée, les acquéreurs ont sollicité avec succès, par la voie judiciaire, la réparation de leur préjudice résultant de l’absence de raccordement au réseau public d’assainissement sur le fondement de l’article 1604 du code civil et tenant au défaut de conformité de la chose vendue. Précisons que l’acte de vente en cause comportait cette stipulation : « Le Vendeur déclare sous sa seule responsabilité que l’immeuble vendu est raccordé à l’assainissement communal ». Les vendeurs avaient fait appel du jugement aux motifs que la non-conformité de la chose vendue obéit au régime de la garantie des vices cachées et non du défaut de sa conformité. La Cour d’appel avait confirmé la position des premiers juges. Rappelons que l’article 1603 du code civil dispose que le vendeur «a deux obligations principales, celle de délivrer et celle de garantir la chose qu’il vend ». Deux garanties distinctes découlent de cet article : L’obligation de délivrance conforme : elle est définie à l’article 1604 du Code civil: « la délivrance est le transport de la chose vendue en la puissance et possession de l’acheteur ». L’obligation de délivrer une chose conforme consiste pour le vendeur à livrer le bien voulu par l’acheteur, c’est-à-dire un bien répondant aux caractéristiques souhaitées et spécifiées, et sur lesquelles les parties s’étaient mises d’accord. Dès lors, à défaut de délivrer une chose conforme, le vendeur, est susceptible d’engager sa responsabilité contractuelle à l’égard de l’acquéreur, lequel pourra à sa guise opter entre la résolution de la vente ou son exécution ; La garantie légale contre les vices cachés prévue à l’article 1641 du Code civil lequel dispose que « le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage à laquelle on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix s’il les avait connus ». Cette garantie contre la théorie des vices cachés ne s’applique donc : – qu’en présence d’un vice ; – d’un vice qui était caché lors de la vente ; – et à condition qu’il soit invoqué dans le délai prévu à cet effet. Le vice s’apprécie par rapport à la destination normale de la chose. La formule jurisprudentielle habituelle au visa de l’article 1641 du code civil est celle d’un « défaut ou vice rendant la chose impropre à sa destination normale » (Cass. 3ème Civ., 14 fév. 1996 : Bull. Civ. 3, n° 47 ; Paris, 16 sept. 1997, TA 97, p. 1390). La garantie légale de conformité intègre donc aussi bien les défauts de conformité que les vices cachés. En dehors de cette garantie légale, un acheteur peut tout à fait agir sur le fondement de l’obligation de délivrance conforme issue du Code civil ou celui de la garantie des vices cachés lesquels sont fondamentalement distincts. Dès lors que la chose livrée est différente de celle convenue entre les parties et qu’elle ne présente pas les caractéristiques spécifiées, seul le non-respect de l’obligation de délivrance conforme peut être invoqué. Si la chose n’est pas conforme à sa destination normale et que son utilisation en est diminuée, voire impossible, l’acheteur n’aura alors d’autre choix que d’agir sur le fondement de la garantie des vices cachés En l’espèce, dans le cadre du litige qui lui était soumis, la Cour de cassation confirme l’appréciation portée par la Cour d’appel qui avait rejeté la demande des acquéreurs aux motifs : « Mais attendu qu’ayant relevé que l’immeuble avait été vendu comme étant raccordé au réseau public d’assainissement et constaté que le raccordement n’était pas conforme aux stipulations contractuelles, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, en a exactement déduit que les vendeurs avaient manqué à leur obligation de délivrance». Cet arrêt de la Cour de cassation est intéressant en ce qu’il confirme le raisonnement de la Cour d’appel qui s’était contentée de vérifier l’existence d’un défaut de conformité sans avoir recherché l’existence d’un vice caché, nécessitant pour l’acquéreur lésé une démonstration juridique plus importante au stade de la première instance (démonstration de l’existence d’un vice, lequel doit être caché et ce dans un délai). Notons que les juridictions civiles ont déjà eu l’occasion de rappeler que l’absence de raccordement au réseau collectif ne constitue pas un vice caché dans le cadre de la cession d’une maison d’habitation, même située en plein cœur de la campagne. Dans de telles circonstances, il appartenait en effet à l’acquéreur de se renseigner sur ce point, et éventuellement, d’en faire une condition déterminante de son consentement (CA Rouen, 1ère ch., 16 juin 2004, n°RG 02/01932, Mme de Frémicourt c/ Mme Ducloux : Juris-Data n° 2004-246738). De la même manière, on notera que le non raccordement d’un immeuble au réseau d’assainissement collectif n’est pas constitutif d’un vice caché (Civ. 3e, 28 mars 2007, pourvoi n°06-12.461, Dalloz actualité 05 avril 2007). L’arrêt de la Cour de cassation, publié au bulletin, nous rappelle également l’importance de bien veiller à la rédaction et la lecture des actes de vente et/ou notariés qui peuvent prévoir des régimes exonératoires ou limitatives sur ces questions d’absence de…