Le juge, le climat et l’exécutif…

Par Maître Lucas DERMENGHEM, Avocat Of Counsel, GREEN LAW AVOCATS et Maître David DEHARBE, Avocat associé gérant, GREEN LAW AVOCATS Le 19 novembre 2020, le Conseil d’Etat a rendu une décision inédite à propos du respect, par l’Etat français, de ses engagements en matière de lutte contre le dérèglement climatique (CE 19 nov. 2020, n° 427301, COMMUNE DE GRANDE-SYNTHE et a). Les conclusions du rapporteur public sont publiées avec la présente note au Bulletin Juridique des Collectivités Locales cf. : Saisie par la commune de Grande-Synthe (Nord) et par son maire agissant à titre personnel, la Haute Assemblée s’est prononcée sur la légalité des décisions implicites de refus opposées par le Président de la République, le Premier ministre et le Ministre de la Transition Ecologique à la demande tendant notamment à ce que soient prises « toutes mesures utiles permettant d’infléchir la courbe des émissions de gaz à effet de serre produites sur le territoire national de manière à respecter a minima les engagements consentis par la France au niveau international et national ». Pour statuer sur la légalité de ces refus implicites, le Conseil d’Etat était tout d’abord tenu d’examiner les différents engagements souscrits par la France en matière climatique sur le plan international, européen et national. Il s’agissait, ensuite, de vérifier si ces engagements étaient respectés par l’Etat, justifiant que celui-ci puisse se permettre de refuser l’édiction de mesures supplémentaires permettant d’infléchir la courbe des émissions de gaz à effet de serre. L’arrêt commenté présente tout d’abord l’intérêt de recenser d’une manière didactique les différentes normes auxquelles la France est liée en matière de lutte contre le dérèglement climatique. Le Conseil d’Etat dresse ainsi la liste des règles juridiques applicables en la matière, en débutant par le droit international pour terminer par les textes de droit national. Sur le plan international, le Conseil d’Etat rappelle les termes des articles 2 et 3 de la convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) du 9 mai 1992, à laquelle la France est partie, avant de mentionner le fameux article 2 de l’accord de Paris du 12 décembre 2015 conclu dans le cadre de la CCNUCC, lequel contient l’objectif – âprement débattu – consistant à contenir l’élévation de la température moyenne « nettement en dessous de 2° C par rapport aux niveaux préindustriels » et à « poursuivre l’action menée pour limiter l’élévation de la température à 1,5° C par rapport aux niveaux préindustriels ». Au niveau communautaire, le Conseil d’Etat mentionne : – la décision 94/69/CE du 15 décembre 1993 par laquelle le Conseil a approuvé la CCNUCC au nom de la Communauté européenne, devenue l’Union européenne ; – le premier « Paquet Energie Climat 2020 », composé en particulier de la décision n° 406/2009/CE du 23 avril 2009 relative à l’effort à fournir par les États membres pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre afin de respecter les engagements de la Communauté en matière de réduction de ces émissions jusqu’en 2020, ayant notamment pour objectif une réduction de 20 % des émissions de gaz à effet de serre par rapport à 1990. Aux termes de l’annexe II de cette décision, la France s’est vue définir un objectif de réduction de 14% de ses émissions de CO2 par rapport aux niveaux d’émissions de 2005. – le second « Paquet Energie Climat » reposant notamment sur le règlement (UE) 2018/842 du 30 mai 2018, édicté afin de respecter les engagements pris dans le cadre de l’accord de Paris. Aux termes de l’annexe I de ce règlement, la France est tenue de réduire ses émissions de CO2 de – 37% en 2030 par rapport à leur niveau de 2005. Enfin, à l’échelle nationale, il est rappelé que le législateur français a institué l’article L. 100-4 du code de l’énergie fixant un objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 40% entre 1990 et 2030 et l’atteinte de la neutralité carbone à l’horizon 2050 en divisant les émissions de gaz à effet de serre par un facteur supérieur à six entre 1990 et 2050. L’objectif de – 40% en 2030 que s’est fixé la France est ainsi plus ambitieux que ce qui lui a été attribué au niveau communautaire. Le Conseil d’Etat rappelle qu’en vue d’atteindre cet objectif, l’article L. 222-1 A du code de l’énergie prévoit un dispositif de « budget carbone » fixé par décret, pour la période 2015-2018 puis pour chaque période consécutive de cinq ans. Le budget carbone correspond ainsi à un total d’émission de gaz à effet de serre pour une période déterminée, qui ne doit pas être dépassé. Le Conseil d’Etat indique qu’en vertu de l’article 2 du décret du 18 novembre 2015 : « Les budgets carbone des périodes 2015-2018, 2019-2023 et 2024-2028 sont fixés respectivement à 442, 399 et 358 Mt de CO2eq par an, à comparer à des émissions annuelles en 1990, 2005 et 2013 de, respectivement, 551, 556 et 492 Mt de CO2eq. ». Après avoir listé les engagements que s’est fixés la France en matière de lutte contre le dérèglement climatique, la Haute Assemblée rappelle que les stipulations de la CCNUCC et de l’accord de Paris sont dépourvues d’effet direct mais doivent néanmoins être prises en considération pour l’interprétation des dispositions de droit national, qui ont pour objet de les mettre en œuvre. Ensuite, pour apprécier la légalité des décisions de refus des autorités sollicitées d’édicter des mesures supplémentaires permettant d’infléchir la courbe des émissions de gaz à effet de serre, le Conseil d’Etat constate tout d’abord que la France a « substantiellement dépassé » le premier budget carbone qu’elle s’était allouée pour la période 2015-2018, d’environ 62 Mt de CO2eq par an. Cependant, pour le Conseil d’Etat, cette circonstance n’est à elle seule pas de nature à caractériser une insuffisance des efforts pour atteindre les objectifs de réduction fixés. En effet, pour effectuer cette analyse, la Haute Assemblée a entendu prendre en considération les différentes périodes pour lesquelles un budget carbone a été fixé, soit 2019-2023, 2024-2028 et 2029-2033. En d’autres termes, pour le…

Lubrizol : refus du TA de Rouen d’ordonner la communication de l’étude de dangers !

Par David Deharbe (Green Law Avocats) Mais comment diable les auteurs de l’étude de dangers du site de Lubrizol ont-t-il pu conclure à la fréquence de risque d’un seul incendie tous les 10.000 ans alors que l’usine, située en plein cœur de Rouen, en a connu deux en 6 ans avec les conséquences que l’on connaît ? Cette étude, manifestement « insuffisante » fonde pourtant toujours la politique de maîtrise des risques du site. Or, à ce jour, on ignore toujours qui a réalisé cette étude de dangers ou si ce document a été tiers-expertisé, comme le permet pourtant la réglementation. Aucune information, non plus, sur la manière dont l’Inspection des Installations classées l’a appréhendée … Force est aujourd’hui de constater que cette étude de dangers demeure inaccessible au public et que les grands discours de transparence du gouvernement dès les premières heures de l’incendie d’octobre 2019 n’ont jamais conduit l’Etat à mettre cette étude dans le domaine public ! De surcroît, après deux incendies ayant eu des impacts incontestables en dehors du site, cette installation Seveso seuil haut, qui semble fonctionner en vertu de droits acquis, aurait rendu nécessaire  que l’on vérifie la conformité de sa situation au regard de l’étude d’impact. Un couple de riverains résidant dans les 500 mètres de l’usine Lubrizol a donc fort légitimement sollicité du Tribunal administratif de Rouen, sur le fondement des dispositions de l’article L. 521-3 du code de justice administrative, qu’il enjoigne au préfet de la Seine-Maritime de leur communiquer : – sous 48 heures à compter de la notification de l’ordonnance à intervenir, la dernière version de l’étude de danger de l’installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE) exploitée par la société Lubrizol sur le territoire de la commune de Rouen, « l’éventuelle tierce-expertise » réalisée à propos de cette étude et les rapports relatifs à cette étude et à « son éventuelle tierce-expertise » ; – sous 15 jours à compter de la notification de l’ordonnance à intervenir, « les éventuelles versions antérieures » de l’étude de dangers de cette même ICPE, « l’éventuelle étude d’impact relative à l’ICPE », les rapports administratifs relatifs à ces études, l’entier dossier relatif aux installations classées pour la protection de l’environnement exploitées par les sociétés Lubrizol et NL Logistique sur le territoire de la commune de Rouen ; – d’assortir cette injonction d’une astreinte de 1 000 euros par jour de retard en application de l’article L. 911-3 du code de justice administrative, à compter de l’expiration des délais impartis ; Cette demande est intervenue certes près d’un an après la catastrophe de Lubrizol mais surtout après que le Sénat, l’Assemblée nationale et le CGEDD ont plusieurs mois et tour à tour stigmatisé l’insuffisance de l’étude de dangers, à laquelle leurs rapporteurs semblent avoir eu accès. Et l’instruction pénale ouverte dans ce dossier contre l’exploitant mis en examen pour non-respect des prescriptions techniques n’a pas plus vocation à faire le jour sur les carences de fautives que sur le contrôle d’une étude de danger insuffisante.   C’est pourtant en ces termes que le même magistrat, qui a d’ailleurs jusqu’à présent invariablement rejeté toutes les demandes des victimes dans le dossier Lubrizol, fait à nouveau échec à ce référé mesures utiles : « Pour établir l’urgence à communiquer, parmi les nombreux documents demandés relatifs à l’activité de l’usine Lubrizol de Rouen, l’étude de dangers établie dans le cadre de la procédure de délivrance d’une autorisation de type « installation classée » pour l’exploitation du site de Rouen, M. Coconnier et Mme Dubuc se bornent à annoncer un recours indemnitaire contre l’Etat, des suites d’un évènement survenu il y a plus d’un an à la date de la présente ordonnance. Au soutien de leur demande, ils produisent deux certificats médicaux datés du 22 octobre 2019 prescrivant à l’un de leurs deux enfants mineurs ainsi qu’à Mme Dubuc des médicaments courants. Ils produisent également copie d’un dépôt de plainte auprès du Procureur de la République du 26 octobre 2019 pour « mise en danger d’autrui, risque immédiat de mort ou d’infirmité par violation manifestement délibérée d’une obligation réglementaire de sécurité et de prudence », sans autres précisions sur l’état d’avancement de la procédure. Ils opposent le risque pour la sécurité publique que fait peser l’étude de dangers qu’ils estiment comporter de graves lacunes et sur laquelle sont fondés de nombreux instruments juridiques et techniques permettant d’autoriser le fonctionnement de l’usine Lubrizol, comme en attesterait le rapport des ministères de l’industrie et de l’écologie de février 2020 qu’ils produisent ainsi que les déclarations de Mme Lepage devant la commission du sénat le 4 décembre 2029. Toutefois, M. Coconnier et Mme Dubuc se prévalent au soutien de leur action en responsabilité contre l’Etat d’un fondement juridique imprécis et de préjudices non définis, fondés sur des prescriptions médicales anciennes de plus de 11 mois, qui ne font état au demeurant d’aucune pathologie. Par ailleurs, s’ils mettent en cause « la carence fautive de l’Etat », ils ne donnent aucune autre information que des articles de presse ou rapports sans lien direct avec leur supposé préjudice, le rapport des ministères déjà évoqué concluant quant à lui que « les difficultés ou fragilités que la mission a pu constater ne lui paraissent pas spécifique à la région concernée ou aux sites impliqués. Elles nécessitent en revanche une action nationale forte pour améliorer la prévention de ce type d’évènement et en limiter les conséquences, sur l’ensemble de notre territoire ». Si les requérants mettent en cause le redémarrage total des activités de l’usine Lubizol au 1er octobre 2020 pour justifier encore de l’urgence, ils n’établissent ni même n’allèguent avoir contesté les autorisations qui ont précédé cette remise en activité de l’usine. Enfin, ils ne font pas davantage valoir qu’ils auraient, en vain, tenté d’obtenir les documents dont ils incriminent l’insuffisance auprès des services de l’Etat compétents, ni même, par des « captures d’écrans » du site de la préfecture de la Seine-Maritime, qu’ils auraient fait quelque recherche que ce soit pour consulter les documents,…

Artificialisation des sols : les préfets sommés de prendre le maquis

Par David DEHARBE (Green Law Avocats) Le 1er Ministre demande aux préfets dans une circulaire du 24 août 2020, avec le soutien services de la Direction générale des entreprises (DGE) et ceux de la Direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature (DGALN) , de saisir la Commission nationale d’aménagement commercial chaque fois que la création d’un nouvel équipement commercial ou une extension est autorisée en CDAC (Commission nationale d’aménagement commerciale) alors que le projet ne leur semble pas respecter, l’objectif de « zéro artificialisation », faute notamment d’une consommation économe de l’espace ou en raison de l’imperméabilisation des sols qu’il génère. Le préfet dispose, dans le cadre des opérations de revitalisation des territoires (ORT), d’une faculté de suspension de la procédure devant la CDAC dans les conditions définies à l’article L.752-1-2 du code de commerce ; en qualité de président de la CDAC, ils disposent d’un pouvoir d’intervention, avant la décision ou l’avis, pour rappeler les enjeux, objectifs légaux et critères d’appréciation, et, une fois l’avis ou la décision rendu, pour exercer un recours, administratif ou contentieux. Le nombre de recours en CNAC formés par des préfets demeure très faible – de l’ordre de deux ou trois par an. Aucun recours contentieux d’un préfet n’est recensé contre une décision de la CNAC, ou contre un arrêté de permis de construire valant AEC (PC/AEC) en raison de l’avis favorable de la CNAC, alors même que, depuis 2014, pour les projets nécessitant un PC/AEC, le représentant de l’Etat dans la département n’est pas soumis au recours administratif préalable obligatoire (cf. le I de l’article L.752-17 du code de commerce). Ainsi même s’il n’a pas saisi lui-même la CNAC, contre la décision ou l’avis de la CDAC, le préfet peut agir au contentieux contre la décision ou l’avis de la CNAC. Dans l’instruction du 3 mai 2017 sur la législation en matière d’aménagement commercial, l’exécutif rappelait déjà aux préfets qu’en leur qualité de représentant de l’Etat dans le département, ils doivent exercer  un contrôle de légalité, notamment sur les documents d’urbanisme afin d’éviter que la destination commerciale des sols encadrés par les SCOT et les PLUi ne sacrifie des terres agricoles. Le droit ne s’use que si l’on ne s’en sert pas sachant que les CDAC sont neutralisées par le modus vivendi auxquels les élus locaux se soumettent pour que le principe demeure celui de l’autorisation dans plus de 85% des cas  … Mais les enjeux ont émus la convention citoyenne : les surfaces commerciales et économiques représentent 14% des surfaces artificialisées. Et déjà le plan Biodiversité du 4 juillet 2018 prônait de  Limiter la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers pour atteindre l’objectif de zéro artificialisation nette en annonçant : il sera donné « instruction   aux   préfets   de   vérifier   systématiquement l’application des mesures de lutte contre l’étalement urbain et de rendre régulièrement compte de leurs actions en ce domaine. » Assurément la quantification des objectifs à atteindre en la matière et la définition de ce que l’on doit entendre comme étant constitutif « artificialisation des sols » seront dans les mois à venir un enjeu crucial  pour parvenir à un point d’équilibre entre la liberté d’entreprendre et les « fonctions hydrologiques, biologiques ou agricoles ». On remarquera d’ailleurs que la circulaire commentée opte dans l’immédiat, via le droit mou qu’elle constitue, pour une définition plutôt large de l’artificialisation.

Réforme de la Procédure civile : ce qui change au 1er septembre 2020 !

Par Maître Ségolène REYNAL (Green Law Avocats) Comme nous l’écrivions en décembre dernier, la loi n°2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 a modernisé substantiellement la procédure civile. Plusieurs décrets sont successivement intervenus afin de mettre en œuvre la création du Tribunal Judiciaire (TJ), issu de la fusion des Tribunaux de Grande Instance (TGI) et des Tribunaux d’Instance (TI), et organiser les conséquences d’une telle fusion. A la suite de la publication du décret du 11 décembre 2019 (n° 2019-1333) portant réforme de la procédure civile, le CNB a engagé un recours en référé-suspension devant le Conseil d’Etat (CE, 30 décembre 2019, n°436941) qui a refusé de suspendre l’exécution dudit décret. Toutefois, il a octroyé un report de l’entrée en vigueur d’une partie de la réforme au 1er septembre 2020. Pour rappel, l’entrée en vigueur de cette réforme s’est faite en trois temps : Par principe, la réforme est applicable au 1er janvier 2020 aux instances en cours et aux affaires nouvelles ; Par dérogation, la réforme est applicable au 1er janvier 2020 pour les dispositions relatives à l’exécution provisoire de droit, à l’extension des pouvoirs du juge de la mise en état, et à la représentation obligatoire par avocat et à la procédure accélérée au fond, pour les affaires introduites à compter du 1er janvier 2020 ; Par dérogation, la réforme entre en vigueur au 1er septembre 2020 pour les affaires nouvelles concernant les dispositions relatives à la généralisation de l’assignation avec prise de date. Les évolutions majeures en vigueur dès le 1er janvier 2020 concernaient notamment : La suppression du TGI et du TI, au profit de la création du TJ et des chambres de proximité (art. L212-8 du COJ) ; La création d’un juge chargé des contentieux et de la protection (JCP) ; La simplification des modes de saisine ; L’extension de la représentation obligatoire ; L’extension des pouvoirs du juge de mise en état et la convention de procédure participative aux fins de mise en état ; L’exécution provisoire de droit et la fin du principe de l’effet suspensif de l’appel ; La procédure accélérée au fond (PAF). L’article 55, III du décret n° 2019-1333 du 11 mars 2019 dispose : « jusqu’au 1er septembre 2020, dans les procédures soumises, au 31 décembre 2019, à la procédure écrite ordinaire, la saisine par assignation de la juridiction et la distribution de l’affaire demeurent soumises aux dispositions des articles 56, 752, 757 et 758 du code de procédure civile dans leur rédaction antérieure au présent décret. Jusqu’au 1er septembre 2020, les assignations demeurent soumises aux dispositions de l’article 56 du code de procédure civile, dans sa rédaction antérieure au présent décret ». Ainsi, à partir du 1er septembre 2020, seront applicables les dernières dispositions du décret relatives à la généralisation de l’assignation avec prise de date concernant : > La procédure écrite ordinaire ; > La procédure prévue aux articles R.202-1 et suivants du livre des procédures fiscales ; > Les procédures diligentées devant le tribunal paritaire des baux ruraux ; > Les procédures prévues au Livre IV du code de commerce devant le tribunal judiciaire. En somme, les procédures susmentionnées devront désormais faire l’objet d’une assignation avec prise de date. L’assignation avec prise de date devant le TJ (nouv. Art. 56 du CPC) L’article 55 du CPC définit une assignation comme étant « l’acte d’huissier de justice par lequel le demandeur cite son adversaire à comparaître devant le juge ». Cette assignation doit contenir des mentions spécifiques devant le Tribunal Judiciaire, à peine de nullité, prévues d’une part à l’article 56 du CPC, dont la nouvelle version entre en vigueur au 1er septembre 2020, et d’autre part, à l’article 751 et suivants du CPC. En effet, la nouvelle rédaction de l’article 56 du code de procédure civile prévoit que l’assignation contient à peine de nullité […] les lieu, jour et heure de l’audience à laquelle l’affaire sera appelée ». Ce mécanisme s’inscrit dans l’idée de modernisation et d’allégement de la procédure civile, en ce qu’elle se doit d’être simplifiée et accessible pour le justiciable. En effet, la prise de permet au justiciable de pouvoir connaître, dès l’introduction de sa demande, la date de la première audience. Corrélativement, ce mécanisme permet de décharger le greffe des convocations et des saisies de données.  A cet égard, il a donc été préconisé que l’information du défendeur soit désormais effectuée, en priorité, par acte d’huissier de justice, en lieu et place de la convocation par le greffe. Cette modalité de convocation présente plusieurs avantages : Tout d’abord, ce mode garantit le respect du contradictoire par la délivrance concomitante de l’acte de saisine et des pièces qui viennent à l’appui des demandes, assurant ainsi l’efficacité des échanges en vue de la première audience. Ensuite, le recours à l’acte d’huissier permet au greffier, déchargé des tâches de convocations et de classement des avis de réception, de réinvestir le rôle statutaire qui est le sien d’assistant du magistrat et de garant de la procédure. Enfin, cela permet pour les avocats et les justiciables, de connaître dès l’introduction de leur demande la date d’audience qui correspond à une audience de plaidoiries s’il s’agit d’une procédure orale, ou à une audience d’orientation s’il s’agit d’une procédure écrite ordinaire. Communication de la date de l’audience par tous moyens (art. 751 du CPC) L’article 751 du CPC prévoit que « la demande formée par assignation est portée à une audience dont la date est communiquée par tout moyen au demandeur selon des modalités définies par arrêté du garde des sceaux. » L’article 751 du CPC est modifié substantiellement, et permet, au 1er septembre 2020, à un justiciable de former une demande d’assignation, représenté par l’intermédiaire d’un huissier ou d’un avocat ou non, avec une première date d’audience. À compter du 1er septembre 2020, la communication de la date d’audience se fera par voie électronique, selon les modalités prévues aux articles 748-1 et suivants du CPC. À réception de la date d’audience il appartiendra alors au demandeur de mentionner dans le corps de l’assignation « les lieu, jour et heure de l’audience à laquelle l’affaire sera appelée » pour signification de l’acte par voie…

Transition énergétique, environnement et développement durable dans le rapport d’activité 2019 de la DGCCRF

par Maître David DEHARBE (Green Law Avocats) Le 27 juillet 2020, la direction de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a publié, avec un peu de retard, son bilan d’activité pour l’année 2019 : téléchargeable ici. La directrice générale met en avant deux thématiques qui ont surtout marqué les actions entreprises par l’administration de contrôle. Il y a d’un côté la nécessaire augmentation des contrôles dans le domaine de la transition énergétique et d’un autre côté il y a la lutte contre les fraudes du quotidien, au premier rang desquelles le démarchage abusif . Parallèlement à cette recrudescence de fraudes de nombreuses enquêtes ont été menées dans le secteur de l’Habitat ainsi que le démontre le bilan d’activité. La directrice générale met notamment un point d’orgue sur la question de la rénovation énergétique en indiquant qu’elle est « à l’interface [des] deux thématiques » ci-dessus mentionnées. La rénovation énergétique des logements a occupé une grande partie des actions de l’administration suite au développement des offres d’ « isolation à 1 euro » qui ont fait l’objet de fraudes caractérisées par un nombre accru de démarchages téléphoniques agressifs. Au vu du nombre croissant de ces fraudes, la DGCCRF réaffirme son rôle dans la protection économique des consommateurs pour « lutter contre le préjudice financier pour les ménages, la concurrence déloyale pour les professionnels sérieux et garantir le succès de la mise en œuvre d’une politique publique prioritaire », ainsi que l’a souligné la directrice générale. En 2019, à la suite de nombreuses plaintes la DGCCRF a exercé un contrôle plus étroit afin de lutter contre les pratiques déloyales des professionnels dans le secteur de la rénovation énergétique des bâtiments. Le bilan d’activité recense les différents contrôles menés et fait état de plusieurs chiffres alarmants : 469 établissements contrôlés dont les entreprises du BTP, les prestataires, les démarcheurs, sous-traitants, artisans, associations, établissements de crédit, sociétés de domiciliation, etc. 56% établissement en anomalie 69% établissements RGE 234 avertissements, 163 injonctions administratives, 74 procès-verbaux administratifs et 180 procès verbaux pénaux. En outre, la DGCCRF a initié plusieurs procédures de saisie pénale, visant les biens des gérants de sociétés peu scrupuleuses dans les Hauts-de-France et en Auvergne-Rhône-Alpes, pour des montants pouvant atteindre plus d’un million d’euros. Ces procédures ont permis de geler les avoirs dans l’attente du jugement au fond, évitant ainsi qu’ils soient mis hors de portée de la justice Parmi les manquements répertoriés on retient du bilan d’activité « le non-respect des droits des consommateurs en matière de vente hors établissement commercial, des règles relatives à l’information précontractuelle sur les prix et les conditions particulières de vente, la violation des règles applicables au crédit affecté et l’usage de pratiques commerciales trompeuses, voire agressives. » Les plaintes concernaient majoritairement les certificats d’économie d’énergie avec en première ligne les opérations d’isolation des combles à 1 euro. Avant la publication du bilan d’activité les nombreuses fraudes constatées ont fait naître diverses mesures dans le domaine de la rénovation énergétique. Comme la récente réforme du label RGE qui vient s’ancrer dans la lutte contre les fraudes dans le secteur de la transition énergétique. Par un arrêté en date du 5 juin 2020, le Gouvernement a ainsi renforcé le contrôle pour la délivrance de la qualification RGE pour les entreprises. En outre, l’aide d’Etat MaPrimRenov mise en place pour financer les travaux de rénovation énergétique dans les logements lancée en janvier dernier doit déjà faire face à des modifications qui ont vu le jour le 15 juillet 2020. Ces évolutions ont touchées les travaux d’isolation thermique. Afin d’éviter les surfacturations, la surface de rénovation couverte par cette aide s’est vu diminuer ainsi que le montant des forfaits pour les ménages modestes et très modestes. Sur le terrain de la sécurité sanitaire des produits et de leur contamination environnementale, le rapport apporte encore des enseignements intéressants. Comme le rappelle le rapport « La DGCCRF mène des enquêtes et réalise des actions de contrôle sur les produits de consommation alimentaires et non alimentaires. Elle gère les situations d’alerte et de crise en cas de doute sur la sécurité d’un produit ou de risque avéré pour les consommateurs et s’appuie sur un réseau de laboratoires qui effectuent des analyses des produits suspectés de présenter un risque pour la santé ou la sécurité des particuliers.Rattachée au cabinet de la directrice générale, l’Unité d’alerte (UA) coordonne les mesures à prendre pour faire cesser les dangers signalés sur des produits de consommation (alimentaires ou non alimentaires) et protéger les consommateurs (mesures de retrait du marché et de rappel des produits, actions d’information…). Elle s’assure de la réactivité et de la cohérence de l’action de l’État et intervient en lien étroit avec les services déconcentrés, les autres ministères concernés (Agriculture et Santé notamment) et les instances nationales et européennes d’évaluation et de gestion des risques. » En 2019, l’Unité d’alerte a ainsi géré 1504 alertes, dont 488 ont fait l’objet d’un rappel auprès des consommateurs, et émis 132 enregistrements sur les réseaux d’alertes européens. Sur le terrain des risques sanitaires on relève le rôle de la Direction dans la gestion du risque de contamination des laits infantiles avec une alerte as de salmonelloses à Salmonella poona chez des nourrissons de moins de un an du fait de la consommation des produits de nutrition infantile à base de protéines de riz. Les alertes de janvier 2019 ont donné lieu à des retraits-rappels de gammes de laits sur notre territoire et contaminés depuis leur production en Espagne. De même 802 contrôles d’effectivité des mesures menés par les enquêteurs de la DGCCRF ont permis de suivre la prise en charge des rappels par les professionnels depuis l’«affaire Lactalis » de 2017. On apprend ainsi que la Direction s’est encore inquiétée des teneurs préoccupantes en alcaloïdes opiacés dans des produits de boulangerie, les conclusions de l’enquête ayant révélé que l’origine de l’alerte était due à l’utilisation de graines de pavot insuffisamment nettoyées. La DGCCRF a partagé les résultats de ses investigations avec la Commission européenne et les experts des autres Etats membres. Les discussions devraient…