Projet de terminal méthanier flottant du Havre, validation du régime contentieux

Projet de terminal méthanier flottant du Havre, validation du régime contentieux

Par David DEHARBE, avocat gérant (Green Law Avocats)

Par un arrêt n° 469305 du 28 avril dernier, le Conseil d’État a validé le décret n° 2022-1275 du 29 septembre 2022 relatif au régime juridique applicable au contentieux des décisions afférentes au projet de terminal méthanier flottant dans la circonscription du grand port fluvio-maritime de l’axe Seine (site du Havre) (JORF n°0227 du 30 septembre 2022).

Conseil constitutionnel et ENR : non-conformité partielle

Conseil constitutionnel et ENR : non-conformité partielle

Par Mathieu DEHARBE, juriste (Green Law Avocats)

Par sa décision n° 2023-848 DC du 9 mars 2023, le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur les dispositions de la loi relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables (JORF n°0060 du 11 mars 2023) dont il avait été saisi par deux recours émanant, l’un et l’autre, de plus de soixante députés.

Une transition énergétique qui manque encore d’énergie

Une transition énergétique qui manque encore d’énergie

Par Maître Marie-Coline GIORNO (Avocate collaboratrice chez Green Law Avocats)

A l’heure où la transition énergétique est urgente, où les tensions géopolitiques actuelles en témoignent, et où nous avons même une ministre dédiée à ce sujet, force est de constater que cette transition peine encore à se traduire dans les faits.

Le rapport annuel de l’autorité environnementale pour l’année 2021 en atteste

La QPC prometteuse qui accouche d’une souris…

Par Maître David DEHARBE (GREEN LAW AVOCATS) Dans une décision n° 2021-953 QPC, le Conseil constitutionnel a finalement admis la conformité au « du principe de nécessité des délits et des peines » du cumul d’une amende administrative forfaitaire et d’une sanction pénale prévu par le droit des polices environnementales (cf. L.173-1, II et L. 171-8 du code de l’environnement). C’est une demi surprise mais on était en droit d’espérer que les sages de la rue de Montpensier reconnaissant une autre portée au principe non bis in idem, invoqué contre le cumul de sanctions administrative et pénale devenu la règle en matière d’environnement . Quelques explications s’imposent pour comprendre notre déception. Selon l’article L. 171-8 du code de l’environnement, en cas de méconnaissance des prescriptions applicables aux installations classées pour la protection de l’environnement, l’autorité administrative compétente met en demeure l’exploitant de l’installation ou de l’ouvrage classé d’y satisfaire dans un délai qu’elle détermine. Les dispositions du même article prévoient que l’exploitant qui ne s’est pas conformé à cette mise en demeure à l’expiration du délai imparti peut se voir infliger une amende administrative d’un montant maximum de 15 000 euros. Par ailleurs, les dispositions de l’article L. 173-1 du même code prévoient qu’une personne physique reconnue coupable du délit d’exploitation d’une installation classée pour la protection de l’environnement en violation de cette mise en demeure encourt une peine de deux ans d’emprisonnement et de 100 000 euros d’amende. Lorsqu’il s’applique à une personne morale, ce même délit est, selon l’article L. 173-8 du même code, puni d’une amende de 500 000 euros qui peut s’accompagner, notamment, des peines de dissolution de la personne morale, de placement sous surveillance judiciaire, de fermeture temporaire ou définitive ou d’exclusion des marchés publics à titre temporaire ou définitif L’exploitant d’une installation classée pour la protection de l’environnement avait contesté via une QPC la constitutionnalité ce cadre légal en ce qu’il permet l’intervention d’une amende forfaitaire administrative infligée pour non-respect d’une mise en demeure qui l’exposait encore à une sanction pénale. Le principe non bis in idem, selon lequel on ne peut être sanctionné deux fois pour les mêmes faits est effectivement implicitement consacré à l’article à l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : « La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée ». Selon le Conseil constitutionnel « Si l’éventualité que deux procédures soient engagées peut conduire à un cumul de sanctions, le principe de proportionnalité implique qu’en tout état de cause le montant global des sanctions éventuellement prononcées ne dépasse pas le montant le plus élevé de l’une des sanctions encourues » (Cons. const. 28 juillet 1989, n°89-260DC, § 22). Dans sa décision du 3 décembre 2021 le Conseil constitutionnel rappelle que « Les principes ainsi énoncés ne concernent pas seulement les peines prononcées par les juridictions pénales mais s’étendent à toute sanction ayant le caractère d’une punition ». Ainsi le Conseil admet que le cumul de sanctions administratives et pénales doit respecter les principes de légalité, de proportionnalité et de  la nécessité des peines. Mais le juge constitutionnel limite la portée pratique du non bis in idem en précisant : « Il découle du principe de nécessité des délits et des peines qu’une même personne ne peut faire l’objet de plusieurs poursuites tendant à réprimer de mêmes faits qualifiés de manière identique, par des sanctions de même nature, aux fins de protéger les mêmes intérêts sociaux. Or bien évidemment en l’espèce le juge constitutionnel considère que le cumul n’intéresse pas des sanctions de même nature : « 10. Ainsi, à la différence de l’article L. 171-8 qui prévoit uniquement une sanction de nature pécuniaire, l’article L. 173-1 prévoit une peine d’amende et une peine d’emprisonnement pour les personnes physiques ou, pour les personnes morales, une peine de dissolution, ainsi que les autres peines précédemment mentionnées. 11. Dès lors, les faits prévus et réprimés par les dispositions contestées doivent être regardés comme susceptibles de faire l’objet de sanctions de nature différente. Par conséquent, le grief tiré de la méconnaissance des principes de nécessité et de proportionnalité des peines doit être écarté ». Cette solution est fort discutable dès lors que le principe non bis in idem ne justifie en rien de distinguer selon la nature des peines lorsque, pour partie au moins ou même en totalité, elles peuvent être identiques quand le juge entre en condamnation : l’exploitant ICPE qui ne respecte pas une mise en demeure s’expose au versement d’une somme d’argent tant au titre de l’amende administrative que de la peine contraventionnelle,  au-delà du risque de la peine privative de liberté. Et au demeurant l’amende administrative comme la contravention ont en commun de constituer des mesures à proprement parler répressives qui tendent tout autant à sanctionner, à obtenir l’obéissance et ont une portée prophylactique. Il est d’autant plus regrettable de voir le Conseil opter pour cette solution qu’elle ignore la grande portée en pratique de l’amende administrative : faute de pouvoir en obtenir aisément la suspension par le juge administratif, elle rend le privilège du préalable redoutable en confiant non à un juge mais aux administrations le pouvoir de sanctionner … Mais fait-il le rappeler ? Un tel scenario expose à l’arbitraire. Or c’est pourtant le rôle du Conseil constitutionnel de nous en protéger. Ces QPC prometteuses qui accouchent d’une souris et de renvois qui tournent à vide sont décidément une grande déception pour les avocats aux barreau qui attendent d’une justice constitutionnelle qu’elle soit un peu moins encline à faciliter l’action administrative et un peu plus dévouée à la protection des libertés publiques.

Le Conseil constitutionnel saisi d’une QPC à l’encontre de l’article 541-30-2 du code de l’environnement

Par Maître DAvid DEHARBE (Green Law Avocats) La FNADE (la Fédération Nationale des Activités de Dépollution) a saisi le Conseil d’Etat de la légalité du décret n° 2021-838 du 29 juin 2021 qui crée l’article R. 541-48-2 du code de l’environnement prévoyant les modalités de justification du respect des critères de performance de tri par un tiers accrédité en application de l’article L. 541-30-2 du code de l’environnement. A cette occasion la FNADE a posé une question prioritaire de constitutionnalité à l’encontre de cette disposition de cette disposition législative issue de l’article 91 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (loi dite Agec). L’article L. 541-30-2 du code de l’environnement prévoit que les installations de stockage de déchets non dangereux non inertes doivent prioriser la réception de résidus de tri des activités de valorisation, lorsqu’elles traitent des déchets issus d’une collecte séparée et satisfont à des critères de performance. Ces critères de performance ont été fixés par le décret précité et son arrêté d’application (arrêté du 29/06/21 pris pour l’application de l’article L. 541-30-2 du code de l’environnement relatif aux critères de performances d’une opération de tri des déchets non dangereux non inertes : JO n° 157 du 8 juillet 2021)). Ainsi les exploitants d’installation de stockage de déchets non-dangereux non inertes sont tenus de réceptionner les déchets produits par les activités de préparation en vue de la réutilisation, de recyclage et de valorisation ainsi que les résidus de tri qui en sont issus lorsqu’ils justifient qu’ils satisfont aux critères de performance selon les modalités prévues par l’arrêté précité. La FNADE reproche à l’article L541-30-2 du code de l’environnement de méconnaître la liberté contractuelle et la liberté d’entreprendre, toutes deux garanties par la constitution. Le Conseil d’Etat a décidé de renvoyer cette QPC au Conseil constitutionnel… affaire à suivre.