Par Me Marie-Coline GIORNO (Green Law Avocats)
Actuellement, de nombreuses collectivités s’engagent dans une démarche dite « Zéro Herbicide ». Bien que cette démarche soit tout à fait louable et réponde aux préoccupations environnementales et sanitaires d’une grande partie de la population, il convient de rappeler qu’au niveau juridique, les conditions de mise sur le marché des herbicides s’avèrent strictement encadrées par le règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE du Conseil.
Les herbicides appartiennent à une catégorie plus générale appelée « produits phytopharmaceutiques ».
Aux termes de l’article 2 du règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE du Conseil, les produits phytopharmaceutiques sont des « produits, sous la forme dans laquelle ils sont livrés à l’utilisateur, composés de substances actives, phytoprotecteurs ou synergistes, ou en contenant, et destinés à l’un des usages suivants:
a) protéger les végétaux ou les produits végétaux contre tous les organismes nuisibles ou prévenir l’action de ceux-ci, sauf si ces produits sont censés être utilisés principalement pour des raisons d’hygiène plutôt que pour la protection des végétaux ou des produits végétaux;
b) exercer une action sur les processus vitaux des végétaux, telles les substances, autres que les substances nutritives, exerçant une action sur leur croissance;
c) assurer la conservation des produits végétaux, pour autant que ces substances ou produits ne fassent pas l’objet de dispositions communautaires particulières concernant les agents conservateurs;
d) détruire les végétaux ou les parties de végétaux indésirables, à l’exception des algues à moins que les produits ne soient appliqués sur le sol ou l’eau pour protéger les végétaux;
e) freiner ou prévenir une croissance indésirable des végétaux, à l’exception des algues à moins que les produits ne soient appliqués sur le sol ou l’eau pour protéger les végétaux. »
En préambule, le règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE du Conseil constate que :
« La production végétale occupe une place très importante dans la Communauté. L’utilisation de produits phytopharmaceutiques constitue l’un des moyens les plus importants pour protéger les végétaux et produits végétaux contre les organismes nuisibles, y compris les mauvaises herbes, et pour améliorer la production agricole.
Les produits phytopharmaceutiques peuvent cependant également avoir des effets non bénéfiques sur la production végétale. L’utilisation de ces produits peut présenter des risques et des dangers pour l’homme, les animaux et l’environnement, notamment s’ils sont mis sur le marché sans avoir été officiellement testés et autorisés et s’ils sont utilisés d’une manière incorrecte.
Le présent règlement a pour objet de garantir un niveau élevé de protection de la santé humaine et animale et de l’environnement, et dans le même temps de préserver la compétitivité de l’agriculture communautaire. Il convient d’accorder une attention particulière à la protection des groupes vulnérables de la population, notamment les femmes enceintes, les nourrissons et les enfants. Le principe de précaution devrait être appliqué et le présent règlement devrait assurer que l’industrie démontre que les substances ou produits fabriqués ou mis sur le marché n’ont aucun effet nocif sur la santé humaine ou animale ni aucun effet inacceptable sur l’environnement. »
Fort de ces constatations, le règlement (CE) n° 1107/2009 précité fixe la procédure d’approbation des autorisations de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques. L’approbation d’un produit phytopharmaceutique exige que plusieurs critères soient remplis et une vigilance particulière est apportée à l’examen des effets du produit sur la santé ou l’environnement.
Ensuite, les autorisations de mise sur le marché de ces produits sont délivrées au niveau national, conformément à la procédure prévue par ce règlement. En France, la procédure de délivrance des autorisations de mise sur le marché est complétée par des dispositions contenues dans le code rural et de la pêche maritime.
Lorsque les critères de délivrance des autorisations de mise sur le marché ne sont pas remplis, les produits phytopharmaceutiques concernés ne peuvent être autorisés. S’ils ne remplissent plus les critères prévus par le règlement, ils doivent être retirés et ne peuvent faire l’objet d’une procédure de renouvellement.
Par ailleurs, bien que les produits phytopharmaceutiques fassent l’objet d’autorisations de mise sur le marché délivrées au niveau national suivant une procédure définies par le règlement (CE) n° 1107/2009 précité, les substances actives contenues dans ces produits sont, quant à elles, approuvées directement au niveau de l’Union européenne suivant une procédure prévue dans ce même règlement.
Ce règlement précise également les conditions dans lesquelles les substances actives sont renouvelées.
Enfin, il détermine les hypothèses dans lesquelles des refus d’approbation ou de renouvellement de substances actives doivent être prononcés.
C’est pourquoi de nombreux règlements d’exécution sont pris au niveau de l’Union européenne concernant des substances actives.
Quelques exemples récents peuvent ainsi être cités :
– Règlement d’exécution (UE) 2015/2082 de la Commission du 18 novembre 2015 concernant la non-approbation de l’Arctium lappa L. (parties aériennes) en tant que substance de base conformément au règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, JOUE L302 du 19 novembre 2015 ;
– Règlement d’exécution (UE) 2015/2083 de la Commission du 18 novembre 2015 portant non-approbation de Tanacetum vulgare L. en tant que substance de base conformément au règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, JOUE L302 du 19 novembre 2015 ;
– Règlement d’exécution (UE) 2015/2084 de la Commission du 18 novembre 2015 portant approbation de la substance active flupyradifurone, conformément au règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, et modifiant l’annexe du règlement d’exécution (UE) n° 540/2011 de la Commission, JOUE L302 du 19 novembre 2015 ;
– Règlement d’exécution (UE) 2015/2085 de la Commission du 18 novembre 2015 portant approbation de la substance active mandestrobine, conformément au règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, et modifiant l’annexe du règlement d’exécution (UE) n° 540/2011 de la Commission, JOUE L302 du 19 novembre 2015.
Avant qu’un produit phytopharmaceutique ne parvienne entre les mains de son utilisateur, un double contrôle est effectué :
– Un contrôle de la substance active réalisé au niveau de l’Union européenne ;
– Un contrôle du produit phytopharmaceutique lui-même réalisé au niveau national.
En conséquence, en matière de mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques, le droit constitue ainsi le premier rempart pour prévenir d’éventuelles atteintes à la santé et à l’environnement.