Compteur Linky : quel propriétaire public ?

Par Maître Lucas DERMENGHEM, Green Law Avocats Par un arrêt rendu le 28 juin 2019 qui sera mentionné au Tables du recueil Lebon, le Conseil d’Etat a mis fin à la controverse juridique entourant la propriété des compteurs « Linky », née avec l’opposition de plusieurs communes à l’implantation de ces dispositifs dits « communicants ». Le déploiement à grande échelle de ces compteurs par la société ENEDIS et ses sous-traitants se heurte depuis plusieurs années à l’opposition d’un certain nombre de citoyens et collectivités territoriales. Au regard des nombreux griefs invoqués à l’encontre de ces installations (émission de champs électromagnétiques nocifs pour la santé humaine, utilisation des données personnelles, risque incendie, surfacturation…), cette bataille juridique se déroule tant devant les tribunaux de l’ordre judiciaire que devant le prétoire du juge administratif. Devant le juge judiciaire, de nombreuses actions ont déjà été intentées en référé, aux fins d’obtenir l’interdiction préalable de pose des compteurs ou leur démantèlement lorsque ceux-ci ont déjà été installés. Ces différentes tentatives se sont jusqu’ici majoritairement conclues par des échecs, à l’exception de certaines ordonnances de référé interdisant la pose ou ordonnant le démantèlement des compteurs au domicile de personnes diagnostiquées électro-hypersensibles (EHS). On notera sur ce dernier point les ordonnances rendues par le juge des référé des Tribunaux de Grande Instance (TGI) de Grenoble (à deux reprises : TGI Grenoble, Ord., 17 novembre 2016 ; TGI Grenoble, Ord., 20 septembre 2017), de Toulouse (TGI Toulouse, Ord., 12 mars 2019, n°19/00026) ou encore très récemment de Foix (TGI Foix, Ord., 25 juin 2019). Le juge des référés de Bordeaux s’est montré quant à lui plus frileux en recommandant l’installation d’un dispositif de filtre autour de compteurs afin de protéger les personnes EHS des ondes émises (TGI Bordeaux, Ord., 23 avril 2019). Quant aux litiges portés devant les tribunaux administratifs, ils concernent essentiellement des délibérations de conseils municipaux ou des arrêtés municipaux destinés à encadrer – et le plus souvent interdire – le déploiement des compteurs « Linky » sur le territoire communal. L’exemple le plus médiatisé est sans conteste celui de la commune de Bovel (Ille-et-Vilaine), objet de l’arrêt du Conseil d’Etat ici commenté. Par deux délibérations en date des 17 mars et 23 juin 2017, la commune de Bovel avait d’abord refusé l’élimination des compteurs électriques existants et leur remplacement par des dispositifs « Linky », et ensuite maintenu cette position en rejetant le recours gracieux intenté par le Préfet d’Ille-et-Vilaine. Le préfet a alors contesté ces deux délibérations devant le Tribunal administratif de Rennes, lequel a procédé à leur annulation par jugement du 7 décembre 2017 (TA Rennes, 7 décembre 2017, n° 1502392). En appel, la Cour administrative d’appel de Nantes a confirmé ce jugement (CAA Nantes, 5 octobre 2018, n°18NT00454). Elle a considéré que le conseil municipal de la commune n’avait tout simplement pas la compétence pour s’opposer au déploiement des compteurs « Linky » sur le territoire communal dans la mesure où ces compteurs ne relevaient pas de sa propriété, mais de celle syndicat mixte départemental d’énergie d’Ille-et-Vilaine, à qui la commune avait transféré sa compétence d’organisation du service public de distribution d’électricité. En effet, selon la Cour, il résulte des dispositions combinées des articles L. 322-4 du code de l’énergie et L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales que la propriété des ouvrages publics de distribution d’électricité, dont font partie les compteurs communicants « Linky », est attachée à la qualité d’autorité organisatrice du réseau public de distribution d’électricité, qualité dont était revêtu en l’espèce le syndicat mixte départemental. Saisi d’un pourvoi en cassation, le Conseil d’Etat valide entièrement l’interprétation retenue par la Cour administrative d’appel. Cette décision aura incontestablement des impacts notables sur la lutte menée à l’encontre des compteurs « Linky ». En effet, en premier lieu, de nombreuses communes ont transféré leurs compétences en matière de gestion du réseau public de distribution d’électricité à un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) ou à un syndicat mixte. Avec cette décision qui tranche définitivement la question du propriétaire des compteurs, ces communes se voient dépossédées d’un motif juridique permettant d’encadrer leur déploiement. D’autant que le contrôle de la pose des compteurs ne peut efficacement avoir lieu par l’exercice, par le Maire, de ses pouvoirs de police générale afin d’assurer la sécurité et la salubrité publiques qui seraient susceptibles d’être menacées par l’installation de ces dispositifs sur le territoire communal. En effet, les juridictions administratives saisies considèrent généralement qu’aucun trouble à l’ordre public n’est établi (voir pour un exemple CAA Nantes, 5 octobre 2018, Commune de Cast, n°17NT01495). En second lieu, avec cet arrêt, le propriétaire des compteurs « Linky » est désormais clairement identifié, et l’on peut supposer que cela conduise à déplacer une partie du contentieux jusqu’ici majoritairement dirigé vers le concessionnaire ENEDIS vers les personnes publiques détenant la propriété des compteurs, afin de solliciter de leur part l’interdiction préalable des compteurs, l’injonction de pose avec prescriptions (par exemple un filtre) voire le démantèlement des dispositifs déjà implantés. La décision de l’autorité concédante pouvant, ensuite, faire l’objet d’un recours contentieux devant le juge administratif.

Energie : Consultation de la Commission de régulation de l’énergie en vue de l’élaboration du TURPE 6

Consultation de la Commission de régulation de l’énergie en vue de l’élaboration du TURPE 6   En vertu de l’article L. 341-3 du Code de l’énergie, la CRE a compétence pour déterminer le TURPE (tarif d’utilisation du réseau public d’électricité). Au travers de cette mission, la CRE doit s’assurer de la transparence des tarifs et doit veiller à ce qu’ils couvrent les coûts d’une gestion efficace, en prenant en compte les mutations du secteur de l’énergie. C’est dans ce cadre que la CRE lance une consultation en vue d’établir la structure des nouveaux tarifs réseaux dits TURPE 6, qui feront l’objet d’une délibération en 2020. Cette consultation est ouverte jusqu’au 12 juillet prochain. Par une note technique jointe à cette consultation, la CRE note que secteur de l’énergie fait face à des évolutions structurantes en matière de production et de consommation. Sur le plan de la production, on assiste à une véritable décentralisation comme en atteste la part croissante des énergies renouvelables dans le mix énergétique. En ce qui concerne, la consommation, l’essor des nouvelles technologies permet une plus grande implication des usagers. De plus, l’émergence des voitures électriques ou le développement de l’autoconsommation marquent un bouleversement des pratiques. A cet égard, les prévisions de 10 GW d’autoconsommation individuelle en 2035 vont dans le sens d’une baisse significative des soutirages.   Au sein de cette note technique, la CRE concentre ainsi son attention sur trois composantes du TURPE : la tarification fixe ; le soutirage ; l’injection.   Tout d’abord, au titre des tarifs fixes, la CRE propose de maintenir la composante gestion en matière de distribution à son niveau actuel. En revanche, elle prévoit une augmentation de 18% de cette composante en ce qui concerne le transport.   Par ailleurs, la composante de comptage ne devrait pas être réévaluée puisque l’écart entre les charges de gestions et les revenus n’est que transitoire. Toutefois, pour la distribution la CRE envisage une diminution de cette composante tarifaire étant donné que le déploiement des compteurs évolués a permis une baisse des coûts significatives. En effet, les coûts en BT ≤ 36 kVA devraient baisser de 10% et ceux en HTA et BT > 36 kVA de 40% entre le TURPE 5 et le TURPE 6.   Enfin, en ce qui concerne le soutirage, la CRE souhaite conserver les tarifs à quatre plages temporelles en basse tension et à cinq plages temporelles en haute tension.   Si dans le TURPE 5 des exceptions sont prévues, la CRE vise à les abolir d’ici le TURPE 7. D’autre part, la CRE prévoit de mettre fin aux options à pointe mobile pour le réseau basse tension afin d’assurer une meilleure lisibilité des tarifs. En ce sens, elle considère également que l’option week-end n’est pas justifiée et pourrait induire des comportements inefficaces dans la mesure où les poches réseaux sont déjà chargées le week-end. Par ailleurs, La CRE considère qu’il pourrait être opportun d’introduire un dénivelé de puissance ce qui inciterait les usagers à consommer en heure creuse. En effet, les consommateurs résidentiels et professionnels pourraient souscrire une puissance différente en heure pleine et en heure creuse. En outre, la CRE envisage un assouplissement des plages temporelles en transport (HTB) en laissant la possibilité à RTE de déplacer les plages d’heures creuses ou de saison haute par zone géographique. Pour mémoire, Enedis a la possibilité de positionner les huit heures creuses en fonctions des réalités du réseau local de distribution. En définitive, le développement des productions décentralisées et la baisse simultanée des prix du stockage modifient les besoins de développement et de renforcement du réseau. Ce faisant, la CRE envisage une tarification de l’injection qui prendrait notamment en compte les coûts d’infrastructure ou encore les pertes techniques du réseau (effet Joule). Une telle évolution permettrait d’envoyer un signal tarifaire aux producteurs qui intégreraient ces éléments dans leur décision d’investissement. Ces derniers pourraient ainsi être amenés à effectuer un arbitrage pour déterminer le nœud du réseau qui présente le raccordement le moins coûteux. Les coûts de réserves pourraient également être pris en considération dans ce tarif d’injection car la production influe sur leur dimensionnement du réseau. Cette composante serait alors calculée en € par MWh.   Les contributions afférentes sur la structure des prochains tarifs d’utilisation des réseaux publics d’électricité « TURPE 6 » sont attendues jusqu’au 12 juillet sur le site dédié de la CRE : https://consultations.cre.fr/   Article rédigé par Me Jérémy Taupin avec l’appui de Samuel Vue Artaud (Master Droit de l’énergie)  

Publication d’un ouvrage sur la responsabilité environnementale et son assurance

Maîtres David Deharbe et Sébastien Bécue ont le plaisir de vous annoncer la publication, aux éditions de l’Argus de l’assurance, de leur ouvrage intitulé « Assurer le risque environnemental des entreprises », dont vous trouverez ci-dessous la (belle) couverture et la table des matières détaillée :   L’originalité de l’ouvrage, outre le fait qu’il soit le premier aussi détaillé sur le sujet, réside dans son approche à la fois théorique et pratique.   Des sources de l’action en responsabilité environnementale Le rappel exhaustif des sources juridiques mobilisables dans le cadre d’une action en responsabilité environnementale (la police administrative des installations classées, les troubles anormaux du voisinage, les régimes de responsabilité civile pour faute et du fait des choses, les régimes spéciaux, la loi sur la responsabilité environnementale et le préjudice écologique)     La pratique de l’action en responsabilité environnementale Les spécificités procédurales liées à certaines actions (procédure civile, action en préjudice écologique, action de groupe environnementale, articulation avec l’action pénale, les questions liées à la réparation du préjudice écologique)     Une présentation pratique des possibilités d’assurance des risques environnementaux Un historique du développement de l’assurance des risques environnementaux ainsi qu’une présentation et analyse avec exemples des principaux contrats d’assurance disponibles sur le marché L’ouvrage est à jour de l’inscription du préjudice écologique dans le code civil.                                                                                                  

Biogaz: Vers deux nouveaux cahiers des charges pour la mise sur le marché et l’utilisation du digestat agricole

Par Jérémy TAUPIN – Avocat (jeremy.taupin@green-law-avocat.fr)   De nouvelles possibilités de mise sur le marché et d’utilisation du digestat issu de la méthanisation agricole bientôt permises par deux nouveaux cahiers des charges (DIGAGRI2 et DIGAGRI3) Le ministère de l’Agriculture a en effet soumis à la consultation du public jusqu’au 6 juin prochain un projet d’arrêté approuvant deux nouveaux cahiers des charges permettant cette valorisation.   Une suite au premier cahier des charges DIG AGRI 1 Les articles L. 255-1 et suivants du Code rural et de la pêche maritime (CRPM) prévoient que les matières fertilisantes et les supports de culture sont soumis à autorisation préalable de mise sur le marché (AMM). Cependant, par dérogation à ce principe général et sous réserve que l’innocuité pour l’homme, les animaux et leur environnement des produits considérés soit établie, les matières fertilisantes peuvent être dispensées d’AMM si elles sont conformes à un cahier des charges approuvé par arrêté du ministre de l’agriculture. Ces deux nouveaux projets de cahier des charges pour la mise sur le marché et l’utilisation en tant que matières fertilisantes de digestats de méthanisation agricoles, s’inscrivent ainsi dans ce contexte. Rappelons qu’un premier cahier des charges (DigAgri 1), évoqué sur notre blog, a été approuvé par arrêté en date du 13 juin 2017. Il permet la mise sur le marché en cession directe de digestats issus de la méthanisation agricole d’effluents d’élevages, de matières végétales agricoles, de sous-produits d’industries agro-alimentaires exclusivement végétaux ou non soumis à l’obligation d’hygiénisation, pour une utilisation en fertilisation de grandes cultures et de prairies uniquement. L’utilisation sur les cultures destinées à être consommées crues et sur toutes les cultures légumières est exclue. Des cahiers des charges différents s’agissant de la nature des intrants dans le digesteur et des procédés de méthanisation Les deux nouveaux projets de cahier des charges ont été établis par le ministère sur la base des mêmes principes que le cahier des charges DigAgri 1, et s’inscrivent dans leur prolongement. Les différences portent essentiellement sur la nature des intrants dans le digesteur et sur les procédés de méthanisation Le cahier des charges DigAgri 2 envisagé diffère notamment par le procédé de méthanisation. Si les matières premières sont identiques au cahier des charges DigAgri 1 les digestats issus d’un processus discontinu de méthanisation en phase solide (dit voie sèche) sont désormais admis au bénéfice de la mise sur le marché directe. Les conditions précises (température, temps de séjour moyen, etc.) du procédé de méthanisation sont détaillées par le cahier des charges. Le cahier des charges DigAgri 3 permet quant à lui l’incorporation d’autres matières premières dans le méthaniseur. Etant donné sa visée plus ouverte, il est probable qu’il remplace à terme le cahier des charges DigAgri1. Sont ainsi admises dans le méthaniseur les matières suivantes : Les denrées alimentaires animales ou d’origine animale issues des industries agro alimentaires (IAA), retirées du marché pour des motifs autre que sanitaire et transformées (point f de l’article 10 du règlement CE 1069/2009 susvisé et sont «transformés » au sens du règlement CE 852/2004 ayant leur classement en sous-produits animaux), y compris les anciens aliments pour animaux autres que crus (point g de l’article 10 précité) ; Les matières issues du traitement des eaux résiduaires des IAA exclusivement, y compris les graisses de flotation ; Les co-produits d’origine végétale issus des IAA les denrées alimentaires d’origine végétale, sans emballages ; les déchets végétaux issus de l’entretien des jardins et espaces verts (tontes, tailles, élagages, feuilles). Les 2 nouveaux cahiers des charges ouvrent la possibilité de recevoir des déchets emballés qui seraient déconditionnés sur site. Conformément aux objectifs du plan Énergie Méthanisation Autonomie Azote (EMAA), l’obligation est maintenue, pour ces 2 nouveaux cahiers des charges, d’incorporer au moins un tiers d’effluents d’élevage et au moins deux tiers de matières agricoles. Ces cahiers des charges restent ainsi très agricoles, et n’ont pas vocation dans l’immédiat à s’appliquer aux installations territoriales ou industrielles.

Irrégularités de l’enquête publique locale : l’Etat non-responsable

Par Maître Lucas DERMENGHEM (Green Law Avocats) Par un arrêt du 13 mars 2019 qui sera mentionné aux Tables du recueil Lebon (CE, 13 mars 2019, n°418170), le Conseil d’Etat a jugé que la responsabilité de l’Etat ne pouvait être engagée du fait des irrégularités du commissaire enquêteur dans le cadre d’une enquête publique relative à l’élaboration d’un plan local d’urbanisme (PLU). En l’espèce, en raison d’irrégularités établies par le commissaire enquêteur, le Tribunal administratif de Melun avait dans un jugement rendu le 27 novembre 2013 annulé la délibération du conseil municipal de la commune de Villeneuve-le-Comte approuvant le PLU. En l’occurrence, le Tribunal administratif avait considéré qu’en ne répondant pas lui-même aux observations du public et en se bornant, pour justifier son avis favorable au projet de PLU, à viser les observations du public, sans y répondre et les avis des personnes publiques associées, sans les analyser, le commissaire enquêteur n’avait satisfait ni à l’exigence d’examen des observations recueillies, ni à celle de motivation personnelle de ses conclusions, contrairement à ce qu’exigeait l’article R. 123-22 du code de l’environnement dans sa version alors applicable. Au vu de ces irrégularités, le juge de première instance a estimé que la délibération du conseil municipal approuvant le PLU a été prise à l’issue d’une procédure entachée d’un vice substantiel et devait par conséquent être annulée. La commune de Villeneuve-le-Comte avait par la suite saisi le préfet d’une demande indemnitaire tendant à la réparation du préjudice que lui aurait causé l’Etat du fait des irrégularités commises par le commissaire enquêteur. A la suite du rejet de la demande du Tribunal administratif (TA Melun, 4 février 2016, n°1401470) puis de la cour administrative d’appel de Paris (CAA Paris, 14 décembre 2017, n°16PA00853), la commune s’est pourvue en cassation devant le Conseil d’Etat. Dans sa décision, la Haute juridiction va d’abord établir un rappel des dispositions pertinentes du code de l’urbanisme et du code de l’environnement relatives à l’enquête publique en matière d’élaboration de PLU. La Haute Assemblée va déduire de ces normes que le PLU soumis à enquête publique est élaboré à l’initiative et sous la responsabilité de la commune. Il est d’abord rappelé que la mission du commissaire enquêteur consiste à établir un rapport qui est adressé au maire, relatant le déroulement de l’enquête et examinant les observations recueillies, puis à consigner dans un document séparé, ses conclusions motivées. Le Conseil d’Etat estime que le commissaire enquêteur conduit donc une enquête à caractère local, destinée à permettre aux habitants de la commune de prendre une connaissance complète du projet et de présenter leurs observations, mais aussi à l’autorité compétente de disposer de tous les éléments nécessaires à son informations et de l’éclairer dans ses choix. Le Conseil d’Etat en déduit ainsi que le commissaire enquêteur exerce sa mission au titre d’une procédure conduite par la commune. Dans un second temps du raisonnement, la Haute Assemblée ajoute qu’il ne peut être déduit que le commissaire enquêteur exercerait sa mission au nom et pour le compte de l’Etat du simple fait qu’il est susceptible, dans le cadre de l’enquête, de prendre en compte des éléments ne concernant pas directement la commune. En outre, le Conseil d’Etat retient dans un troisième temps du raisonnement que si les modalités de désignation et de rémunération du commissaire enquêteur échappent à la commune, ces règles visent avant tout à garantir l’indépendance et l’impartialité du commissaire, étant précisé que les frais occasionnés restent assumés par la commune. Par ailleurs, le Conseil d’Etat confirme également la Cour administrative d’appel de Paris en ce qu’elle a jugé que la circonstance que l’adoption du PLU de Villeneuve-le-Comte serait une condition préalable à la réalisation du projet de Village-Nature, classé par l’Etat « opération d’intérêt national » et « projet d’intérêt général » ne permettait pas davantage d’engager la responsabilité de l’Etat en raison des fautes commises par le commissaire enquêteur. Par cette décision, le juge du Palais Royal s’inspire d’une interprétation déjà ancienne dégagée par la cour administrative d’appel de Lyon, dans un arrêt du 31 mai 2011, (CAA Lyon, 31 mai 2011, Min. écologie c/ Commune de Péron, n°09LY02412). Mais l’apport de l’arrêt commenté réside également dans la définition du modus operandi qui aurait dû être appliqué par le maire de Villeneuve-le-Comte après avoir constaté les fautes commises par le commissaire enquêteur, alors qu’à cette date aucune procédure ne lui permettait de saisir le président du Tribunal administratif compétent comme le prévoit aujourd’hui l’article R. 123-20 du code de l’environnement. Selon le Conseil d’Etat, il appartenait ainsi au maire de « ne pas donner suite à une procédure entachée d’irrégularités et d’en tirer les conséquences en demandant soit au commissaire enquêteur de corriger ces irrégularités soit de mettre en œuvre une nouvelle procédure en saisissant à nouveau le président du tribunal administratif pour qu’il procède à la désignation d’un nouveau commissaire enquêteur ».