Capri c’est fini, et l’amiante en classe 3 aussi: la France condamnée par la Cour de justice de l’Union européenne!

La Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) a condamné la France, aux termes d’un arrêt du 1er décembre 2011 non encore publié mais déjà lisible ci-après:  http://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf?text=&docid=115787&pageIndex=0&doclang=fr&mode=lst&dir=&occ=first&part=1&cid=13064 pour le pour non-respect des dispositions de la directive 1999/31/CE du Conseil du 26 avril 1999 relative à la mise en décharge des déchets ainsi que la décision 2003/33/CE du Conseil du 19 décembre 2002 établissant les critères et procédure d’admission des déchets dans les décharges.  La CJUE, saisie de ce différend par la Commission, a estimé que les déchets d’amiante lié, et plus spécifiquement les déchets d’amiante-ciment, devaient être regardés, comme des déchets dangereux    au sens de la directive 200/532 de la Commission du 3 mai 2000 qui établit une liste des déchets dangereux.   Par ailleurs, l’annexe de la directive 2003/33/CE précitée prévoit les critères d’admission des déchets en décharge.     Or, celle-ci mentionne expressément que les déchets de matériaux de construction contenant de l’amiante peuvent être entreposés dans une unité distincte pour déchets non dangereux, si l’unité est suffisamment confinée.  Dès lors, les textes communautaires ne laissent nullement la possibilité aux instances nationales de prévoir un stockage des déchets d’amiante lié en décharge pour déchets inertes.   Or, la France avait, par arrêté du 15 mars 2006 relatif aux types de déchets inertes admissibles dans les installations de stockage de déchets inertes, admis , aux termes de ces déchets admissibles, les matériaux de construction contenant de l’amiante.    Ledit arrêté avait été abrogé par un arrêté du 28 octobre 2010 qui maintenait cependant les déchets d’amiante-lié au sein de la liste des déchets admissibles en installation de stockage pour déchets inertes.  La condamnation de la France allait donc de soi et ne prête pas à discussion.   C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le ministère du Développement durable s’est empressé de publier sur son site un communiqué de presse le 2 décembre 2011 annonçant la révision de la règlementation relative au stockage des déchets d’amiante lié.    Dès lors, les déchets d’amiante lié seront donc obligatoirement stockés dans des installations classées pour la protection de l’environnement prévues par la loi du 19 juillet 1976. On remarquera que la France avait déjà été condmanée par la Courcde Justice (CJCE, 15 déc. 2004, aff. C-172/04,  Commission c/ France) pour ne pas avoir soumis à autorisation d’exploitation les centres de stockage dits de classe 3 qui alors ne se trouvaient soumis qu’à une simple autorisation prélabale d’urbanisme!   Cette seconde condamnation entrainera de nouvelles obligations au regard de la classification ICPE des décharges recevant de l’amiante-ciment eu égard à la particularité et la dangerosité du déchet concerné qui, même lié, peut toujours présenter un risque notamment pour la santé humaine.     De nombreux contentieux afférents à ce type de problématique trouveront là un nouvel élan…. le nouvel arrêté ministériel à intervenir devra régler une série de difficultés qui ne font que poindre, mais qui nous font dire Capri c’est fini, et l’amiante en classe 3 aussi….    Marie Letourmy   Avocat au Barreau de Lille Green Law Avocat

Circulaire d’application sur les ZDE: de nouvelles précisions ministérielles

Par circulaire du 25 octobre 2011  (circulaire éolien 25nov.2011: NOR : DEVR1128562C), le ministre de l’écologie a décliné les hypothèses se présentant aux autorités préfectorales quant à la définition des zones de développement de l’éolien (ZDE). Dans un contexte où l’attentisme des préfets est décrié alors que l’adoption des SRCAE a pris un retard évident compte-tenu de l’intervention très tardive des textes d’application (cf. Brève  du 20/11/2011, « Etat d’avancement de la mise en oeuvre du Grenelle  de l’environnement : troisième rapport annuel), la circulaire rappelle l’absence de mesures transitoires relatives aux propositions de ZDE formulées par les communes et les intercommunalités avant la promulgation de la loi 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement (ENE). Ainsi que nous avons pu le souligner dans plusieurs brèves publiées sur ce blog  (« projet de décret SRCAE – schéma régional éolien  et après la consultation » du  14/02/2011 ;  « publication du décret SRCAE au JORF : mieux vaut tard que jamais », 21/06/2011 ; « Eolien : le schéma régional éolien terrestre de Haute-Normandie adopté », 21/07/2011), la définition des ZDE pâtit des nouvelles règles issues de la loi Grenelle II. Le rapport n° 007442-02 du conseil général de l’environnement et du développement durable (GGDD) relatif à l’instruction administrative des projets éoliens, récemment mis en ligne, en date de mai 2011,  rappelle que de nombreuses ZDE et parcs éoliens existants ne sont pas positionnés dans les zones propices au développement de l’éolien (p.51). Des instructions adressées aux services de l’Etat y sont déjà inscrites pour ne pas bloquer la définition des ZDE en cours  (p.51). C’est une évidence : les ZDE – telles qu’issues de l’article 37 de la  loi  n° du 13 juillet 2005  de programme fixant les orientations de la politique énergétique -,  qui conditionnent l’obligation d’achat de l’électricité produite, n’ont pas produit l’effet escompté. Au terme de procédures lourdes tant au niveau administratif que financier, les ZDE ont été définies sans la vision prospective souhaitable   ou encore en l’absence de toute mise en place d’un mode gouvernance adéquat. Les critiques – déjà évoquées sur ce blog  (cf. brèves précédentes) – ont par ailleurs été  clairement formulées dès 2010 dans le rapport parlementaire du député Franck REGNIER n° 2398 du 31 mars 2010 relatif à l’énergie éolienne. Au vu des nouveaux impératifs posés dans la loi Grenelle II du 12 juillet 2010, l’adaptation de la circulaire du Ministre de l’Ecologie en date  du 19 juin 2006 (sur les dispositions relatives à la création des zones de développement de l’éolien terrestre) était nécessaire afin de rappeler aux autorités préfectorales les enjeux et les moyens dont elles disposent en matière de définition des ZDE conditionnant l’obligation de rachat de l’électricité produite. Dans la circulaire du 25 octobre 2011, et suite à la publication du décret relatif aux SRCAE n° 2011-678 en date du 16 juin 2011 qui précise  les modalités d’élaboration des nouveaux schémas régionaux de l’éolien (SRE), le ministère revient sur les différentes les hypothèses entourant les propositions de ZDE émises par les communes et les intercommunalités et leur articulation avec les schémas régionaux éoliens. Annexé au SRCAE (schéma régional du climat, de l’air et de l’énergie) qui doit être coproduit par les autorités déconcentrées et décentralisées régionales, le SRE (schéma régional éolien) détermine les zones favorables à l’implantation des fermes éoliennes (art. L. 222-1 du code de l’environnement). En application de l’art. 90 de la  loi ENE,  les ZDE créées ou modifiées postérieurement à la publication du SRE doivent être situées au sein des parties du territoire régional favorables au développement de l’énergie éolienne définies par le schéma !  Aussi, des précisions sur l’articulation entre les ZDE et ces schémas devaient être adoptées. Suivant les termes de la circulaire : – Les ZDE adoptées avant la promulgation de la loi  ENE  ne sont pas remises en cause. – Pour les ZDE proposées et déclarées recevables avant l’entrée en vigueur de la loi Grenelle II mais n’ayant pas donné lieu à une décision définitive du préfet, la situation est plus complexe : le préfet arrête la ZDE, avant la publication du SRE, mais  la commune ou l’intercommunalité doit se conformer aux nouvelles obligations posées par la loi du 12 juillet 2010 (notamment fournir des éléments d’appréciation sur leur potentiel éolien ; sur les possibilités de raccordement aux réseaux électriques ; sur  la possibilité pour les projets à venir de préserver la sécurité publique, les paysages, la biodiversité, les monuments historiques et les sites remarquables et protégés ainsi que le patrimoine archéologique – art. L 314-9 du code de l’énergie). – Pour les ZDE dont la proposition a  été formulée après le 14 juillet 2010 (soit après la promulgation de la loi ENE) et déclarée recevable,  comme précédemment, dès lors que la publication du SRE n’est pas envisagée dans le délai d’instruction de 6 mois de la ZDE (délai souvent dépassé en pratique), le préfet dispose d’une marge d’appréciation pour créer la ZDE au vu des éléments complétés par la loi ENE. Dans ces deux hypothèses, la circulaire précise expressément que le fait que la ZDE se situe en dehors d’une zone favorable pressentie dans le SRE ne peut être retenu comme motif de refus de création d’une ZDE. – Pour la définition des ZDE, intervenant suite à la publication du SRE qui doit être annexé au SRCAE, alors qu’une déclaration de recevabilité est obtenue,  le préfet devra s’assurer que le périmètre des la ZDE est bien inclus dans des territoires favorables au SRE. Et lorsque le SRE sera publié (soit au plus tard le 30 juin 2012 pour une élaboration coconsentie par les autorités régionales déconcentrées et décentralisées, soit au plus tard le  30 septembre 2012 pour une élaboration diligentée par le préfet de région), toute proposition émanant des collectivités listées en zone favorable de développement de l’éolien devra être strictement conforme au contenu du schéma régional. Le contenu de la circulaire atteste de la difficulté à mettre en oeuvre la nouvelle réglementation de l’éolien compte-tenu…

Tarifs du Gaz: le Conseil d’Etat suspend l’arrêté du 29 septembre 2011

La décision rendue aujourd’hui par la Haute juridiction suspend l’arrêté du 29 septembre 2011 relatif aux tarifs réglementés de vente de gaz naturel fourni à partir des réseaux publics de distribution de GDF Suez. Les ministres concernés devront se prononcer à nouveau sur ces tarifs dans un délai d’un mois. L’ordonnance est disponible sur le site du Conseil d’Etat, qui a publié un communiqué de presse.

Déchets verts: l’interdiction de brûlage à l’air libre rappelée par circulaire

Une circulaire interministérielle (Circulaire_brulage_a_l_air_libre_des_dechets_verts[1] NOR : DEVR1115467C) en date du 18 novembre 2011 relative à l’interdiction du brûlage à l’air libre des déchets verts adressée aux préfets de départements et autres autorités administratives rappelle les dispositions législatives et réglementaires s’opposant au brûlage des déchets verts (par assimilation aux déchets ménagers) ainsi que l’obligation d’en assurer la valorisation, à compter du 1er janvier 2012, pour les producteurs d’une quantité importante de biodéchets (Loi ENE). Elle fait écho à la réponse du ministre de l’écologie publiée au JO du 31 mai 2011 à la question parlementaire n°100536 du député Frédéric Reiss suivant laquelle  « le brûlage à l’air libre des déchets verts est une pratique qui ne répond pas aux exigences liées à l’élimination des déchets telles que définies par l’article L. 541-2 du code de l’environnement et elle pose en outre des problèmes notables d’ordre sanitaire, ce qui justifie qu’elle se trouve interdite dans le cas général. La valorisation des déchets verts des particuliers a été réaffirmée dans les engagements du Grenelle de l’environnement, et leur valorisation sur place par compostage ou leur collecte en déchèterie doivent donc être privilégiées ». La circulaire précise « dès lors que les déchets verts, qu’ils soient produits par les ménages ou par les collectivités territoriales, peuvent relever de la catégorie des déchets ménagers et assimilés, le brûlage en est interdit en vertu des dispositions de l’article 84 du règlement sanitaire départemental type. » La circulaire distingue les interdictions de principe des hypothèses où une dérogation peut être obtenue. L’interdiction de principe vaut, par exemple, en cas de pic de pollution, dans les périmètres des plans de protection de l’atmosphère, en zone urbaine ou en zone périurbaine et rurale dès lors qu’il existe un système de collecte et/ou de déchetteries.  A défaut de mise en place d’un système de collecte, dans les zones périurbaines ou rurales, des dérogations ne peuvent être envisagées qu’à la condition que des objectifs et modalités de développement des déchetteries ou structures de compostage soient précisés. De même, dans les terrains situés dans un plan de prévention des risques incendies de forêt, les éventuelles autorisations de débroussaillement devront être strictement définies par l’autorité préfectorale.  Cette circulaire présente les règles de droit en vigueur mais elle pourrait bien également contenir des dispositions impératives, ce qui en rend la qualification juridique incertaine. Rappelons qu’abandonnant la distinction qu’il avait opéré dans sa  décision d’Assemblée du 29 janvier 1954, « Institution Notre-Dame du Kreisker » (rec. P. 64) entre les circulaires réglementaires et les circulaires interprétatives, le Conseil d’Etat a modifié sa jurisprudence relative aux circulaires administratives dans sa décision « Mme Duvignères » (CE, Sect., 18 déc. 2002, RFDA 2003, p. 280, concl. P. Fombeur) pour y substituer la distinction entre les circulaires impératives et celles simplement indicatives. Depuis l’invocabilité d’une circulaire à l’appui d’un recours en excès de pouvoir dépend non pas du caractère réglementaire de la circulaire mais de son impérativité. La qualification juridique d’une circulaire n’est cependant pas chose aisée d’autant que certaines circulaires mélangent tout à la fois des dispositions indicatives et des dispositions impératives.  Notamment, les conditions – posées dans la circulaire-  entourant le brûlage de dehors de tout épisode de pollution et les dérogations éventuellement admises sont déclinées sous la forme d’instructions strictes données à l’autorité administrative susceptibles d’être appréhendées comme des dispositions réglementaires. Pour autant, l’illégalité de telles dispositions ne présente pas de caractère d’automaticité puisque la jurisprudence la conditionne au vice d’incompétence ou à d’autres motifs, tel que la prescription d’une interprétation à suivre méconnaissant le sens et la portée des dispositions législatives ou réglementaires qu’elle entend expliciter.  Patricia Demaye-Simoni Maître de conférences en droit public

Bail emphytéotique, bail à construction: sur la modicité du prix

Un arrêt récent rendu par la 3ème chambre de la Cour de cassation le 21 septembre dernier (Cass. 3ème civ., 21 sept. 2011, n°10-21.900 : Juris-Data n°2011-019517) invite à se pencher sur la détermination de la redevance dans le cadre de la conclusion d’un bail à construction. Un parallèle peut être fait avec le bail emphytéotique, dès lors qu’il s’agit des contrats de longue durée couramment usités par les opérations photovoltaïques et éoliens pour asseoir leurs installations. Dans l’arrêt précité, un bailleur tentait notamment de se prévaloir de la nullité pour absence de cause du bail à construction qu’il avait consenti en raison du caractère qu’il estimait dérisoire de la redevance prévue. Il invoquait à ce titre les dispositions de l’article 1131 du Code civil. En effet, la jurisprudence a déjà considéré que la stipulation d’un prix dérisoire voire vil peut être de nature à créer un déséquilibre contractuel tel qu’il confine à l’absence de cause et doit être sanctionné par la nullité du contrat. En l’espèce, la Cour de Cassation a cependant approuvé la cour d’appel d’avoir rejeté la demande du bailleur estimant que celle-ci était prescrite. La Haute juridiction a retenu que la nullité soulevée étant une nullité relative destinée à protéger un intérêt privé, elle se prescrivait par 5 ans à compter de la conclusion du contrat. Il s’avère donc nécessaire d’apporter la plus grande précaution à la détermination de la redevance aux fins de ne pas encourir, dans le délai quinquennal précité, une nullité du contrat qui remettrait en cause l’exploitation du parc éolien ou photovoltaïques, et ce alors que les frais conséquents d’installation et d’exploitation auraient été exposés. La même réflexion s’impose dans le cadre du bail emphytéotique même si la modicité de la redevance a longtemps été perçue comme un élément déterminant de ce type de contrat. En effet, traditionnellement il était considéré que la redevance versée dans le cadre d’un bail emphytéotique se devait d’être modique. Cette modicité se concevait notamment par l’obligation qui était souvent impartie au preneur d’améliorer le bien loué et la propriété des constructions édifiées qui était acquise en fin de bail par le bailleur. Cependant, le nouvel essor que connaît depuis quelques années le bail emphytéotique, utilisé comme titre foncier dans le cadre d’opérations d’installations photovoltaïques ou éoliennes, a détourné quelque peu celui-ci de sa vocation initiale. Il n’est pas rare dans les baux emphytéotiques conclus aujourd’hui de ne plus voir nécessairement de clause mettant à la charge du bailleur l’obligation d’améliorer le fonds loué, cette obligation n’étant pas imposée par les textes, et de prévoir le démantèlement des installations en fin de bail. Or, la modicité, que la Cour de Cassation et les juges du fond se refusent d’ailleurs de retenir comme élément déterminant de la qualification du bail emphytéotique, doit s’apprécier eu égard aux charges pesant sur le preneur. En l’absence de toute clause imposant une amélioration des lieux loués et un transfert de propriété des constructions en fin de bail, il convient de prendre garde au quantum de la redevance prévue. Une redevance pouvant être perçue comme modique en présence de charges imposées au preneur et d’avantage obtenu par le bailleur à l’expiration du contrat, pourra être perçue comme vile ou dérisoire en l’absence de toute obligation du preneur…et, comme il l’a été mentionné ci-dessus, l’action en nullité pour absence de cause est susceptible de venir sanctionner le déséquilibre constaté. Prudence donc dans la fixation de la redevance. Mieux vaut renoncer à une réduction de celle-ci aux fins de sécuriser le titre foncier, support de l’installation…. Marie LETOURMY Avocat au Barreau de Lille Green Law Avocat