Les projets ENR (éolien, solaire, hydroélectricité etc.) temporairement reconnus d’intérêt public supérieur par le droit européen (règlement UE 2022/2577 du Conseil du 22 décembre 2022)

Les projets ENR (éolien, solaire, hydroélectricité etc.) temporairement reconnus d’intérêt public supérieur par le droit européen (règlement UE 2022/2577 du Conseil du 22 décembre 2022)

Par Maître Sébastien BECUE, avocat of counsel (Green Law Avocats).

Un nouvel épisode marquant sur la question de l’articulation entre protection de la biodiversité et développement des énergies renouvelable: l’adoption du règlement temporaire du 22 décembre 2022.

La chronique de droit des ENR disponible sur le blog !

La chronique de droit des ENR disponible sur le blog !

Sur son blog, le cabinet Green Law Avocats donne désormais accès à sa chronique de droit des ENR publiée depuis plusieurs années dans la revue « Droit de l’environnement » (téléchargeable ci-dessous). Bonne lecture !

Avis critique de l’AE sur deux SRADDET (AURA et Hauts de France)

Par Me Sébastien BECUE – avocat of counsel Deux SRADDET ont donné lieu à des avis intéressants de l’autorité environnementale en région AURA et en Hauts de France. Avis de l’Autorité environnementale (AE) sur le SRADDET de la région Auvergne-Rhône-Alpes : point sur les ENR L’AE salue dans son avis « des objectifs relativement ambitieux de développement des énergies renouvelables » (+54% d’ici 2030) : En ce qui concerne l’éolien et l’hydrogène, il est intéressant de constater que l’Autorité environnementale critique le choix effectué de prévoir des mesures qui vont au-delà de ce que prévoit la règlementation nationale et tendent en réalité à restreindre les possibilités de développement : Pour l’éolien, le SRADDET prévoit que les dossiers de demande soient transmises au Préfet « avec l’avis favorable de toutes les collectivités impactées ». L’application d’un telle règle, outre qu’elle serait hypothétique car illégale (la fixation de telles règles de procédure n’entrant évidemment pas dans la compétence régionale), rendrait quasi-impossible le développement d’un projet éolien. S’agissant de l’hydrogène, le SRADDET prévoit que « afin  de  maintenir  un  équilibre économique pérenne autour d’une station de distribution et/ou de production d’énergie (ou d’une station multi énergies) permettant une mobilité décarbonée efficace sur le territoire d’Auvergne-Rhône-Alpes, les documents de planification et d’urbanisme devront prévoir un zonage permettant de respecter une zone de chalandise dans laquelle il ne sera pas possible d’installer une nouvelle station à énergie décarbonée. Cette zone de chalandise, propre à chaque station, dépendra de la densité de population et d’une distance minimum». Pour l’AE, s’il faut évidemment structurer le maillage des stations de recharge hydrogène, cette règle doit être modifiée a minima « pour n’interdire, dans les zones de chalandise imposées par cette règle, que la création de stations de recharge en hydrogène qui entreraient en concurrence avec celles déjà installées » L’AE critique le traitement commun de la biomasse comme source d’énergie et la méthanisation et critique le fait que la réalisation des objectifs spécifiques à la biomasse nécessiterait l’import de bois de pays étrangers, pratique au coût environnemental élevé… Enfin, en ce qui concerne le développement de l’hydroélectricité, l’AE s’étonne du fait que le rapport d’objectifs ne traite pas de l’enjeu majeur de cette source d’énergie, le respect des exigences de continuité écologique. Avis de l’Autorité environnementale (AE) sur le SRADDET de la région Hauts-de-France : point sur les ENR L’AE note dans son avis que le projet rappelle « que la  région  Hauts-de-France  est parmi  les  plus  énergivores  de  France (consommations d’énergie et émissions de gaz à effet de serre 30 % supérieures à la moyenne nationale), principalement du fait des usages industriels ». Le choix d’un « triple moratoire » concernant   l’éolien, le bois énergie et les biocarburants est très critiqué par l’AE, qui relève sa possible incompatibilité avec la loi de transition énergétique voire même avec le principe de non-régression environnementale. L’AE appuie particulièrement sur le choix fait de prévoir un objectif de stabilisation de l’énergie éolienne, en proposant à la place une adaptation des objectifs de production selon les territoires.

Droits d’antériorité et continuité écologique : le Conseil d’Etat fait passer le poisson

Par Maître Lucas DERMENGHEM (Green Law Avocats) Par un arrêt du 22 octobre 2018, le Conseil d’Etat a apporté des précisions salutaires sur les délais à prendre en compte en matière de respect des obligations au titre de la continuité écologique pour les ouvrages situés sur un cours d’eau, en particulier s’agissant de la réalisation de dispositifs de circulation de poissons migrateurs. Les faits étaient simples : le Préfet du Bas-Rhin a, par arrêté préfectoral du 17 avril 2012, prescrit à l’exploitant d’une centrale hydroélectrique la mise en œuvre de différentes mesures relatives au débit réservé et à la continuité écologique. Parmi ces prescriptions figurait la réalisation d’une passe à poissons, dont un arrêté préfectoral du 26 mars 2013 portant prescriptions complémentaires a fixé le délai de réalisation de cet aménagement au 1er octobre 2013. Ce dernier arrêté a fait l’objet d’un recours de la part de l’exploitant, rejeté par le Tribunal administratif de Strasbourg, dont le jugement fut confirmé par la Cour administrative d’appel de Nancy, conduisant le requérant à former un recours en cassation devant le Conseil d’Etat. Si l’un des moyens soulevés devant le Conseil d’Etat tendait à l’irrégularité de la procédure d’adoption de l’arrêté préfectoral portant prescriptions complémentaires, l’intérêt de l’affaire réside essentiellement dans les modalités de mise en œuvre de la réalisation d’une passe à poissons, en particulier sur les délais dans lesquels cette prescription doit être respectée. En l’espèce, le Conseil d’Etat a apporté des précisions relatives à la question des délais applicables pour la réalisation d’une passe à poissons au regard de deux dispositions. La première est l’ancien article L. 232-6 du code rural (devenu ensuite l’article L. 432-6 du code de l’environnement, dont la rédaction est identique, et aujourd’hui abrogé). Cet article disposait que dans certains cours d’eau dont la liste est fixée par décret, tout ouvrage doit comporter des dispositifs assurant notamment la circulation des poissons migrateurs. Les ouvrages existants devaient être mis en conformité dans un délai de 5 ans à compter de la publication d’une liste d’espèces migratrices par bassin ou sous-bassin pour lesquels un dispositif devait être mis en place afin d’assurer leur circulation. La seconde est l’article L. 214-17 du code de l’environnement dans sa version alors applicable, issu de la loi du 30 décembre 2006 sur l’eau et les milieux aquatiques. Selon cette disposition, les ouvrages situés sur une liste de cours d’eau dans lesquels il est nécessaire d’assurer la circulation des poissons migrateurs doivent être gérés, entretenus et équipés selon des règles définies par l’autorité administrative. L’article précise que le régime précité s’applique, pour les « ouvrages existants régulièrement installés », à l’issue d’un délai de cinq ans après la publication des listes de cours d’eau concernés par arrêté ministériel. Le Conseil d’Etat va apporter les précisions suivantes sur l’articulation entre ces deux articles : « 9. Il résulte de la combinaison de ces dispositions avec celles du III de l’article L. 214-17 du code de l’environnement cité au point 6, telles qu’éclairées par les travaux parlementaires, que si un délai de cinq ans après la publication des listes prévues au 2° du I du même article L. 214-17 est accordé aux exploitants d’ ” ouvrages existants régulièrement installés ” pour mettre en œuvre les obligations qu’il instaure, ce délai n’est pas ouvert aux exploitants d’ouvrages antérieurement soumis à une obligation de mise en conformité en application de l’article L. 232-6 du code rural, devenu l’article L. 432-6 du code de l’environnement, qui n’auraient pas respecté le délai de cinq ans octroyé par ces dispositions pour mettre en œuvre cette obligation. Ces ouvrages existants ne peuvent ainsi être regardés comme ” régulièrement installés “, au sens du III de l’article L. 214-17 du code de l’environnement, et sont donc soumis aux obligations résultant du I de cet article dès la publication des listes qu’il prévoit ». Pour le Conseil d’Etat, un ouvrage n’ayant pas respecté le délai de cinq ans pour se mettre en conformité au titre de ses obligations en matière de circulation de poissons migrateurs issues de l’article L. 232-6 du code rural ne peut être considéré comme un « ouvrage existant régulièrement installé » au titre de l’article L. 214-17 du code de l’environnement et ainsi bénéficier du délai de 5 ans pour se mettre en conformité dans le cadre de cette disposition. Cette solution n’est pas sans rappeler celle qui voulait que les droit d’antériorité ne pouvait bénéficier à une installation nouvellement classées que si elle avait été régulièrement sous l’empire de l’ancienne législation qui lui était applicable avant le décret de classement (Conseil d’État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 30/01/2013, n° 347177). En l’espèce, l’exploitant de l’ouvrage était soumis aux obligations de l’ancien article L. 232-6 du code rural puisque le cours d’eau sur lequel il était situé figurait sur les listes établies au titre de cette disposition depuis le 24 décembre 1999. En l’occurrence, un dispositif de circulation des poissons migrateurs devait donc avoir été installé sur l’ouvrage par l’exploitant dans un délai de 5 ans, soit depuis le 25 décembre 2004. Or, l’exploitant n’a jamais construit ce dispositif. Ainsi, à la date de publication de l’arrêté ministériel classant le cours d’eau sur lequel est situé l’ouvrage au titre de l’article L. 214-17 du code de l’environnement, l’exploitant ne s’était pas mis en conformité au regard de l’ancien article L. 232-6 du code rural. Il ne pouvait donc être considéré comme un « ouvrage existant régulièrement installé » et bénéficier ainsi du délai de cinq ans pour se mettre en conformité en vertu de l’article L. 214-17. Les obligations issues de cet article lui étaient dès lors applicables à compter de la date de classement du cours d’eau, soit le 1er janvier 2013. A compter du 1er janvier 2013, le préfet pouvait donc prescrire à l’exploitant la mise en œuvre d’une passe à poissons opérationnelle avant le 1er octobre 2013, sans que celui-ci ne puisse bénéficier du délai de 5 ans prévu par l’article L. 214-17 du code de l’environnement.

Autorisation environnementale : la simplification se poursuit surtout pour les IOTA, ICPE et les éoliennes (décret n°2018-797 du 18 septembre 2018)

Par Lucas DERMENGHEM- Green Law Avocats Le décret n°2018-797 du 18 septembre 2018, publié au Journal officiel du 20 septembre, vient modifier le contenu des pièces complémentaires à fournir en cas de demande d’autorisation environnementale concernant une installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE) ou des installations, ouvrages, travaux et activités (IOTA) relevant de la loi sur l’eau. Il importe d’emblée de préciser que ce texte ne modifie pas le contenu commun à tous les dossiers de demande d’autorisation environnementale, mais porte uniquement sur les pièces à fournir dans le cas où la demande concerne l’exploitation d’une ICPE ou la réalisation d’installations, ouvrages, travaux et activités soumis à la loi sur l’eau. Ce décret – l’un des premiers signés de la main du nouveau ministre de la transition écologique et solidaire François de Rugy – a pour objectif la simplification et la clarification du contenu du dossier de demande dans le cas où le projet relèverait des deux législations précitées. Ainsi, s’agissant d’abord du contenu du dossier relatif aux IOTA, l’article D. 181-15-1 du code de l’environnement fait l’objet de modifications concernant essentiellement les barrages et ouvrages assimilés (rubrique 3.2.5.0 de la nomenclature IOTA), les ouvrages utilisant l’énergie hydraulique (rubrique 3.2.6.0 de la nomenclature IOTA), ou encore ceux destinés à prévenir les inondations. A titre d’exemple, une simplification est opérée pour les dossiers de demande relatifs aux barrages, pour lesquels il n’est plus exigé que le pétitionnaire fournisse un document justifiant qu’il aura, avant la mise à l’enquête publique, la libre disposition des terrains ne dépendant pas du domaine public sur lesquels les travaux devront être effectués. Le décret du 18 septembre 2018 apporte aussi de substantielles modifications quant au contenu des dossiers de demande d’autorisation environnementale relatives à l’exploitation d’une ICPE. Tout d’abord, des changements affectent la description des capacités techniques et financières. Ainsi, le décret conserve la possibilité pour le pétitionnaire, lorsqu’il n’est pas en mesure de constituer les capacités techniques et financières dont il dispose au moment du dépôt de la demande d’autorisation, de décrire les modalités prévues pour les établir au plus tard à la mise en service de l’installation. En revanche, depuis l’entrée en vigueur du décret, il n’est désormais plus tenu d’adresser au préfet les éléments justifiant de la constitution effective de ses capacités au plus tard à la mise en service (article D. 181-15-2 du code de l’environnement, I 3°). De plus, le pétitionnaire n’est aujourd’hui plus contraint de préciser la nature et les délais de constitution des garanties financières : désormais, leur seul montant suffit (article D. 181-15-2 du code de l’environnement, I 8°). En outre, le décret apporte des modifications notables s’agissant des éoliennes. Ainsi, le texte exige qu’à l’appui de la demande soit produit un document justifiant que le projet éolien est conforme, selon le cas, au règlement national d’urbanisme, au plan local d’urbanisme ou au document tenant lieu ou à la carte communale en vigueur lors de l’instruction (article D. 181-15-2 du code de l’environnement, I 12° a). De plus, à contre-courant de l’esprit général de simplification qui anime le décret, le dossier de demande d’autorisation relatif à des installations éoliennes doit désormais contenir une étude relative aux impacts cumulés sur les risques de perturbations des radars météorologiques par les éoliennes lorsque celles-ci sont situées à l’intérieur de la surface définie par la distance minimale d’éloignement (article D. 181-15-2 du code de l’environnement, I 12° d). Enfin, une autre modification issue du décret du 18 septembre 2018 mérite d’être signalée : la suppression de la nécessité de fournir un plan d’opération interne (POI) dans les dossiers de demande d’autorisation concernant l’utilisation d’organismes génétiquement modifiés (OGM) (article D. 181-15-6 du code de l’environnement).

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