72 heures de Pont-de-Vaux : vers la régularisation

72 heures de Pont-de-Vaux : vers la régularisation

Par Maître David DEHARBE, Avocat gérant (Green Law Avocats)

Par un jugement du 9 décembre 2022, le tribunal administratif sursoit en effet à statuer sur la demande tendant à l’annulation de l’arrêté de la préfète de l’Ain autorisant la commune de Pont-de-Vaux à procéder aux aménagements d’un circuit de sports motorisés en bordure de Saône et à l’utiliser sur une période annuelle de quatre jours en août et accorde un délai de six mois pour régulariser l’autorisation.

Centrale du Larivot : au fond le TA résiste au Conseil d’Etat !

Par Maître David DEHARBE (Green Law Avocats) On avait suivi cette affaire à rebondissement au stade du référé. Le juge des référés du Tribunal administratif de Guyane avait ordonné la suspension provisoire de l’arrêté préfectoral portant autorisation environnementale du projet de la société EDF pour le projet de construction et d’exploitation d’une centrale électrique sur le territoire de la commune de Matoury au lieu-dit le Larivot  (TA Guyane, ord. 27 juillet 2021, n°2100957). Mais le Conseil d’État a finalement annulé pour erreurs de droit  la suspension de l’autorisation environnementale de la future centrale électrique du Larivot (CE, 10 février 2022, n° 455465, mentionné aux Tables du recueil Lebon : téléchargeable ci-dessous et sur doctrine), en raison, d’une part, d’une mauvaise application de l’article L. 100-4 du code de l’énergie et, d’autre part, d’une mauvaise application de l’article L. 121-40 du code de l’urbanisme. Le tribunal administratif de la Guyane a rendu, ce jeudi 28 avril 2022, son jugement au fond dans cette affaire (TA Guyane 28 avril 2022 n° 2100237). Statuant sur la requête des associations Guyane nature environnement et France nature environnement qui contestaient la légalité de l’autorisation environnementale délivrée par le préfet de Guyane à la société EDF-PEI pour l’exploitation d’une centrale électrique au Larivot, il va tout de même annuler la décision attaquée mais pour autre motif que la méconnaissance de la trajectoire climatique, rejetée par le Conseil d’Etat. Le tribunal a jugé que la dérogation à l’interdiction de porter atteinte aux espèces protégées, comprise dans l’autorisation environnementale, était illégale faute pour les services de l’Etat de démontrer l’absence de « solution alternative satisfaisante » permettant de réduire les atteintes portées aux espèces protégées. Le tribunal a estimé, au vu du dossier, qu’il n’est pas démontré que les deux zones dit du « parc avenir », situées à Rémire-Montjoly à proximité du  Lille)port de Dégrad-des-Cannes, ne constituaient pas des « solutions alternatives satisfaisantes » au sens du code de l’environnement, sachant que le choix de ces terrains aurait permis de réduire les atteintes portées aux espèces protégées. Les deux zones en question avaient d’ailleurs été envisagées par EDF-PEI pour y implanter la centrale électrique avant que l’entreprise ne choisisse finalement le site du Larivot. Remarquons que sur ce motif le Tribunal opte pour une annulation sèche considérant qu’une révision au titre L181-18 du code de l’environnement n’était pas possible. L’Etat a déjà annoncé faire appel et engager un sursis à exécution de ce jugement (Source BFM Lille) TA-Guyane-28-avril-2022-n°-2100237 Télécharger

1000 VACHES ET LE JUGE ADMINISTRATIF

Par maître THOMAS RICHET (Green Law Avocats) La réforme de l’autorisation environnementale unique par l’ordonnance n°2017-80 du 26 janvier 2017 relative à l’autorisation environnementale s’est efforcée de moderniser les pouvoirs du juge de plein contentieux en matière d’installations classées pour la protection de l’environnement. Comme toutes les réformes, cette ordonnance apporte son lot d’interrogations… Ainsi la cour administrative d’appel de Douai n’a pas hésité à poser les questions indispensables à la mise en œuvre efficace de ce nouveau dispositif dans le cadre d’une demande d’avis au Conseil d’Etat (CAA Douai, 16 décembre 2017, n°15DA01535, « Association Novissen et autres »). Dans cette affaire dite « des 1000 vaches », le préfet de la Somme a autorisé par un arrêté du 1er février 2013 la SCEA Côte de la Justice (ci-après la « SCEA ») à exploiter un élevage bovin de 500 vaches laitières, un méthaniseur et une unité de cogénération (1,338 MW électrique, 1,75 MW thermiques) sur le territoire de la commune de Buigny-Saint-Maclou et de Drucat-Le-Plessiel. Par un jugement du 30 juin 2015, le tribunal administratif d’Amiens a rejeté la demande de l’association Novissen et autres visant à demander l’annulation de cette autorisation. Ces derniers ont d’interjeté appel devant la cour administrative d’appel de Douai. Après avoir constaté que les justifications en matière de capacités financières étaient insuffisantes et viciaient donc la phase de l’enquête publique (I.), la cour s’est interrogée sur les pouvoirs du juge du plein contentieux en matière d’installations classées pour la protection de l’environnement (II.). I/La question des capacités financières et de la bonne information du public lors de l’enquête publique Après avoir rejeté de nombreux moyens relatifs notamment à l’incomplétude du dossier de demande initiale, à l’analyse des conditions de remise en l’état du site, à la production de l’avis des personnes publiques au dossier d’enquête, ou encore aux capacités techniques du pétitionnaire, la cour a examiné la problématique des capacités financières de l’exploitant. Cette dernière pose actuellement de réelles difficultés aux juridictions (Cf. Jugement du TA de Lille, portant également une demande d’avis au Conseil d’Etat, en date du 14 décembre 2017, req. n°1602467, « Association « Non au Projet Eolien de Walincourt-Selvigny et Haucourt-en-Cambrésis » et autres »), mais aussi et surtout, aux exploitants (Cf. notre précédent commentaire sur le sujet). L’obstacle des capacités financières Par une lecture combinée des articles L. 521-1 et R. 123-6 du code de l’environnement, la cour indique que, pour permettre une bonne information du public lors de l’enquête publique, le dossier d’enquête doit comprendre la demande d’autorisation initiale et donc les capacités financières prévues au 5° de l’article L. 512-3 du code de l’environnement. En l’espèce, les juges considèrent que les justifications relatives aux capacités financières ne sont pas suffisantes. A ce titre, ils relèvent tout d’abord que le dossier ne comporte « aucune précision sur les capacités financières dont dispose, en propre, la SCEA Côte de la Justice, tels par exemple des éléments de bilans et de comptes de résultats » alors même que le projet nécessite de lourds investissements. En effet, le dossier de demande d’autorisation mentionne un investissement de 12 millions d’euros et la nécessité d’une injection de trésorerie à hauteur de 1,5 millions d’euros. De même, alors que le projet « doit se réaliser sous la forme d’un montage administratif et financier dans lequel [la SCEA] doit bénéficier du soutien financier des sociétés Ramery SA et Ramery environnement, il résulte de l’instruction que ne figurait au dossier aucun élément probant de nature à lui permettre d’accréditer ces allégations ». Enfin, l’atelier de méthanisation ne faisait pas l’objet d’un document prévisionnel d’exploitation, et ce, contrairement à l’atelier laitier. Des études financières confidentielles remises au préfet La SCEA soutenait pourtant que « deux études financières avaient été remises à la préfecture sous condition de confidentialité » et que cette information figurait au sein de la présentation des garanties financières du dossier d’enquête publique. Or, le juge a relevé sur ce point qu’ « il n’est pas établi ni même allégué (…) qu’aucune information concrète n’était susceptible d’être produite dans le dossier soumis à enquête publique, tant en ce qui concerne les éléments financiers de base concernant la SCEA Côte de la Justice ou ses partenaires financiers que la nature juridique des liens les unissant pour la mise en œuvre de ce projet, sans méconnaître d’éventuelles règles de confidentialité qu’il se serait agi de protéger ». On peut s’interroger sur la pertinence de la délivrance d’une telle information au public. En effet, pouvait-il la comprendre ? Etait-elle véritablement nécessaire pour permettre au public de comprendre les caractéristiques du projet et ses enjeux ? On retrouve ici un scénario assez comparable à l’affaire qui  donné lieu à la jurisprudence ARF : là aussi ce sont des informations retirées du dossier d’enquête publique et relatives aux capacités financières du prétendant à l’exploitation d’un incinérateur qui avaient justifié que le Tribunal administratif d’Amiens annule l’autorisation d’exploiter, en considérant que l’irrégularité n’était pas ‘danthonisable” (TA Amiens, 21 avril 2009, Sté ARF, nos 0601680-0601803-0700315/ CAA Douai, 17septembre 2009, N° 09DA00765). Or il est essentiel de rappeler cette précision de l’arrêt ARF du Conseil d’Etat que nombre de juridictions oublient aujourd’hui lorsqu’elles contrôlent la légalité externe du dossier d’enquête publique à l’aune de la régularité de la présentation des capacités techniques et financières : “contrairement à ce qui est soutenu, la cour a ce faisant recherché si, en l’espèce, l’absence de ces indications dans le dossier soumis à l’enquête publique avait eu pour effet de nuire à l’information complète de la population”… C’est bien une obligation du juge d’apprécier au cas par cas si certaines informations sur les capacités financières sont ou non nécessaires au public (CE, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 15/05/2013, 353010). Quoi qu’il en soit, la cour a relevé que l’incomplétude du dossier soumis à enquête publique, du fait de ce manque de justification des capacités financières, a pu nuire à la bonne information du public et que ce vice était de nature à entacher d’illégalité de l’arrêté d’autorisation du préfet. Ayant certainement anticipé cette difficulté, la SCEA a sollicité l’application de l’article L. 181-18 du code de…