Tarification incitative des déchets : des clarifications attendues dans la loi de finances pour 2012 !

Lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2012, les parlementaires ont précisé les modalités de mise en oeuvre de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM) incitative et expérimentale adoptée avec la loi Grenelle II de l’environnement  (art. 195) dont le principe avait été déjà posé avec la loi Grenelle I  à échéance de 2014 (art. 46) : cf. notre brève sur ce blog, « Déchets ménagers : la délicate expérimentation de la TEOM incitative », 08/04/2011. En pratique, cependant, le manque de précisions contenues dans les textes en vigueur (entre autre, l’absence de modification des dispositions du code général des impôts)  n’a pas permis de débuter les expérimentations prévues par l’article 195 de la loi n° 788-2010 portant engagement national pour l’environnement. Des précisions sur les modalités de calcul de la composante variable de la TEOM Aussi, à  l’initiative de Bertrand Pancher, l’Article47septiesCGI du projet de loi de finances pour 2012 entend préciser les modalités de calcul de la composante variable de la TEOM. Il est prévu que les communes et leurs établissements publics puissent volontairement instituer une part incitative de la TEOM calculée «  en multipliant la quantité de déchets produits pour chaque local imposable l’année précédant celle de l’imposition par un tarif par unité de quantité de déchets produits », sachant que le tarif de cette part incitative doit être adopté chaque année par la collectivité ou l’établissement responsable de la gestion du service. Toutefois, le projet souligne que pour la première année de mise en place de la TEOM incitative, le produit total de la taxe ne pourra être supérieur au produit total de la taxe résultant des rôles généraux de l’année précédente. En dépit de l’opposition sénatoriale (cf : débats du Sénat en date du 5 décembre 2011) qui souhaitait diminuer le seuil plancher de la part variable, et ce à partir de 2013,  le taux de variabilité de cette TEOM pourra être compris entre 20 % et 45 % du produit total de la taxe. Le projet de loi de finances pour 2012  distingue entre les constructions anciennes et les constructions neuves, les constructions collectives et les constructions individuelles. Ainsi, la détermination de la part incitative de la TEOM variera selon  le type de construction ou d’habitat  en cause (art. 1522 bis ajouté au code général des impôts). Et une période transitoire  de 5 ans pourra être instituée  au cours de laquelle la part incitative  sera calculée proportionnellement au nombre de personnes composant le foyer. Le contentieux relatif à l’assiette de la part variable  devrait être instruit par le bénéficiaire de la taxe, avec, bien évidemment,  une prise en charge par ce dernier des risques liés aux éventuelles erreurs d’établissement d’imposition ! L’hypothèse d’un rattachement d’une commune ou d’un EPCI n’ayant pas opté pour ce régime La loi n°2010-1563 de réforme des collectivités territoriales du 16 décembre 2010 est également prise en compte puisque les parlementaires ont réfléchi aux conséquences du rattachement d’une commune ou d’une intercommunalité ne faisant pas application des nouvelles dispositions législatives à un autre EPCI ou à un syndicat mixte ayant opté pour ce régime. Dans cette hypothèse, le taux variable sera reporté à la deuxième année suivant le rattachement au nouvel établissement public. Plus précisément,  il s’agit ici de préciser la mise en oeuvre des nouveaux schémas départementaux de coopération intercommunale  dont la publication  doit, en principe, intervenir au plus tard   le 31 décembre 2011 (art. 35 à 37 de la loi n°2010-1563). Indéniablement,  l’intention du législateur d’assurer la mise en pratique du Grenelle de l’environnement est louable. Toutefois,  des doutes sur l’efficacité du dispositif législatif, tel que précisé par le projet de loi de finances,  peuvent être soulevés. De cette façon, par exemple, le surcoût lié à l’instauration de ce service  (avec, par exemples, la gestion des fichiers des usagers ou l’achat de nouvelles bennes) est susceptible d’être répercuté sur l’usager du service d’enlèvement des déchets ménagers.  De plus, il ne semble pas que le mode de calcul retenu en habitat collectif soit réellement révélateur de la quantité de déchets produite par foyer : suivant les termes du projet retenu par l’Assemblée nationale, « lorsque la quantité de déchets produits est connue globalement pour un ensemble de locaux mais pas connue individuellement pour les locaux de cet ensemble, elle est répartie entre eux par la collectivité au prorata de leur valeur locative retenue pour l’établissement de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères ». Patricia Demaye-Simoni Maître de conférences en droit public

Quand le droit pénal de l’environnement frappe fort…

Le Tribunal correctionnel de Draguignan a prononcé, le 15 décembre dernier, plus de 600.000 euros d’amende pour exploitation sans autorisation d’un centre d’enfouissement de déchets  et délit de pollution des eaux. Le groupe PIZZORNO Environnement et l’une de ses filiales, la SMA (société moderne d’assainissement et de nettoyage), exploitante de la décharge incriminée,  ont été condamnés à de multiples contraventions pour non-respect de l’arrêté préfectoral d’exploitation du site en ce qui concerne la nature et la provenance des déchets stockés au sein du centre d’enfouissement des déchets des Lauriers sis à Bagnols-en-Forêt. En cause, la réception et le stockage de mâchefers provenant de l’incinérateur d’Antibes, de même que la présence non autorisée sur site de gravats de chantier et de boues de station d’épuration. Par ailleurs, deux amendes de 100.000 euros ont été prononcées en raison du délit de pollution des eaux générée par la lixiviation des déchets non autorisés et stockés sur le site. Une autre filiale du groupe PIZZORNO, la SOVATRAM, qui avait acheminé les mâchefers,  a quant à elle était condamné à 10.000 euros d’amende pour délit de faux.  S’agissant des constitutions de parties civiles, la commune de Bagnols-en-Forêt, qui est à l’origine de la procédure en raison d’une plainte déposée par son maire, s’est vue allouée la somme de 80.000 euros. Plusieurs associations pour la protection de l’environnement se sont également vues déclarées recevables et ont obtenu des indemnités allant de 2000 euros à 1 euro symbolique en réparation des préjudices invoqués. Le groupe PIZZORNO aurait déjà indiqué son intention de faire appel. Les poursuites à l’encontre de M. François Pizzorno, PDG du groupe, ont été disjointes et renvoyées au 29 mars 2012. Affaire à suivre… Marie Letourmy Avocat au Barreau de Lille Green Law Avocat

Eolien/ ICPE: le Ministre confirme l’applicabilité du régime à l’Outre Mer

Une réponse ministérielle publiée le 20 décembre 2011 vient confirmer que le classement ICPE des éoliennes, prévu par la Loi Grenelle II et mis en oeuvre par un décret du 23 août 2011, s’applique également à l’Outre Mer (question114005 éolien OutreMer publié au JOAN 20/12/2011). C’est l’occasion aussi de tenter de justifier, pour le Gouvernement, le classement en ICPE des éoliennes. Texte de la question “M. Alfred Almont interroge Mme la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement sur le futur décret concernant les installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE). En effet, lors des discussions au Parlement de la loi dite “Grenelle de l’environnement”, les députés ultramarins avaient été rassurés sur le fait que les installations éoliennes situées en Outre-mer ne seraient pas concernées par les classements en ICPE. Ces classements concernent, comme l’indique le code de l’énergie, les réseaux métropolitains. De plus, des règles en matière d’ICPE, comme la distance minimale entre 2 mâts ou le nombre minimal de mâts pour déposer un permis ne peuvent s’appliquer à l’Outre-mer au vu de l’exiguïté du territoire de la plupart des départements et collectivité d’outre-mer. Enfin, la question de l’indépendance énergétique et de la sortie de l’utilisation des sources d’énergie carbonées ne peut être traitée de la même façon en métropole et dans les territoires d’outre-mer. Or, selon les informations qui sont aujourd’hui données, les ICPE incluraient toutes les éoliennes quel que soit leur territoire d’installation. Il souhaiterait à et égard pouvoir être rassuré par Mme la Ministre, pour que ne soient pas incluses dans les ICPE les installations éoliennes construites et exploitées en outre-mer“. Texte de la réponse “Le Gouvernement soutient un développement de l’énergie éolienne à haute qualité environnementale, réalisé de manière ordonnée, de sorte à prévenir les atteintes aux paysages, au patrimoine et à la qualité de vie des riverains. Ces orientations ont été confirmées par la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l’environnement, puis par la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement. Les parcs éoliens sont susceptibles de présenter des risques ou des inconvénients vis-à-vis des personnes ou de l’environnement (par exemple : perturbation des radars, bruit, effets sur l’avifaune, projections de glace, perturbation de la réception de télévision…), qu’ils soient situés en métropole ou en outre-mer. Compte tenu de ces impacts potentiels, il est justifié et proportionné d’appliquer aux parcs éoliens la législation des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE). La loi portant engagement national pour l’environnement a introduit les dispositions permettant d’accompagner cette transition. La possible ambiguïté de la loi n° 2010-788 portant engagement national pour l’environnement au sujet des éoliennes ultramarines et de leur soumission à la législation ICPE a été l’objet d’une question posée au Conseil d’État, qui a confirmé que la législation ICPE devait s’appliquer sur l’ensemble du territoire national .”

Zone d’action prioritaire pour l’air: les projets de décret pour l’expérimentation sont soumis à consultation

En application de l’article L. 228-3 du code de l’environnement, les communes de plus de 100.000 habitants se sont vues offrir la possibilité de procéder à des expérimentations  tendant à instituer des zones d’actions prioritaires pour l’air,  autorisées par décret, pour une durée maximale de 3 ans ( susceptible d’être prolongée pour une durée 18 mois) : plus précisément, aux termes de cet article,  « dans les communes ou groupements de communes de plus de 100 000 habitants où une mauvaise qualité de l’air est avérée, notamment par des dépassements de normes réglementaires ou des risques de  dépassements de ces normes, une zone d’actions prioritaires pour l’air, dont l’accès est interdit aux véhicules contribuant le plus à la pollution atmosphérique, peut être instituée, à  titre expérimental, afin de lutter contre cette pollution et notamment réduire les émissions de particules et d’oxydes d’azote ».  L’enjeu n’est autre que de parvenir à une réduction de la pollution atmosphérique et de contribuer à la réduction des émissions de particules atmosphériques polluantes pour assurer la mise en oeuvre du Plan Particules qui prévoit une réduction des particules fines de 30 % pour 2015  (cf. sur ce blog, notre brève du 7 février 2011, « ZAPA : l’expérimentation des zones d’actions prioritaires pour l’air lancée »)!  Aussi, 8 collectivités et intercommunalités ont d’ores et déjà été retenues pour prendre part à cette expérimentation : le Grand Lyon, Grenoble-Alpes Métropole, Clermont Communauté, le Pays d’Aix, la Plaine Commune (Saint-Denis),  la ville de Paris, Nice et Bordeaux.  Elles ont engagé des études préalables qui devraient donner lieu au dépôt de projets officialisés en juillet 2012 (cf. Ministère de l’Ecologie, « Plan particules : point d’avancement », 29 novembre 2011, p. 7/17). Si la loi Grenelle II précise, qu’avant toute transmission au préfet, le projet de ZAPA doit faire l’objet d’une évaluation environnementale et être mis à disposition du public, l’article L. 182 de ce texte législatif souligne encore que les conditions  règlementaires de mise en oeuvre de la loi Grenelle II doivent être précisées.  Effectivement, les décisions d’interdiction de circuler ou de restriction de la circulation dans les ZAPA prononcées par les autorités locales concernées dépendent des précisions réglementaires apportées par le Gouvernement, à savoir  – un arrêté du ministre de l’Ecologie définissant la nomenclature des véhicules dans les ZAPA (soumis à consultation du public dans les premiers mois de l’année 2011 et contesté en ce qu’il affecterait 26 % du parc automobile)  – ainsi que deux décrets, l’un définissant les sanctions applicables en cas d’infraction à une ZAPA, l’autre déterminant les groupes de véhicules bénéficiant d’une dérogation  nationale ou locale aux ZAPA. C’est dans ce contexte que deux projets de décrets sont  soumis à l’avis du public jusqu’au 14 décembre 2011. Le projet de décret relatif aux véhicules autorisés à circuler dans les expérimentations de ZAPA liste les véhicules autorisés à circuler dans les ZAPA, quelles que soient les mesures d’interdiction ou de restriction de la circulation mises en oeuvre dans ces zones, à savoir les véhicules d’intérêt général, les véhicules relevant du ministère de la défense et les véhicules portant une carte de stationnement pour personnes handicapées.  Par ailleurs, il précise que les communes et les intercommunalités expérimentatrices, soit les autorités locales, peuvent également demander des dérogations aux mesures d’interdiction de circulation dans une ZAPA et les accompagner d’une étude environnementale. Le second projet de décret relatif à l’identification des véhicules et aux sanctions applicables en cas d’infraction à une mesure d’interdiction ou de restriction de la circulation harmonise le classement des véhicules en fonction de leurs émissions polluantes  dans les diverses mesures d’interdiction ou de restriction de la circulation (en cas de pics de pollution, pour application des plans de protection de l’atmosphère et celle des ZAPA) pour ensuite définir les sanctions applicables en cas d’infractions constatées dans les ZAPA.  Ainsi, le projet de nouvel article R.318-2 du code de l’environnement souligne que le classement des véhicules à moteur est établi à partir de leur niveau d’émission de polluants atmosphériques par nomenclature dressée par arrêté interministériel (en fonction de leur date de première immatriculation, de leur norme Euro ou de leur motorisation).  Quant à l’amende prévue en cas de non-respect des mesures expérimentales mises en oeuvre dans les ZAPA (projet d’art. R.226-15 du code de l’environnement), elle pourra correspondre, selon les catégories de véhicules, à celle prévue pour les contraventions de 4e classe  (135 euros) ou à celle prévue pour les contraventions de 3e classe (68 euros).  Les CTI pourront alors utiliser le produit des amendes pour mener des études ou des opérations de mise en oeuvre des ZAPA (art. R. 2334-12 du CGCT modifié). La publication de ces décrets est annoncée pour fin janvier 2012. Patricia Demaye-Simoni Maître de conférences en droit public

Antenne relais: la preuve de l’opposition du Maire à la déclaration préalable

Par un jugement du 3 novembre 2011 (Société orange France,  TA Amiens1002538 antenne relais), le tribunal administratif d’Amiens  a annulé un arrêté municipal  en date du 21 juillet 2010 ordonnant  à  la société Orange France d’interrompre les travaux de construction de trois antennes de téléphonie mobile sur une parcelle de la commune, travaux  débutés à la suite d’une décision de non-opposition tacite aux travaux. Ce faisant, le tribunal administratif rappelle « qu’en l’absence de notification d’une décision d’opposition à une déclaration de travaux dans le délai d’instruction, qui court à compter de la réception en mairie d’un dossier complet, l’auteur de la déclaration bénéficie d’une décision implicite de non-opposition ». Bien que le maire de la commune se soit manifesté en opposition à cette demande dans le délai d’un mois (art. R 423-38 du code de l’urbanisme),  aucune pièce du dossier n’a véritablement permis d’attester la réception de cette contestation auprès de la société Orange France. Conséquemment, en l’absence de situation d’urgence, le maire ne pouvait user de ses prérogatives de police administrative pour ordonner l’interruption des travaux sans respecter la procédure contradictoire prévue par la loi n°79-587 du 11 juillet 1979 ! Patricia Demaye-Simoni Maître de conférences en droit public