Certificats d’économies d’énergie (CEE) : une révision des fiches en discussion pour la préparation du vingt-huitième arrêté en la matière

Par Maître Graziella DODE, Avocat – GREEN LAW AVOCATS (graziella.dode@green-law-avocat.fr) Les fiches d’opérations standardisées sont au cœur du dispositif CEE, créé par la Loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique (dite « Loi POPE »). Pour rappel, ce dispositif repose sur une obligation de réalisation d’économies d’énergie imposée par les pouvoirs publics aux fournisseurs d’énergie dont les ventes annuelles sont supérieures à certains seuils. En réalité, trois types d’actions peuvent donner lieu à la délivrance de certificats d’économies d’énergie : – La réalisation d’opérations standardisées ; – La valorisation d’opérations spécifiques ; – Et le financement d’un programme d’accompagnement. Au 30 novembre 2015, on a relevé que sur les 907,4 TWh cumac de CEE délivrés, 93 % l’ont été pour des opérations standardisées. Ces opérations sont répertoriées sous la forme de fiches, qui permettent de calculer rapidement et de façon forfaitaire le nombre de kWh cumac qui résultent de la mise en œuvre d’une opération standardisée. Elles se répartissent en six secteurs : bâtiment résidentiel, bâtiment tertiaire, industrie, réseaux (chaud/froid, éclairage extérieur et électricité), transport et agriculture. Ces fiches ont un caractère réglementaire : en effet, elles font l’objet d’un arrêté ministériel du ministre chargé de l’Energie. Précisément, le vingt-huitième arrêté en la matière est en préparation. L’Association Technique Energie Environnement (ATEE) est chargée de mettre en œuvre des groupes de travail sectoriels de professionnels. En résumé, ils sont chargés d’identifier les opérations d’économies d’énergie qui pourraient être standardisées, de déterminer les critères techniques et administratifs nécessaires et les économies d’énergie engendrées pour une opération donnée et d’élaborer les projets de fiches. Ces projets sont ensuite soumis à l’expertise de l’Agence de l’Environnement et de la Maitrise de l’Energie (ADEME). Ils sont, enfin, approuvés par la Direction générale de l’Energie et du Climat (DGEC) avant d’être arrêtées par le ministre chargé de l’Energie, et publiées au Journal officiel de la République Française. L’actuel catalogue des fiches d’opérations standardisées en vigueur résulte d’un arrêté du 22 décembre 2014 et publié au Journal Officiel le 24 décembre 2014. L’ATEE a récemment proposé à la DGEC la révision de six fiches et la création de 14 nouvelles fiches pour le prochain arrêté en la matière. Nous avions déjà eu l’occasion de faire un point d’étape détaillé sur le cadre juridique des CEE. Vous pourrez retrouver cet article ici. Le dispositif des CEE est ainsi en perpétuelle évolution, et les professionnels et particuliers des secteurs concernés doivent assurer une veille régulière afin de pouvoir adapter leurs pratiques.

Certificats d’économies d’énergie (CEE) : de nouvelles modalités concernant le fioul domestique (décret n°2018-401 du 29 mai 2018)

Par Maître Graziella DODE, Avocat – GREEN LAW AVOCATS (graziella.dode@green-law-avocat.fr) Créé par la Loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique (dite « Loi POPE »), le dispositif CEE poursuit son insertion dans le paysage juridique français. Pour rappel, ce dispositif repose sur une obligation de réalisation d’économies d’énergie imposée par les pouvoirs publics aux fournisseurs d’énergie dont les ventes annuelles sont supérieures à certains seuils. Après deux premières périodes d’obligations marquées par un grand succès – dépassement des objectifs fixés – et une troisième période en demi-teinte, en raison d’une hausse sensible du nombre de fraudes aux CEE et des enquêtes révélant la mauvaise connaissance du dispositif par les consommateurs, la quatrième période d’obligations du dispositif CEE est en vigueur depuis le 1er janvier 2018 (voir notre article sur ce sujet ici). Elle couvrira les années 2018 à 2020. Afin de préparer cette nouvelle période, un important travail de concertation avec les acteurs du secteur énergétique a été mené de septembre 2016 à mi-2017. Récemment, un décret est venu préciser les modalités de remontée de l’obligation d’économies d’énergie des vendeurs aux metteurs à la consommation de fioul domestique. Il s’agit en effet de l’une des mesures phares de cette quatrième période, qui répond à une volonté d’une partie importante de la filière fioul. Le Décret n° 2018-401 du 29 mai 2018 relatif aux certificats d’économies d’énergie et aux obligations d’économies d’énergie auxquelles sont soumises les personnes mettant à la consommation du fioul domestique, pris en application de la Loi n° 2017-1839 du 30 décembre 2017 mettant fin à la recherche ainsi qu’à l’exploitation des hydrocarbures et portant diverses dispositions relatives à l’énergie et à l’environnement, précise ainsi que : Le transfert d’obligation d’économies d’énergie des vendeurs aux metteurs sur le marché de fioul domestique prend effet à compter du 1er janvier 2019 ; Les délégataires de sociétés relevées de leurs obligations d’économies d’énergie perdront leur statut de délégataire à compter de cette même date ; Pour les vendeurs de fioul qui ne seront plus obligés CEE à compter du 1er janvier 2019 et pour leurs délégataires, il demeure possible de déposer des dossiers de demande de CEE jusqu’au 31 décembre 2018. Un arrêté sera pris avant le 1er juin 2019 pour fixer, pour l’année 2018, le volume des obligations d’économies d’énergie pour les vendeurs de fioul domestique et leurs délégataires ; À compter de 2019, le seuil de franchise servant au calcul de l’obligation d’économies d’énergie pour le fioul domestique et celui pour les carburants autres que le gaz de pétrole liquéfié seront alignés à 1.000 mètres cubes ; L’obligation d’économies d’énergie est diminuée pour le fioul domestique et les carburants autres que le gaz de pétrole liquéfié ; Par ailleurs, le décret prévoit l’introduction, à partir du 1er juillet 2018, du gazole B10 – indice d’identification 22 bis – dans la liste des carburants pour automobiles pris en compte pour la fixation des obligations d’économies d’énergie. Voici donc une évolution supplémentaire du cadre juridique des CEE, dont le cabinet assure une veille serrée.

Le cadre juridique des Certificats d’Economie d’Energie (CEE) évolue !

Par Maître Graziella Dode Mis en place il y a 12 ans, le dispositif des Certificats d’Economie d’Energie (CEE) repose sur une obligation de réalisation d’économies d’énergie imposée par les pouvoirs publics aux vendeurs d’énergie, lesquels doivent promouvoir l’efficacité énergétique auprès des consommateurs d’énergie (ménages, collectivités territoriales ou professionnels). Le 1er janvier 2018, le dispositif est entré dans sa 4ème période d’obligation pour une durée de 3 ans. Rappelons tout d’abord le fonctionnement du dispositif des CEE (I), avant d’évoquer ses récentes évolutions (II). Le fonctionnement du dispositif des CEE  La loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique a créé les Certificatifs d’Economie d’Energie (CEE). Le dispositif, entré en vigueur en janvier 2006, est destiné à inciter à la réalisation d’économies d’énergie, principalement dans les secteurs du bâtiment, de l’industrie, des transports et des réseaux de chaleur. Il est repris dans le Code de l’énergie aux articles L. 221-1 et suivants, et R. 221-1 et suivants. Les personnes soumises à l’obligation d’économies d’énergies, visées par la loi Le principe des certificats repose sur une obligation de réalisation d’économies d’énergie imposée par les pouvoirs publics, sur une période donnée, à certains vendeurs d’énergie appelés “obligés”. L’article L. 221-1 du Code de l’énergie dispose ainsi : « Sont soumises à des obligations d’économies d’énergie : 1° Les personnes morales qui mettent à la consommation des carburants automobiles et dont les ventes annuelles sont supérieures à un seuil défini par décret en Conseil d’Etat. 2° Les personnes qui vendent de l’électricité, du gaz, du fioul domestique, de la chaleur ou du froid aux consommateurs finals et dont les ventes annuelles sont supérieures à un seuil défini par décret en Conseil d’Etat. Les ventes annuelles de fioul domestique des personnes morales exclues par le seuil fixé en application du 2° doivent représenter moins de 5 % du marché. Les obligations des personnes morales dont les ventes annuelles de fioul domestique dépassent le seuil fixé en application du 2° ne portent que sur les ventes supérieures à ce seuil. Les personnes mentionnées aux 1° et 2° peuvent se libérer de ces obligations soit en réalisant, directement ou indirectement, des économies d’énergie, soit en acquérant des certificats d’économies d’énergie. Une part de ces économies d’énergie doit être réalisée au bénéfice des ménages en situation de précarité énergétique. La définition des montants d’économies d’énergie à réaliser prend en compte les certificats d’économies d’énergie obtenus par la contribution à des programmes mentionnés au deuxième alinéa de l’article L. 221-7. » L’article L. 221-2 du même code précise : « A l’issue de la période considérée, les personnes mentionnées à l’article L. 221-1 justifient de l’accomplissement de leurs obligations en produisant des certificats d’économies d’énergie obtenus ou acquis dans les conditions prévues aux articles L. 221-7, L. 221-8 et L. 221-9. Afin de se libérer de leurs obligations, les personnes mentionnées aux 1° et 2° de l’article L. 221-1 sont autorisées à se regrouper dans une structure pour mettre en place des actions collectives visant à la réalisation d’économies d’énergie ou pour acquérir des certificats d’économies d’énergie. » A défaut d’être obtenus par un « obligé », les CEE peuvent être attribués à des personnes dites « éligibles » définies à l’article L. 221-7 du Code de l’énergie : Toute personne visée à l’article L. 221-1 (fournisseurs d’énergies notamment) ; Toute collectivité publique ; L’Agence nationale de l’habitat ; Tout organisme visé à l’article L. 411-2 du Code de la construction et de l’habitation (organismes d’habitation à loyer modéré) ; Toute société d’économie mixte exerçant une activité de construction ou de gestion de logements sociaux. Les personnes soumises à l’obligation d’économies d’énergies du fait de rapports contractuels Toute personne morale non visée par les dispositions précitées ne peut se voir attribuer de CEE, sauf si : Elle en achète aux obligés, aux éligibles ou à une personne morale en ayant acquis auprès d’elles. Les CEE sont en effet juridiquement qualifiés de biens meubles négociables et répondent ainsi à la logique de marché de l’offre de la demande, tel que le rappelle l’article L. 221-8 du Code de l’énergie. Ou si elle conclut un contrat de délégation avec des obligés. L’article R. 221-5 du Code de l’énergie envisage ainsi la possibilité de devenir délégataire de CEE : « Une personne soumise à une obligation d’économies d’énergie en application de l’article R. 221-3 peut, pour l’obligation de chacune des périodes définies à l’article R. 221-4, ainsi que pour celle définie à l’article R. 221-4-1 : 1° Déléguer la totalité de son obligation d’économies d’énergie de la période à un tiers ; 2° Déléguer une partie de son obligation d’économies d’énergie de la période à un ou plusieurs tiers. Dans ce cas, le volume de chaque délégation partielle ne peut pas être inférieur à 1 milliard de kWh cumac. Sous réserve des dispositions de l’article R. 221-7, une personne ayant délégué la totalité de ses obligations individuelles n’est plus considérée comme une personne soumise à une obligation d’économies d’énergie. » Ce dernier alinéa nous invite à souligner le fait qu’« en cas de défaillance du délégataire, les obligations individuelles définies en application des articles R. 221-4 et R. 221-4-1 sont remises à la charge de chaque délégant. Lorsqu’il est mis fin par les parties au contrat de délégation, l’obligation individuelle revient au délégant et le délégataire n’est plus considéré comme une personne soumise à une obligation d’économies d’énergie pour cette obligation individuelle. Le ministre chargé de l’énergie est informé par les parties de la fin du contrat de délégation d’obligation dans un délai d’un mois » (article R. 221-7 du Code de l’énergie). L’article R. 221-5 du Code de l’énergie ajoute que le délégataire doit justifier : Ne pas faire partie des personnes mentionnées au 2° de l’article 45 de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics ; Pour la période d’obligation concernée, d’un volume d’au moins 150 millions de kWh cumac d’obligations reçues de personnes soumises à une obligation d’économies d’énergie….

Défrichement et PC tacite: précisions sur le déféré préfectoral et contrôle du juge sur les autorisations (CE, 6 mai 2015)

Par Marie-Coline Giorno (Green Law Avocat) Aux termes d’un arrêt du 6 mai dernier, le Conseil d’Etat a précisé les conditions du déféré préfectoral en présence d’un permis de construire tacite. Il a également éclairci le degré de contrôle du juge concernant la qualification de terrains pouvant faire l’objet d’une autorisation de défrichement. Enfin, il a rappelé à plusieurs reprises que les juges de fond étaient souverains dans leur appréciation des faits et que son propre rôle se limitait à vérifier qu’ils ne les avaient pas dénaturés. (CE, 9e et 10e sous-sect., 6 mai 2015, n°366004, mentionné dans les tables du recueil Lebon) Les faits étaient les suivants. La propriétaire de plusieurs parcelles a déposé une demande de permis de construire en vue de l’édification d’une villa. En l’absence de réponse de la mairie, la pétitionnaire a demandé au maire de lui délivrer un certificat attestant qu’elle était bénéficiaire d’un permis de construire tacite. Ce certificat, prévu à l’article R. 424-13 du code de l’urbanisme, lui a été délivré le 22 décembre 2009 et a été transmis au préfet des Alpes-Maritimes le 6 janvier 2010. Par un courrier du 23 février 2010, ce dernier a demandé au maire de “prendre une décision refusant ce permis de construire ” au motif que la demande de la pétitionnaire aurait dû être précédée d’une demande d’autorisation de défrichement en application de l’article R. 431-19 du code de l’urbanisme. Le maire a rejeté cette demande par une décision du 22 mars 2010. Le préfet a alors déféré la décision de permis de construire tacite au tribunal administratif. Le tribunal a annulé le permis de construire litigieux et ce jugement a été confirmé en appel. La pétitionnaire a alors formé un pourvoi en cassation devant le Conseil d’Etat. Dans un premier temps, le Conseil d’Etat a examiné la régularité du jugement attaqué. En l’espèce, la requérante critiquait l’absence de réouverture de l’instruction après la clôture malgré la production d’un mémoire du Préfet. Après avoir rappelé les conditions dans lesquelles des mémoires produits après la clôture de l’instruction rouvrent ou non l’instruction, le Conseil d’Etat a estimé qu’en l’espèce le mémoire produit par le préfet après la clôture de l’instruction ne contenait aucun élément susceptible d’exercer une influence sur le jugement de l’affaire. Il en déduit que la cour n’a pas entaché la procédure d’irrégularité en ne rouvrant pas l’instruction. Le Conseil d’Etat rappelle ici sa position classique concernant la réouverture de l’instruction et sa position ne comporte aucune nouveauté. Dans un second temps, le Conseil d’Etat s’est prononcé sur le bien-fondé du jugement. Sa décision est alors particulièrement intéressante. En premier lieu, le Conseil d’Etat se prononce sur la portée du recours gracieux du préfet. Il estime que ce courrier valait demande de retrait et que, par suite, les conclusions présentées par le Préfet devant le tribunal administratif tendant à l’annulation de ce permis de construire tacite n’étaient pas irrecevables dans la mesure où elles étaient en rapport avec l’objet du recours gracieux. Le Conseil d’Etat vérifie ici que la Cour n’a pas dénaturé les faits qui lui étaient soumis. Il se livre donc à un contrôle de la dénaturation, laissant aux juges du fond le pouvoir d’apprécier souverainement les faits qui leur ont été soumis. Il s’agit d’un contrôle du juge de cassation habituel. En deuxième lieu, le Conseil d’Etat estime que bien qu’il résulte de l’article L. 424-8 du code de l’urbanisme qu’un permis de construire tacite est exécutoire dès qu’il est acquis, ces dispositions ne font pas obstacle à ce que le Préfet défère un permis de construire tacite au tribunal dans les deux mois de sa transmission par la commune. En matière de permis de construire tacite, l’obligation de transmission est satisfaite lorsque la commune a transmis au préfet l’entier dossier de demande, en application de l’article R. 423-7 du code de l’urbanisme. Par suite, le délai du déféré préfectoral court alors à compter de la date à laquelle le permis est acquis ou, dans l’hypothèse où la commune ne satisfait à l’obligation de transmission que postérieurement à cette date, à compter de la date de cette transmission. En l’espèce, le Conseil d’Etat relève qu’il ne ressortait pas des pièces du dossier que la commune aurait transmis la demande de permis au Préfet. Par suite, le délai ouvert au Préfet contre le permis de construire tacite en litige a débuté à compter de la date à laquelle le certificat prévu à l’article R. 424-13 du code de l’urbanisme lui avait été transmis. En troisième lieu, le Conseil d’Etat considère que c’est à bon droit que la Cour a jugé que les dispositions de l’article L. 424-5 du code de l’urbanisme, qui limitent le délai pendant lequel une autorisation de construire peut être retirée, spontanément ou à la demande d’un tiers, par l’autorité qui l’a délivrée, n’ont ni pour objet ni pour effet de faire obstacle à ce que le représentant de l’Etat forme un recours gracieux jusqu’à l’expiration du délai dont il dispose pour déférer un tel acte au tribunal administratif, ni à ce que ce dernier délai soit interrompu par le recours gracieux. Il en résulte qu’un recours gracieux du Préfet peut être recevable alors même que le permis de construire tacite ne peut plus être retiré. Le Conseil d’Etat réitère une solution qu’il avait déjà adoptée en 2011 sur la recevabilité du recours gracieux du préfet (CE, 9e et 10e  sous-sections réunies, 5 mai 2011, n°336893, Publié au recueil Lebon). En quatrième lieu, la requérante faisait état de l’inconstitutionnalité de dispositions législatives alors que le Conseil d’Etat statuant au contentieux n’avait pas renvoyé au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité posée à cet effet par la requérante. Le moyen a donc été écarté. En cinquième lieu, le Conseil d’Etat précise que les juges du font se livrent à une appréciation souveraine des faits pour déterminer si les parcelles dont la requérante est propriétaire doivent être regardées comme étant en état boisé ou à destination forestière au sens…