Ae et cas par cas : clarifications

Par Maître Lucas DERMENGHEM, Green Law Avocats Nous l’annoncions le décret n° 2020-844 du 3 juillet 2020 relatif à l’autorité environnementale et à l’autorité chargée de l’examen au cas par cas a été publié au Journal Officiel du 4 juillet dernier. Il convient d’en faire une analyse approfondie. I/ Contexte Ce texte était particulièrement attendu depuis qu’un vide juridique avait été crée à la suite de l’annulation partielle, par le Conseil d’Etat, de certaines dispositions du décret n°2016-519 du 28 avril 2016 et du décret n° 2016-1110 du 11 août 2016 qui avaient pour effet de désigner le préfet de région en tant qu’autorité environnementale chargée d’émettre un avis sur les évaluations environnementales des projets. Faisant application de la célèbre jurisprudence « Seaport » de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) rendue à propos de l’autonomie de l’autorité environnementale, le Conseil d’Etat avait annulé ces dispositions sur la base du raisonnement suivant : « 7. Considérant, que ce même 1° de l’article 1er du décret attaqué a cependant maintenu, au nouveau IV du même article R. 122-6 du code de l’environnement, la désignation du préfet de région sur le territoire de laquelle le projet de travaux, d’ouvrage ou d’aménagement doit être réalisé, en qualité d’autorité compétente de l’Etat en matière d’environnement, pour tous les projets autres que ceux pour lesquels une autre autorité est désignée par les I, II et III du même article ; que pour autant, ni le décret attaqué, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire n’a prévu de dispositif propre à garantir que, dans les cas où le préfet de région est compétent pour autoriser le projet, en particulier lorsqu’il agit en sa qualité de préfet du département où se trouve le chef-lieu de la région en vertu de l’article 7 du décret précité du 29 avril 2004, ou dans les cas où il est en charge de l’élaboration ou de la conduite du projet au niveau local, la compétence consultative en matière environnementale soit exercée par une entité interne disposant d’une autonomie réelle à son égard, conformément aux exigences rappelées au point 5 ; que, ce faisant, les dispositions du 1° de l’article 1er du décret attaqué ont méconnu les exigences découlant du paragraphe 1 de l’article 6 de la directive du 13 décembre 2011 ; qu’elles doivent donc être annulées en tant que l’article R. 122-6 du code de l’environnement qu’elles modifient conserve au préfet de région la compétence pour procéder à l’évaluation environnementale de certains projets ; » (CE, 6 décembre 2017, n°400559) « 7. Considérant qu’en maintenant ou en prévoyant la désignation du préfet de région en qualité d’autorité environnementale pour certains projets ou groupes de projets sans qu’aucune disposition du décret attaqué, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire ne prévoit de dispositif propre à garantir que, dans les cas où le préfet de région est également compétent pour autoriser le projet concerné ou un ou plusieurs des projets faisant l’objet d’une procédure d’autorisation concomitante, en particulier lorsqu’il agit en sa qualité de préfet du département où se trouve le chef-lieu de la région en vertu de l’article 7 du décret précité du 29 avril 2004, ou dans les cas où il est en charge de l’élaboration ou de la conduite du projet ou d’un ou plusieurs de ces projets au niveau local, la compétence consultative en matière environnementale soit exercée par une entité disposant d’une autonomie réelle à son égard, les dispositions des 11° et 27° de l’article 1er du décret attaqué ont méconnu les exigences découlant du paragraphe 1 de l’article 6 de la directive du 13 décembre 2011 rappelées au point 4 ; » (CE, 28 décembre 2017, n°407601). L’article 31 de la loi n°2019-1147 et le décret commenté ont pour objectif de combler le vide juridique crée par ces décisions. La présente note n’a pas vocation à commenter l’ensemble des apports du décret mais tendra uniquement à se focaliser sur les modifications impactant la désignation de l’autorité environnementale et de l’autorité en charge du cas par cas, ainsi que sur le dispositif visant à prévenir les conflits d’intérêts. II/ L’éviction actée du préfet de région en tant qu’autorité environnementale Désormais, avec l’entrée en vigueur de ce nouveau décret, seules trois autorités, et non plus quatre, peuvent être désignées comme « autorité environnementale » ayant pour mission de donner un avis sur les projets soumis à évaluation environnementale. L’article R122-6 du code de l’environnement est ainsi modifié en conséquence et prévoit une désignation de l’autorité environnementale compétente en fonction des autorités chargées d’élaborer et d’autoriser le projet : 1) Le ministre chargé de l’environnement occupera la fonction d’autorité environnementale pour les projets, autres que ceux mentionnés au 2° de l’article R122-6, qui donnent lieu à un décret pris sur le rapport d’un autre ministre, à une décision d’autorisation, d’approbation ou d’exécution d’un autre ministre, ou qui sont élaborés par les services placés sous l’autorité d’un autre ministre. Le ministre de l’environnement peut déléguer la fonction d’autorité environnementale à la formation d’autorité environnementale du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGDD). 2) La formation d’autorité environnementale du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGDD) sera l’autorité environnementale pour : Les projets qui donnent lieu à une décision d’autorisation, d’approbation ou d’exécution du ministre chargé de l’environnement ou à un décret pris sur son rapport ; les projets qui sont élaborés par les services placés sous l’autorité du ministre chargé de l’environnement ou par des services interministériels agissant dans les domaines relevant des attributions de ce ministre ; les projets qui sont élaborés sous maîtrise d’ouvrage d’établissements publics relevant de la tutelle du ministre chargé de l’environnement, ou agissant pour le compte de celui-ci ; l’ensemble des projets de travaux, d’aménagement ou d’ouvrages de la société SNCF Réseau et de sa filiale mentionnée au 5° de l’article L. 2111-9 du code des transports.  3) La mission régionale d’autorité environnementale (MRAe) du Conseil général de l’environnement et du développement durable de la région sur le territoire de laquelle le projet doit être réalisé effectuera…

Nouvelle exception à la loi littoral

Par Maître DAVID DEHARBE (Green Law Avocats) Dans sa décision n°432944 (mentionné aux tables du recueil Lebon) du 10 juillet 2020, Association France Nature Environnement, le Conseil d’Etat précise le régime de l’implantation d’aménagements légers pouvant être implantés dans les espaces remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques. Pour rappel, l’article L. 121-23 du code de l’urbanisme énonce que « Les documents et décisions relatifs à la vocation des zones ou à l’occupation et à l’utilisation des sols préservent les espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral, et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques. […] ». Toutefois, l’article L. 121-24 permet de déroger à cette règle lorsqu’il est question de l’implantation d’aménagements légers. Depuis la loi n° 2018-1021, du 23 novembre 2018, portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, l’article L. 121-24 prévoit que la liste limitative de ces aménagements légers doit être définie par décret en Conseil d’Etat. Cette liste est inscrite à l’article R. 121-5 du code de l’urbanisme : « Des aménagements légers, dont la liste limitative et les caractéristiques sont définies par décret en Conseil d’Etat, peuvent être implantés dans ces espaces et milieux lorsqu’ils sont nécessaires à leur gestion, à leur mise en valeur notamment économique ou, le cas échéant, à leur ouverture au public, et qu’ils ne portent pas atteinte au caractère remarquable du site. […] ». En l’espèce, le décret n° 2019-482 du 21 mai 2019, relatif aux aménagements légers autorisés dans les espaces remarquables ou caractéristiques du littoral et des milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques, a modifié la liste des aménagements légers ; en ajoutant la nouvelle catégorie relative aux canalisations nécessaires au services publics ou aux activités économiques. Par une requête, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 23 juillet et 22 août 2019 et 14 février 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, l’association France Nature Environnement demande au Conseil d’Etat d’annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2019-482 du 21 mai 2019 relatif aux aménagements légers autorisés dans les espaces remarquables ou caractéristiques du littoral et des milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques. La haute juridiction administrative  apporte deux éclaircissements : sur la légalité externe elle précise la portée de la consultation publique fondée sur articles L. 120-1 et L. 123-19-1 du code de l’environnement (I) ; sur la légalité interne elle explicite la portée du principe de non-régression issu de l’article L110-1 du code de l’environnement (II).  Concernant la portée de la consultation publique fondée sur articles L. 120-1 et L. 123-19-1 du code de l’environnement, le Conseil d’Etat a indiqué que l’obligation de consultation publique préalable à l’édiction de certains types d’actes ayant une incidence directe et significative sur l’environnement « n’imposent de procéder à une nouvelle publication pour recueillir des observations du public sur les modifications qui sont ultérieurement apportées au projet de décision, au cours de son élaboration, que lorsque celles-ci ont pour effet de dénaturer le projet sur lequel ont été initialement recueillies les observations du public. ». Les projets soumis à consultation publique préalable peuvent ainsi être modifié sans qu’il y ait lieu de relancer une procédure de consultation. Le Conseil d’Etat pose toutefois un garde-fou : cette modification ne doit pas avoir pour effet de dénaturer le projet sur lequel ont été initialement recueillies les observations du public. Certes, cette solution n’est pas nouvelle (CE, 4 décembre 2013, n° 357839 358128 358234, Cons. 8 ; CE, 17 juin 2015, n°375853, Cons. 7 à 9 ; CE 22 octobre 2018, Union nationale des industries de carrières et matériaux de construction, n°408943) Mais cette solution relativise comme beaucoup d’autres de la juridiction administrative la consistances du principe de participation. En effet ce principe a été lu par exemple comme n’impliquant pas par lui-même l’obligation de procéder à une information du public préalablement à l’autorisation d’extension d’une installation nucléaire de base (CE, 16 mars 2001,  collectif national stop melox, n° 212930). Ce principe n’impose pas plus en lui-même l’organisation d’une enquête publique ou que le public soit associé à la décision publique. Mais surtout on sait que le Conseil d’Etat a une lecture stricte du « projet » ayant une incidence importante sur l’environnement (Ce qui exclut de son champ d’application le contentieux des ZDE : CE 26 juin 2013, Cne de Roquerfère, n°360466 ; plus étrangement encore l’arrêté fixant les règles de balisage des éoliennes afin de garantir la sécurité de la circulation aérienne : CE 13 mars 2020, n° 425161). Et cette solution s’inscrit encore dans une logique qui consiste désormais à accepter les régularisations des vices de formes et même de ceux qui semblent pourtant méconnaître le principe de participation (CE 22 mars 2018, n°415852)… si bien que l’on se demande parfois si le principe en est encore un et si le recours a encore un intérêt ! Bien évident la sécurité juridique explique largement ces entorses à la participation. On constate en fait qu’après le mépris de ses représentants, le peuple doit compter désormais avec le mépris des juges … On finit par se demander si, à ainsi torturer la loi plus qu’il ne l’interprète, le Conseil d’Etat ne prend pas le risque d’alimenter la thèse de ceux qui a l’instar de Dominique Rousseau proposent désormais sans détour la suppression de la Haute juridiction administrative (Dominique Rousseau : « Pour déconfiner la France politiquement, il faut reconnaître la compétence des citoyens »). Concernant la portée du principe de non-régression issu de l’article L110-1 du code de l’environnement, il est de bon ton de rappeler qu’il est le pendant de l’effet cliquet en droit de l’environnement. Le principe de non-régression est une création doctrinale du professeur Prieur qu’il considère être « la conséquence du caractère finaliste du droit de l’environnement, qui vise non seulement à protéger l’environnement dans ses différentes composantes, mais également à l’améliorer, ce qui désigne une action vers plus de protection » (Prieur M. et Sozzo G. (dir.), La non-régression en droit de l’environnement, Bruylant, 2012,…

Le port du masque obligatoire

Par Maitre David DEHARBE (Green Law Avocats) Le décret n° 2020-884 du 17 juillet 2020 (JORF n°0175 du 18 juillet 2020texte n° 32), modifie les mesures prises pour la sortie de l’état d’urgence sanitaire. Ce texte impose le port du masque à toute personne de 11 ans et plus dans les lieux clos. Le décret n°2020-884 du 17 juillet 2020 modifiant le décret n° 2020-860 du 10 juillet 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans les territoires sortis de l’état d’urgence sanitaire et dans ceux où il a été prorogé, pris dès le vendredi 17 juillet, a été publié le samedi 18 juillet au Journal officiel. Conformément aux annonces du Premier ministre, sa mise en œuvre intervient depuis le lundi 20 juillet 2020. Ce décret impose notamment le port du masque grand public dans plusieurs catégories d’établissements recevant du public (ERP), dont font partie les administrations. Le port du masque grand public était déjà obligatoire, parfois avec des règles spécifiques à certaines activités, dans les établissements recevant du public (ERP) relevant des catégories suivantes (fixées par l’arrêté du 25 juin 1980) :     (L) Salles d’auditions, de conférences, de réunions, de spectacles ou à usage multiple, y compris les salles de spectacle et les cinémas.     (N) Restaurants et débits de boissons ;     (O) Hôtels et pensions de famille ;     (P) Salles de jeux ;     ( R) Établissements d’éveil, d’enseignement, de formation, centres de vacances, centres de loisirs sans hébergement ;     (S) Bibliothèques, centres de documentation ;     (V) Établissements de culte ;     (X) Établissements sportifs couverts ;     (Y) Musées ;     (PA) Établissements de plein air ;     (CTS) Chapiteaux, tentes et structures ;     (OA) Hôtels-restaurants d’altitude ;     (EF) Établissements flottants ;     (REF) Refuges de montagne.     Les gares routières et maritimes ainsi que les aéroports. A compter de lundi 20 juillet, s’ajoutent les catégories suivantes :     (M) Magasins de vente, centres commerciaux ;     (W) Administrations et banques. Les marchés couverts ont également été ajoutés. Dans les autres catégories d’établissements, il peut, comme aujourd’hui, être rendu obligatoire par l’exploitant. Cette obligation ne s’applique pas aux candidats à un concours ou un examen lorsqu’ils sont assis. Ce port du masque s’applique également dans les collectivités de l’article 74 de la Constitution et à la Nouvelle-Calédonie. Par ailleurs, ce décret met fin, à compter du 25 juillet, à la dérogation de réaliser un test virologique réalisé moins de 72 heures avant un vol à destination de l’une des collectivités pour les étrangers venant d’un pays inscrit sur la liste des pays où le virus du Covid-19 ne circule pas.  Enfin, il permet au préfet de prescrire la mise en quarantaine ou le placement et le maintien en isolement, lorsqu’elles arrivent sur le territoire national depuis l’étranger pour les personnes qui présentent des symptômes mais aussi des personnes ne pouvant justifier, à leur arrivée, du résultat d’un examen biologique de dépistage virologique réalisé moins de 72 heures avant le vol ne concluant pas à une contamination par le Covid-19. Le non-respect du port du masque de ces mesures est passible d’une contravention de 4ème classe ( amende forfaire de 135 € – amende minorée à 90 €, amende majorée à 375 € et une amende maximale pouvant atteindre 750 €). La sanction pour non respect du port du masque trouve sa base légale à l’alinéa 3 de l’article 3136-1 modifié par l’article 2 de la loi n°2020-290 du 23 mars 2020 : “La violation des autres interdictions ou obligations édictées en application des articles L. 3131-1 et L. 3131-15 à L. 3131-17 est punie de l’amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe. Cette contravention peut faire l’objet de la procédure de l’amende forfaitaire prévue à l’article 529 du code de procédure pénale. Si cette violation est constatée à nouveau dans un délai de quinze jours, l’amende est celle prévue pour les contraventions de la cinquième classe.“

REDEVANCE POST-STATIONNEMENT

Par Maître David DEHARBE (Green Law Avocats) Par une décision relativement récente, la Commission du contentieux du stationnement payant a jugé que « les éventuelles insuffisances, imprécisions ou inexactitudes entachant l’avis de paiement ne sont susceptibles d’empêcher le délai de courir que dans le cas où elles ont été de nature à fausser l’appréciation du destinataire sur l’obligation de payer, sur le montant mis à sa charge ou sur la date limite impartie » (CCSP, 20 mai 2020, n° 18008047). C’est l’occasion de revenir sur ce dispositif qui est encore mal connu des automobilistes. La loi n°2014-581 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (dite loi MAPTAM) est venue dépénaliser et décentraliser le stationnement payant sur voirie. En effet son article 63 institue le forfait post-stationnement (FPS). En cas de rejet du recours administratif préalable obligatoire, toute contestation d’un forfait post-stationnement doit être transmise, depuis le 1er janvier 2018, à la commission du contentieux du stationnement payant qui constitue u e nouvelle juridiction administrative spécialisée ; la commission située à Limoges, est compétente pour statuer sur l’ensemble du territoire national. D’application au 1er janvier 2018, le FPS est venu remplacer les amendes forfaitaires en cas de stationnement non payé ou de dépassement du temps pour lequel le stationnement a été payé. Le FPS constitue une redevance d’occupation du domaine public ; c’est donc l’ordre juridictionnel administratif qui est compétent pour l’examen des contestations avec la création d’une nouvelle juridiction administrative spécialisée à compétence nationale, la Commission du contentieux du stationnement payant (CCSP), après avoir effectué un recours administratif préalable obligatoire (RAPO) dans le mois suivant la notification. Notons que la saisine de la CCSSP doit se faire après avoir payé le FPS et dans le délai d’un mois suivant la notification de la décision du RAPO. Néanmoins pour contester le FPS majoré, il faut saisir directement la CCSP sans passer par un RAPO. On est donc ici passé d’une procédure de contestation des procès-verbaux de contravention devant le juge pénal, à une contestation devant le juge administratif. Cependant les infractions relatives au stationnement gênant ou illicite conservent un caractère pénal. Enfin, la CCSP est également compétente pour connaître de l’action en responsabilité à la suite de l’édiction de l’avis de paiement du FPS et, le cas échéant, du titre exécutoire émis (CE, 20 février 2019, n° 422499). Le Conseil d’Etat a déjà eu à juger des modalités de contestation du FPS : selon les juges, ces modalités ne méconnaissent pas les stipulations des articles 6 et 13 de la convention européenne des droits de l’homme, soit le droit au procès équitable et le droit au recours effectif (CE, 30 septembre 2019, n° 421427). Rappelons encore que Les décisions de la commission peuvent faire l’objet, dans un délai de deux mois, d’un recours en cassation devant le Conseil d’État (art. R.2333-120-64 CGCT). L’objectif était de donner compétence aux collectivités territoriales en la matière. En effet, d’après le rapport du Défenseur des droits publié le 14 janvier 2020, ce sont déjà 564 communes ou intercommunalités qui ont opté pour la mise en place de cette réforme. S’agissant des autres collectivités, elles ont soit choisi de maintenir la gratuité du stationnement, soit abandonné le stationnement payant en faveur de la gratuité ou de la mise en place de zones bleues, dispositif permettant également la rotation des véhicules sur la voie publique. Ensuite, chaque collectivité peut choisir de gérer elle-même le contrôle du stationnement payant ou déléguer la gestion à un tiers cocontractant. C’est à la collectivité qu’il revient de fixer le montant de la redevance payé par l’usager pour l’utilisation du domaine public et celui du FPS dû en cas de non-paiement de cette redevance conformément à l’article L. 2333-87 du code général des collectivités territoriales. Ainsi ces montants peuvent varier d’une collectivité à l’autre mais également selon les zones de stationnement d’une même commune. Toutefois, le montant du FPS ne peut être supérieur au montant de la redevance due pour la durée maximale de stationnement autorisée dans la zone où se trouve le véhicule. Notons que le FPS ne concerne pas les personnes titulaires d’une carte mobilité inclusion portant la mention stationnement. En cas de non-respect de paiement du stationnement, le FPS est notifié par avis de paiement qui peut l’être soit par : Dépôt sur le pare-brise du véhicule ; Envoi par courrier au titulaire ; Envoi par mail au titulaire de la carte grise. Cet avis de paiement comporte les informations suivantes : Collectivité et prestataire chargé de contrôler le stationnement payant ; Date et heure du constat ; Adresse de la constatation de stationnement ; Numéro d’immatriculation du véhicule ; Montant du FPS à payer, réduit si nécessaire des montants déjà payés avant le contrôle ; Heure de fin de validité du FPS ; Service auprès duquel le FPS doit être payé ; Possibilité d’un FPS minoré ; Moyens de paiement et date limite de règlement ; Voies et délais de recours. Le montant dû, est minoré si le paiement est effectué rapidement ; à l’inverse, si le paiement est effectué au-delà du délai de 3 mois, il sera majoré. Le FPS peut être payé : Par internet ; Par téléphone ; Par courrier ; Au service en charge des impôts. Il convient de noter que le paiement du FPS ne vaut plus, comme avec une amende contraventionnelle, acceptation de l’infraction. Ce paiement préalable permet de prévenir les recours dilatoires (CE, 30 septembre 2019, n° 421427). Sur ce point, le Conseil d’Etat a récemment renvoyé au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité relative à l’article L. 2333-87-5 du code général des collectivités territoriales qui subordonne la recevabilité du recours devant la CCSP au paiement préalable, par le redevable qui conteste la somme mise à sa charge, du montant du FPS sans prévoir de possibilité de dérogation. Le moyen tiré de l’atteinte au droit au recours effectif est jugé suffisamment sérieux pour le Conseil d’État (CE, 10 juin 2020, n° 433276). Il convient de préciser qu’à la suite de la décision du 30 septembre 2019, certains ont estimé que le Conseil d’Etat n’excluait…

Climat : le CE inflige une astreinte de 10 M€ d’euros par semestre à L’État

Par Maître David DEHARBE (Green Law Avocats) Par un arrêt d’Assemblée du 10 juillet 2020, le Conseil d’État (CE 10 juillet 2020, association les amis de la terre et autres, n° 428409) ordonne au Gouvernement de prendre des mesures pour réduire la pollution de l’air, sous astreinte de 10 M€ par semestre de retard. L’on sait que par une décision du 12 juillet 2017, le Conseil d’Etat, statuant au contentieux (CE, 12 juillet 2017, Association Les Amis de la Terre France, n° 394254), a : – d’une part, annulé les décisions implicites du Président de la République, du Premier ministre et des ministres chargés de l’environnement et de la santé, refusant de prendre toutes mesures utiles et d’élaborer des plans conformes à l’article 23 de la directive 2008/50/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008 concernant la qualité de l’air ambiant et un air pur pour l’Europe, permettant de ramener, sur l’ensemble du territoire national, les concentrations en particules fines et en dioxyde d’azote en-deçà des valeurs limites fixées à l’annexe XI de cette directive, – d’autre part, enjoint au Premier ministre et au ministre chargé de l’environnement de prendre toutes les mesures nécessaires pour que soit élaboré et mis en œuvre, pour chacune des zones énumérées au point 9 des motifs de cette décision, un plan relatif à la qualité de l’air permettant de ramener les concentrations en dioxyde d’azote et en particules fines PM10 sous les valeurs limites fixées par l’article R. 221-1 du code de l’environnement dans le délai le plus court possible et de le transmettre à la Commission européenne avant le 31 mars 2018. Par une demande, enregistrée le 2 octobre 2018 au secrétariat de la section du rapport et des études du Conseil d’Etat, l’association Les amis de la Terre – France et plusieurs autres associations ont demandé au Conseil d’Etat : 1°) de constater que la décision n° 394254 du 12 juillet 2017 du Conseil d’Etat n’a pas été exécutée à la date du 31 mars 2018 ; 2°) de prononcer à l’encontre de l’Etat, s’il ne justifie pas avoir pris les mesures de nature à assurer l’exécution de cette décision dans un délai d’un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, une astreinte de 100 000 euros par jour de retard. Après sa décision en juillet 2017, 3 années et 3 jours plus tard, le Conseil d’État, réuni en Assemblée du contentieux constate que le Gouvernement n’a toujours pas pris les mesures demandées pour réduire la pollution de l’air dans 8 zones en France et menace donc le gouvernement de cette astreinte record. Le Conseil d’État, constate d’abord que les valeurs limites de pollution restent dépassées dans 9 zones en 2019 (dernière année pour laquelle le Gouvernement a fourni au Conseil d’Etat des chiffres complets) : Vallée de l’Arve, Grenoble, Lyon, Marseille-Aix, Reims, Strasbourg et Toulouse pour le dioxyde d’azote, Fort-de-France pour les particules fines, et Paris pour le dioxyde d’azote et les particules fines. Le Conseil d’État relève que le plan élaboré en 2019 pour la vallée de l’Arve (Haute-Savoie) comporte des mesures précises, détaillées et crédibles pour réduire la pollution de l’air et assure un respect des valeurs limites d’ici 2022. En revanche, les « feuilles de route » élaborées par le Gouvernement pour les autres zones ne comportent ni estimation de l’amélioration de la qualité de l’air attendue, ni précision sur les délais de réalisation de ces objectifs. Enfin, s’agissant de l’Ile-de-France, le Conseil d’État relève que si le plan élaboré en 2018 comporte un ensemble de mesures crédibles, la date de 2025 qu’il retient pour assurer le respect des valeurs limites est, eu égard aux justifications apportées par le Gouvernement, trop éloignée dans le temps pour pouvoir être regardée comme assurant une correcte exécution de la décision de 2017. Le Conseil d’État en déduit que, hormis pour la vallée de l’Arve, l’État n’a pas pris des mesures suffisantes dans les 8 zones encore en dépassement pour que sa décision de juillet 2017 puisse être regardée comme pleinement exécutée. Face à cette situation, la Haute juridiction adapte en ces termes le mécanisme de l’astreinte en présence d’une carence dans l’exécution de sa décision au fond par l’Etat lui même : ” afin d’assurer l’exécution de ses décisions, la juridiction administrative peut prononcer une astreinte à l’encontre d’une personne morale de droit public ou d’un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public, soit dans la décision statuant au fond sur les prétentions des parties sur le fondement de l’article L. 911-3 du code de justice administrative, soit ultérieurement en cas d’inexécution de la décision sur le fondement des articles L. 911-4 et L. 911-5 du même code. En cas d’inexécution totale ou partielle ou d’exécution tardive de la décision, la juridiction procède, en vertu de l’article L. 911-7 de ce code, à la liquidation de l’astreinte. En vertu du premier alinéa de l’article L. 911-8 de ce code, la juridiction a la faculté de décider, afin d’éviter un enrichissement indu, qu’une fraction de l’astreinte liquidée ne sera pas versée au requérant, le second alinéa prévoyant que cette fraction est alors affectée au budget de l’État. Toutefois, l’astreinte ayant pour finalité de contraindre la personne morale de droit public ou l’organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public à exécuter les obligations qui lui ont été assignées par une décision de justice, ces dispositions ne trouvent pas à s’appliquer lorsque l’Etat est débiteur de l’astreinte en cause. Dans ce dernier cas, lorsque cela apparaît nécessaire à l’exécution effective de la décision juridictionnelle, la juridiction peut, même d’office, après avoir recueilli sur ce point les observations des parties ainsi que de la ou des personnes morales concernées, décider d’affecter cette fraction à une personne morale de droit public disposant d’une autonomie suffisante à l’égard de l’Etat et dont les missions sont en rapport avec l’objet du litige ou à une personne morale de droit privé, à but…