Par Maître David Deharbe (GREEN LAW AVOCATS)
Par un communiqué de presse du 22 février 2021, le Conseil d’Etat est venu dérouler les étapes du calendrier des suites qu’il réserve à ses décisions de juillet et novembre 2020 relatives à la pollution de l’air et à la réduction des gaz à effet de serre.
Pour mémoire, dans la première affaire, le Conseil d’Etat, saisi par des associations et collectivités territoriales, avait ordonné, le 12 juillet 2017, au gouvernement d’élaborer des plans conformes à la directive du 21 mai 2008 sur la qualité de l’air afin de réduire les concentrations de dioxyde d’azote (NO2) et de particules fines (PM10) dans 13 zones en France.
Le 10 juillet 2020, constatant que cette injonction n’avait pas été respectée dans 8 zones, la Haute juridiction a ordonné à l’Etat d’agir dans un délai de 6 mois, sous peine d’une astreinte de 10 millions d’euros par semestre de retard.
Le 25 janvier 2021, le ministère de la transition écologique a adressé un mémoire au Conseil d’Etat précisant les mesures prises en faveur de la qualité de l’air depuis le mois de juillet.
Le calendrier prévisionnel des suites à donner à cette décision est le suivant :
- Début mars 2021 : analyse du mémoire transmis par le ministère de la transition écologique par la section du rapport et des études du Conseil d’Etat et transmission d’un avis à la section du contentieux répondant à la question suivante : « est-ce que le gouvernement a pris ou non les mesures nécessaires dans les 8 zones pour réduire les concentrations de dioxyde d’azote (NO2) et de particules fines (PM10) ? » ;
- Mi-mars 2021 : ouverture de la phase d’instruction contradictoire ;
- Eté 2021 : Tenue d’une nouvelle audience publique au Conseil d’Etat en présence des parties ;
- Après l’été 2021 : Si le Conseil d’Etat juge que le gouvernement n’a pas pris les mesures de lutte contre la pollution de l’air ordonnées et qu’il prend une décision sur le paiement de l’astreinte pour le premier semestre de retard (janvier-juillet 2021), le processus sera renouvelé tous les semestres jusqu’à ce qu’il juge que sa décision a été pleinement exécutée.
Dans la seconde affaire, le Conseil d’Etat avait admis, par un arrêt du 19 novembre 2020, le recours de la commune de Grande-Synthe contre l’inaction de l’Etat à respecter sa trajectoire de réduction des gaz à effet de serre (- 40% par rapport à 1990 d’ici 2030). Il a alors laissé au gouvernement un délai de 3 mois pour justifier que cette trajectoire de réduction des gaz à effet de serre pourra être respectée sans qu’il soit besoin de prendre des mesures supplémentaires.
Le 22 février dernier, le gouvernement a adressé au Conseil d’Etat un mémoire dans lequel il affirme que les mesures prises sont suffisantes pour atteindre la trajectoire d’ici 2030.
Le calendrier prévisionnel des suites à donner à cette décision est le suivant:
- Avril 2021 : ouverture de la phase d’instruction contradictoire ;
- Eté 2021 : Tenue d’une nouvelle audience publique au Conseil d’Etat en présence des parties ;
- Après l’été 2021 : Si le Conseil d’Etat ordonne des mesures supplémentaires, il réalisera un suivi de leur exécution selon le même processus (instruction contradictoire, nouvelle audience publique, possibilité d’une astreinte).
Remarquons par ailleurs que pour sa part et c’est une première, la Cour administrative d’appel de Paris vient d’ordonner une expertise dans un contentieux en réparation de la pollution de l’air pour carence fautive de l’Etat (CAA Paris, 11 mars 2021, n°19PA02868 ; BRIMO Sara, « Responsabilité – Changer d’air ? », AJDA, n°19, 31 mai 2019, p.1104). Si les juges du fond ont conclu à la faute de l’Etat en la matière, ils n’ont jamais admis le lien de causalité entre les pathologies des requérants et les carences étatiques (https://www.green-law-avocat.fr/air-toujours-des-declarations-de-carences-sans-condamnation-a-reparer/).