Ce texte complète la circulaire Olin très partiellement annulée par le Conseil d’Etat (CE 10 janvier 2007,COLLECTIF POUR LA DEFENSE DES LOISIRS VERTS et FEDERATION FRANCAISE DE MOTOCYCLISME).
Le caractère interprétatif de la circulaire.
Après analyse, l’instruction du 13 décembre 2011 complétant la circulaire du 6 septembre 2005 ne semble manifestement pas présenter un caractère interprétatif de la règlementation en vigueur opposable à la circulation des quads et autres véhicules à moteur.
Dénuée de caractère impératif, elle n’est donc pas susceptible de recours devant le juge de l’excès de pouvoir (Conseil d’Etat, 18 décembre 2002, n°233618, Mme Duvignières) … le Ministre a prudemment cette fois évité le contentieux de ses actes.
Finalement cette circulaire fait quelques rappels heureux.
L’interdiction de principe figurant à l’article L. 362-1 du code de l’environnement
L’article L. 362-1 du code de l’environnement prévoit l’interdiction de circulation des véhicules à moteur en dehors du domaine public routier, des chemins ruraux et voies privées ouvertes à la circulation publique.
Il n’y a pas d’obligation de matérialiser cette interdiction de principe (Cour d’appel de Dijon, Chambre correctionnelle Arrêt du 24 mars 2010 nos 10/234, 10/269) :
L’article R. 362-2 du code de l’environnement prévoit que le fait, pour tout conducteur, de contrevenir aux dispositions des articles L. 362-1 et L. 362-3 est puni de l’amende prévue pour les contraventions de la 5e classe (soit 1 500 euros au plus).
L’étendue du pouvoir de police du maire dans la règlementation de la circulation sur les chemins ruraux
Là encore la circulaire prend grand soin de souligner que le maire est compétent pour interdire, à titre temporaire ou permanent, l’usage de tout ou partie du réseau des chemins ruraux aux catégories de véhicules et de matériels dont les caractéristiques sont incompatibles avec la constitution de ces chemins (articles L. 2213-1 et L. 2215-3 du code général des collectivités territoriales ; Conseil d’Etat, 9 nov. 1992, no 94372, Denard).
L’interdiction de circulation ne peut toutefois présenter un caractère trop général … Bizarrement le Ministre ne procède pas à ce rappel. Ainsi, le Maire ne peut interdire, de façon générale et permanente, la circulation des véhicules à moteur sur toute l’étendue du territoire de la commune non desservi par une voie bitumée (CAA Bordeaux, 28 mai 2002, no 99BX00597, Nelias).
Mais l’arrêté municipal n’est pas obligatoirement limité dans le temps (Conseil d’Etat, 12 décembre 1997 n°173231).
Il semble toutefois à la lecture de la jurisprudence, qu’une discrimination entre les différents types de véhicules puisse être envisagée dès lors qu’elle apparaît justifiée, notamment en raison des spécificités des véhicules et des désordres qu’ils occasionnent (Conseil d’Etat, 29 déc. 1997, no 173042, Fougerouse ; CAA Bordeaux, 2e ch., 23 juill. 2002, no 99BX01413, Assoc. départementale de défense de la propriété privée). De même, les conditions d’utilisation des véhicules agricoles étant différentes de celles des autres véhicules de transport, il est loisible au maire de laisser la possibilité aux véhicules agricoles de circuler sur un <chemin> ayant fait l’objet d’une interdiction de circulation sans porter une atteinte illégale au principe d’égalité devant la loi (CAA Nantes, 24 juillet 2007, n° 04NT01171, Seillery).
Obligation de signalisation
Si comme le rappelle la circulaire ce n’est pas le cas sur une voie privée, une interdiction de circulation de véhicules motorisés sur un chemin rural, nécessairement prescrite par un arrêté de police, devra faire l’objet d’une signalisation pour être opposable aux usagers.
Le droit écrit est ici très net (cf. les articles L161-13 du code rural, ;L. 113-1 du code de la voirie routière, ; R411-25 code de la route ; Instruction interministérielle sur la signalisation routière (IISR), 4e partie, signalisation de prescription, novembre 2008, article 56-1).
Sachant que la violation des arrêtés de police réglementant la circulation localement n’est pas un risque négligeable. L’article R. 362-3 du code de l’environnement prévoit que le fait, pour tout conducteur, de contrevenir aux mesures édictées en application des articles L. 2213-4 et L. 2215-3 du code général des collectivités territoriales est puni de l’amende prévue pour les contraventions de la 5e classe (soit 1 500 euros au plus).
Des plans départementaux des itinéraires de randonnée motorisée ?
Si l’on ajoute à cela, comme le fait la circulaire que les plages, les chemins de halages, les chemins forestiers et tout autre chemin non carrossé ou temporaire sont interdits sous peine d’amende et parfois de confiscation du matériel, une conclusion s’impose : les quadeurs et autres amateurs de trial ou d’enduro sur voies ouvertes ne pourront pas dire qu’ils ne savaient pas ce qu’ils encouraient !
Nul ne doutera que la pression écologique est ici tout aussi forte que légitime : il en va de la protection des espèces et surtout de leurs habitats, à l’aune de Natura 2000 et du développement durable.
Demeure néanmoins cette question politiquement très incorrecte : où garantir le libre loisir motorisé amateur ?
On voudrait juste rappeler un dernier oubli de la circulaire : le plan départemental des itinéraires de randonnée motorisée pourtant prévu à l’article L361-2 du code de l’environnement. C’est un intéressant baromètre de la garantie de la liberté d’aller de venir et accessoirement de déranger les espèces pour celles et ceux qui ne sont pas aussi électoralement influents que les chasseurs français ou désormais les randonneurs: si l’on dénombre quelques 80 plans pédestres de même nature juridique, il suffit d’une main pour compter à l’échelle du territoire les plans motorisés. On peut alors sinon comprendre du moins s’expliquer que le dimanche certains bravent l’interdit et prennent le maquis au guidon de leurs terrible engin … Attention, les gendarmes vous attendent (là aussi) au coin du bois !