Annulation d’un festival pour cause de COVID 19: l’interprétation divergente du contrat d’assurance du HELLFEST

Par Sébastien BECUE- Avocat of counsel L’Argus de l’assurance révèle le début de contentieux en cours entre le festival de métal HELLFEST et son assureur, qui refuse de garantir les conséquences financières de l’annulation de l’évènement musical et festif qui devait se tenir du 19 au 21 juin prochain. Il s’agit à l’évidence du premier exemple d’une longue série, au vu du nombre de festivals prévus cet été (Solidays vient également d’annoncer son annulation…). Souscrit le 17 décembre 2019, le contrat d’assurance du HELLFEST comporterait selon l’Argus une clause intitulée « épidémies » excluant de la garantie en ces termes : « les pertes pécuniaires résultant de (…) pneumonies atypiques (SRAS : syndrome respiratoire aigu sévère) »; et de « pandémies reconnues par les autorités françaises ou par l’OMS (organisation mondiale de la santé) », tout en précisant dans ce cas que « seront seulement garanties, dans ce dernier cas, les manifestations qui auraient été souscrites avant la reconnaissance officielle par les autorités françaises ou par l’OMS desdites pandémies ». Selon le festival, les pertes pécuniaires du fait de l’actuelle pandémie du coronavirus seraient couvertes dès lors que le contrat avait été souscrit avant la reconnaissance officielle de la pandémie par l’OMS le 11 mars dernier. L’assureur considère à l’inverse que le coronavirus sévissant actuellement constitue une pneumonie atypique de type SRAS, ce qui semble d’emblée être confirmé par le fait que son nom d’espèce est le SRAS-CoV-2 ; et qu’en conséquence la condition d’une reconnaissance officielle ne s’appliquerait pas dans ce cas. Au-delà de la résolution de cette question sémantique (aux conséquences juridiques et financières…), l’analyse du contrat dans sa globalité pourrait offrir une pistes juridique au festival, la légitimité de la clause d’exclusion de garantie pourrait notamment être questionnée. Sur ce point, il est intéressant de lire dans l’Argus que : le HELLFEST n’a jamais, en 10 années, actionné son contrat d’assurance, pour lequel il paye une prime annuelle conséquente de 170.000 euros ; que sa perte, de 2 millions d’euros, aurait pu être largement aggravée en cas d’annulation plus tardive ; et que le contrat, qui rappelons-le n’avait jamais été actionné jusque-là, aurait un plafond de 21 millions d’euros. Rappelons en tout état de cause que le bras de fer peut parfois aussi se résoudre amiablement, sous la pression collective des assurés, les assureurs pouvant aussi tenir compte des relations commerciales existantes et du risque en terme de réputation : la disparition d’une institution comme le HELLFEST serait un très mauvais signal, surtout au vu du caractère supportable des enjeux financiers pour l’assureur. Pour toute précision à ce sujet: Me David DEHARBE (david.deharbe@green-law-avocat.fr)

Riverains de la pollution de l’usine Lubrizol : comment obtenir réparation ?

Par David DEHARBE, avocat associé gérant (Green Law Avocats) david.deharbe@green-law-avocat.fr L’incendie de l’usine Lubrizol de Rouen, installation classée pour la protection de l’environnement et Seveso seuil haut, a été déclaré éteint le vendredi 27 septembre. Circulez, rien à voir tout va très bien il n’y a pas de risque sanitaire selon les pouvoirs publics. Il n’y a “pas de polluants anormaux dans les prélèvements effectués”, a assuré la ministre de la Transition écologique, Elisabeth Borne. Il n’en demeure pas moins  que la pollution est bien présente au-delà même de l’incertitude qui entoure d’éventuelles pollutions sanitaires directes : des galettes d’hydrocarbures ont fait leur apparition sur la Seine, à Rouen et la suie à couvert à plusieurs kilomètres à la ronde les jardins. A minima les riverains sont contraints de prendre des mesures de prévenir la migration de la pollution : détruire leur légumes, renoncer à les consommer … etc. Et plus grave : les sols sont sans aucun doute impactés. Le droit de l’environnement permet avec certitude la réparation des préjudices ainsi subis (cf. notre ouvrage : Sébastien BECUE et David DEHARBE, Assurer le risque environnemental des entreprises, éditions de l’Argus de l’assurance).   D’abord une action en trouble de voisinage devant le juge judiciaire permettra assurément à tout riverain d’obtenir la remise en état de sa propriété ou de sa parcelle louée. Cette action est très simple à engager car il ne faut pas démontrer la faute de l’industriel mais seulement l’existence d’un lien de causalité entre la pollution causée par l’industriel et le préjudice anormal subi par le riverain. De surcroît les associations agréées de protection de l’environnement comme les collectivités territoriales impactées  peuvent encore agir contre l’exploitant de l’installation Seveso en réparation du préjudice écologique subi par leur territoire. Ainsi le préjudice écologique après avoir été consacré par le juge (cf. par ex. :Le préjudice écologique reconnu suite à la pollution de l’estuaire de la Loire par la raffinerie de Donges (CA RENNES, 9 déc.2016) ) a été intégré dans le code civil : “Toute personne responsable d’un préjudice écologique est tenue de le réparer” (Article 1246, créé par la loi n°2016-1087 du 8 août 2016 – art. 4). Ajoutons que s’agissant du préjudice écologique et du risque sanitaire une action dite de groupe à l’américaine est désormais ouverte, via une association agréée. On doit aussi signaler que sur le terrain assurantiel tous les contrats d’assurance de biens des particuliers (multirisques habitation, multirisques automobile) comportent obligatoirement une garantie qui couvre les catastrophes technologiques. La garantie peut être déclenchée si l’accident rend inhabitable au moins 500 logements et qu’un arrêté de catastrophe technologique précisant les zones et la période de survenance des dommages est publié au Journal officiel dans les quinze jours qui suivent la catastrophe. L’assuré doit déclarer le sinistre au plus tôt et respecter dans tous les cas le délai indiqué dans le contrat. On verra ce qu’il en sera ici et surtout si les collectivités locales vont exiger de l’Etat qu’il prenne un arrêté de catastrophe technologique. Pour les riverains le nettoyage des suies persistantes sur leurs biens en serait grandement facilité. Enfin on peut encore s’interroger sur d’éventuelles carences de l’Etat dans le contrôle de l’installation classée au regard de l’importance des zones impactées. Là aussi une action en responsabilité de l’Etat devant la juridiction administrative serait sans doute pertinente. Ainsi au-delà des actions pénales très médiatiques, le droit de la responsabilité civile en ce compris la réparation du préjudice environnemental devrait plus discrètement mais surement permettre d’assurer les réparations qui s’imposent. Si l’affaire AZF a accouché d’actions juridictionnelles bien décevante, la conscience environnementale du moment parait au contraire réellement favorable à ce que l’affaire de l’usine Lubrizol suscite des actions juridictionnelles exemplaires … les pistes ne manquent pas !  

Publication d’un ouvrage sur la responsabilité environnementale et son assurance

Maîtres David Deharbe et Sébastien Bécue ont le plaisir de vous annoncer la publication, aux éditions de l’Argus de l’assurance, de leur ouvrage intitulé « Assurer le risque environnemental des entreprises », dont vous trouverez ci-dessous la (belle) couverture et la table des matières détaillée :   L’originalité de l’ouvrage, outre le fait qu’il soit le premier aussi détaillé sur le sujet, réside dans son approche à la fois théorique et pratique.   Des sources de l’action en responsabilité environnementale Le rappel exhaustif des sources juridiques mobilisables dans le cadre d’une action en responsabilité environnementale (la police administrative des installations classées, les troubles anormaux du voisinage, les régimes de responsabilité civile pour faute et du fait des choses, les régimes spéciaux, la loi sur la responsabilité environnementale et le préjudice écologique)     La pratique de l’action en responsabilité environnementale Les spécificités procédurales liées à certaines actions (procédure civile, action en préjudice écologique, action de groupe environnementale, articulation avec l’action pénale, les questions liées à la réparation du préjudice écologique)     Une présentation pratique des possibilités d’assurance des risques environnementaux Un historique du développement de l’assurance des risques environnementaux ainsi qu’une présentation et analyse avec exemples des principaux contrats d’assurance disponibles sur le marché L’ouvrage est à jour de l’inscription du préjudice écologique dans le code civil.                                                                                                  

Immobilier: Un système de chauffage avec système de pompe à chaleur est un “ouvrage”, protégé par la garantie décennales au sens de l’article 1792 du Code civil

Aurélien BOUDEWEEL- Green Law Avocat   Par un arrêt en date du 22 novembre 2016, la Cour d’appel de GRENOBLE (CA GRENOBLE, 22 novembre 2016, 1ère civile, n°14/02120) a considéré que l’installation d’une pompe à chaleur est bien un ouvrage au sens de l’article 1792 du Code civil, ce qui emporte un système de garantie intéressant. En l’espèce, des particuliers avaient selon devis d’une société spécialisée dans la matière confié le remplacement de leur chauffage central au gaz par une installation de chauffage par géothermie verticale avec une pompe à chaleur, devant fonctionner avec des capteurs solaires. Les travaux ont été entièrement achevés le 2 octobre 2008 et réglés pour la somme de 12.897,38 euros. Postérieurement, et devant la survenance de désordres, les particuliers avaient assigné l’assureur de la société, entre-temps placée en liquidation judiciaire, afin que soit ordonnée une mesure d’expertise judiciaire. Devant le refus d’intervention de l’assureur, les particuliers avaient assigné cette dernière au titre de la garantie décennale. Par un jugement en date du 20 mars 2014, le Tribunal de grande instance de GRENOBLE avait d’abord débouté les particuliers de leurs demandes. La Cour d’appel de GRENOBLE vient cependant de leur donner raison. Rappelons que l’article 1792 du Code civil énonce que « Tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage, des dommages, même résultant d’un vice du sol, qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination. Une telle responsabilité n’a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d’une cause étrangère ». La mise en jeu de la garantie décennale prévue par l’article 1792 du Code civil suppose la démonstration de trois éléments cumulatifs : L’existence d’un « ouvrage » au sens juridique du terme, La réception de cet ouvrage, Une atteinte à la solidité ou d’une impropriété à sa destination. La Cour d’appel de GRENOBLE a donc réformé le jugement et a retenu la qualification d’ouvrage. On notera qu’elle prend en compte L’importance technique de l’installation, La complexité du circuit et le nombre de circuits, Une analyse préalable des besoin du client, L’intervention de bureaux d’études spécialisés Le montant des travaux, L’objectif poursuivi par les travaux. « (…) A titre liminaire, la cour observe, qu’en première instance, la société X ne contestait pas que la pompe à chaleur litigieuse constituait un ouvrage au sens de l’article susvisé. En l’espèce, les travaux réalisés par la société Y, visant à remplacer totalement le chauffage initial au gaz propane, au regard, de première part, de l’importance technique de l’installation constituée de deux circuits, d’un plancher chauffant en rez de chaussée, de radiateurs au premier étage, d’une pompe à chaleur avec raccordement aux sondes géothermiques au passage du mur et raccordement au kit solaire avec circulateur, nécessitant une analyse des besoins des utilisateurs et une adéquation à ces derniers avec intervention d’un bureau d’étude thermique et fluide outre un maître d’œuvre, de seconde part, du coût élevé des travaux, soit la somme de12.897,38€, et, enfin, de l’objectif d’assurer le chauffage de l’ensemble de l’immeuble, doivent être considérés comme un ouvrage de construction au sens des dites dispositions (…) ». Puis la Cour tire les conséquences du cadre juridique ainsi rappelé, en retenant que le dysfonctionnement rend l’ouvrage impropre à sa destination : « Aux termes de l’article 1792-6 du Code Civil, la réception est l’acte par lequel le maître de l’ouvrage déclare accepter l’ouvrage avec ou sans réserve. Si aucun procès-verbal de réception n’a été établi par écrit et signé entre les parties, il ressort des pièces du dossier que l’ouvrage a été réalisé dans son intégralité, qu’il a été mis en fonctionnement et que le maître d’ouvrage avait réglé, au moment de sa livraison, la totalité du prix. Ces éléments caractérisent l’existence de la volonté non équivoque des maîtres de l’ouvrage de le recevoir. A la date d’achèvement des travaux, malgré une mise en route laborieuse, le système de chauffage fonctionnait, de sorte qu’il doit être retenu qu’une réception tacite des travaux est intervenue, sans réserve, le 2 octobre 2008 (…) L’expert, qui conclut à la nécessité de faire réaliser une étude hydraulique et de régulation pour adapter la nouvelle installation géothermique à l’existant, retient le non-respect des règles de l’art dans la mise en œuvre de la pompe à chaleur, une négligence dans la direction et la surveillance des travaux et une imputabilité des désordres à la société Y. L’expert retient une impropriété du système de chauffage installé à sa destination, qui était d’assurer un chauffage satisfaisant dans l’habitation, sans consommation d’énergie excessive et sans surveillance de tous les instants des maîtres de l’ouvrage. Par voie de conséquence, la société Y engage sa responsabilité au titre de la garantie décennale. Le jugement déféré sera réformé sur ce point (…) ». L’arrêt de la Cour d’appel de GRENOBLE met en évidence la difficulté d’appréciation des juridictions du fond quant à la notion « d’ouvrage », laquelle est soumise à une appréciation souveraine au cas par cas. Notons toutefois qu’il est aujourd’hui admis que le système de climatisation installé dans un immeuble accueillant un parc des expositions constituait un ouvrage « par sa conception, son ampleur et l’emprunt de ses éléments d’équipement à la construction immobilière » (Cass. 3e civ., 28 janv. 2009, n° 07-20.891  : JurisData n° 2009-046846). Il en a été jugé de même pour « une pompe à chaleur dont l’installation impliquait des raccordements aérauliques et électriques et un ancrage de l’unité dans la structure de gros-œuvre » (CA Dijon, 21 avr. 2015, n° 13/01661 : JurisData n° 2015-012960). En revanche, l’installation d’une climatisation sur un immeuble existant a été vue comme relevant du régime de la responsabilité de droit commun, lorsqu’elle n’a pas nécessité de travaux particuliers. C’est également le cas dans l’hypothèse où une pompe à chaleur dont les éléments ne sont pas incorporés à l’existant mais reposent sur des supports et que leur pose a fait l’objet de travaux techniquement limités (CA Colmar, 17 févr. 2014, n° 14/0128  : JurisData n° 2014-002852). L’enjeu est important puisqu’une garantie…

Les causes d’exonération d’un dommage de travaux publics : Attention, terrain glissant ! (CAA Bordeaux, 17 nov.2014)

La Cour administrative d’appel de Bordeaux (formation des chambres réunies, du 17 novembre 2014, n°12BX01795) vient de rendre une intéressante décision en matière d’indemnisation du fait d’un dommage de travaux publics. Le 19 avril 2000, à la suite d’une période de précipitations intenses, un glissement de terrain sur les pentes du Mont Cabassou, dans la commune de Rémire-Montjoly (Guyane), a provoqué une importante coulée de boue. Cette coulée de boue a, en partie, enseveli l’usine de fabrication de yaourts, glaces et jus de fruits appartenant à la société Cilama, située en contrebas de la RN 3, à la base du Mont Cabassou. Les assureurs de la Cilama lui ont versé plus de douze millions d’euros en réparation des dommages aux biens subis lors du glissement de terrain et des pertes d’exploitation. Ils ont ensuite saisi le tribunal administratif de Cayenne pour demander la condamnation de l’État à réparer leur préjudice. Par un jugement du 9 juin 2008, le tribunal administratif de Cayenne a déclaré l’Etat entièrement responsable des dommages et l’a condamné à rembourser intégralement les assureurs. L’État a alors interjeté appel. La cour administrative d’appel de Bordeaux a alors déclaré l’Etat responsable d’un tiers des dommages subis par la société Cilama, a rejeté les conclusions de l’Etat tendant à ce que la commune de Rémire-Montjoly le garantisse des condamnations prononcées contre lui et a prescrit une expertise en vue d’évaluer le montant exact du préjudice (Cour Administrative d’Appel de Bordeaux, 19 janvier 2010, n°08BX02263). A la suite d’un pourvoi de la société Cilama, le Conseil d’Etat a annulé cet arrêt pour insuffisance de motivation et renvoyé l’affaire devant la cour administrative d’appel de Bordeaux (Conseil d’État, 29 juin 2012, n°337820). L’arrêt de la cour administrative d’appel de Bordeaux rendu après renvoi du Conseil d’Etat est la décision présentement commentée (Cour administrative d’appel de Bordeaux, formation des chambres réunies, du 17 novembre 2014, n°12BX01795). Cette décision mérite qu’on s’y intéresse en ce qu’elle rappelle dans quelles conditions la responsabilité de l’Etat peut être engagée en cas de carence du maire ou en présence de dommages causés à des tiers par des travaux publics. Tout d’abord, la cour administrative d’appel de Bordeaux annule le jugement du tribunal administratif de Cayenne en ce qu’il avait retenu la responsabilité pour faute de l’Etat (I.) puis, saisie de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, admet la responsabilité sans faute de l’Etat pour les dommages de travaux publics causés à des tiers (II.).  Sur le bien-fondé du jugement du tribunal administratif de Cayenne Après avoir rappelé les dispositions du 5° de l’article L.2212-2 du code général des collectivités territoriales et le 1° de l’article L.2215-1 du même code, la Cour considère « qu’il résulte de ces dispositions que la responsabilité de l’Etat en matière de prévention des accidents naturels ne peut être engagée qu’à la condition que le préfet, en s’abstenant de se substituer au maire pour prendre les mesures propres à prévenir de tels accidents, ait commis une faute lourde ». Il est vrai qu’en principe, la prévention des accidents naturels relève de la compétence du maire. Néanmoins, en cas de carence du maire, le Préfet peut se substituer au maire de la Commune après une mise en demeure restée sans résultat. Si toutefois le Préfet reste lui aussi inactif, la responsabilité de l’Etat ne peut alors être engagée qu’à la condition que le préfet, en s’abstenant de se substituer au maire, ait commis une faute lourde (Conseil d’Etat, 1ère et 2ème sous-sections réunies, 7 avril 1967, n°65187 65224, mentionné aux tables du recueil Lebon, Conseil d’État, 4ème et 5ème sous-sections réunies, 25 juillet 2007, n°283000, Conseil d’État, 4ème et 5ème sous-sections réunies, 25 juillet 2007, n°293882). En l’espèce, le tribunal administratif s’est borné à retenir que l’insuffisance des mesures de prévision et de prévention prises par les services de l’équipement était constitutive d’une faute de nature à engager la responsabilité de l’Etat. Dès lors qu’il n’a pas caractérisé l’insuffisance des mesures de prévision et de prévention prises par les services de l’équipement de « faute lourde », le tribunal administratif a commis une erreur de droit justifiant l’annulation de son jugement. C’est donc à bon droit que la cour administrative d’appel de Bordeaux annule le jugement du tribunal administratif de Cayenne. Sur l’effet dévolutif de l’appel  Dans un premier temps, la cour administrative d’appel de Bordeaux rappelle le principe de responsabilité sans faute de l’Etat du fait des dommages causés par des travaux publics à des tiers (2.1.). Puis, dans un second temps, elle écarte chacune des causes d’exonération susceptibles d’être invoquées (2.2.). – Sur la responsabilité sans faute de l’Etat pour des dommages causés à des tiers par des travaux publics  La cour administrative de Bordeaux rappelle le principe de responsabilité sans faute de l’Etat pour les dommages causés aux tiers par des travaux publics.  Tout d’abord, elle explique « que le mouvement de terrain survenu le 19 avril 2000 a été provoqué par le soulèvement des couches géologiques supérieures du Mont Cabassou […] et que ce soulèvement résulte des fortes pressions provenant du gonflement, à la suite de pluies intenses, d’une nappe d’eau profonde et captive située dans le substratum granitique, fissuré dans sa partie supérieure ». Puis, elle précise «  qu’à la suite de deux précédents glissements de terrain importants, survenus le 14 février 1989 et le 23 mai 1990, les services de l’équipement, chargés de l’entretien de la RN 3, ont notamment décidé, afin de prévenir la survenance de nouveaux mouvements de terrain ou tout au moins d’en limiter l’ampleur, de faire procéder à des prélèvements de matériaux dans la partie supérieure des zones touchées par ces deux glissements ». Elle en déduit alors « qu’en réduisant l’épaisseur des couches géologiques supérieures dans la partie du Mont Cabassou exposée aux surpressions en provenance de la nappe captive et en diminuant ainsi le poids de ces couches dont la pression contrebalançait ces surpressions, ces travaux publics, à l’égard desquels les sociétés Cilama et Antilles Glaces ont la qualité de tiers, ont joué un rôle déterminant dans…

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