Bilans GES: les guides méthodologiques mis en ligne

Deux guides  ministériels  ont été publiés sur le site du ministère de l’écologie, du développement durable des transports et du logement, le 16 septembre 2011, relativement, – d’une part, à la méthode pour la réalisation des bilans d’émissions de gaz à effet de serre pour les entreprises, – et d’autre part, à celle à suivre pour les collectivités territoriales (110912_Art-75_Guide_specifique_pour_les_collectivites). Ces deux guides  complètent utilement  l’article 75 de la loi n° 2010-788 portant engagement national pour l’environnement (art. L. 229-5 et L.229-29 du code de l’environnement) ainsi que le décret n° 2011-829 du 11 juillet 2011 relatif au bilan des émissions de gaz à effet de serre et au plan climat-énergie territorial (art. R 229-45 à R 229-57 du code de l’environnement) déjà commenté sur ce blog  (cf. notre brève du 18/07/2011 relative au «  Bilans des émissions de gaz à effet de serre et plans climat-énergie territoriaux (PCET) : des précisions parues au JO » ;  pour le projet : cf. : notre brève du 07/03/2011, « Bilan des émissions de gaz à effet de serre et plan climat énergie-territorial : le projet de décret en consultation » ), sachant que les collectivités territoriales et intercommunalités doivent disposer au plus tard le 30 septembre 2011 de la méthode d’établissement des bilans (art.2 du décret n° 2011-829). Succinctement, nous rappellerons que ce bilan doit être établi avant le 31 décembre 2012 puis réactualisé tous les 3 ans. De tels bilans sont d’autant plus importants qu’ils doivent servir à l’élaboration des plans climat-énergie territoriaux (PCET) et  s’inscrire dans le  schéma régional du climat, de l’air et de l’énergie (SRCAE – cf. notre brève du 22/06/2011 : « publication du décret SRCAE au JORF : mieux vaut tard que jamais !,) avec lequel ils doivent être compatibles. En application de l’article R. 229-49 du code de l’environnement, le ministère chargé de l’écologie  a publié  les informations méthodologiques nécessaires à l’établissement des bilans des émissions de gaz à effet de serre. Relativement  à la stratégie d’élaboration du bilan,  le «  guide  méthodologique pour la réalisation des bilans d’émissions de gaz à effet de serre des collectivités »  indique nettement sa préférence pour une analyse territoriale  du bilan de gaz à effet de serre  même si cette approche n’est pas imposée par les textes législatifs et réglementaires. La recommandation,  présentée sous la forme d’un tableau s’adresse aux collectivités territoriales qui doivent élaborer un PCET. Au delà de la distinction entre les émissions  directes et indirectes de gaz à effet de serre, les recommandations n’oublient pas les  questions d’interférences de territoires (régionaux et infrarégionaux) dès lors que la région – tout à la fois en tant que collectivité décentralisée et déconcentrée – sert de cadre géographique pour l’élaboration du schéma régional du climat, de l’air et de l’énergie !  Il est, en outre,  précisé que les bilans doivent prendre en compte  la gestion externalisée du service (délégations de service public, contrats de partenariat public-privé, marchés publics, conventions de mandat ou conventions publiques d’aménagement) ou les quasi-régies. L’échelon intercommunal, quant à lui, assurant le recentrage des données d’émissions de GES dès lors que les communes lui ont transféré des compétences y ayant trait. L’intérêt de la prise en charge intercommunale de la compétence est souligné en annexe afin, notamment, d’éviter les double-comptes ou de faciliter l’accès aux données…. Patricia Demaye-Simoni Maître de conférences en droit public.

Antenne relais et précaution : (pour) un regard profane sur le risque …

Monsieur Gabriel Chagnon a engagé depuis deux années une thèse sous ma direction sur l’appréhension de la notion de risque en jurisprudences administrative et judiciaire. Il me signale (et je l’en remercie vivement) cette espèce toute fraiche qui mérite une diffusion immédiate (CA Montpellier 15 septembre 2011, n° 140/04612§ ). Au demeurant, on se risque, en attendant des commentaires plus « scientifiques », à cette brève remarque sur le blog de Green law.  En matière d’antennes relais, le juge judiciaire aura pleinement rempli son office là où le juge administratif n’a pas osé l’exercer entièrement. Certes le Conseil d’Etat a finalement admis que le principe de précaution était opposable aux autorisations d’urbanisme, justement à l’occasion du contentieux occasionné par les DP afférentes aux antennes relais (CE 19 juillet 2010, n° 328687, ASSOCIATION DU QUARTIER LES HAUTS DE CHOISEUL). Mais on le sait, le juge administratif considère aujourd’hui les preuves scientifiques comme insuffisantes pour remettre en cause la légalité des déclarations de travaux. Pour sa part, le juge judiciaire n’a pas hésité sur le terrain des troubles anormaux du voisinage à conclure à «l’anormalité» en scrutant la même littérature scientifique que celle en possession du juge administratif … Mais surtout, comme nous le rappelle l’espèce reproduite, il a regardé cette littérature scientifique avec un autre oeil : non pas celui d’un juge qui se prendrait pour un expert capable de séparer le bon grain de l’ivraie au sein de la controverse scientifique, mais celui du profane désorienté car exposé par les opérateurs de téléphonie mobile sinon à un danger du moins à un risque controversé et surtout imposé. Et plus que jamais il faut saluer le courage de juges qui acceptent de prendre finalement en compte la relativité sociale des opinions scientifiques majoritaires pour le profane et le spécialiste …  L’espèce reproduite et si dessous téléchargeable (CA Montpellier, 15 septembre 2011, n° 140/04612), à l’instar de la piste défrichée par la Cour d’appel de Versailles sur le sujet (CA Versailles, 4 févr. 2009, n° 08/08775, SA Bouygues Télécom c/ Lagouge et a., Environnement n° 4, Avril 2009, comm. 51) comme le Tribunal de Grande Instance de Nanterre (TGI Nanterre, 27 mai 2010, n° RG06/09412) est en la matière sans ambigüité : alors qu’ici l’opérateur avait les moyens de respecter la zone des 100 mètres il a délibérément décidé de descendre en dessous de ce seuil d’exposition bien que la controverse scientifique persiste au moins à la marge sur le risque sanitaire ainsi créé.

L’amiante invisible sans vice caché …

Face à un constant renforcement des obligations des propriétaires d’immeubles bâtis avant le 1er juillet 1997 (cf . décret n°2011-629 du 3 juin 2011 relatif à la protection de la population contre les risques sanitaires liés à un exposition à l’amiante dans les immeubles bâtis), il convient de noter un arrêt rendu le 6 juillet dernier par la Cour de Cassation (Cass. 3ème civ., 6 juillet 2011, n°10-18.882 ) En effet, cet arrêt rappelle clairement la validité de la clause d’exclusion de garantie des vices cachés insérée au contrat de vente même en cas de découverte ultérieure d’amiante dans l’immeuble. Les arguments allégués par l’acquéreur aux fins d’obtenir la prise en charge des frais de désamiantage ainsi que des dommages et intérêts reposaient sur la prétendue mauvaise foi du vendeur et sur le fait que la question de l’amiante relevant d’une obligation légale, il ne pouvait y être dérogée contractuellement. Ayant rapidement écarté la mauvaise foi des vendeurs faute pour les demandeurs d’en apporter la preuve, la Cour d’Appel de Paris, approuvée par la Haute juridiction, a retenu que la seule obligation du vendeur était d’annexer à l’acte de vente un repérage avant vente de l’amiante conformément aux dispositions de l’article L. 1334-13 du Code de la Santé publique. Or, celui-ci avait bien été réalisé en l’espèce et communiqué aux acquéreurs. Dès lors, la clause d’exclusion de garantie des vices cachés trouvait donc parfaitement à s’appliquer. En réalité, les acquéreurs avaient vraisemblablement occulté qu’un diagnostic amiante (avant vente) négatif ne signifie pas pour autant absence totale d’amiante dans l’immeuble. En effet, la réalisation de ce repérage est strictement encadré par les textes règlementaires en la matière qui prévoient l’examen de certains produits et matériaux de l’immeuble et, qui plus est, accessibles sans travaux destructifs. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle la responsabilité du diagnostiqueur n’a pas été retenue en l’espèce. La mission de ce dernier ne porte, ainsi qu’il l’a été souligné ci-dessus, que sur l’examen visuel de certaines parties de l’immeuble. En conséquence, le rapport émis par le diagnostiqueur ne porte que sur la présence ou l’absence d’amiante dans ces éléments et pour peu que cela soit visible, conformément aux termes de sa mission. La solution ne peut qu’être approuvée juridiquement en ce qu’elle cantonne l’appréciation de la responsabilité du diagnostiqueur amiante aux limites de sa mission telle que définie par l’arrêté du 22 août 2002. Or, la tentation est parfois grande pour les juges du fond de s’engouffrer dans la brèche ouverte par l’obligation de conseil et de tenter d’y rattacher toutes sortes d’obligations parfois particulièrement éloignées du cadre de la mission initiale du professionnel. Cet arrêt méritait donc d’être souligné en ce qu’il rappelle clairement la stricte application des textes même dans cette matière sensible qu’est l’amiante. Marie LETOURMY Avocat au Barreau de Lille Green Law Avocat

Les infractions environnementales épargnées par le Conseil constitutionnel

A la suite de la décision du Conseil constitutionnel sur les jurés populaires, la spécificité des délits environnementaux a encore une fois été reconnue. GREEN LAW fait ici état du point de vue d’une pénaliste, avocate au Barreau de Rouen. « Considérant (…) que toutefois, les infractions prévues au livre IV du Code pénal et celles prévues au Code de l’environnement sont d’une nature telle que leur examen nécessite des compétences juridiques spéciales qui font obstacles à ce que des personnes tirées au sort y participent (…) » (Conseil constitutionnel, décision n°2011-635 DC du 4 août 2011). La loi du 10 août 2011 (n°2011-939)  sur l’entrée de jurés populaires dans les tribunaux correctionnels et sur la refonte de la justice des mineurs a consacré le souhait de l’exécutif d’adjoindre aux magistrats professionnels des jurés dits citoyens au sein, notamment, des Tribunaux correctionnels. Le Conseil constitutionnel a cependant censuré le projet de loi qui lui était soumis en soustrayant à la réforme un certain nombre de délits parmi lesquels ceux figurant au Code de l’environnement. Il s’agit là d’une nouvelle manifestation de défiance à l’égard des magistrats siégeant dans les juridictions pénales, en affectant cette fois la composition de ces dernières. Nous pouvons douter de l’apport véritable de cette réforme et nous réjouir que les infractions environnementales soient passées entre les mailles du filet répressif… En septembre 2010, Nicolas SARKOZY émettait l’idée d’introniser des jurés dits « citoyens » au sein, notamment, des Tribunaux correctionnels et des Chambres de l’application des peines. D’aucuns avaient perçu cette idée comme un nouveau coup de boutoir contre le laxisme imaginaire des magistrats. Alors qu’était remise en cause la présence des juges non professionnels au sein des Cours d’assises (notamment par Michèle ALLIOT-MARIE pour les crimes les moins graves), l’idée paraissait suffisamment incongrue pour nous faire espérer qu’elle n’était qu’un nouvel effet d’annonce caressant une partie de l’opinion publique dans le sens du poil… Las, sans que ce ne soit demandé ni par professionnels de la justice, ni par le peuple, un projet de loi était déposé en ce sens et a été finalement adopté définitivement par l’Assemblée nationale cet été (loi n° 2011-939 du 11 août 2011 sur l’entrée de jurés populaires dans les tribunaux correctionnels et sur la refonte de la justice des mineurs). Objectif affiché de la loi, rapprocher les français de leur justice. Mais beaucoup n’y voient qu’un nouveau moyen d’encadrer l’action des magistrats par la sévérité supposée – et peut-être aussi mythique que le laxisme des juges – des jurés « citoyens » ; HORTEFEUX l’a affirmé, MERCIER s’en défend. Ce qui permet de donner crédit à cette dernière thèse, ce sont les efforts déployés par le pouvoir pour encadrer toujours davantage l’activité des magistrats, lesquels pour beaucoup y voit une nouvelle marque de défiance à leur égard. Les dernières évolutions du droit positif ont en effet comme conséquence première de réduire la liberté des magistrats. – D’abord par le renforcement de la légalité formelle, en encadrant tant que faire se peut la décision des magistrats. En ce sens, nous citerons dans le domaine du droit de la peine  la loi du 10 août 2007 (n° 2007-1198) réintroduisant dans le droit pénal français la notion de peine plancher pour les infractions commises en état de récidive légale et plus récemment, la loi du 14 mars 2011 instituant des peines minimales cette fois pour les primo délinquants… – Aujourd’hui par l’adjonction de jurés dits « citoyens » (les magistrats, comme les greffiers ou les avocats, ne sont-ils pas des citoyens concourant à l’oeuvre de justice ?) ailleurs que dans les procès criminels, censés être plus répressifs que nos complaisants magistrats. Ce projet n’est pas bon, il est inutile, il est couteux. Il n’a été sollicité ni par le corps judiciaire, ni par le peuple. Mais surtout, l’une des préoccupations que soulève cette réforme est celle de l’aptitude des citoyens populaires à exercer la mission de juger. La mission du juré d’Assises n’a rien de comparable avec la mission de juger des prévenus comparaissant devant le Tribunal correctionnel. Aux Assises la présence de représentants du peuple répond à une tradition séculaire, éprouvée par la pratique. On demande aux jurés des procès criminels de se forger une intime conviction. Et en choisissant un quantum de peine, ils sont avant tout juges du trouble à l’ordre public. Aux Assises le luxe de prendre le temps, au Tribunal correctionnel l’exigence de rapidité, voire de rendement et donc de technicité, de spécialisation et de professionnalisme. Il faut tout de même acter que le parlement a limité l’intervention des jurés populaires aux questions relatives à la qualification des faits, à la culpabilité et à la détermination de la peine. Notons d’emblée que la qualification juridique des faits ainsi que le droit des peines correctionnelles peuvent poser de véritables difficultés juridiques, ce qui nous autorise à nourrir l’espoir que dans de telles hypothèses, les magistrats seront en réalité maîtres de la décision. Il est alors permis de douter fortement de l’utilité des jurés. C’est également la raison pour laquelle d’aucuns, nombreux, pensent que derrière la volonté affichée de rapprocher le peuple de ses juges se cache en réalité l’espoir que les jurés compensent par leur sévérité le laxisme des magistrats. Au moins pouvons-nous nous réjouir que le Conseil constitutionnel ait retiré du champ d’application de la loi notamment les délits prévus par le Code de l’environnement. Ainsi, en la matière environnementale, est reconnu aux juges le mérite de leur fonction et de leur compétence. La motivation du Conseil n’est autre que ce que nous avancions en amont : la question de la compétence des jurés pour juger. Sa décision n’est en effet que la reconnaissance d’une évidence, celle qu’il faut un savoir et de l’expérience pour juger. Est il nécessaire de rappeler que les délits environnementaux nécessitent systématiquement une appréciation du juge des conditions techniques de l’activité industrielle en cause ? Un jugement récent du Tribunal correctionnel de Lille (JugementTrib Correctionnel LILLE17.12.2010) vient d’ailleurs de relaxer une…

Bail et environnement : quid du niveau de dépollution exigible du preneur-exploitant ?

Le droit de l’environnement, et plus spécifiquement le droit des ICPE, continue sa percée dans le domaine des relations privées (sur ce point cf. en particulier les travaux du Professeur François-Guy TREBULLE et de Mathilde BOUTONNET). Les contractants doivent de plus en plus tenir compte de la police des ICPE dans le cadre des conventions immobilières. Si l’impact du droit de l’environnement en matière de ventes immobilières a été bien identifié, largement commenté et rapidement appréhendé par les parties, tel n’est pas le cas du droit des baux. En effet, un grand nombre de baux destinés à supporter une activité relevant de la nomenclature ICPE ne comporte, encore aujourd’hui, aucune stipulation précise quant aux modalités de restitution de l’immeuble en fin de bail et ne prévoit aucun audit de pollution dans le cadre de l’état des lieux d’entrée. Or, la question de l’articulation entre la remise en état du site telle que relevant de la législation ICPE et la restitution du bien selon les dispositions du Code civil se pose avec d’autant plus de force que ces deux notions juridiques ne se recouvrent pas nécessairement et peuvent conduire à des divergences notables. Concrètement, il convient de s’interroger sur le niveau de dépollution dû par le preneur-exploitant à la fin de l’exploitation de son activité et de son bail. Aucune difficulté dans l’hypothèse où les prescriptions administratives imposent une remise en état du site dans son état initial et prévoient une dépollution totale du site. Qui devra le plus au titre de la police ne pourra le moins sauf à engager sa responsabilité délictuelle et s’exposer aux sanctions administratives Mais qu’en est-il lorsque celles-ci sont plus limitées, eu égard notamment à l’usage futur du site, et que le bailleur entend obtenir une dépollution plus importante? La Cour de cassation n’a pas encore répondu, de manière parfaitement claire, à cette question et ce point sera très certainement tranché prochainement. Néanmoins, et en attendant,  il est d’ores et déjà possible de déceler quelques pistes de réflexion susceptibles d’être prises en compte dans la détermination de la solution. En application du droit de l’environnement, et plus spécifiquement de la réglementation ICPE, il est certain que le preneur-exploitant devra se conformer aux prescriptions administratives de remise en état sous peine de voir sa responsabilité engagée. Ce point fait l’objet d’une position constante de la Cour de Cassation qui considère que l’absence de respect des mesures administratives constitue une faute civile de nature à engager la responsabilité du locataire à l’égard du bailleur. Mais le bailleur peut-il exiger du preneur une dépollution totale ou quais-totale des lieux lorsque celle-ci n’est pas imposée l’administration ? Pour tenter de répondre à cette interrogation, il est nécessaire de se placer sur le terrain du droit des baux qui prend alors le relais du droit des ICPE. En l’absence de toute clause insérée dans le contrat, le droit commun du bail prévoit, aux termes de son article 1731 du Code Civil : « S’il n’a pas été fait d’état des lieux, le preneur est présumé les avoir reçus en bon état de réparations locatives, et doit les rendre tels, sauf preuve du contraire ». Ainsi, une présomption de bon état des lieux est instituée et il appartient, le cas échéant, au locataire de démontrer que tel n’était pas le cas en l’espèce. En l’occurrence, on pourrait être tenté de retenir, sur le fondement de ce texte, que le preneur doit effectuer une dépollution totale du terrain en l’absence de toute mention au contrat de bail et d’état des lieux précis sur ce point. Cependant, cette approche, particulièrement sévère pour le preneur-exploitant exerçant une activité polluante, n’est, à notre sens, pas conforme à l’esprit du texte. En effet, l’article susvisé prend soin de préciser que l’obligation de restitution imposée au locataire s’entend d’un « bon état de réparations locatives » et non d’une remise en état initial du bien. Par ailleurs, et c’est un là un point essentiel, il échet d’interpréter les dispositions du Code civil les unes par rapport aux autres. Or, aux termes de l’article 1732 dudit Code: « Il [le preneur] répond des dégradations ou des pertes qui arrivent pendant sa jouissance, à moins qu’il ne prouve qu’elles ont eu lieu sans sa faute ». Les dispositions de cet article permettent de limiter l’obligation de restitution du locataire aux dégradations causées de manière fautive. Dès lors, seule une usure anormale du bien serait susceptible de lui être imputée, c’est-à-dire une usure résultant d’une faute du preneur dans la jouissance du bien. Appliqué à l’exploitation d’une ICPE ayant généré de la pollution sur le terrain d’emprise, objet du bail, ce texte induit qu’en l’absence de faute du preneur-exploitant dans l’exercice de son activité, il ne pourrait lui être imposé, au titre de son obligation de restitution, un niveau de dépollution supérieur à celui requis par l’administration et qui est aujourd’hui déterminé par l’usage futur du site. L’interprétation a contrario d’un arrêt de la Cour d’Appel de Paris semble aller en ce sens (CA Paris, 16e ch. A, 7 mars 2007, n°05/05004 : Juris-Data n°2007-330937). Dans cette espèce, les juges du fond ont décidé que le preneur exploitant, exerçant une activité de travaux publics agricoles, avait commis une faute en ne prenant pas les mesures nécessaires à prévenir toute pollution dès lors que celle-ci résultait de l’existence de fuites et débordements lors d’opérations de transvasement et dépotage. Ils ont dès lors fait droit à la demande de dommages et intérêts intentée par le bailleur en réparation du préjudice subi. Ainsi, cette jurisprudence laisse à penser que le preneur, qui aura pris toutes les dispositions nécessaires à l’exercice de son activité, pourra valablement opposer au bailleur la vétusté naturelle du bien inhérente à l’exploitation que ce dernier a parfaitement accepté aux termes de la destination du bail. A cet égard, la Cour de Cassation a déjà considéré que le bailleur pouvait avoir à supporter une pollution résiduelle du site lorsque le preneur s’était conformé à son obligation de remise en…