Urbanisme: la notification d’un pourvoi en cassation à l’adresse de l’avocat à la Cour est vue comme respectant l’article R600-1 CU (CE, 15 oct.2014)

Aux termes d’une décision du 15 octobre 2014, le Conseil d’Etat est venu apporter une précision sur la régularité d’une notification de recours réalisée en vertu de l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme (Conseil d’État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 15 octobre 2014, n°366065, mentionné dans les tables du Recueil Lebon) Les faits sont les suivants. Le préfet de la région Auvergne a délivré à une société un permis de construire en vue de la réalisation d’un parc éolien. Par un jugement du 27 mars 2012, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé ce permis à la demande plusieurs requérants. Le pétitionnaire a alors fait appel de ce jugement et a obtenu gain de cause en appel. Un pourvoi en cassation a alors été formé à l’encontre de l’arrêt de la Cour administrative d’appel. Devant le Conseil d’Etat, le pétitionnaire du permis de construire opposait une fin de non-recevoir tirée de ce que les requérants ne lui auraient pas régulièrement notifié leur pourvoi. On comprend à la lecture de l’arrêt que les requérants avaient notifié leur pourvoi à l’adresse de leur avocat à la Cour, les ayant représenté en instance d’appel. Il invoquait, à cet effet, les dispositions de l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme. Aux termes de cet article, ” En cas (…) de recours contentieux à l’encontre (…) d’un permis de construire, d’aménager ou de démolir, (…) l’auteur du recours est tenu, à peine d’irrecevabilité, de notifier son recours à l’auteur de la décision et au titulaire de l’autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l’annulation ou à la réformation d’une décision juridictionnelle concernant (…) un permis de construire, d’aménager ou de démolir. (…) / La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt (…) du recours. / La notification du recours à l’auteur de la décision et, s’il y a lieu, au titulaire de l’autorisation est réputée accomplie à la date d’envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception. Cette date est établie par le certificat de dépôt de la lettre recommandée auprès des services postaux “. Le Conseil d’Etat a alors rappelé que cette obligation de notification s’appliquait au recours initial mais également à tout recours ultérieur contre une décision juridictionnelle : « ces dispositions font obligation à l’auteur d’un recours contentieux de notifier une copie du texte intégral de son recours à l’auteur et au bénéficiaire du permis attaqué, de même que, ultérieurement, de son recours contre une décision juridictionnelle rejetant tout ou partie des conclusions tendant à l’annulation de cette décision ». Il a ensuite considéré que, qu’il ressortait des pièces de la procédure que les requérants avaient, dans le délai imparti, expédié à la société pétitionnaire, par lettre recommandée avec accusé de réception, une copie de leur pourvoi contre l’arrêt de la cour administrative d’appel de Lyon à une adresse qui correspondait «  en réalité non à celle de son siège social mais à celle de son avocat devant la cour ». Bien que la société n’ait pas reçu cette notification en raison du caractère erroné de l’adresse, le Conseil d’Etat a jugé la notification régulière dès lors qu’elle avait été faite à l’adresse figurant dans les visas de l’arrêt attaqué. Cette décision est à rapprocher d’une décision rendue par le Conseil d’Etat le 24 septembre 2014 (Conseil d’État, 10ème / 9ème SSR, 24/09/2014, 351689, mentionné dans les tables du Recueil Lebon). Aux termes de cette seconde décision, le Conseil d’Etat a rappelé que « le but [de l’article R.600-1 du code de l’urbanisme] est d’alerter tant l’auteur d’une décision d’urbanisme que son bénéficiaire de l’existence d’un recours contentieux formé contre cette décision, dès son introduction ». En l’espèce, il a annulé le jugement d’une cour administrative d’appel qui avait considéré que le requérant n’avait pas rempli son obligation de notifier la requête d’appel au détendeur en expédiant celle-ci non pas à l’adresse du pétitionnaire mais à l’adresse de l’architecte à qui le pétitionnaire avait donné mandat jusqu’à la notification de la décision définitive de l’administration. Le Conseil d’Etat a considéré dans cette seconde décision que la Cour avait commis une erreur de droit en considérant que la notification n’avait pas été régulière alors qu’il ressortait des pièces du dossier qui lui était soumis que l’adresse qui avait été écrite sur la notification était mentionnée sur le permis litigieux comme étant celle à laquelle la bénéficiaire du permis de construire était domiciliée. En conséquence, il résulte de ces deux décisions que si la notification a été faite par erreur à une mauvaise adresse, la notification est regardée comme régulière sur le fondement de l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme si l’erreur était légitime et figurait sur les documents officiels (tels que le permis litigieux ou l’arrêt qui est attaqué). L’erreur est considérée comme légitime si elle résulte elle-même d’une erreur commise par la personne dont l’acte est attaqué (administration ou juridiction qui a inscrit une adresse erronée dans la décision attaquée). Si cette position du Conseil d’Etat se comprend au regard de la nature de l’erreur commise par l’auteur de la notification, elle nous semble néanmoins ne pas tout à fait correspondre à l’esprit de l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme qui vise, rappelons-le, à « alerter tant l’auteur d’une décision d’urbanisme que son bénéficiaire de l’existence d’un recours contentieux formé contre cette décision, dès son introduction ».

Retrait de permis de construire: le Conseil d’Etat précise enfin le délai de notification

La décision de retrait d’une autorisation d’urbanisme doit être notifiée dans le délai de trois mois prévu par l’article L. 424-5 du code de l’urbanisme: c’est ce qui vient d’être jugé par la Huate juridiction. Il faut saluer une décision récente du Conseil d’Etat statuant (enfin !) sur le délai de notification des décisions de retrait des autorisations d’urbanisme. Dans une décision du 13 février 2012 n°351617 Association société protectrice des animaux de Vannes (CE_13_02_2012_351617_Publié_au_recueil_Lebon), le Conseil d’Etat vient de juger que la légalité d’une décision de retrait d’une autorisation d’urbanisme est conditionnée notamment par sa notification dans le délai de trois mois imparti l’article L. 424-5 du code de l’urbanisme : « Considérant, d’autre part, qu’aux termes du second alinéa de l’article L. 424-5 du code de l’urbanisme : Le permis de construire, d’aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peut être retiré que s’il est illégal et dans le délai de trois mois suivant la date de cette décision ; que, compte tenu de l’objectif de sécurité juridique poursuivi par le législateur, qui ressort des travaux préparatoires de la loi du 13 juillet 2006 dont ces dispositions sont issues, l’autorité compétente ne peut rapporter un permis de construire, d’aménager ou de démolir, tacite ou explicite, que si la décision de retrait est notifiée au bénéficiaire du permis avant l’expiration du délai de trois mois suivant la date à laquelle ce permis a été accordé ; » (Conseil d’État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 13/02/2012, 351617, Publié au recueil Lebon)   Cette décision “SPA de Vannes” constitue un heureux revirement de la jurisprudence antérieure (Conseil d’Etat, Section du contentieux, 21 décembre 2007, “Société BRETIM”, n° 285515),  applicable, nous semble t-il, qu’en matière d’urbanisme. La jurisprudence “Sté BRETIM”, qui prévoit que la date de notification de la décision de retrait n’emportait aucune conséquence sur la légalité de celle-ci, demeure donc applicable dans les autres domaines du droit, lorsqu’une décision créatrice de droit est retirée.   Jusqu’alors, le bénéficiaire pouvait, en toute insécurité, se voir légalement notifier une décision de retrait plusieurs mois après le retrait opéré. L’absence d’obligation de notifier le retrait dans le délai de trois mois permettait indirectement l’administration, et nous avons pu souvent le craindre, à dater le retrait du permis dans le délai légal sans que cela puisse être vérifié ni sanctionné, et à le notifier bien après le délai de trois mois. Concrètement, il faut donc aujourd’hui, pour que le retrait d’un permis de construire soit légal, que le pétitionnaire se le voit notifier dans le délai de trois mois à compter de l’intervention du permis. I l serait souhaitable que le Conseil d’Etat généralise cette obligation à l’ensemble des décisions individuelles créatrices de droit.  

Antenne relais: la preuve de l’opposition du Maire à la déclaration préalable

Par un jugement du 3 novembre 2011 (Société orange France,  TA Amiens1002538 antenne relais), le tribunal administratif d’Amiens  a annulé un arrêté municipal  en date du 21 juillet 2010 ordonnant  à  la société Orange France d’interrompre les travaux de construction de trois antennes de téléphonie mobile sur une parcelle de la commune, travaux  débutés à la suite d’une décision de non-opposition tacite aux travaux. Ce faisant, le tribunal administratif rappelle « qu’en l’absence de notification d’une décision d’opposition à une déclaration de travaux dans le délai d’instruction, qui court à compter de la réception en mairie d’un dossier complet, l’auteur de la déclaration bénéficie d’une décision implicite de non-opposition ». Bien que le maire de la commune se soit manifesté en opposition à cette demande dans le délai d’un mois (art. R 423-38 du code de l’urbanisme),  aucune pièce du dossier n’a véritablement permis d’attester la réception de cette contestation auprès de la société Orange France. Conséquemment, en l’absence de situation d’urgence, le maire ne pouvait user de ses prérogatives de police administrative pour ordonner l’interruption des travaux sans respecter la procédure contradictoire prévue par la loi n°79-587 du 11 juillet 1979 ! Patricia Demaye-Simoni Maître de conférences en droit public

Antenne relais: la preuve de l’opposition du Maire à la déclaration préalable

Par un jugement du 3 novembre 2011 (Société orange France, aff. n° 1002538), le tribunal administratif d’Amiens a annulé un arrêté municipal en date du 21 juillet 2010 ordonnant à la société Orange France d’interrompre les travaux de construction de trois antennes de téléphonie mobile sur une parcelle de la commune, travaux débutés à la suite d’une décision de non-opposition tacite aux travaux. Ce faisant, le tribunal administratif rappelle « qu’en l’absence de notification d’une décision d’opposition à une déclaration de travaux dans le délai d’instruction, qui court à compter de la réception en mairie d’un dossier complet, l’auteur de la déclaration bénéficie d’une décision implicite de non-opposition ». Bien que le maire de la commune se soit manifesté en opposition à cette demande dans le délai d’un mois (art. R 423-38 du code de l’urbanisme), aucune pièce du dossier n’a véritablement permis d’attester la réception de cette contestation auprès de la société Orange France. Conséquemment, en l’absence de situation d’urgence, le maire ne pouvait user de ses prérogatives de police administrative pour ordonner l’interruption des travaux sans respecter la procédure contradictoire prévue par la loi n°79-587 du 11 juillet 1979 ! Patricia Demaye-Simoni Maître de conférences en droit public   Le jugement est téléchargeable ci-dessous. Jugement TA Amiens – Antennes relais