Dans le cadre de la procédure de la question prioritaire de constitutionnalité (QPC), le Conseil constitutionnel a déclaré, au cours de ces deux dernières années, plusieurs dispositions législatives du code de l’environnement non conformes à l’article 7 de la Charte de l’environnement, lequel prévoit notamment, le droit de participation du public à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement.

Ces décisions sont les suivantes :

–        Décision n° 2011-183/184 QPC du 14 octobre 2011 déclarant non conforme à la Constitution  le second alinéa de l’article L. 511-2 du code de l’environnement et le paragraphe III de l’article L. 512-7 du même code (dispositions relatives aux projets de nomenclature et de prescriptions générales relatives aux installations classées pour la protection de l’environnement) ;

–        Décision n° 2012-262 QPC du 13 juillet 2012 déclarant non conforme à la Constitution le premier alinéa de l’article L. 512-5 du code de l’environnement (disposition relative aux projets de règles et prescriptions techniques applicables aux installations classées pour la protection de l’environnement soumises à autorisation) ;

–        Décision n°2012-269 QPC du 27 juillet 2012 déclarant non conforme à la Constitution le 4° de l’article L. 411-2 du code de l’environnement (disposition relative à la dérogation aux mesures de préservation du patrimoine biologique) ;

–        Décision n°2012-270 QPC du 27 juillet 2012 déclarant non conforme à la Constitution le 5° du II de l’article L. 211-3 du code de l’environnement (disposition relative à la délimitation des zones de protection d’aires d’alimentation des captages d’eau potable).

 

Pour donner un effet utile à ses décisions et laisser le temps au législateur de procéder aux rectifications nécessaires, le Conseil constitutionnel a fixé une prise d’effet différée des déclarations d’inconstitutionnalité : au 1er  janvier 2013 pour les décisions n° 2011-183/184 QPC, n° 2012-262 QPC, n°2012-270 QPC et au 1er septembre 2013 pour la décision n°2012-269 QPC.

 

Le projet de loi adopté par le Sénat le 6 novembre 2012 vient tirer les conséquences de la jurisprudence du Conseil constitutionnel et a donc pour objectif de donner à l’article 7 de la Charte de l’environnement toute sa portée.

 

Ce projet de loi prévoit notamment :

–        Une réécriture intégrale de l’article L. 120-1 du code de l’environnement ;

  • Cette disposition phare, destiné à transposer les principes de l’article 7 de la Charte dans le code de l’environnement, donne désormais une définition du principe de participation du public ainsi que ses conditions d’application. Elle exclut de son champ d’application les décisions individuelles.
  • L’article L. 120-1 du code de l’environnement serait désormais rédigé ainsi:

« Art. L. 120-1. – I. – La participation du public permet d’associer toute personne, de façon transparente et utile, à la préparation des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement, en l’informant des projets de décisions concernées afin qu’elle puisse formuler ses observations, qui sont prises en considération par l’autorité compétente.

« Le présent article définit les conditions et limites dans lesquelles ce principe est applicable aux décisions, autres que les décisions individuelles, des autorités de l’État, y compris les autorités administratives indépendantes, et de ses établissements publics ayant une incidence sur l’environnement lorsque celles-ci ne sont pas soumises, par les dispositions législatives qui leur sont applicables, à une procédure particulière organisant la participation du public à leur élaboration.

« II. – Sous réserve des dispositions de l’article L. 120-2, le projet d’une décision mentionnée au I, accompagné d’une note de présentation non technique précisant notamment le contexte de ce projet, est rendu accessible au public par voie électronique. Lorsque le volume ou les caractéristiques du projet de décision ne permettent pas sa publication intégrale par voie électronique, la note de présentation précise les lieux et heures où l’intégralité du projet peut être consultée.

« Au plus tard à la date de la publication prévue au premier alinéa du présent II, le public est informé, par voie électronique, des modalités de consultation retenues.

« Les observations du public, formulées par voie électronique ou postale, doivent parvenir à l’autorité administrative concernée dans un délai qui ne peut être inférieur à vingt et un jours.

« Les observations déposées sur un projet de décision sont accessibles par voie électronique dans les mêmes conditions que le projet de décision.

« Le projet ne peut être définitivement adopté avant l’expiration d’un délai permettant la prise en considération des observations formulées par le public et la rédaction d’une synthèse de ces observations. Sauf en cas d’absence d’observations, ce délai ne peut être inférieur à quatre jours à compter de la date de clôture de la consultation.

« Dans le cas où la consultation d’un organisme consultatif comportant des représentants des catégories de personnes concernées par la décision en cause est obligatoire et lorsque celle-ci intervient après la consultation du public, la synthèse des observations du public lui est transmise préalablement à son avis.

« Au plus tard à la date de la publication de la décision et pendant une durée minimale de trois mois, l’autorité administrative qui a pris la décision rend publique, par voie électronique, une synthèse des observations du public. La synthèse des observations indique les observations du public dont il a été tenu compte.

« III. – Le II ne s’applique pas lorsque l’urgence justifiée par la protection de l’environnement, de la santé publique ou de l’ordre public ne permet pas l’organisation d’une procédure de consultation du public. Les délais prévus au II peuvent être réduits lorsque cette urgence, sans rendre impossible la participation du public, le justifie.

« IV. – Les modalités de la participation du public peuvent être adaptées en vue de protéger les intérêts mentionnés au I de l’article L. 124-4. »

 

 

–        Une réécriture du paragraphe III de l’article L. 512-7 du code de l’environnement ;

  • La nouvelle rédaction supprime la publication des projets de prescriptions générales en matière d’installations soumises à enregistrement.

 

–        Une réécriture de l’article L. 211-3 du code de l’environnement ;

  • L’article L. 211-3 du code de l’environnement relatif à la délimitation des zones de protection d’aires d’alimentation des captages d’eau et de la détermination du programme d’actions rentrera désormais dans le champ d’application de l’article L. 120-1 du code de l’environnement et soumis à une procédure de participation de public.

 

–        L’habilitation donnée au gouvernement de prendre par ordonnance certaines dispositions relatives à la participation du public ;

  • Le Gouvernement devra notamment créer des procédures organisant la participation du public à l’élaboration des décisions individuelles et des décisions émanant de toutes les autres personnes publiques autres que l’Etat. C’est la Décision n°2012-269 QPC du 27 juillet 2012 (dérogation à la destruction d’espèces protégées) qui a justifié l’organisation d’une procédure de participation du public préalablement à l’élaboration des décisions individuelles prises en matière d’environnement.

 

–        La création d’un Conseil national de transition écologique, organe consultatif, présidé par le ministre chargé de l’écologie ou son représentant ;

  • Le Conseil national de transition énergétique sera notamment chargé d’émettre un avis sur les projets de lois relatifs à l’environnement.

 

Le projet de loi adopté par le Sénat a été transmis pour examen à l’Assemblée Nationale, dans le cadre de la procédure accélérée imposée par le Gouvernement.

 

Anaïs DE BOUTEILLER – Green Law Avocat