La promesse de vente sous condition suspensive : l’application de la clause pénale n’est pas automatique!

Par un arrêt en date du 6 mai 2014 (C.cass, viv. 3ème, 6 mai 2014 n° 13-12619), la Cour de cassation précise que les vendeurs qui ont remis en vente un immeuble ayant fait l’objet d’une promesse de vente sous condition suspensive ne peuvent demander le bénéfice de la clause pénale en cas de refus de l’acquéreur de réitérer la vente. En l’espèce, des particuliers avaient conclu une promesse de vente concernant un terrain avec la condition suspensive que l’acquéreur obtienne un permis de construire. Le permis de construire fut obtenu et les vendeurs sollicitaient la régularisation de la vente. Tel ne fut pas le cas puisque l’acquéreur resta silencieux. Les acquéreurs ont alors sollicité l’application de la clause pénale à leur profit étant précisé qu’ils avaient entre-temps publié une annonce de remise en vente de l’immeuble. Saisie du litige, la Haute juridiction analyse dans un premier temps la condition suspensive dont était assortie la promesse de vente en jugeant : « Qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté que la promesse de vente du 24 janvier 2008 était notamment consentie à l’acquéreur sous condition suspensive du dépôt d’une demande de permis de construire dans les 10 jours de la signature de la promesse et que si l’acquéreur ne recevait pas de réponse de l’administration avant le 15 avril 2008, la condition serait réputée défaillante, la régularisation de la vente étant prévue au plus tard au 30 avril 2008 ; que la cour d’appel a également constaté que l’acquéreur n’avait déposé sa demande de permis de construire que le 18 février 2008 et que, sur demande de l’administration, il avait complété son dossier le 29 avril 2008, démontrant sa volonté de poursuivre la vente, de sorte qu’à la date du 29 avril 2008, le délai de réalisation de la condition suspensive avait été tacitement prorogé par les deux parties (…) » Puis la Cour de cassation censure partiellement la Cour d’appel quant aux conséquences découlant de la publication par les acquéreurs d’une annonce de vente : « Qu’il résulte en l’espèce des constatations de la cour d’appel, qu’à aucun moment les consorts X… n’ont signifié à Monsieur Y… qu’ils publiaient le 7 juin 2008 une annonce pour proposer le bien à la vente, ou encore, au moment de passer cette annonce, qu’ils ne souhaitaient plus le lui proposer, pas plus qu’ils ne lui ont adressé la moindre mise en demeure visant le dépassement des délais, les consorts X… faisant en effet à cet égard valoir dans leurs conclusions d’appel (p. 7) qu’ils entendaient exclusivement, au moyen, de cette annonce, s’octroyer une sorte de garantie en recherchant un éventuel nouvel acquéreur, pour le cas où il s’avèrerait finalement impossible de conclure une quelconque transaction avec Monsieur Y…, de sorte qu’au regard des constatations de la cour d’appel selon lesquelles les parties étaient convenues, au 29 avril 2008, de proroger les délais de réalisation de la condition d’obtention du permis de construire, en l’absence de toute manifestation inverse de la volonté des consorts X…, Monsieur Y… était fondé, une fois le permis de construire obtenu, à demander la réitération de la vente, que l’annonce ait, ou non, été passée, et que de ce fait, en pratique, dans les relations entre les consorts X… et Monsieur Y…, le bien objet de la vente était toujours « immobilisé » ; que dès lors en affirmant qu’en mettant le bien en vente, sans en aviser antérieurement Monsieur Y…, ni l’avoir mis en demeure d’une quelconque façon, les consorts X… lui avaient signifié sans équivoque que leur bien n’était plus immobilisé et qu’ils s’estimaient déliés de leur engagement, la cour d’appel n’a pas tiré de ses constatations les conséquences légales, et a derechef violé l’article 1134 du code civil. PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi » Cet arrêt est intéressant puisqu’il rappelle qu’en principe la promesse de vente sous condition suspensive produit ses effets selon la volonté des parties lorsque les conditions suspensives se réalisent et que les termes arrivent à échéance; a contrario, si la volonté affichée des parties n’est pas de mener la vente à son terme, l’application de la clause pénale peut être neutralisée par le juge. Concrètement, en cas de violation de la promesse, les sanctions sont celles du droit commun. La victime de l’inexécution peut : Demander la résolution et/ou des dommages et intérêts (Cass. civ., 26 mars 1884 : DP 1884, 1, p. 403 ; S. 1886, 1, p. 341 : vendeur demandant la résolution. – Cass. 3e civ., 28 avr. 1981, n° 80-10.002, préc. n° 88 : idem. – P.-H. Antonmattei et J. Raynard, op. cit., n° 67. – J. Huet, op. cit., n° 11520. – Ph. Malaurie, L. Aynès et P.-Y. Gautier, op. cit., n° 137). Demander le paiement de l’indemnité prévue par la clause pénale (CA Poitiers, 1re ch., 26 nov. 2008 : JurisData n° 2008-379706. – CA Bourges, ch. civ., 16 nov. 2004, n° 03/01740 : JurisData n° 2004-261859). En l’espèce il s’agissait de cette seconde hypothèse dans le litige soumis à la Cour de cassation. Toutefois, la Cour de cassation de manière assez logique en l’espèce refuse de faire droit à l’application automatique de la clause pénale au regard du comportement des vendeurs lesquels ont publié une annonce de vente de l’immeuble démontrant qu’ils considéraient ne plus être liés par la promesse de vente litigieuse. C’est donc une recherche de la volonté des parties au sens de l’article 1134 du code civil qui est menée par la juridiction d’appel reprise par la Cour de cassation. Ce refus de la Cour de cassation d’appliquer automatiquement le jeu de la clause pénale prévue dans une promesse de vente doit conduire les bénéficiaires de promesse à demeurer vigilants et à émettre expressément leur volonté de réitérer la vente… car s’ils sont trop prudents (notamment en remettant le bien en vente… ce qui somme toute n’apparaît pas déraisonnable au vu du silence de l’acquéreur), leur comportement risque d’être interprété contre eux. Aurélien BOUDEWEEL Green Law Avocat

La prescription de l’action publique en cas d’infractions aux règles d’urbanisme : un régime juridique subtil !

Par un arrêt en date du 27 mai 2014 (C.cass, 27 mai 2014, n°13-80.574), la Cour de cassation rappelle que les infractions d’exécution de travaux sans déclaration préalable et en méconnaissance du plan local d’urbanisme (PLU) s’accomplissent pendant la durée des travaux jusqu’à leur achèvement. La Haute juridiction précise à cet égard que la prescription de l’action publique ne court qu’à compter du jour où les installations sont en état d’être affectées à l’usage auquel elles sont destinées. En l’espèce, un particulier avait fait installer en 2005 des constructions modulaires sans autorisation et en méconnaissance du Plan local d’urbanisme. Ce dernier avait été condamné en première instance à une amende et une remise en état des lieux.  Estimant que le régime de la prescription devait trouver à s’appliquer, la Cour d’appel de Versailles saisie du litige avait rejeté l’argument au motif que « les faits qui lui sont reprochés constituent des délits continus dont les effets se prolongent par la volonté réaffirmée de la prévenue de ne pas respecter les dispositions réglementaires applicables ». Rappelons que les infractions au code de l’urbanisme constituent des délits. Leur prescription est donc, conformément à l’article 8 du code de procédure pénale, de 3 ans. Il faut souligner que le délai de prescription des infractions au code de l’urbanisme ne commence à courir qu’à compter de l’achèvement des travaux (C.cass, crim, 17 juin 1964 ; C.cass, crim., 10 déc. 1985, n° 84-92.105 ; C.cass, crim, 20 mai 1992, n° 90-87.350), ce qui justifie que l’on parle d’infraction continue. Ce que la Cour de cassation précise dans l’arrêt commenté est que les travaux ne sont “achevés” qu’à compter du moment où l’immeuble est en état d’être affecté à l’usage auquel il est destiné. Ainsi, la jurisprudence considère que la prescription n’est pas acquise tant que des travaux, même non soumis à permis de construire (revêtement extérieur en pierre et travaux intérieurs tels que le carrelage et la peinture) restent à exécuter (C.cass crim, 18 mai 1994, n° 93-84.557). En l’espèce, la Cour de cassation casse partiellement le raisonnement suivi par la Cour d’appel et rappelle :  « Attendu que les infractions d’exécution de travaux sans déclaration préalable et en méconnaissance du Plan Local d’Urbanisme s’accomplissent pendant tout le temps où les travaux sont exécutés et jusqu’à leur achèvement ; que la prescription de l’action publique ne court qu’à compter du jour où les installations sont en état d’être affectées à l’usage auquel elles sont destinées ; Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure qu’un procès-verbal, dressé le 9 octobre 2008, a constaté que Mme X… avait posé des constructions modulaires d’une surface d’environ 20 m2 ainsi qu’une toiture deux pans et un auvent sans autorisation et en méconnaissance du PLU de la commune de …, sur une parcelle lui appartenant ; Attendu que, pour rejeter l’exception de prescription soulevée par Mme X… qui soutenait qu’en 2005 elle a acheté une construction modulaire qu’elle a posée sur sa parcelle et que l’auvent a été créé au moment où ladite construction a été installée, l’arrêt attaqué retient que les faits qui lui sont reprochés constituent des délits continus dont les effets se prolongent par la volonté réaffirmée de la prévenue de ne pas respecter les dispositions réglementaires applicables ; Mais attendu qu’en se déterminant ainsi, sans rechercher si, à la date du premier acte interruptif de prescription, l’ouvrage, portant sur les constructions modulaires et l’auvent, était  depuis trois années, en état d’être affecté à l’usage auquel il était destiné, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ; D’où il suit que la cassation est encourue de ce chef ». L’arrêt rendu par la Cour de cassation confirme sa jurisprudence abondante rendu sur le sujet et sanctionne la liberté de raisonnement de la Cour d’appel de Versailles. Cet arrêt est intéressant puisqu’il permet de rappeler que le régime de la prescription de l’action publique pour les infractions commises en méconnaissance des règles d’urbanisme est soumis à un régime d’appréciation au cas par cas, qui conduira le juge à vérifier à partir de quand la prescription a commencé à courir. Aussi, les personnes souhaitant faire jouer la prescription devront apporter la preuve par le biais de photographies, factures ou constat d’huissier …. que les travaux exécutés étaient bien terminés à une date déterminée et donc permettaient à la construction d’être affectée à l’usage auquel elle est destinée. Rappelons donc que la prescription au sens du droit de l’urbanisme ne jouera qu’à compter du jour de l’achèvement complet des travaux et du jour où l’installation est en état d’être affectée à l’usage auquel on la destine. En l’absence de travaux achevé ou ne permettant pas un usage auquel la construction est destinée, aucun délai ne court et les poursuites pénales sont alors susceptibles d’être engagées. Me Aurélien BOUDEWEEL Green Law Avocat  

Eoliennes: le permis de construire n’a pas à être précédé d’une autorisation d’occupation du domaine public pour le passage des câbles (CE, 4 juin 2014)

Le Conseil d’Etat vient de trancher récemment (Conseil d’Etat, 4 juin 2014, n°357176) la question de savoir si la délivrance du permis de construire pour un parc éolien est subordonnée à l’obtention préalable d’une autorisation d’occupation du domaine public pour le passage des câbles électriques nécessaires au raccordement au réseau des éoliennes. Cette question était d’importance car les règles auparavant applicables prévoyaient que le demandeur au permis devait disposer d’un “titre l’habilitant à construire”, ce qui pouvait être de nature à rendre nécessaire une AOT ou une COT lorsque le domaine public était concerné par la construction. Toute la question demeurait de savoir si le réseau de câbles était inclus dans la construction, ce d’autant qu’en l’espèce, ce n’était même pas le réseau privé (éoliennes-poste de livraison) mais le réseau géré par le gestionnaire (poste de livraison/poste source) qui était en cause. La réponse pourrait apparaître comme frappée du bon sens (la construction ne porte que sur le parc éolien) mais pourtant, cette question restait en suspend, tant que deux jurisprudences s’opposaient: l’arrêt rendu en appel dans l’affaire finalement tranchée par le Conseil d’Etat (CAA Douai, 23 déc. 2011, n°10DA00973) et un jugement du Tribunal administratif de Lille (TA Lille, 4 oct. 2012, n° 0907032). En l’espèce, une association cherchait à obtenir l’annulation d’un permis de construire accordé à un opérateur pour la construction d’un parc éolien. Au soutien de sa demande, l’association soutenait que l’enfouissement des câbles électriques reliant le poste de livraison du parc éolien au poste source du réseau de distribution d’électricité nécessitait une occupation des ouvrages du réseau public de distribution implantés sur le domaine public. Elle estimait que le pétitionnaire devait joindre à sa demande de permis de construire la preuve de la délivrance d’une autorisation d’occupation du domaine public. Lors de l’audience, les conclusions du Rapporteur public avaient été accueillies avec une grande surprise et la formation de jugement de la Cour administrative d’appel de Douai avait estimé que le parc éolien et les câbles formaient un tout : « L’enfouissement des câbles électriques reliant le poste de livraison aux postes sources nécessite une occupation des ouvrages du réseau public de distribution d’électricité implantés sur le domaine public ; que le pétitionnaire du permis litigieux ne justifie pas de la délivrance, par la commune ou par le gestionnaire du réseau de transport d’électricité, d’une autorisation d’occupation du domaine public à cette fin ; que dans ces conditions [le pétitionnaire] ne peut être regardée comme disposant d’un titre l’habilitant à construire ». L’année suivante, le Tribunal administratif de Lille (TA Lille, 4 oct. 2012, n° 0907032) avait rendu un jugement contradictoire. Le Conseil d’Etat clarifie donc cette question en considérant : « qu’il résulte toutefois des articles 14 et 18, alors applicables, de la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité que le raccordement des ouvrages de production d’électricité au réseau public de transport d’électricité ainsi qu’aux réseaux publics de distribution d’électricité incombe aux gestionnaires de ces réseaux ; qu’ainsi, le raccordement, à partir de son poste de livraison, d’une installation de production d’électricité au réseau électrique se rattache à une opération distincte de la construction de cette installation et est sans rapport avec la procédure de délivrance du permis de construire l’autorisant ; que la délivrance de ce permis n’est donc pas subordonnée, hors l’hypothèse où l’installation serait elle-même implantée, en tout ou en partie, sur le domaine public, à l’obtention préalable d’une autorisation d’occupation du domaine public ». La construction de l’installation éolienne et son raccordement au réseau électrique sont deux opérations distinctes. La délivrance du permis de construire n’est donc pas subordonnée à l’obtention préalable d’une autorisation du domaine public. Rappelons que cet arrêt est rendu sous le régime antérieur relatif au titre habilitant à construire. Aujourd’hui, l’article R431-13 du code de l’urbanisme règle cette question, puisqu’il prévoit « Lorsque le projet de construction porte sur une dépendance du domaine public, le dossier joint à la demande de permis de construire comporte une pièce exprimant l’accord du gestionnaire du domaine pour engager la procédure d’autorisation d’occupation temporaire du domaine public ». Il ne sera donc désormais nécessaire de joindre au dossier de permis de construire éolien une pièce attestant de l’accord du gestionnaire du domaine public pour engager la procédure d’autorisation d’occupation temporaire du domaine public que pour autant que le parc lui même est lui même implanté sur une telle parcelle (dans cette hypothèse, ce n’est pas l’autorisation d’occupation du domaine public qui est requise, mais uniquement l’accord du gestionnaire pour engager la procédure d’autorisation). Si le parc n’est pas implanté sur du domaine public, la construction ne sera pas assujettie à la production de l’accord du gestionnaire, même si le parc nécessite bien évidemment un raccordement au RPD. Camille Colas Green Law Avocat  

Vente d’immeuble en zone humide : vigilance quant aux restrictions à la constructibilité ! (CA Riom, 13 janv.2014)

Par un arrêt en date du 13 janvier 2014(CA, 13 janvier 2014, n°12/02917: arrêt CA RIOM 13 janvier 2014),  la Cour d’appel de RIOM rend une décision intéressant tous les propriétaires de biens situés en “zone humide”. En effet, la Cour d’appel censure le jugement du tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand ayant débouté des particuliers de leur demande d’annulation de la vente d’un terrain acquis en vue de la construction d’une maison d’habitation au titre de l’erreur sur la substance de la chose vendue.  En l’espèce, des particuliers avaient acheté un terrain en vue de faire construire une maison d’habitation. Sur le plan de l’urbanisme, le terrain était classé en zone constructible. Néanmoins la classification du tréfonds du terrain en “zone humide” le rendait difficilement constructible puisque la législation découlant de la Loi sur l’eau soumet à autorisation préfectorale tous travaux ayant notamment pour effet de supprimer, assécher ou imperméabiliser une zone humide. Ainsi, le coût de la réalisation d’une éventuelle construction se révélait deux fois supérieur au devis initial en raison de la nécessité de drainage et d’enrochement du ruisseau. Les particuliers estimant que la condition déterminante de l’acquisition de ce terrain était l’édification de leur future maison d’habitation ont assigné le vendeur au visa de l’article 1110 du code civil au titre de l’erreur sur la qualité substantielle de la chose vendue. Rappelons que l’article 1110 du Code civil énonce : « L’erreur n’est une cause de nullité de la convention que lorsqu’elle tombe sur la substance même de la chose qui en est l’objet. Elle n’est point une cause de nullité lorsqu’elle ne tombe que sur la personne avec laquelle on a intention de contracter, à moins que la considération de cette personne ne soit la cause principale de la convention ». Notons qu’en première instance, les juges avaient débouté l’action des demandeurs au motif que ces derniers étaient parfaitement informés de la qualification de la zone en zone humide et que des précautions devaient être prises pour une construction immobilière. Saisie du litige en appel, la Cour d’appel de RIOM censure le raisonnement suivi par la juridiction de première instance en estimant:  « […] qu’il résulte de l’article 1110 du code civil que l’erreur est cause de nullité d’une convention que lorsqu’elle affecte la substance même de la chose qui en est l’objet ; Attendu, en l’espèce, qu’il n’est pas contesté que la constructibilité du terrain vendu était bien une condition substantielle du consentement donné par les acquéreurs qui avaient effectivement reçu, avant la signature de l’acte authentique, une information quant au caractère humide du terrain et que des précautions devaient être prises, mais la seule mention était qu’une étude de sol préalable à la mise en œuvre d une construction soit faite (…) ; Attendu en conséquence, qu’au jour de la vente authentique, M. M. et Mme M. n’étaient informés que de la présence du ruisseau très humide , ce qui est d ailleurs un pléonasme et de la nécessité de faire un étude de sol, ce qui ne laissait pas présager de grosses difficultés quant à la constructibilité réelle du terrain compte tenu de spécifications également limitées à cette seule étude de sol indiquées au permis de construire; Mais attendu que c’est ensuite, lors de l’étude géotechnique, effectuée le 12 novembre 2010 par A…BTP, que les réels problèmes sont apparus après vérification, tant au niveau technique qu’au niveau réglementaire, que les solutions de fondation pouvaient être envisagées; Qu’en effet, il est démontré qu’une étude hydrologique était nécessaire pour vérifier la possibilité de réaliser une construction ; que l’étude concluait que ce n’était qu’ après avoir envisagé les solutions de fondation et de dallage qu’il pouvait être déterminé si le site était réellement constructible ou non ; que A…BTP mentionne de nombreuses venues d’eau à certaines profondeurs, et qu’en raison de la nature des sols superficiels, une possibilité de présence épisodique de nappes superficielles d’imbibition était envisagée au vu de la présence du ruisseau ; que l’étude hydrologique a été régulièrement versée aux débats et que la discussion qui s’ensuivit entre les parties est parfaitement contradictoire ; Attendu en conséquence que si la présence de ce ruisseau était évident lors de la passation de l’acte authentique de vente, les conclusions géotechniques et hydrogéologiques faisaient pour la première fois apparaître des dispositions très particulières de conception et d’exécution des fondations, et ce après drainage ; que c’est d’ailleurs pour cette raison que la société A….BTP concluait qu’elle ne pouvait fournir aucune solution avant l’étude hydrologique ; ( …) Attendu en conséquence que c’est à bon droit que M. M. et Mme M., évoquant l’erreur qu’ils avaient commise sur la qualité substantielle du terrain, ont sollicité que soit prononcée la nullité de la vente de la parcelle ZA numéro …….lieu dit «…………….» passée par devant Maître J………., notaire à C…………..le 22 ………..2009, ainsi que la restitution de la somme de 44.267,15 € correspondant au prix de vente et frais notariés d’enregistrement; Attendu que l’arrêt étant déclaratif de droit il convient de considérer que, conformément à l’article 1153 – 1 du code civil, les intérêts au taux légal courront compter de son prononcé ». Cet arrêt est utile car en l’espèce la parcelle de terrain qui a été achetée par les particuliers n’était pas inconstructible. Toutefois le caractère humide de la zone rendait le coût de la construction plus important que celui prévu initialement par les acheteurs. Surtout, les études de sol qui ont été diligentées révélaient la difficulté de mener un projet de construction à des conditions économiquement acceptables. Ce n’est donc pas une faute que les vendeurs auraient commises qui ont conduit à l’annulation de la vente, mais bien une erreur sur les qualités intrinsèques de la chose vendue.  Rappelons qu’une jurisprudence abondante admet que l’erreur puisse porter sur l’aptitude de la chose à remplir l’usage auquel on la destine.  En matière de vente d’immeubles, la jurisprudence reconnaît l’erreur lorsque : Le terrain est déclaré, à la suite d’une vente, inconstructible (Cass. 1re civ., 2 mars 1964 : Bull. civ. 1964, I, CA Bourges, 16 avr. 1985 ; CA Toulouse,…

Antenne relais sur un bâtiment existant : la soumission à déclaration préalable ou permis de construire ne dépend pas de la hauteur de l’antenne (CE, 30 avril 2014)

Par une décision en date du 30 avril 2014 (CE, 30 avril 2014, n°366712, mentionné dans les Tables du recueil Lebon) le Conseil d’Etat a jugé que l’implantation d’une antenne de radiotéléphonie mobile sur la terrasse d’un immeuble existant constitue une « opération de travaux exécutés sur une construction existante », de sorte que la hauteur de l’antenne relais est sans incidence sur la détermination du régime juridique applicable.  En l’espèce, un opérateur de téléphonie mobile avait déposé une déclaration préalable en vue de l’installation de 3 antennes de moins de douze mètres de hauteur et d’une armoire technique sur la terrasse d’un immeuble existant. Une association de riverains avait saisi le juge administratif contre la décision de non-opposition du maire au projet. Le Tribunal administratif de Rennes avait tout d’abord annulé la décision jugeant que la hauteur totale du projet qui dépassait le seuil de 12 mètres prévus par la réglementation sur les constructions nouvelles rendait nécessaire l’obtention du permis de construire au sens de l’article R421-1 et R 421-9 a) du Code de l’urbanisme. Saisi du litige par l’opérateur, le Conseil d’Etat censure le Tribunal administratif de Rennes pour erreur de droit. Rappelons en effet qu’aux termes de l’article R. 421-14 du code de l’urbanisme alors applicable, il était prévu que « sont soumis à permis de construire les travaux suivants, exécutés sur des constructions existantes, à l’exception des travaux d’entretien ou de réparations ordinaires : a) Les travaux ayant pour effet la création d’une surface hors oeuvre brute supérieure à vingt mètres carrés ; b) […] c) […] d) […] Pour l’application du b du présent article, les locaux accessoires d’un bâtiment sont réputés avoir la même destination que le local principal». Ainsi, dès lors que l’implantation d’une antenne sur la toiture d’un immeuble est qualifiée de « travaux sur une construction existante », seuls les critères posés par l’article R 421-14 doivent être pris en compte pour déterminer si une déclaration préalable ou un permis de construire est nécessaire. Or, la hauteur des travaux sur l’immeuble existant est indifférente selon l’article R 421-14. La Haute juridiction rappelle ainsi peu importe la hauteur de l’antenne dans l’hypothèse où elle est implantée sur un immeuble existant : « Considérant que l’implantation d’une antenne de radiotéléphonie mobile sur la terrasse d’un immeuble constitue une opération de travaux exécutés sur une construction existante ; que si ce type d’ouvrage, pour être soumis à simple déclaration préalable, doit respecter les critères fixés par les articles R. 421-14 et R. 421-17 précités et, notamment, avoir pour effet, pour l’ensemble constitué par la ou les antennes-relais et par l’armoire technique, la création d’une surface hors œuvre brute comprise entre deux et vingt mètres carrés, en revanche, sa hauteur est sans incidence sur la détermination du régime applicable ; que, par suite, en jugeant que l’implantation d’une antenne de radiotéléphonie sur le toit d’un immeuble devait respecter les règles relatives aux constructions nouvelles et faire l’objet d’un permis de construire en vertu des dispositions combinées des articles R. 421-1 et R. 421-9 du code de l’urbanisme lorsque la hauteur de l’ouvrage au-dessus du sol est supérieure à 12 mètres et la surface hors œuvre brute créée supérieure à 2 mètres carrés, le tribunal administratif de Rennes a commis une erreur de droit ; que, dès lors et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi, le jugement attaqué doit être annulé ; » On notera que la version de l’article R. 421-14 alors applicable prévoyait une « surface hors œuvre brute » (SHOB) supérieure à vingt mètres carrés, tandis qu’il s’agit aujourd’hui d’évaluer l’emprise au sol ou la surface de plancher, qui ne doivent pas excéder vingt mètres carrés. Néanmoins, ce changement de terminologie ne change en l’espèce rien au raisonnement ici adopté par le Conseil d’Etat : il faut tenir compte de la surface cumulée de tous les éléments (pylône, dalle de béton, local technique…), dans la mesure où ceux-ci entretiennent un lien fonctionnel impliquant de les considérer comme une seule construction, et ce peu importe la hauteur de l’antenne. En définitive, cette décision du Conseil d’Etat, qui a les mérites d’une publication aux Tables, confirme la simplicité de la formalité d’urbanisme pour les opérateurs, pour lesquels l’implantation en toiture des immeubles sera privilégiée. Néanmoins, ce type d’implantation soulève des questions de sécurité bien différentes d’une implantation au sol, ainsi que des questions propres au droit de la copropriété qu’i convient de ne pas négliger pour les propriétaires concernés. Aurélien Boudeweel Green Law Avocat