ENR: les 10 propositions du groupe de travail éolien

Par Me Sébastien Bécue (GREEN LAW AVOCATS) Le cabinet est auteur d’un manuel en droit de l’éolien publié par LE MONITEUR Nous l’évoquions en fin d’année dernière, « il est toujours autant nécessaire de simplifier le développement de l’éolien ! » si la France veut tenir ses objectifs de développement des énergies renouvelables. Le groupe de travail « éolien » présidé par Sébastien LECORNU, Secrétaire d’Etat rattaché au ministère de la Transition écologique et solidaire, a rendu ses conclusions le 18 janvier 2018. Il ressort de leur lecture que si la démarche ne répond évidemment pas à l’ensemble des attentes de la profession, elle va au-delà de la simple volonté d’affichage. On peut en espérer une amélioration des conditions de développement des projets de parc même si certaines de ces mesures mériteraient des commentaires plus détaillés. Voici les 10 propositions retenues : 1° Suppression du double degré de juridiction pour les éoliennes terrestres. 2° Cristallisation automatique des moyens invocables au bout de deux mois après introduction du recours 3° Rédaction d’une instruction ministérielle encadrant l’appréciation par le Préfet des conditions d’autorisation du « repowering » 4° Renforcement de la motivation des avis conformes de la DGAC et réexamen de certaines zones d’entraînement aérien propices à l’éolien 5° Suppression de l’autorisation d’approbation d’ouvrage (APO) pour les câbles inter-éoliens et les raccordements 6° Autorisation du balisage fixe des éoliennes 7° Accompagnement des collectivités dans la définition de leur démarche paysagère 8° Garantie que minimum 20 % des retombées fiscales des éoliennes reviennent aux communes d’implantation 9° Rédaction d’un guide des bonnes pratiques entre développeur éolien et collectivité et création d’un réseau national d’accompagnement des collectivités dans leur démarche de développement 10° Systématisation des bonus « financement participatif » dans les appels d’offres

Plan de prévention des risques technologiques : une nouvelle application de la jurisprudence Commune de Saint-Bon-Tarentaise (CE, 6 déc.2017)

  Par Me Fanny Angevin- Green Law Avocats   Par une décision en date du 6 décembre 2017 (CE, n°400735, Mentionné aux Tables), le Conseil d’Etat s’est prononcé sur la question de savoir si la jurisprudence du Conseil d’Etat Commune de Saint-Bon-Tarentaise du 5 mai 2017 n°388902 pouvait s’appliquer à la concertation organisée pour l’élaboration d’un plan de prévention des risques technologiques. La décision Commune de Saint-Bon-Tarentaise avait mis fin à la jurisprudence Commune de Sainte-Lunaire, en considérant que l’illégalité de la délibération prescrivant l’élaboration ou la révision d’un plan local d’urbanisme ne pouvait être utilement invoquée contre la délibération approuvant le plan local d’urbanisme. C’est donc une décision intéressante pour les PPRT. Les plans de prévention des risques technologiques (PPRT) sont encadrés par les articles L. 515-15 et suivants du code de l’environnement. Ces plans visent à réguler l’urbanisation autour de certaines installations dangereuses et à ces fins, peuvent prévoir des interdictions et des prescriptions particulières pour les constructions ou ouvrages environnants. La procédure d’élaboration d’un plan de prévention des risques technologiques est encadrée par l’article L. 515-22 du code de l’environnement. Cet article prévoit classiquement trois étapes à la procédure d’élaboration du plan : la concertation, la consultation des personnes associées et l’enquête publique. Par ailleurs, l’article L. 515-22 du code de l’environnement, en ce qui concerne la concertation, opère un renvoi vers les dispositions du code de l’urbanisme (ancien article L. 300-2 du code de l’urbanisme aujourd’hui aux articles L. 103-2 et suivants du code de l’urbanisme). C’est donc avec la même logique de concertation d’un document d’urbanisme que la procédure de concertation d’un plan de prévention des risques technologiques est en principe élaborée. Dans l’affaire présentée devant le Conseil d’Etat, les préfets d’Indre-et-Loire et du Loir-et-Cher avaient prescrit l’élaboration du plan de prévention des risques technologiques visant à délimiter un périmètre de sécurité autour du site naturel de stockage souterrain de gaz au lieu-dit « Les Gerbaults » (Commune de Céré-la-Ronde). Par un arrêté commun en date des 19 et 24 décembre 2013, le plan a été approuvé. Une association de riverains et un particulier ont ensuite attaqué cet arrêté devant le Tribunal administratif d’Orléans, qui a l’a annulé par un jugement en date du 10 février 2015 au regard de l’insuffisante précision des modalités de concertation dans la délibération initiale. La Cour administrative d’appel de Nantes, par une décision en date du 15 avril 2016 n°15NT01185, a confirmé l’annulation du Tribunal administratif d’Orléans par adoption des motifs. Le Ministre s’est donc pourvu en cassation, soutenant que le moyen tiré de l’insuffisance des modalités de concertation qui sont définies initialement dans la délibération prescrivant l’élaboration du plan de prévention des risques technologiques, était inopérant à l’encontre de la délibération ayant ultérieurement approuvé le même plan. Le Conseil d’Etat avait donc à examiner la question relative à l’application de sa récente jurisprudence Commune de Saint-Bon-Tarentaise du 5 mai 2017 (relative à un PLU) à l’élaboration d’un plan de prévention des risques technologiques. Pour plus de clarté, il convient de revenir sur l’apport de la jurisprudence précitée. En effet, l’article L. 300-2 du code de l’urbanisme dans sa version applicable au litige (aujourd’hui codifié aux articles L. 103-2 et suivants du même code) indiquait que : « Les objectifs poursuivis et les modalités de la concertation sont fixés par […] le préfet […]. ». Or, depuis 2010, le Conseil d’Etat considérait de manière constante que la délibération prévoyant les modalités de concertation avec les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées ainsi que les objectifs poursuivis par la commune en projetant d’élaborer ou de réviser un document d’urbanisme, constituait dans ces deux volets, une formalité substantielle dont la méconnaissance entachait d’illégalité le document d’urbanisme approuvé (CE, 10 février 2010, Commune de Sainte-Lunaire, n°327149). Il convient d’ailleurs de noter que le document d’urbanisme approuvé était entaché d’illégalité et ce alors même que la concertation aurait respecté les modalités définies par le conseil municipal (arrêt précité du10 février 2010, n°327149). Cette jurisprudence avait entraîné l’annulation de nombreuses délibérations adoptant un plan local d’urbanisme qui emportaient ainsi l’annulation du document d’urbanisme (voir notamment à ce titre : CAA Douai, 27 novembre 2014, n°13DA01104 ; CAA Marseille, 13 avril 2016, n°15MA02002 ; CAA Nancy, 2 juillet 2015, n°14NC01767 ; CAA Versailles, 11 mai 2015, n°13VE00583 ; CAA Douai, 30 avril, 2015, n°14DA01249), ce qui pouvait avoir de lourds impacts pour les finances communales. Il convient néanmoins de noter que l’article L. 300-2 indiquait en son 5e alinéa que « Les documents d’urbanisme et les opérations mentionnées aux I et II ne sont pas illégaux du seul fait des vices susceptibles d’entacher la concertation, dès lors que les modalités définies par la décision ou la délibération prévue au II ont été respectées. ». Le Conseil d’Etat a progressivement donné plus d’importance à cette disposition, afin d’éviter qu’une irrégularité qui s’est déroulée en début de procédure conduise à l’annulation du document d’urbanisme (voir notamment CE, 8 octobre 2012, n°338760). Ainsi, dans la décision précitée Commune de Saint-Bon-Tarentaise, le Conseil d’Etat a mis fin à la jurisprudence Commune de Sainte-Lunaire, en considérant que l’illégalité de la délibération prescrivant l’élaboration ou la révision d’un plan local d’urbanisme ne pouvait être utilement invoquée contre la délibération approuvant le plan local d’urbanisme. En effet, la Haute juridiction a estimé dans cette décision que : « si cette délibération est susceptible de recours devant le juge de l’excès de pouvoir, son illégalité ne peut, en revanche, eu égard à son objet et à sa portée, être utilement invoquée contre la délibération approuvant le plan local d’urbanisme » (CE, 5 mai 2017, n°388902). Le Rapporteur public dans cette affaire avait d’ailleurs précisé qu’il s’agissait « d’estimer, du fait des particularités de cette procédure, que cette irrégularité du tout premier acte est structurellement sans influence sur le dernier. » (Conclusions M. Louis DUTHEILLET de LAMOTHE sur CE, 5 mai 2017, n°388902). Le revirement de jurisprudence du Conseil d’Etat visait donc à instaurer le fait que la délibération prescrivant l’élaboration ou la révision d’un document d’urbanisme est attaquable dans les délais de recours normaux, mais que…

Capacités financières et ICPE : pour une prise en compte du modèle économique du secteur d’activité en cause ! (TA Limoges, 14 déc.2017)

Par David DEHARBE- avocat associé GREEN LAW AVOCATS La jurisprudence Hambrégie (CE, 22 fév. 2016, n°384821.) du Conseil d’Etat, parfois interprétée de façon bien trop stricte par certaines juridictions du fond, et relative aux capacités techniques et financières exigibles du demandeur à l’exploitation d’une installation classée pour la protection de l’environnement, n’en finit plus de faire des dégâts… Avec son jugement du 14 décembre 2017, le tribunal administratif de Limoges (TA Limoges 14 décembre 2017, Association Sources et rivières du limousin, n° 1500920) inscrit sa jurisprudence dans la série des annulations de projet pour défaut de la démonstration dans le DDAE de ces capacités et montre que le juge peut néanmoins utiliser ses nouveaux pouvoirs détenus depuis l’ordonnance du 26 janvier 2017. Cette annulation est couplée en l’espèce à un avis d’un commissaire enquêteur jugé irrégulier car ce dernier a osé s’exprimer sur la guérilla contentieuse que mènent certaines associations à la liberté de l’industrie, on se dit que le juge a définitivement perdu de vue la vocation de la police des installations à concilier cette liberté avec les intérêts du voisinage et plus largement de l’environnement … Revenons sur ce qui est finalement reproché au commissaire enquêteur. Aux termes du jugement :« L’intervention de l’association des sources et rivières du Limousin (SRL) n’avait pas d’autre objectif que de décrédibiliser le porteur du projet et les services de l’Etat, juste pour faire du sensationnel et montrer qu’elle existait », qu’« en faisant usage d’affirmations non vérifiées et pouvant avoir des incidences graves, SRL a pris le parti de la facilité et du tout négatif» et en s’interrogeant sur la « légitimité » de l’association à conserver « une habilitation au titre de la représentativité dans les instances régionales », le commissaire enquêteur doit être regardé, par ces remarques dépréciatives portées à l’encontre de l’association requérante, seule à avoir présenté des observations défavorables au projet, exprimé un parti pris initial favorable au projet ; que, dès lors, l’association sources et rivières du Limousin est fondée à soutenir que le commissaire enquêteur a manqué, en l’espèce, à son devoir d’impartialité ». Et au final le Tribunal d’en conclure : « que ce vice n’a pas, en l’espèce, exercé d’influence sur le sens de la décision prise par le préfet de la Creuse, il a privé le public de la garantie qui s’attache à l’expression par le commissaire enquêteur d’une position personnelle, émise de manière objective au vu de l’ensemble du dossier ». A croire que le public est plus bête de l’administration et qu’il faut le protéger. Assurément il faut le protéger des commissaires enquêteurs ….certainement pas en censurant l’autorisation mais en supprimant cette institution dont la médiation est bien inutile. En tout état de cause on ne voit pas en quoi cette « garantie » a porté atteinte au principe de participation … Ce défaut de démonstration d’une telle atteinte est sans doute insupportable pour le pétitionnaire. Ne l’est pas moins sans doute l’analyse faite en l’espèce de la question des capacités financières. D’emblée disons-le nous sommes bien conscients des conditions très particulières de la jurisprudence Hambrégie où était en cause un investissement de 772 millions d’euros nécessaire à l’installation d’une centrale à gaz, financés à 30% sur fonds propres et à 70% par dette bancaire!  Quand est en cause une usine à gaz comme celle en cause dans l’affaire jugée par le Conseil d’Etat, on pourrait à la rigueur  comprendre que le Conseil d’Etat admette que le juge du fond puisse vérifier que les engagements des tiers sont des engagements « fermes ». Mais s’agissant de capacités qui doivent seulement être suffisamment « certaines », on ne saurait absolument pas exiger des établissements bancaires un engagement définitif pour le plus grand nombre des installations classées. Devant le Tribunal administratif de Limoges était mis en cause le fait que le préfet de la Creuse avait autorisé le propriétaire d’une usine de production d’électricité située sur le territoire de la commune de Saint-Hilaire-le-Château, à disposer de l’énergie de la rivière « Le Thaurion » pour l’exploitation d’une modeste production d’énergie hydroélectrique. Mais, une association avait demandé au tribunal administratif de Limoges d’annuler cet arrêté. Or le Tribunal relève « que la notice d’impact produite par M. D. dans le dossier de demande d’autorisation mentionne que ce dernier possède une entreprise de travaux publics basée au Moutier d’Ahun, qu’il réalisera lui-même la partie du projet consacrée au génie civil et qu’il dispose des compétences et des connaissances suffisantes pour assurer ultérieurement le fonctionnement de la centrale avec l’assistance de prestataires spécialisés pour la partie technique ; que, par un courrier du 26 mars 2014 adressé au commissaire enquêteur et joint au dossier d’enquête publique, M. D. a également précisé qu’il «n’avait pas plus de capacités qu’un bon nombre de gestionnaires de ce type d’installation », qu’il était prévu l’assistance de prestataires spécialisés pour la partie électrique et que « pour le reste, [il pensait] pouvoir assumer », étant « responsable d’une petite entreprise de maçonnerie depuis 30 ans après 10 ans de conduite de chantier et qu’à ce jour cette entreprise n’est pas trop en mauvaise posture » ; que, par ce même courrier, s’agissant des capacités financières, l’intéressé s’est borné à exposer qu’un financement était prévu avec un apport personnel de 150 000 euros et que « pour le reste c’est la banque qui jugera de l’opportunité ou non de soutenir ce projet afin de le finaliser » ; que ces seules mentions n’étaient pas suffisantes pour apprécier la capacité technique et financière de l’exploitant à assurer le bon fonctionnement de l’installation en cause ». Et une nouvelle fois le principe de participation vient en creux interdire la régularisation par une simple Danthonysation du moyen : « les insuffisances de ces indications dans le dossier de demande d’autorisation ont eu pour effet de nuire à l’information complète du public et sont susceptibles d’avoir exercé une influence sur la décision du préfet de la Creuse, l’association sources et rivières du Limousin est fondée à soutenir que la notice d’impact est entachée d’insuffisance…

Contestation du montant de l’indemnité suite à la résiliation d’un marché public d’évacuation d’O.M. : les pièces contractuelles sont essentielles !

Par Maître Thomas RICHET (Green Law Avocats) Par un arrêt du 14 décembre 2017 (requête n°15BX01342), la cour administrative d’appel de Bordeaux rappelle aux opérateurs économiques l’importance d’une bonne lecture des pièces contractuelles d’un marché public. Dans cette affaire, la communauté intercommunale du nord de La Réunion (ci-après la « CINOR ») avait conclu le 4 mars 2013 un marché public avec la société ECM Caly et Paji (ci-après « société ECM ») ayant pour objet la fourniture de 16 caissons métalliques destinés à l’évacuation des ordures ménagères pour un montant total de 89 059 euros. Par un courrier du 26 avril 2013, le président de la CINOR a prononcé la résiliation de ce marché sur le fondement de l’article 33 du Cahier des Clauses Administratives Générales Fournitures Courantes et Services (ci-après « CCAG-FCS ») auquel renvoyait l’article 9 du Cahier des Clauses Administratives Particulières (ci-après « CCAP ») et a fixé le montant de l’indemnité de résiliation à 4 452, 95 euros correspondant à 5% du montant hors taxes du marché. L’article 33 du CCAG-FCS dispose que : « Lorsque le pouvoir adjudicateur résilie le marché pour motif d’intérêt général, le titulaire a droit à une indemnité de résiliation, obtenue en appliquant au montant initial hors taxes du marché, diminué du montant hors taxes non révisé des prestations admises, un pourcentage fixé par les documents particuliers du marché ou, à défaut, de 5 %. Le titulaire a droit, en outre, à être indemnisé de la part des frais et investissements, éventuellement engagés pour le marché et strictement nécessaires à son exécution, qui n’aurait pas été prise en compte dans le montant des prestations payées. Il lui incombe d’apporter toutes les justifications nécessaires à la fixation de cette partie de l’indemnité dans un délai de quinze jours après la notification de la résiliation du marché. Ces indemnités sont portées au décompte de résiliation, sans que le titulaire ait à présenter une demande particulière à ce titre. » La société ECM a décidé de saisir le Tribunal administratif de La Réunion d’un recours en reprise des relations contractuelles (« recours Béziers II »), et en demande de condamnation de la CINOR. Par un jugement n°1300817 du 29 décembre 2014, dont la CINOR a interjeté appel devant la Cour administrative de Bordeaux, les juges de première instance ont condamné la communauté intercommunale à verser à cette société la somme de 18 451,76 euros, assortie des intérêts aux taux légal à compter du 19 juin 2013. L’arrêt commenté est intéressant à double titre. D’abord en ce qu’il rappelle une règle constante du contentieux administratif : il appartient au premier juge de répondre à tous les moyens qui ne sont pas « inopérants ». Mais l’arrêt doit  surtout retenir l’attention s’agissant du contentieux de l’exécution des marchés publics. Un moyen qui n’est pas inopérant et auquel le juge administratif ne répond pas rend son jugement irrégulier (constant) Dans un premier temps, la cour décide d’annuler le jugement rendu par les premiers juges en ce qu’ils ne se sont pas prononcés sur un moyen développé par la CINOR. Ce moyen était tiré du fait que la société ECM n’avait pas respecté les règles fixées à l’article 33 du CCAG-FCS (règles reproduites ci-dessus), auxquelles renvoyait l’article 9 CCAP. En effet, les juges de première instance avaient bien rejeté une fin de non-recevoir tirée du défaut de liaison du contentieux mais avaient omis de répondre au moyen de la personne publique concernant le respect de la procédure prévue à l’article 33 du CCAG-FCS. Le moyen n’étant pas inopérant, c’est-à-dire qu’il n’était pas manifestement infondé,  le tribunal devait y répondre. En effet, L’omission de répondre à un moyen entache la régularité du jugement (CE, 10 juin 1966, Mme Perrucot, n°64572 ; CE, Assemblée, 1er avril 1988, Mlle Vadsaria, n°55232 ; CE, 5 novembre 1990, Péan, n°79657). A la différence du défaut de réponse à une partie des conclusions, le défaut de réponse à un moyen entraîne en principe l’annulation totale du jugement, à moins que le moyen auquel il n’a pas été répondu ait été présenté à l’appui de conclusions divisibles (CE, 10 février 1982, Angeletti, n°17618) Le moyen n’était pas inopérant, il n’y a pas été répondu, le jugement n’étant pas régulier, il doit être annulé. Pour être recevables, des conclusions indemnitaires en demande de majoration de l’indemnité de résiliation doivent respecter la procédure décrite par les documents contractuels du marché publics La cour relève que la procédure prévue à l’alinéa 2 de l’article 33 du CCAG-FCS n’a pas été respectée par la société ECM lors de la demande de majoration de l’indemnité de résiliation. Cet alinéa prévoit l’obligation, pour l’opérateur économique désireux de solliciter une majoration de l’indemnité de résiliation, suite à la résiliation de son marché public de fournitures, de transmettre, dans les quinze jours de la notification de cette résiliation, les justificatifs nécessaires. En l’espèce, aucun élément ne permettait de s’assurer de la date à laquelle la société ECM avait contesté le montant de l’indemnisation, et donc du délai dans lequel elle avait introduit cette demande. En outre, la cour relève que la demande n’était pas assortie des justificatifs nécessaires. Dès lors, même si cette société avait introduit des conclusions en reprise des relations contractuelles dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision de résiliation du marché, elle n’était pas fondée à solliciter une majoration de l’indemnité due au titre de la résiliation pour motif d’intérêt général. La cour relève donc que : « [la CINOR] est fondée à soutenir que la société ECM Caly et Paji a méconnu les stipulations précitées de l’article 33 du cahier des clauses administratives générales ” fournitures courantes et de services ” et que ses conclusions indemnitaires, tendant à la condamnation de la communauté intercommunale du nord de La Réunion à lui verser une somme supplémentaire au titre de l’indemnisation de la résiliation du marché, devaient être rejetées comme irrecevables. »   Cette solution doit attirer l’attention des opérateurs économiques et des pouvoirs adjudicateurs sur les règles applicables à la phase d’exécution des marchés publics et qui sont contenues au sein même des pièces…

ICPE : les porteurs de projets devraient enfin être fixés sur la question des capacités financières… ! (TA Lille, 14 déc.2017)

Par Sébastien BECUE- GREEN LAW AVOCATS Dans le cadre d’un recours intenté à l’encontre d’une autorisation unique expérimentale d’un parc éolien (défendue par le Cabinet); le Tribunal administratif de Lille a décidé d’interroger le Conseil d’Etat sur la possible application rétroactive des dispositions procédurales du nouveau régime de l’autorisation unique environnementale (cf. Ordonnance entrée en vigueur au 1er mars 2017) aux contentieux en cours contre les autorisations uniques expérimentales et les autorisations d’exploiter ICPE. Cela concernera en particulier l’épineuse question de l’appréciation des capacités techniques et financières. En particulier, deux questions cruciales devraient être tranchées en principe sous trois mois. La première concerne tous les projets industriels : il s’agit de savoir si le juge de plein contentieux des installations classées peut se fonder sur la nouvelle définition des capacités techniques et financières lorsqu’il réalise son contrôle de la suffisance du dossier de demande d’autorisation. La seconde concerne seulement la filière éolienne : la dispense de permis de construire prévue par le nouveau régime rend-elle inopérants les moyens soulevés à l’encontre des autorisations uniques expérimentales en tant qu’elles valent également permis de construire ; et, par voie de conséquence, rend-elle sans objet les recours à l’encontre des permis de construire un parc éolien lorsque le projet bénéficie également d’une autorisation d’exploiter ICPE ? Le Tribunal semble lier la réponse à ces questions à la valeur juridique du texte fondant le régime, à savoir une ordonnance qui n’est pour l’heure pas encore ratifiée. A suivre. …