Ae et cas par cas : clarifications

Par Maître Lucas DERMENGHEM, Green Law Avocats Nous l’annoncions le décret n° 2020-844 du 3 juillet 2020 relatif à l’autorité environnementale et à l’autorité chargée de l’examen au cas par cas a été publié au Journal Officiel du 4 juillet dernier. Il convient d’en faire une analyse approfondie. I/ Contexte Ce texte était particulièrement attendu depuis qu’un vide juridique avait été crée à la suite de l’annulation partielle, par le Conseil d’Etat, de certaines dispositions du décret n°2016-519 du 28 avril 2016 et du décret n° 2016-1110 du 11 août 2016 qui avaient pour effet de désigner le préfet de région en tant qu’autorité environnementale chargée d’émettre un avis sur les évaluations environnementales des projets. Faisant application de la célèbre jurisprudence « Seaport » de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) rendue à propos de l’autonomie de l’autorité environnementale, le Conseil d’Etat avait annulé ces dispositions sur la base du raisonnement suivant : « 7. Considérant, que ce même 1° de l’article 1er du décret attaqué a cependant maintenu, au nouveau IV du même article R. 122-6 du code de l’environnement, la désignation du préfet de région sur le territoire de laquelle le projet de travaux, d’ouvrage ou d’aménagement doit être réalisé, en qualité d’autorité compétente de l’Etat en matière d’environnement, pour tous les projets autres que ceux pour lesquels une autre autorité est désignée par les I, II et III du même article ; que pour autant, ni le décret attaqué, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire n’a prévu de dispositif propre à garantir que, dans les cas où le préfet de région est compétent pour autoriser le projet, en particulier lorsqu’il agit en sa qualité de préfet du département où se trouve le chef-lieu de la région en vertu de l’article 7 du décret précité du 29 avril 2004, ou dans les cas où il est en charge de l’élaboration ou de la conduite du projet au niveau local, la compétence consultative en matière environnementale soit exercée par une entité interne disposant d’une autonomie réelle à son égard, conformément aux exigences rappelées au point 5 ; que, ce faisant, les dispositions du 1° de l’article 1er du décret attaqué ont méconnu les exigences découlant du paragraphe 1 de l’article 6 de la directive du 13 décembre 2011 ; qu’elles doivent donc être annulées en tant que l’article R. 122-6 du code de l’environnement qu’elles modifient conserve au préfet de région la compétence pour procéder à l’évaluation environnementale de certains projets ; » (CE, 6 décembre 2017, n°400559) « 7. Considérant qu’en maintenant ou en prévoyant la désignation du préfet de région en qualité d’autorité environnementale pour certains projets ou groupes de projets sans qu’aucune disposition du décret attaqué, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire ne prévoit de dispositif propre à garantir que, dans les cas où le préfet de région est également compétent pour autoriser le projet concerné ou un ou plusieurs des projets faisant l’objet d’une procédure d’autorisation concomitante, en particulier lorsqu’il agit en sa qualité de préfet du département où se trouve le chef-lieu de la région en vertu de l’article 7 du décret précité du 29 avril 2004, ou dans les cas où il est en charge de l’élaboration ou de la conduite du projet ou d’un ou plusieurs de ces projets au niveau local, la compétence consultative en matière environnementale soit exercée par une entité disposant d’une autonomie réelle à son égard, les dispositions des 11° et 27° de l’article 1er du décret attaqué ont méconnu les exigences découlant du paragraphe 1 de l’article 6 de la directive du 13 décembre 2011 rappelées au point 4 ; » (CE, 28 décembre 2017, n°407601). L’article 31 de la loi n°2019-1147 et le décret commenté ont pour objectif de combler le vide juridique crée par ces décisions. La présente note n’a pas vocation à commenter l’ensemble des apports du décret mais tendra uniquement à se focaliser sur les modifications impactant la désignation de l’autorité environnementale et de l’autorité en charge du cas par cas, ainsi que sur le dispositif visant à prévenir les conflits d’intérêts. II/ L’éviction actée du préfet de région en tant qu’autorité environnementale Désormais, avec l’entrée en vigueur de ce nouveau décret, seules trois autorités, et non plus quatre, peuvent être désignées comme « autorité environnementale » ayant pour mission de donner un avis sur les projets soumis à évaluation environnementale. L’article R122-6 du code de l’environnement est ainsi modifié en conséquence et prévoit une désignation de l’autorité environnementale compétente en fonction des autorités chargées d’élaborer et d’autoriser le projet : 1) Le ministre chargé de l’environnement occupera la fonction d’autorité environnementale pour les projets, autres que ceux mentionnés au 2° de l’article R122-6, qui donnent lieu à un décret pris sur le rapport d’un autre ministre, à une décision d’autorisation, d’approbation ou d’exécution d’un autre ministre, ou qui sont élaborés par les services placés sous l’autorité d’un autre ministre. Le ministre de l’environnement peut déléguer la fonction d’autorité environnementale à la formation d’autorité environnementale du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGDD). 2) La formation d’autorité environnementale du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGDD) sera l’autorité environnementale pour : Les projets qui donnent lieu à une décision d’autorisation, d’approbation ou d’exécution du ministre chargé de l’environnement ou à un décret pris sur son rapport ; les projets qui sont élaborés par les services placés sous l’autorité du ministre chargé de l’environnement ou par des services interministériels agissant dans les domaines relevant des attributions de ce ministre ; les projets qui sont élaborés sous maîtrise d’ouvrage d’établissements publics relevant de la tutelle du ministre chargé de l’environnement, ou agissant pour le compte de celui-ci ; l’ensemble des projets de travaux, d’aménagement ou d’ouvrages de la société SNCF Réseau et de sa filiale mentionnée au 5° de l’article L. 2111-9 du code des transports.  3) La mission régionale d’autorité environnementale (MRAe) du Conseil général de l’environnement et du développement durable de la région sur le territoire de laquelle le projet doit être réalisé effectuera…

Travaux de restauration des fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques

Par Maître David DEHARBE (Green Law Avocats) Il a est créé une nouvelle rubrique 3.3.5.0 permettant de soumettre à déclaration uniquement les projets de restauration des fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques définis par arrêté ministériel. Elle est exclusive de l’application des autres rubriques de la nomenclature et vise à simplifier pour les porteurs de projet les procédures associées aux projets vertueux et visant à l’atteinte des objectifs de la directive 2000/60/CE (DCE). La création d’une rubrique relative aux travaux de restauration des fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques sans seuil a inquiété en particulier le monde agricole.  Un projet d’arrêté définissant les travaux de restauration des fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques relevant de la rubrique 3.3.5.0. de la nomenclature annexée à l’article R. 214-1 du code de l’environnement a été soumis à consultation. Finalement l’arrêté du 30 juin 2020 définit  à compter du 1er septembre 2020 les travaux de restauration des fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques relevant de la rubrique 3.3.5.0 de la nomenclature annexée à l’article R. 214-1 du code de l’environnement (JORF n°0162 du 2 juillet 2020, texte n° 22). Aux termes de l’article 1er de l’arrêté du 30 juin 2020, ces travaux de restauration sont les suivants : 1° Arasement ou dérasement d’ouvrage en lit mineur ; 2° Désendiguement ; 3° Déplacement du lit mineur pour améliorer la fonctionnalité du cours d’eau ou rétablissement du cours d’eau dans son lit d’origine ; 4° Restauration de zones humides ; 5° Mise en dérivation ou suppression d’étangs existants ; 6° Remodelage fonctionnel ou revégétalisation de berges ; 7° Reméandrage ou remodelage hydromorphologique ; 8° Recharge sédimentaire du lit mineur ; 9° Remise à ciel ouvert de cours d’eau couverts ; 10° Restauration de zones naturelles d’expansion des crues ; 11° Opération de restauration des fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques prévue dans l’un des documents de gestion suivants, approuvés par l’autorité administrative : a) Un schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) visé à l’article L. 212-1 du code de l’environnement ; b) Un schéma d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE) visé à l’article L. 212-3 du code de l’environnement ; c) Un document d’objectifs de site Natura 2000 (DOCOB) visé à l’article L. 414-2 du code de l’environnement ; d) Une charte de parc naturel régional visée à l’article L. 333-1 du code de l’environnement ; e) Une charte de parc national visée à l’article L. 331-3 du code de l’environnement ; f) Un plan de gestion de réserve naturelle nationale, régionale ou de Corse, visé respectivement aux articles R. 332-22, R. 332-43, R. 332-60 du code de l’environnement ; g) Un plan d’action quinquennal d’un conservatoire d’espace naturel, visé aux articles D. 414-30 et D. 414-31 du code de l’environnement ; h) Un plan de gestion des risques d’inondation (PGRI) visé à l’article L. 566-7 du code de l’environnement ; i) Une stratégie locale de gestion des risques d’inondation (SLGRI) visée à l’article L. 566-8 du code de l’environnement ; 12° Opération de restauration des fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques prévue dans un plan de gestion de site du Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres dans le cadre de sa mission de politique foncière ayant pour objets la sauvegarde du littoral, le respect des équilibres écologiques et la préservation des sites naturels tels qu’énoncés à l’article L. 322-1 susvisé.

Preuve de la consistance légale du droit fondé en titre

Par Maître Théo DELMOTTE (Green Law Avocats) La détermination de la consistance légale des ouvrages fondés en titre fait très souvent l’objet d’intenses débats contentieux, et ce malgré les éclairages de la jurisprudence sur la méthode à employer. Par un arrêt du 16 juin 2020, la cour administrative d’appel de Bordeaux (CAA Bordeaux, 16 juin 2020, n°18BX01403 – jurisprudence cabinet) fait application de l’état du droit sur ce sujet, et procède à une utilisation intéressante des rapports d’expertise, souvent diligentés par les exploitants et l’administration pour déterminer la consistance légale d’un ouvrage fondé en titre. En l’espèce, le propriétaire d’un moulin a sollicité de l’administration la reconnaissance de son droit fondé en titre. Le préfet pour sa part a refusé de reconnaitre la consistance légale sollicitée par le propriétaire, et a proposé une consistance légale moindre. L’exploitant du moulin a alors contesté les décisions du préfet devant le tribunal administratif de Bordeaux. Un expert judiciaire a par la suite été désigné par le tribunal afin de déterminer la consistance légale du moulin. L’expert a fixé celle-ci à 628 kW. De son côté, l’administration a fait appel à un organisme de recherche pour produire un rapport de contre-expertise. Ce rapport concluait à des calculs de débit maximum différents de ceux de l’expert. L’administration s’est appuyée sur ce rapport et ses données pour contester la fixation de la consistance légale du moulin à 628 kW. Le tribunal ayant finalement fait droit à la demande de l’exploitant et ayant fixé la consistance légale du droit fondé en titre moulin à 628 kW, le ministre de la transition écologique et solidaire a relevé appel du jugement. La cour rappelle tout d’abord dans son arrêt du 16 juin 2020 l’état du droit sur le sujet : « Le droit fondé en titre conserve en principe la consistance qui était la sienne à l’origine. A défaut de preuve contraire, cette consistance est présumée conforme à sa consistance actuelle. Celle-ci correspond, non à la force motrice utile que l’exploitant retire de son installation, compte tenu de l’efficacité plus ou moins grande de l’usine hydroélectrique, mais à la puissance maximale dont il peut en théorie disposer. Cette puissance maximale est calculée en faisant le produit de la hauteur de la chute par le débit maximum de la dérivation par l’intensité de la pesanteur. Le débit maximum à prendre en compte correspond à celui du canal d’amenée, apprécié au niveau du vannage d’entrée dans l’usine, en aval de ce canal. La hauteur de chute à retenir est celle de la hauteur constatée de l’ouvrage, y compris les rehausses mobiles, sans tenir compte des variations de débit pouvant affecter le niveau d’eau au point de restitution. » La cour reprend ensuite les conclusions de l’expert judiciaire et du rapport de contre-expertise produit par l’administration, et les confronte. La juridiction relève que le ministre n’est pas en mesure de remettre en question les conclusions de l’expert judiciaire. Elle estime qu’il n’apporte pas en l’espèce d’éléments plus précis que ceux de l’expert sur l’état actuel du moulin, susceptibles de remettre sérieusement en cause la fixation de la consistance légale du droit fondé en titre du moulin à 628 kW. En définitive, la cour valide la méthodologie employée par l’expert judiciaire, consistant en des constatations et visites sur place, confrontées à l’étude de données historiques, et permettant in fine de déterminer les caractéristiques actuelles du moulin et sa consistance légale. Ainsi, en appliquant simplement la jurisprudence, la cour a estimé que la consistance légale du moulin était en l’espèce présumée conforme à sa consistance actuelle, à défaut de preuve contraire rapportée par le ministre.   Cet arrêt confirme également qu’il est primordial en pratique de diligenter une expertise pertinente pour apprécier la consistance légale d’un moulin fondé en titre.

Mesures conservatoires en cas de pollution d’un cours d’eau : le JLD n’a pas à exiger la démonstration préalable d’une faute pénale

Par maître David DEHARBE (Green Law Avocats) Par un arrêt en date du 28 janvier 2020, la chambre criminelle de la Cour de cassation (Cass. Crim, 28 janvier 2020, n°19-80.091) : opte pour une interprétation de l’article L. 216-13 du Code de l’environnement en nette faveur de la protection de l’environnement, et au détriment de l’exploitant s’agissant des mesures conservatoires susceptibles d’être prononcées par le juge des libertés et de la détention (JLD) en matière de pollution des eaux. L’affaire portée devant la Haute-Juridiction concernait la pollution du cours d’eau « La Brévenne », relevée en juillet 2018 à hauteur d’une station de traitement et d’épuration dont l’exploitation avait été confiée par un syndicat intercommunal à la société Suez Eau France. L’enquête pénale révélant une pollution des eaux supérieure aux normes règlementaires, le Procureur de la République, sur demande d’une fédération, avait saisi le JLD sur le fondement de l’article L. 216-13 du code de l’environnement d’une requête tendant au prononcé de mesures conservatoires à l’encontre de l’exploitant lui enjoignant de cesser tout rejet dans le milieu aquatique dépassant les seuils fixés. Le JLD ayant fait droit à cette requête pour une durée de six mois, le syndicat intercommunal et la Société Suez Eau France ont interjeté appel. Ces derniers ont alors obtenu du Président de la chambre de l’instruction la suspension par ordonnance de l’exécution de la décision du JLD en application du dernier alinéa de l’article L. 216-13 du Code de l’environnement, puis l’infirmation de l’ordonnance prononçant les mesures conservatoires par un arrêt du 9 novembre 2018, décision objet du pourvoi en cassation formé par la fédération. A ce stade, rappelons qu’en matière de mesures conservatoires, l’alinéa premier de l’article L. 216-13 permet au Procureur de la République, agissant d’office ou à la demande de l’autorité administrative, de la victime ou d’une association agrée de protection de l’environnement, de saisir le JLD d’une requête en cas de non-respect des articles L. 181-12, L. 211-2, L. 211-3 et L. 214-1 à L. 214-6 du Code de l’environnement tendant au prononcé de toute mesure utile, y compris la suspension ou l’interdiction des opérations menées en infraction à la loi pénale. La loi n°2016-1087 dite « loi Biodiversité » a d’ailleurs modifié ces dispositions, portant la durée maximale des mesures utiles pouvant être ordonnées par le juge à un an au lieu de trois mois, précisant que ces mesures portent sur « les opérations menées en infraction à la loi pénale » et non plus sur « l’activité en cause ». Clé de lecture de l’arrêt commenté, ces mesures conservatoires sont susceptibles d’être prononcées à l’encontre des personnes physiques et personnes morales « concernées » par ces opérations menées en infraction à la loi pénale.   A cet égard, la chambre de l’instruction avait infirmé l’ordonnance du JLD à la suite d’une analyse « géographique » sinon ‘codistique’ de l’article L. 216-13. En effet, les juges d’appel avaient relevé que ces dispositions étaient insérées dans le Code de l’environnement au sein d’une sous-section 2 intitulée « sanctions pénales », elle-même figurant dans une section 2 « dispositions pénales » d’un chapitre VI consacré aux « contrôles et sanctions » du titre du Code de l’environnement relatif à l’eau et aux milieux aquatiques et marins. De cette localisation de l’article L. 216-13, la chambre de l’instruction en avait déduit que le JLD ne pouvait prononcer des mesures conservatoires sur le fondement de ces dispositions qu’après avoir nécessairement démontré la commission par les personnes concernées d’une faute de nature à engager leur responsabilité pénale. Autrement dit, parce que ces dispositions figuraient au sein d’une sous-section intitulée « sanctions pénales », les juges d’appel en avaient déduit que la démonstration de l’imputabilité de l’infraction aux personnes concernées était une condition préalable obligatoire au prononcé de mesures conservatoires. Cette lecture est censurée par la chambre criminelle, qui préfère, elle, adopter une interprétation à la fois autonome et téléologique de l’article L. 216-13 en faveur de la protection de l’environnement : Sans tenir compte de la localisation de l’insertion de ces dispositions, la Cour de cassation considère à l’inverse que le prononcé, lors d’une enquête pénale, de mesures conservatoires par le JLD destinées à faire cesser une pollution ou à en limiter les effets n’est pas subordonné à la caractérisation d’une faute de la personne concernée de nature à engager sa responsabilité pénale. Favorable à la protection de l’environnement, la solution n’est pas étonnante, et ce pour plusieurs raisons : – En premier lieu, rappelons que la loi pénale est d’interprétation stricte (art. L. 111-4 du Code pénal). Rapporté à cette décision, la démonstration d’une imputabilité apparaît rapidement comme une condition excessive lorsque le texte évoque comme potentiels sujets au prononcé de mesures conservatoires les « personnes concernées ». Partant, cette condition d’imputabilité aurait pu paraître admissible si le texte avait plutôt visé, par exemple, les personnes « en cause ». – En deuxième lieu, et surtout, la solution retenue par la chambre criminelle se fonde sur une interprétation autonome qui se veut conforme à l’esprit de ces dispositions. Pour cause, dans sa décision, la Cour rappelle la finalité du prononcé de mesures conservatoires, à savoir faire cesser une pollution dans un but de préservation de l’environnement et de la sécurité sanitaire. Fondamentalement provisoires, des mesures conservatoires poursuivent donc une finalité préventive et non répressive. Ajouté à cela que ces dernières répondent à une situation d’urgence, il était donc profondément incohérent vis-à-vis du sens et de la portée du texte de faire dépendre leur prononcé de la démonstration d’une faute de nature à engager la responsabilité pénale de la personne concernée, elle inscrite dans une temporalité nettement différente. – Enfin, en troisième et dernier lieu, la lecture censurée  s’avérait d’une rigueur juridique discutable. Pour cause, accorder une telle importance à cette interprétation dans un contexte d’inflation législative, conduisant à des insertions parfois hasardeuses de dispositions, fragilisait nettement la solution retenue par la chambre de l’instruction. Reste que comme souvent cette lecture environnementale de  la loi se fait au détriment des exploitants pouvant se voir, à l’instar de la société Suez Eau France et du SIVU, imposer des mesures conservatoires à l’occasion d’une…

Avis critique de l’AE sur deux SRADDET (AURA et Hauts de France)

Par Me Sébastien BECUE – avocat of counsel Deux SRADDET ont donné lieu à des avis intéressants de l’autorité environnementale en région AURA et en Hauts de France. Avis de l’Autorité environnementale (AE) sur le SRADDET de la région Auvergne-Rhône-Alpes : point sur les ENR L’AE salue dans son avis « des objectifs relativement ambitieux de développement des énergies renouvelables » (+54% d’ici 2030) : En ce qui concerne l’éolien et l’hydrogène, il est intéressant de constater que l’Autorité environnementale critique le choix effectué de prévoir des mesures qui vont au-delà de ce que prévoit la règlementation nationale et tendent en réalité à restreindre les possibilités de développement : Pour l’éolien, le SRADDET prévoit que les dossiers de demande soient transmises au Préfet « avec l’avis favorable de toutes les collectivités impactées ». L’application d’un telle règle, outre qu’elle serait hypothétique car illégale (la fixation de telles règles de procédure n’entrant évidemment pas dans la compétence régionale), rendrait quasi-impossible le développement d’un projet éolien. S’agissant de l’hydrogène, le SRADDET prévoit que « afin  de  maintenir  un  équilibre économique pérenne autour d’une station de distribution et/ou de production d’énergie (ou d’une station multi énergies) permettant une mobilité décarbonée efficace sur le territoire d’Auvergne-Rhône-Alpes, les documents de planification et d’urbanisme devront prévoir un zonage permettant de respecter une zone de chalandise dans laquelle il ne sera pas possible d’installer une nouvelle station à énergie décarbonée. Cette zone de chalandise, propre à chaque station, dépendra de la densité de population et d’une distance minimum». Pour l’AE, s’il faut évidemment structurer le maillage des stations de recharge hydrogène, cette règle doit être modifiée a minima « pour n’interdire, dans les zones de chalandise imposées par cette règle, que la création de stations de recharge en hydrogène qui entreraient en concurrence avec celles déjà installées » L’AE critique le traitement commun de la biomasse comme source d’énergie et la méthanisation et critique le fait que la réalisation des objectifs spécifiques à la biomasse nécessiterait l’import de bois de pays étrangers, pratique au coût environnemental élevé… Enfin, en ce qui concerne le développement de l’hydroélectricité, l’AE s’étonne du fait que le rapport d’objectifs ne traite pas de l’enjeu majeur de cette source d’énergie, le respect des exigences de continuité écologique. Avis de l’Autorité environnementale (AE) sur le SRADDET de la région Hauts-de-France : point sur les ENR L’AE note dans son avis que le projet rappelle « que la  région  Hauts-de-France  est parmi  les  plus  énergivores  de  France (consommations d’énergie et émissions de gaz à effet de serre 30 % supérieures à la moyenne nationale), principalement du fait des usages industriels ». Le choix d’un « triple moratoire » concernant   l’éolien, le bois énergie et les biocarburants est très critiqué par l’AE, qui relève sa possible incompatibilité avec la loi de transition énergétique voire même avec le principe de non-régression environnementale. L’AE appuie particulièrement sur le choix fait de prévoir un objectif de stabilisation de l’énergie éolienne, en proposant à la place une adaptation des objectifs de production selon les territoires.