AUTORISATION ENVIRONNEMENTALE : CONFIRMATION DE LA POSSIBILITÉ DE RÉGULARISER DEUX VICES

Par Maître David DEHARBE (Green Law Avocats) Par une ordonnance du 15 novembre 2019, le tribunal administratif de Montreuil (TA Montreuil, 15 nov. 2019, n° 1902037) a considéré que l’article 6 de l’ordonnance n° 2016-1058 du 3 août 2016 relative à la modification des règles applicables à l’évaluation environnementale des projets, plans et programmes (JORF, n°0181, 5 août 2016, texte n° 10) ne dispense en aucun cas de l’étude d’impact prévu par l’article R. 122-5 du code de l’environnement, les demandes d’autorisation unique qui concernent les infrastructures ayant auparavant fait l’objet d’une déclaration d’utilité publique, avant le 16 mai 2017. La juridiction motive ainsi sa position : « l’article 6 de l’ordonnance n°2016-1058 relative à la modification des règles applicables à l’évaluation environnementale des projets, plans et programmes, dans sa version issue de l’article 65 de la loi n°2017-257 du 28 février 2017, dispose que cette ordonnance s’applique «aux projets faisant l’objet d’une évaluation environnementale systématique pour lesquels la première demande d’autorisation, notamment celle qui conduit à une déclaration d’utilité publique, est déposée à compter du 16 mai 2017». Il ne ressort toutefois ni de la lettre de la loi, qui utilise l’adverbe notamment, ni de l’intention du législateur, qui, ainsi qu’il résulte de l’exposé sommaire de l’amendement CL175 le 6 décembre 2016, a seulement entendu codifier la jurisprudence du Conseil d’Etat, que cette disposition aurait pour objet de faire obstacle à l’application des dispositions de l’article R. 122-5 du code de l’environnement, issues du décret n°2016-1110 du 11 août 2016 transposant la directive 2011/92/UE, aux demandes d’autorisation environnementale unique concernant des infrastructures ayant fait l’objet d’une déclaration d’utilité publique avant le 16 mai 2017 ». Effectivement  dans l’hypothèse d’un projet nécessitant la délivrance de plusieurs autorisations, ce qui est le cas du Grand Paris express, la jurisprudence considère que la première demande d’autorisation de chacun de ces projets peut être celle qui conduit à la déclaration d’utilité publique : cf. (CE, 2 juin 2003, UFC «Que choisir – Côte d’or», n° 243215 et 15 avril 2016, Fédération nationale des associations d’usagers des transports, n° 387475). Pour garantir au Grand Paris express le bénéficie des assouplissements introduits par l’ordonnance, l’amendement précité proposait effectivement de transposer cette solution jurisprudentielle en matière d’évaluation environnementale (Rapport n° 4293 de première lecture de MM. Jean-Yves Le Bouillonnec et Patrick Mennucci, fait au nom de la commission des lois de l’Assemblée nationale, p. 266.) On relèvera encore que pour se déclarer compétente pour connaître de cette affaire le Tribunal administratif a du considérer qu’elle relevait pas de la compétence d’attribution à la CAA de Paris des contentieux afférents aux infrastructures « nécessaires » aux jeux olympique Olympiques et Paralympiques de 2024 et issue de l’article R. 311-2  du Code de Justice administrative. Pour le Tribunal ce qui est nécessaire doit être indispensable aux jeux, même si l’affectation de l’infrastructure n’y est pas exclusive. Mais cette décision avant dire droit doit surtout retenir l’attention pour l’usage que fait le juge de l’autorisation environnementale de ses pouvoirs d’administrateur. En l’espèce, plusieurs associations et un collectif (les  associations  France Nature Environnement  Ile-de-France,  le  Collectif  pour  le  Triangle  de Gonesse,  les  Amis  de  la  Confédération  paysanne,  les  Amis  de  la  terre  du  Val  d’Oise,  le Mouvement national de lutte pour l’environnement, Val d’Oise environnement, «des Terres pas d’hypers!»,  Environnement  93,  le  Réseau  associations  pour  le  maintien  d’une  agriculture paysanne en Ile-de-France et Vivre mieux ensemble à Aulnay-sous-Bois), demandaient au tribunal administratif de Montreuil d’annuler l’arrêté inter-préfectoral des préfets de la Seine-Saint-Denis, de la Seine-et-Marne et du Val d’Oise en date du 24 octobre 2018 autorisant la création et l’exploitation de la  ligne  17  Nord  du  réseau  de  transports  du  Grand  Paris Express  entre  le  Bourget  et  le Mesnil-Amelot. Le projet d’une grande envergure impliquait la perturbation ou la destruction de plusieurs espèces protégées, des modifications du mode d’écoulement des eaux, mais aussi le déchiffrement de zones boisées ce qui explique que l’autorisation environnementale était sollicitée à la fois au titre d’ICPE, de IOTA, d’un défrichement et d’une dérogation espèce protégée. Or le dossier  a suscité des avis critique de l’autorité environnementale  et défavorable du Conseil national de la nature. Les associations et le collectif requérants estimaient donc l’étude d’impact comme insuffisante au regard des impacts environnementaux et l’arrêté comme entaché d’une erreur manifeste d’appréciation quant aux prescriptions particulières relatives à la dérogation au titre des espèces et habitats protégés. Rappelant la jurisprudence OCREAL, le jugement précise d’emblée que « les inexactitudes, omissions ou insuffisances d’une étude d’impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d’entraîner l’illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l’information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l’autorité administrative » (Conseil d’État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 14/10/2011, 323257). Or s’agissant de s’agissant des prélèvements et rejets des eaux d’exhaure, le Tribunal que les omissions pour être démontrées n’ont pas eu d’effet sur la décision prise. Certes « les requérantes font valoir que les précisions chiffrées relatives aux volumes rejetés en nappe, qui correspondent à moins de 3% du total des prélèvements, sont contradictoires avec la mention selon laquelle le principe de réinjection totale ou partielle vers la nappe est retenu en qualité de solution prioritaire, partout où cette solution s’avèrera réalisable » ; mais cette circonstance n’est pas, eu égard notamment au caractère prospectif de ces termes et à la précision des mentions chiffrées, « de nature à avoir nui à l’information complète de la population ou à avoir exercé une influence sur la décision de l’autorité administrative ». Au contraire, le moyen fait mouche s’agissant de l’analyse du cumul des incidences avec d’autres projets connus : « il résulte de l’instruction que le projet de la ZAC du Triangle de Gonesse relatif à l’urbanisation de la zone située à l’est du centre-ville de Gonesse où doit s’implanter la gare du Triangle de Gonesse, dont il est constant qu’elle a fait l’objet d’une évaluation environnementale et d’un avis de l’autorité…

Autorisation environnementale : court-circuitage des instances consultatives ?

Par Maître Lucas DERMENGHEM, Green Law Avocats   Le Gouvernement s’apprête à faire évoluer, une fois de plus, le régime juridique de l’autorisation environnementale, dispositif pourtant fraîchement entériné en droit français par l’ordonnance n°2017-80 du 26 janvier 2017 et le décret n°2017-81 du 26 janvier 2017. Plusieurs modifications du régime ont déjà été effectuées en court laps de temps, par le décret n°2018-797 du 18 septembre 2018 (relatif au dossier de demande d’autorisation), le décret n°2018-1054 du 29 novembre 2018 ou encore par le décret n°2018-1217 du 24 décembre 2018 mettant en application des dispositions de la loi pour un Etat au service d’une société de confiance (ESSOC). Le 16 avril dernier, un projet de décret a été publié sur le site du Ministère de la Transition écologique dédié aux consultations publiques. Ce projet a vocation à apporter des modifications sur quatre axes différents : la dématérialisation de la procédure, la possibilité de « mieux proportionner les consultations », le lancement plus rapide l’enquête publique et la fluidification de la fin de la procédure. Ce n’est qu’à l’approche de la fin de la consultation en ligne, le 6 mai dernier, que le projet de texte a suscité de nombreuses réactions alors qu’il était passé jusqu’ici relativement inaperçu. Les principales critiques portent sur la modification des modalités de consultation des différentes instances pouvant être associées lors de la phase d’examen de l’autorisation environnementale. L’objectif affiché du Gouvernement étant sur ce point de mettre fin aux consultations systématiques, qui auraient pour effet « d’engorger les services instructeurs et les organismes consultés ». Ainsi, en premier lieu, s’agissant des demandes de dérogation à l’interdiction de porter atteinte aux espèces protégées prévue par l’article L. 411-1 du code de l’environnement, le texte prévoit de supprimer la consultation systématique du Conseil national de la protection de la nature (CNPN), et ce au profit du conseil scientifique régional du patrimoine naturel (CSRPN). Ce n’est que lorsque la demande de dérogation portera sur l’une des 37 espèces de vertébrés répertoriées par l’arrêté ministériel du 9 juillet 1999 que le CNPN sera consulté, ou sur l’une des espèces animales et végétales listées par…un futur arrêté ministériel dont l’édiction est annoncée par le décret, sans précisions sur le calendrier. Si les avis du CNPN ne sont que consultatifs, il s’agit cependant d’une modification majeure de la procédure actuelle qui suscite la critique, notamment de la part des associations de protection de l’environnement. En particulier, l’accent est mis sur la charge de travail déjà importante des CSRPN alors que ces instances manquent de moyens, ainsi que sur leur composition. De telle sorte qu’il existe un doute sur le fait que cette mesure œuvre véritablement en faveur d’une réduction des délais d’instruction lors de la phase d’examen de l’autorisation environnementale et d’une simplification administrative. La crainte d’un défaut d’indépendance à l’échelle locale est également mise en avant, les membres du CSRPN étant nommées par le Préfet de Région alors que c’est le ministre chargé de la protection de la nature qui nomme les membres du CNPN. Cette annonce « phare » du projet de décret n’a donc pas fini d’être commentée, alors que le 6 mai dernier, date de la fin de la consultation publique du texte, les scientifiques de l’IPBES rendaient leur rapport sur l’état de la biodiversité à l’échelle mondial ; c’est un bien mauvais timing, même pour des mesures de simplifications sans doute fondées. En second lieu, le décret réduit sensiblement le champ des consultations dans le domaine de l’eau. Ainsi, il est prévu que si la demande d’autorisation environnementale porte sur un projet relevant d’une autorisation « loi sur l’eau », seule l’avis de la commission locale de l’eau sera requis dans le cas où le projet est situé dans le périmètre d’un schéma d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE). Sont en revanche supprimées les consultations de la personne publique gestionnaire du domaine public, de l’établissement public territorial de bassin ou encore de l’organisme gestion collective des prélèvements d’eau pour l’irrigation (modification de l’article R. 181-22 du code de l’environnement). En troisième lieu, il importe également d’évoquer la suppression, par le projet de décret, de la consultation de l’Office National des Forêts (ONF) s’agissant d’un projet de défrichement d’un bois relevant du régime forestier (abrogation de l’article R. 181-31 du code de l’environnement). En quatrième et dernier lieu, d’autres instances risquent de voir leurs prérogatives nettement diminuées lors de la phase d’examen de l’autorisation. C’est ainsi que les Agences Régionales de Santé (ARS) ne seront consultées qu’en cas de projet soumis à évaluation environnementale ou lorsque le préfet de département l’estime nécessaire (modification de l’article R. 181-18 du code de l’environnement). Autre exemple, il ne sera plus nécessaire de consulter l’Institut national de l’origine et de la qualité lorsqu’un projet d’installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE) devra être implanté dans une commune comportant une aire de production d’un produit d’appellation d’origine (abrogation de l’article R. 181-23 du code de l’environnement). Si elles constituent à notre sens la principale nouveauté du projet de décret, les modifications affectant les différentes consultations requises lors de la phase d’examen de l’autorisation environnementale sont également accompagnées d’autres mesures. Tout d’abord, le Gouvernement entend passer une vitesse supérieure dans la dématérialisation des procédures : il est ainsi prévu de permettre le dépôt des demandes d’autorisation environnementale de manière électronique, sur le site service-public.gouv.fr. L’accusé de réception du dossier serait également délivré de manière électronique. A l’horizon 2023, cette téléprocédure deviendra obligatoire (modification des articles R. 181-12 et R. 181-13 du code de l’environnement). Par ailleurs, le décret prévoit une accélération de la phase de décision avec possibilité de ne pas engager à nouveau une procédure contradictoire lorsque celle-ci a été mise en œuvre dans le cadre du dernier alinéa de l’article R. 181-49 du code de l’environnement. L’objectif est de permettre aux pétitionnaires satisfaits du projet d’arrêté préfectoral issu du CODERST / de la CNDPS de voir l’autorisation délivrée plus rapidement (modification des articles R. 181-40 et R. 181-45 du code de l’environnement). Enfin, le texte adapte la procédure d’instruction…

Veille en droit de l’environnement industriel : textes en consultation publique au 6 mai 2019

Par David DEHARBE. Désormais Green Law Avocats vous convie à un nouveau rendez-vous : sa veille réglementaire hebdomadaire de droit de l’environnement industriel. Cette veille couvre les textes réglementaires, législatifs et européens dans les domaines de l’autorisation environnementale (rubrique 1) et des polices de l’eau (Rubrique n°2), des ICPE (Rubrique n°3), des déchets et des sites et sols pollués (Rubrique n°4) et droit des risques technologiques et naturels (Rubrique n°5). On prendra grand soin de distinguer les textes en consultation publiques en vertu du code de l’environnement, des textes publiés. La veille du vendredi 14H00 sera consacrée aux textes en consultation publiques, celle du vendredi 17h00 aux textes publiés. Il convient d’insister sur le fait que nous sommes en présence avec cet article de projets de textes et non de textes en vigueur. SÉLECTION DE TEXTES EN CONSULTATION AU 6 MAI 2019 AUTORISATION ENVIRONNEMENTALE Décret relatif à la simplification de la procédure d’autorisation environnementale – Consultation terminée bilan téléchargeable ici – Du 16/04/2019 au 06/05/2019 – 2371 commentaires Ce projet (téléchargeable ici) suscite une grande hostilité avec pas moins de 2371 commentaires. En pratique pourtant il est intéressant et on peut se demander pourquoi cette réforme n’a pas d’emblée inspiré le décret procédure de l’autorisation environnementale. Il s’agit pour l’essentiel de dématérialiser (à termes de façon obligatoire) le dépôt du dossier initial et de son accusé de réception. Surtout, le décret cherche accélérer la mise à l’enquête publique et à alléger les consultations en les spécialisant. Le projet de décret, qui a été soumis au Conseil supérieur de la prévention des risques technologiques (CSPRT) du 26 mars 2019 qui doit faire l’objet d’autres consultations … affaire à suivre. POLICES DE L’EAU Modification de la nomenclature des installations, ouvrages, travaux et activités (IOTA) soumis à la loi sur l’eau- Consultation du 03/05/2019 au 26/05/2019 (lien Ministère) Dans le cadre d’une démarche de simplification administrative des procédures, une modification de la nomenclature des installations, ouvrages, travaux ou activités (IOTA) soumis à autorisation ou à déclaration en application des articles L. 214-1 à L. 214-6 du code l’environnement (dite « loi sur l’eau ») est soumise à consultation. Il en résulte plusieurs modifications de rubriques, de seuils par deux projets de décret mais aussi de trois projets de textes ministériels : – décret en Conseil d’État modifiant la nomenclature des installations, ouvrages, travaux et activités visés à l’article L. 214-1 du code de l’environnement et certaines dispositions du code de l’environnement et du code général des collectivités territoriales ; – décret simple relatif à la composition du dossier d’autorisation environnementale prévue à l’article L. 181-1 du code de l’environnement en matière d’assainissement ; – arrêté modifiant l’arrêté du 9 août 2006 relatif aux niveaux à prendre en compte lors d’une analyse de rejets dans les eaux de surface ou de sédiments marins, estuariens ou extraits de cours d’eau ou canaux relevant respectivement des rubriques 2.2.3.0, 3.2.1.0 et 4.1.3.0 de la nomenclature annexée à l’article R. 214-1 du code de l’environnement ; – arrêté définissant les travaux de restauration des fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques relevant de la rubrique 3.3.5.0. de la nomenclature annexée à l’article R. 214 1 du code de l’environnement ; – arrêté modifiant l’arrêté du 21 juillet 2015 modifié relatif aux systèmes d’assainissement collectif et aux installations d’assainissement non collectif, à l’exception des installations d’assainissement non collectif recevant une charge brute de pollution organique inférieure ou égale à 1,2 kg/j de DBO5 ; – arrêté modifiant l’arrêté du 8 janvier 1998 fixant les prescriptions techniques applicables aux épandages de boues sur les sols agricoles pris en application du décret n° 97-1133 du 8 décembre 1997 relatif à l’épandage des boues issues du traitement des eaux usées. Projet d’arrêté fixant la liste des amphibiens et des reptiles représentés dans le département de la Martinique protégés sur l’ensemble du territoire national et les modalités de leur protection – Attention J-2 !!!!– Consultation du 17/04/2019 au 12/05/2019 (lien Ministère) Dans les départements et collectivités d’Outre-mer, des travaux sont en cours pour actualiser le dispositif législatif de protection des espèces animales et végétales. Pour ce qui concerne les Antilles françaises, les arrêtés ministériels fixant la liste des reptiles et amphibiens protégés datent du 17 février 1989 L’arrêté soumis à consultation vise à protéger 14 espèces (12 reptiles, 2 amphibiens). Par rapport à l’arrêté de 1989, 4 espèces sont nouvellement protégées, 4 espèces absentes ou introduites sont retirées. POLICES DES ICPE Décret modifiant la nomenclature des installations classées pour la protection de l’environnement – Consultation du 30/04/2019 au 22/05/2019 (lien Ministère) Ce décret modifie le libellé ou le champ de certaines activités listées dans la nomenclature des installations classée. Il permet plus particulièrement : Une clarification du libellé de rubriques apportant plus de lisibilité et permettant de mieux préciser le classement des rubriques 1413 (installations de remplissage de réservoirs de gaz sous pression), 1414 (installations de remplissage de gaz inflammables liquéfiés), 2931 (ateliers d’essais sur banc de moteurs à explosion), 2980 (aérogénérateurs) avec l’explicitation de la règle « mât + nacelle » du code de l’urbanisme, 3250 (transformation des métaux non ferreux), 3310 (production de ciment), 3540 (installation de stockage de déchets), 3642 (fabrication de produits alimentaires) et 3670 (traitement de surface avec solvants organiques). La suppression du double classement redondant avec les rubriques relevant de la directive européenne IED, pour les rubriques 2102 (élevages de porcs), 2111 (élevages de volailles), 2210 (abattage d’animaux), 2251 (préparation de vins) et 2260 (broyage de produits organiques). L’introduction du régime de la déclaration pour les activités mobiles d’abattage dans certaines conditions pour la rubrique 2210 (abattage d’animaux). Cette mesure est proposée en application de l’article 73 de la loi du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et une alimentation saine et durable (EGALIM). Actuellement, les abattoirs sont soumis à déclaration de 500 kg/j à 5t/j et soumis à autorisation au-dessus de 5t/j. Le projet prévoit l’ajout d’un alinéa portant sur un nouveau type d’installations, à savoir les installations mobiles ayant une capacité de…

Application des pouvoirs du juge de l’autorisation environnementale à des permis de construire éoliens (CAA Bordeaux, 7 mars 2019, n°17BX00719/17BX00721)

Par Me Sébastien BECUE- Green Law Avocats Par un arrêt en date du 7 mars 2019 (n°17BX00719/17BX00721), la Cour administrative d’appel de Bordeaux a décidé d’appliquer les pouvoirs de plein contentieux du juge de l’autorisation environnementale à des permis de construire éoliens délivrés avant le 1er mars 2017. Suite à la décision (codifiée à l’article R. 425-29-2 du code de l’urbanisme) de dispenser, à compter du 1er mars 2017 les projets éoliens de la nécessité d’obtenir un permis de construire, les praticiens de ce contentieux se sont demandés si cette dispense pouvait avoir pour conséquence de rendre irrecevables les conclusions introduites à l’encontre des permis de construire délivrés avant cette date, ou contre les autorisations uniques expérimentales en tant qu’elles valaient permis de construire. Assez logiquement, le Conseil d’Etat (CE, 26 juil. 2018, n°416831) avait conclu que le juge reste tenu de statuer sur la légalité des permis de construire éoliens : en effet, dès lors que la nouvelle autorisation environnementale ne tient pas lieu de permis de construire, les permis délivrés continuent donc à produire leurs effets. S’il est saisi de la question de leur légalité, le juge doit donc statuer en excès de pouvoir, comme c’est la règle en contentieux de l’urbanisme, c’est-à-dire en tenant compte des circonstances de droit et de fait applicables à la date de la décision. Les données de la problématique ont évolué avec l’intervention de la loi n°2018-727 du 10 août 2018, qui a modifié l’article 15 de l’ordonnance « autorisation environnementale ». Celui-ci prévoit désormais que « les permis de construire en cours de validité à cette même date autorisant les projets d’installation d’éoliennes terrestres sont considérées comme des autorisations environnementales relevant du chapitre unique du titre VIII du livre Ier de ce code ». Comme l’exposait le rapport de présentation du projet de loi, cette modification a pour objet « d’éviter que les parcs éoliens qui ont été autorisés avant 2010 par le biais d’un simple permis de construire, et qui feraient l’objet de modifications, ne soient obligés de déposer une demande d’autorisation environnementale complète, au même titre que les installations nouvelles ». Ainsi, grâce à cette disposition, les projets éoliens qui avaient fait l’objet d’un permis de construire peuvent évoluer sans qu’il soit nécessaire d’effectuer de démarches au titre de l’urbanisme (et donc sans nécessité d’obtenir un permis de construire modificatif). La Cour administrative d’appel de Bordeaux tire dans l’arrêt commenté deux autres conséquences possibles (et juridiquement courageuses, il faudra attendre leur validation par le Conseil d’Etat) de cette modification de l’article 15 de l’ordonnance. Conséquence sur la jonction des instances : En l’espèce, les permis de construire et l’autorisation d’exploiter faisaient l’objet d’instances séparées. La Cour relève qu’il y a lieu de joindre les instances et de rendre un arrêt unique dès lors que ces actes « forment ensemble l’autorisation environnementale instituée par l’ordonnance du 26 janvier 2017 dont [le porter de projet] est ainsi titulaire pour la construction et l’exploitation du parc d’éoliennes projeté ». Cette précision aura le mérite de simplifier un peu le traitement du contentieux des actes relatifs à un même projet, qui font encore trop souvent l’objet d’audiences et de de jugements séparés. Conséquence sur les pouvoirs du juge : Au lieu de différencier les pouvoirs du juge selon qu’il statue en excès de pouvoir – pour les permis de construire – ou en plein contentieux – pour l’autorisation d’exploiter devenue autorisation environnementale, la Cour rappelle uniquement les pouvoirs de plein de contentieux de l’autorisation environnementale. Les pouvoirs de plein contentieux du juge s’appliquent donc aux permis et à l’arrêté d’autorisation d’exploiter. Conceptuellement audacieuse, cette unification des pouvoirs de plein contentieux n’a en réalité qu’une faible portée pratique. Comme le rappelle la Cour, « la légalité de l’autorisation au regard des règles d’urbanisme s’apprécie au regard de celles de ces règles applicables à la date de la délivrance de ladite autorisation ». Or c’est déjà le cas en matière de légalité des permis de construire.

Dérogation « espèces protégées » et « intérêt public majeur » : suspension d’un projet par le CE

  Par Me Jérémy Taupin – Green Law Avocats (jeremy.taupin@green-law-avocat.fr) En droit, l’article L. 411-1 du code de l’environnement instaure un régime de protection de certaines espèces animales et végétales, qu’il est interdit de détruire, d’altérer ou de dégrader. L’article L. 411-2 du même code prévoit toutefois que des dérogations à cette interdiction peuvent être délivrées par le Préfet, « à condition qu’il n’existe pas d’autre solution satisfaisante et que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle », notamment pour « des raisons impératives d’intérêt public majeur, y compris de nature sociale ou économique ». Bien évidemment ces dérogations tentent à permettent la réalisation de projets d’infrastructure ou d’aménagement de toute nature mais seulement s’ils remplissent cette condition drastique. Par une décision en date du 28 décembre 2018 (CE, req. n°419918) le Conseil d’Etat est venu préciser l’office du juge des référés dans le cadre du contrôle de cette exigence. En l’espèce, un arrêté préfet de la Dordogne en date du 29 janvier 2018 portant autorisation unique au titre de l’article L. 214-3 du code de l’environnement avait permis l’engagement des travaux de construction d’une déviation routière de 3,2 kilomètres, de deux ponts et d’un pont rail autour du village de Beynac-et-Cazenac. L’objectif affiché de ces travaux était de contourner le centre-ville afin de résorber les bouchons qui paralysent, l’été, cette commune située au bord de la Dordogne. Le projet d’aménagement avait également nécessité l’obtention d’une dérogation à l’interdiction de destruction d’une espèce protégée, dérogation intégrée à l’arrêté du 29 janvier 2018 (voir notre série d’articles sur le blog sur l’autorisation environnementale). Dans sa décision n°419918, la Haute Juridiction annule les ordonnances n° 1800972 et n° 1801192 des 3 et 10 avril 2018 du juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux par lesquelles ce même juge avait rejeté les demandes de suspension de l’exécution de l’arrêté préfectoral du 29 janvier 2018. En effet, après avoir rappelé les dispositions des articles L. 411-1 et -2 du code de l’environnement précités (voir notre précédent article sur le blog au sujet de la motivation des dérogations à l’interdiction de destruction d’une espèce protégée), le Conseil d’Etat estime que le juge des référés du tribunal administratif a dénaturé les pièces du dossier qui lui étaient soumises en jugeant que le moyen tiré de ce que le projet de route de contournement du bourg de Beynac ne répondait pas à une raison impérative d’intérêt public majeur, n’était pas, en l’état de l’instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée. Pour parvenir à cette conclusion, le Conseil d’Etat à clairement mis en avant dans sa décision la balance des intérêts en présence. Le juge des référés au Conseil d’Etat relève d’abord que la liste des espèces protégées affectées par le projet était importante, puisqu’elle comportait quatre espèces de mammifères semi-aquatiques et terrestres, dix-neuf espèces de chiroptères, quatre-vingt douze espèces d’oiseaux, neuf espèces de reptiles et amphibiens, quatre espèces d’insectes et une espèce de poisson. La route de contournement dont l’arrêté contesté autorisait la réalisation se situait également dans des zones faisant en outre, d’une part, l’objet d’un classement en zone Natura 2000 et, d’autre part, l’objet de protection en vertu d’un arrêté de protection du biotope. Le Conseil d’Etat souligne encore qu’il ressort des pièces des dossiers soumis au juge des référés que le bénéfice attendu de cette déviation « apparaît limité en l’état de ce dossier » eu égard, en premier lieu, à la circonstance que l’accroissement de la circulation automobile à Beynac pendant la période estivale est essentiellement dû au nombre important de touristes qui se rendent dans cette commune pour la visiter, et en second lieu, aux travaux déjà réalisés par cette commune, qui ont permis de réduire l’encombrement de la route qui la traverse grâce à un élargissement de la voie existante rendu notamment possible par la mise en place d’un contournement pour les piétons. Cette décision intéressera donc notamment : les porteurs de projet, à qui il incombe de démontrer efficacement au sein de leurs dossiers que la dérogation à l’interdiction de destruction d’espèces protégées répond bien à un intérêt public majeur ; mais également l’administration, qui devra très précisément motiver les décisions rendues dans ce domaine (voir en ce sens X. Braud, La consistance de la motivation d’une dérogation à la protection des espèces, note sous TA Toulouse, 10 juill. 2014 et TA Rennes, 17 oct. 2014, Dr envir. n° 231, févr. 2015. ; Dérogation «Espèces protégées » et raisons impératives d’intérêt public majeur : des précisions et des interrogations, note sous CAA Douai, 15 oct. 2015, n° 14DA02064, RJE n° 1/2016, mars 2016). Précisons que si cette décision du Conseil d’Etat suspend l’exécution de l’arrêté et donc les travaux de réalisation du projet d’aménagement, pourtant déjà bien avancés, l’affaire doit encore être jugée sur le fond par le tribunal administratif de Bordeaux.