Capacités financières et ICPE : pour une prise en compte du modèle économique du secteur d’activité en cause ! (TA Limoges, 14 déc.2017)

Par David DEHARBE- avocat associé GREEN LAW AVOCATS La jurisprudence Hambrégie (CE, 22 fév. 2016, n°384821.) du Conseil d’Etat, parfois interprétée de façon bien trop stricte par certaines juridictions du fond, et relative aux capacités techniques et financières exigibles du demandeur à l’exploitation d’une installation classée pour la protection de l’environnement, n’en finit plus de faire des dégâts… Avec son jugement du 14 décembre 2017, le tribunal administratif de Limoges (TA Limoges 14 décembre 2017, Association Sources et rivières du limousin, n° 1500920) inscrit sa jurisprudence dans la série des annulations de projet pour défaut de la démonstration dans le DDAE de ces capacités et montre que le juge peut néanmoins utiliser ses nouveaux pouvoirs détenus depuis l’ordonnance du 26 janvier 2017. Cette annulation est couplée en l’espèce à un avis d’un commissaire enquêteur jugé irrégulier car ce dernier a osé s’exprimer sur la guérilla contentieuse que mènent certaines associations à la liberté de l’industrie, on se dit que le juge a définitivement perdu de vue la vocation de la police des installations à concilier cette liberté avec les intérêts du voisinage et plus largement de l’environnement … Revenons sur ce qui est finalement reproché au commissaire enquêteur. Aux termes du jugement :« L’intervention de l’association des sources et rivières du Limousin (SRL) n’avait pas d’autre objectif que de décrédibiliser le porteur du projet et les services de l’Etat, juste pour faire du sensationnel et montrer qu’elle existait », qu’« en faisant usage d’affirmations non vérifiées et pouvant avoir des incidences graves, SRL a pris le parti de la facilité et du tout négatif» et en s’interrogeant sur la « légitimité » de l’association à conserver « une habilitation au titre de la représentativité dans les instances régionales », le commissaire enquêteur doit être regardé, par ces remarques dépréciatives portées à l’encontre de l’association requérante, seule à avoir présenté des observations défavorables au projet, exprimé un parti pris initial favorable au projet ; que, dès lors, l’association sources et rivières du Limousin est fondée à soutenir que le commissaire enquêteur a manqué, en l’espèce, à son devoir d’impartialité ». Et au final le Tribunal d’en conclure : « que ce vice n’a pas, en l’espèce, exercé d’influence sur le sens de la décision prise par le préfet de la Creuse, il a privé le public de la garantie qui s’attache à l’expression par le commissaire enquêteur d’une position personnelle, émise de manière objective au vu de l’ensemble du dossier ». A croire que le public est plus bête de l’administration et qu’il faut le protéger. Assurément il faut le protéger des commissaires enquêteurs ….certainement pas en censurant l’autorisation mais en supprimant cette institution dont la médiation est bien inutile. En tout état de cause on ne voit pas en quoi cette « garantie » a porté atteinte au principe de participation … Ce défaut de démonstration d’une telle atteinte est sans doute insupportable pour le pétitionnaire. Ne l’est pas moins sans doute l’analyse faite en l’espèce de la question des capacités financières. D’emblée disons-le nous sommes bien conscients des conditions très particulières de la jurisprudence Hambrégie où était en cause un investissement de 772 millions d’euros nécessaire à l’installation d’une centrale à gaz, financés à 30% sur fonds propres et à 70% par dette bancaire!  Quand est en cause une usine à gaz comme celle en cause dans l’affaire jugée par le Conseil d’Etat, on pourrait à la rigueur  comprendre que le Conseil d’Etat admette que le juge du fond puisse vérifier que les engagements des tiers sont des engagements « fermes ». Mais s’agissant de capacités qui doivent seulement être suffisamment « certaines », on ne saurait absolument pas exiger des établissements bancaires un engagement définitif pour le plus grand nombre des installations classées. Devant le Tribunal administratif de Limoges était mis en cause le fait que le préfet de la Creuse avait autorisé le propriétaire d’une usine de production d’électricité située sur le territoire de la commune de Saint-Hilaire-le-Château, à disposer de l’énergie de la rivière « Le Thaurion » pour l’exploitation d’une modeste production d’énergie hydroélectrique. Mais, une association avait demandé au tribunal administratif de Limoges d’annuler cet arrêté. Or le Tribunal relève « que la notice d’impact produite par M. D. dans le dossier de demande d’autorisation mentionne que ce dernier possède une entreprise de travaux publics basée au Moutier d’Ahun, qu’il réalisera lui-même la partie du projet consacrée au génie civil et qu’il dispose des compétences et des connaissances suffisantes pour assurer ultérieurement le fonctionnement de la centrale avec l’assistance de prestataires spécialisés pour la partie technique ; que, par un courrier du 26 mars 2014 adressé au commissaire enquêteur et joint au dossier d’enquête publique, M. D. a également précisé qu’il «n’avait pas plus de capacités qu’un bon nombre de gestionnaires de ce type d’installation », qu’il était prévu l’assistance de prestataires spécialisés pour la partie électrique et que « pour le reste, [il pensait] pouvoir assumer », étant « responsable d’une petite entreprise de maçonnerie depuis 30 ans après 10 ans de conduite de chantier et qu’à ce jour cette entreprise n’est pas trop en mauvaise posture » ; que, par ce même courrier, s’agissant des capacités financières, l’intéressé s’est borné à exposer qu’un financement était prévu avec un apport personnel de 150 000 euros et que « pour le reste c’est la banque qui jugera de l’opportunité ou non de soutenir ce projet afin de le finaliser » ; que ces seules mentions n’étaient pas suffisantes pour apprécier la capacité technique et financière de l’exploitant à assurer le bon fonctionnement de l’installation en cause ». Et une nouvelle fois le principe de participation vient en creux interdire la régularisation par une simple Danthonysation du moyen : « les insuffisances de ces indications dans le dossier de demande d’autorisation ont eu pour effet de nuire à l’information complète du public et sont susceptibles d’avoir exercé une influence sur la décision du préfet de la Creuse, l’association sources et rivières du Limousin est fondée à soutenir que la notice d’impact est entachée d’insuffisance…

Contestation du montant de l’indemnité suite à la résiliation d’un marché public d’évacuation d’O.M. : les pièces contractuelles sont essentielles !

Par Maître Thomas RICHET (Green Law Avocats) Par un arrêt du 14 décembre 2017 (requête n°15BX01342), la cour administrative d’appel de Bordeaux rappelle aux opérateurs économiques l’importance d’une bonne lecture des pièces contractuelles d’un marché public. Dans cette affaire, la communauté intercommunale du nord de La Réunion (ci-après la « CINOR ») avait conclu le 4 mars 2013 un marché public avec la société ECM Caly et Paji (ci-après « société ECM ») ayant pour objet la fourniture de 16 caissons métalliques destinés à l’évacuation des ordures ménagères pour un montant total de 89 059 euros. Par un courrier du 26 avril 2013, le président de la CINOR a prononcé la résiliation de ce marché sur le fondement de l’article 33 du Cahier des Clauses Administratives Générales Fournitures Courantes et Services (ci-après « CCAG-FCS ») auquel renvoyait l’article 9 du Cahier des Clauses Administratives Particulières (ci-après « CCAP ») et a fixé le montant de l’indemnité de résiliation à 4 452, 95 euros correspondant à 5% du montant hors taxes du marché. L’article 33 du CCAG-FCS dispose que : « Lorsque le pouvoir adjudicateur résilie le marché pour motif d’intérêt général, le titulaire a droit à une indemnité de résiliation, obtenue en appliquant au montant initial hors taxes du marché, diminué du montant hors taxes non révisé des prestations admises, un pourcentage fixé par les documents particuliers du marché ou, à défaut, de 5 %. Le titulaire a droit, en outre, à être indemnisé de la part des frais et investissements, éventuellement engagés pour le marché et strictement nécessaires à son exécution, qui n’aurait pas été prise en compte dans le montant des prestations payées. Il lui incombe d’apporter toutes les justifications nécessaires à la fixation de cette partie de l’indemnité dans un délai de quinze jours après la notification de la résiliation du marché. Ces indemnités sont portées au décompte de résiliation, sans que le titulaire ait à présenter une demande particulière à ce titre. » La société ECM a décidé de saisir le Tribunal administratif de La Réunion d’un recours en reprise des relations contractuelles (« recours Béziers II »), et en demande de condamnation de la CINOR. Par un jugement n°1300817 du 29 décembre 2014, dont la CINOR a interjeté appel devant la Cour administrative de Bordeaux, les juges de première instance ont condamné la communauté intercommunale à verser à cette société la somme de 18 451,76 euros, assortie des intérêts aux taux légal à compter du 19 juin 2013. L’arrêt commenté est intéressant à double titre. D’abord en ce qu’il rappelle une règle constante du contentieux administratif : il appartient au premier juge de répondre à tous les moyens qui ne sont pas « inopérants ». Mais l’arrêt doit  surtout retenir l’attention s’agissant du contentieux de l’exécution des marchés publics. Un moyen qui n’est pas inopérant et auquel le juge administratif ne répond pas rend son jugement irrégulier (constant) Dans un premier temps, la cour décide d’annuler le jugement rendu par les premiers juges en ce qu’ils ne se sont pas prononcés sur un moyen développé par la CINOR. Ce moyen était tiré du fait que la société ECM n’avait pas respecté les règles fixées à l’article 33 du CCAG-FCS (règles reproduites ci-dessus), auxquelles renvoyait l’article 9 CCAP. En effet, les juges de première instance avaient bien rejeté une fin de non-recevoir tirée du défaut de liaison du contentieux mais avaient omis de répondre au moyen de la personne publique concernant le respect de la procédure prévue à l’article 33 du CCAG-FCS. Le moyen n’étant pas inopérant, c’est-à-dire qu’il n’était pas manifestement infondé,  le tribunal devait y répondre. En effet, L’omission de répondre à un moyen entache la régularité du jugement (CE, 10 juin 1966, Mme Perrucot, n°64572 ; CE, Assemblée, 1er avril 1988, Mlle Vadsaria, n°55232 ; CE, 5 novembre 1990, Péan, n°79657). A la différence du défaut de réponse à une partie des conclusions, le défaut de réponse à un moyen entraîne en principe l’annulation totale du jugement, à moins que le moyen auquel il n’a pas été répondu ait été présenté à l’appui de conclusions divisibles (CE, 10 février 1982, Angeletti, n°17618) Le moyen n’était pas inopérant, il n’y a pas été répondu, le jugement n’étant pas régulier, il doit être annulé. Pour être recevables, des conclusions indemnitaires en demande de majoration de l’indemnité de résiliation doivent respecter la procédure décrite par les documents contractuels du marché publics La cour relève que la procédure prévue à l’alinéa 2 de l’article 33 du CCAG-FCS n’a pas été respectée par la société ECM lors de la demande de majoration de l’indemnité de résiliation. Cet alinéa prévoit l’obligation, pour l’opérateur économique désireux de solliciter une majoration de l’indemnité de résiliation, suite à la résiliation de son marché public de fournitures, de transmettre, dans les quinze jours de la notification de cette résiliation, les justificatifs nécessaires. En l’espèce, aucun élément ne permettait de s’assurer de la date à laquelle la société ECM avait contesté le montant de l’indemnisation, et donc du délai dans lequel elle avait introduit cette demande. En outre, la cour relève que la demande n’était pas assortie des justificatifs nécessaires. Dès lors, même si cette société avait introduit des conclusions en reprise des relations contractuelles dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision de résiliation du marché, elle n’était pas fondée à solliciter une majoration de l’indemnité due au titre de la résiliation pour motif d’intérêt général. La cour relève donc que : « [la CINOR] est fondée à soutenir que la société ECM Caly et Paji a méconnu les stipulations précitées de l’article 33 du cahier des clauses administratives générales ” fournitures courantes et de services ” et que ses conclusions indemnitaires, tendant à la condamnation de la communauté intercommunale du nord de La Réunion à lui verser une somme supplémentaire au titre de l’indemnisation de la résiliation du marché, devaient être rejetées comme irrecevables. »   Cette solution doit attirer l’attention des opérateurs économiques et des pouvoirs adjudicateurs sur les règles applicables à la phase d’exécution des marchés publics et qui sont contenues au sein même des pièces…

Dragage du port de Rouen : rejet de la demande de suspension des opérations

Par Maître Fanny ANGEVIN (Green Law Avocat) Par une décision en date du 19 juillet 2017 n°1701997, le juge des référés du Tribunal administratif de Rouen a rejeté une requête d’une association et d’une fédération, autorisation ainsi le dragage du port de Rouen. Les requérants demandaient la suspension d’un arrêté de la préfète de la Seine-Maritime, du préfet du Calvados et du préfet de l’Eure, par lequel avait été autorisé, au titre de l’article L. 214-3 du code de l’environnement, des dragages d’entretien de l’estuaire aval et l’immersion des sédiments du port de Rouen au profit du Grand Port Maritime de Rouen. L’article L. 214-3 du code de l’environnement prévoit les régimes d’autorisation ou de déclaration des activités en eau et milieux aquatiques marins : « I.- Sont soumis à autorisation de l’autorité administrative les installations, ouvrages, travaux et activités susceptibles de présenter des dangers pour la santé et la sécurité publique, de nuire au libre écoulement des eaux, de réduire la ressource en eau, d’accroître notablement le risque d’inondation, de porter gravement atteinte à la qualité ou à la diversité du milieu aquatique, notamment aux peuplements piscicoles. Cette autorisation est l’autorisation environnementale régie par les dispositions du chapitre unique du titre VIII du livre Ier, sans préjudice de l’application des dispositions du présent titre. […]» En l’espèce, les requérants invoquaient des risques relatifs à l’immersion de produits de dragage fortement contaminés, pouvant provoquer des pollutions qui auraient des conséquences sur l’environnement, la qualité des eaux, la faune piscicole et comportant des risques pour les usagers de certaines plages. Plus précisément Dans sa décision, le juge des référés estime que les risques soulevés par les requérants ne sont pas démontrés : « ni la dangerosité des sédiments dragués, ni le risque d’une pollution de zones naturelles protégées avoisinantes (ZNIEFF, Natura 2000) du site du Machu, des plages de Normandie et plus généralement des eaux de la Manche aux conséquences désastreuses sur l’environnement, sur la qualité des eaux et la faune piscicole directement liée à l’immersion de ces sédiments en plein mer ne sont, en l’état de l’instruction, établis par les pièces du dossier. » Par ailleurs, le juge note que « le recours à l’immersion de ces sédiments est nécessaire, après la saturation du site du Kannik, pour assurer la sécurité de la navigation maritime du fait de sa proximité avec le chenal d’entrée du grand port maritime de Rouen. ». C’est là un exemple topique de bilan des urgences où le juge prend en compte l’intérêt à suspendre pour le confronter à celui de maintenir la décision. En l’espèce l’intérêt général s’avère, dans les deux cas, favorable à l’Etat. Ainsi, le juge des référés conclut que la condition d’urgence prévue à l’article L. 521-1 du code de justice administrative ne pouvait pas être regardée comme remplie et rejette par conséquent la demande de suspension des requérants. Les travaux de dragage autorisés par l’arrêté dont il était demandé la suspension ont donc pu continuer. Néanmoins, la décision au fond restant encore pendante, il conviendra de suivre l’issue de cette affaire. Et il ne faut pas non plus se méprendre sur la portée d’un tel arbitrage du juge des référés ainsi surmotivé : il est réalisé « en l’état de l’instruction ». Or sur des questions avec des enjeux aussi fort reste à savoir si l’absence de dangerosité pour l’environnement sera confirmée. La preuve est ici comme souvent dans les contentieux environnementaux les plus techniques un fardeau que le requérant doit porter.

Publication du premier arrêté d’approbation du cahier des charges relatif à la mise sur le marché du digestat agricole (arrêté du 13 juin 2017)

Par Jérémy TAUPIN- Green Law Avocats Le cahier des charges permettant la mise sur le marché et l’utilisation digestats de méthanisation agricoles dit « CDC Digagri 1 », vient d’être publié au Journal Officiel, via un arrêté du 13 juin 2017. Cet arrêté est pris en application des articles L. 255-5 et R. 255-29 du code rural et de la pêche maritime. Pour rappel, l’importation, la détention en vue de la vente, la mise en vente, la vente, la distribution à titre gratuit ou l’utilisation d’une matière fertilisante est normalement subordonnée à l’obtention d’une autorisation de mise sur le marché (« AMM », article L. 255-2 du code rural et de la pêche maritime). Les digestats sont considérés comme des matières fertilisantes, normalement soumises à cette procédure d’autorisation de mise sur le marché. Néanmoins, l’article L. 255-5 du Code rural et de la pêche maritime prévoit que dans certaines situations, les matières fertilisantes sont dispensées d’autorisation de mise sur le marché. Quatre procédures dérogatoires intéressent plus particulièrement les digestats. Ce sont : la conformité à une norme rendue d’application obligatoire par un arrêté pris sur le fondement du décret n°2009-697 du 16 juin 2009 relatif à la normalisation pris pour l’application de la loi n° 41-1987 du 24 mai 1941 relative à la normalisation ; la conformité à un règlement de l’Union européenne n’imposant pas d’autorisation devant être délivrée par un Etat membre préalablement à leur mise sur le marché ou faisant obstacle à ce qu’une restriction soit portée à leur mise sur le marché et à leur utilisation ; la conformité à un cahier des charges approuvé par voie réglementaire garantissant leur efficacité et leur innocuité (article L 255-5, 3° CRPM) ; les digestats issues d’installation classées pour la protection de l’environnement (ICPE) faisant l’objet d’un plan d’épandage garantissant l’absence d’effet nocif sur la santé humaine et animale et sur l’environnement ; C’est donc la troisième procédure dérogatoire listée que l’arrêté du 13 juin 2017 a vocation à régir. Le cahier des charges annexé à l’arrêté ne concerne que les digestats bruts issus d’un processus de méthanisation de type agricole au sens des articles L. 311-1 et D. 311-18 du code rural. En particulier, l’annexe I.1. de l’arrêté prévoit que « Seules les matières premières listées ci-dessous sont acceptées dans le méthaniseur: – les effluents ci-dessous issus d’élevages qui ne font pas l’objet de mesures de restrictions sanitaires: – les lisiers, fumiers ou fientes, à savoir tout excrément et/ou urine d’animaux d’élevage autres que les poissons, avec ou sans litière, – les eaux blanches de laiteries et de salles de traite, – les matières végétales agricoles brutes qui ne font pas l’objet de restrictions relatives au traitement par méthanisation dans le cadre de mesures de lutte contre les organismes nuisibles ou d’autres mesures sanitaires; – les déchets exclusivement végétaux issus de l’industrie agro-alimentaire, – les sous-produits animaux de catégorie 3 (Conformément à l’article 10 du règlement (CE) n°1069/2009) suivants: -le lait; -les produits issus du lait ou de la fabrication de produits laitiers (y compris le colostrum et les produits à base de colostrum), dont les eaux blanches telles que définies au point 15 de l’annexe I du règlement (UE) no 142/2011 susvisé et les boues de centrifugeuses ou de séparateurs de l’industrie du lait, c’est-à-dire les matières constituant des sous-produits de la purification du lait cru et de sa séparation du lait écrémé et de la crème (point 26, article 3, du règlement [CE] 1069/2009 susvisé). Les effluents d’élevage proviennent d’exploitations agricoles autorisées par l’agrément sanitaire mentionné au I- II-1 et sont conformes aux prescriptions de l’agrément. Ils représentent au minimum 33 % de la masse brute des matières premières incorporées dans le méthaniseur par an. Au total, les effluents d’élevage et les matières végétales agricoles brutes représentent au minimum 60 % de la masse brute des matières incorporées ». Les digestats conformes à ce cahier des charges (appelés produits), sont mis sur le marché en vrac uniquement, par cession directe entre l’exploitant de l’installation de méthanisation et l’utilisateur final, pour des usages en grandes cultures et sur prairies. Le cahier des charges précise : La liste des intrants autorisés : effluents d’élevage, résidus de culture et déchets végétaux issus de l’industrie agroalimentaire ainsi que les produits issus du lait ou de la fabrication de produits laitiers ; Le procédé de fabrication des digestats, dont le pourcentage d’intrants agricoles : au minimum 60 % de la masse brute des matières incorporée, mais aussi la qualité du produit en établissant des seuils maximaux pour les Éléments Traces Métalliques et microorganismes pathogènes ou encore le processus de méthanisation; Les conditions de stockage du digestat ; Les usages et conditions d’emploi du digestat : grandes cultures et sur prairies destinées à la fauche ou pâturées avec un matériel adapté selon la période d’application (avant ou pendant cultures) ; L’étiquetage du produit. Les exploitants d’unités de méthanisation agricoles seront donc particulièrement attentifs au contenu du cahier des charges, s’ils désirent pouvoir mettre sur le marché le digestat produit. La numérotation du cahier des charges semble indiquer que sa mise à jour ou l’ajout d’autres cahiers des charges sont envisagés. Cet arrêté participe d’un mouvement textuel relatif à la valorisation du digestat auquel les opérateurs biogaz devront rester attentifs.

Installations Classées : En cas d’indication de délais contradictoires au sein d’un courrier de notification, le délai le plus favorable bénéficie à l’exploitant

Par Jérémy TAUPIN – GREEN LAW AVOCATS Par un arrêt en date du 13 décembre 2016, la Cour administrative d’appel de Bordeaux a estimé (CAA de Bordeaux, 13 décembre 2016, 15BX01145) que dans le cas où le rapport d’inspection et son courrier de notification laissaient à l’exploitant un mois pour faire ses observations sans quoi il serait mis en demeure, et où le même courrier l’invitait à faire sa réponse sous 15 jours, l’administration devait respecter le délai le plus favorable pour l’exploitant. En l’espèce, une société de transport par autocar, a fait l’acquisition des éléments corporels et incorporels d’une société tierce, laquelle était notamment titulaire d’un récépissé de déclaration pour l’exploitation d’une station de distribution de carburant que le préfet de La Réunion lui avait délivré le 27 juillet 2005 au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE). Cette station-service a fait l’objet d’une visite de contrôle effectuée le 21 janvier 2013 par l’inspecteur des ICPE, visite à la suite de laquelle l’inspecteur rédigeait, le 6 février 2013, un rapport au terme duquel il proposait au préfet d’adresser à la société une mise en demeure de respecter les prescriptions générales de l’arrêté ministériel fixant les prescriptions générales applicables à ce type d’ICPE Le rapport communiqué, impartissait à l’exploitant un délai d’un mois pour adresser à l’administration le détail des actions à entreprendre en vue de se conformer à la règlementation applicable. Ce délai d’un mois figurait également dans le courrier de notification auquel était annexé le rapport de l’inspecteur des ICPE. Néanmoins, ce même courrier invitait la société à répondre aux observations formulées à son encontre dans un délai de quinze jours, sans quoi un arrêté de mise en demeure serait pris en application de l’article L. 514-5 du code de l’environnement. Le 4 mars 2013, le préfet de La Réunion mettait en demeure la société, en application de l’article L. 514-1 du code de l’environnement alors en vigueur, de déclarer à ses services le changement d’identité de l’exploitant, d’établir un plan à jour de ses installations existantes et de soumettre celles-ci à un contrôle périodique par des organismes agréées. Ainsi, le rapport et sa lettre d’accompagnement comportaient des mentions contradictoires en ce qui concerne le délai dont disposait la société pour faire valoir ses observations. La société relevait ici appel du jugement du tribunal administratif de le Saint-Denis qui a rejeté sa demande d’annulation de l’arrêté préfectoral du 4 mars 2013. La Cour note que : « dans de telles conditions, il appartient à l’administration de respecter le délai le plus favorable pour l’administré parmi ceux qu’elle mentionne. Il en résulte que le préfet de La Réunion ne pouvait, sans commettre d’irrégularité, prendre son arrêté de mise en demeure tant que le délai d’un mois, qui était mentionné aussi bien dans le rapport de l’inspecteur que dans la lettre de notification, n’était pas expiré. Il est constant que tel n’a pas été le cas dès lors que l’arrêté a été signé le 4 mars 2013, soit moins d’un mois après la notification du rapport de l’inspecteur des installations classées laquelle est intervenue, comme dit précédemment, le 8 février 2013. Par suite, l’arrêté de mise en demeure du 4 mars 2013 a été pris à l’issue d’une procédure irrégulière dès lors qu’il a privé la société START OI d’une garantie liée à la possibilité qui lui avait été laissée de présenter ses observations jusqu’au terme du délai d’un mois prévu ». Les exploitants d’ICPE seront donc bien avisés de vérifier les délais leur étant laissé pour répondre aux rapports de visite de l’inspection, notamment lorsque l’inspection préconise une mise en demeure. En tout état de cause, seul le délai le plus favorable doit être pris en compte. Cet arrêt doit être rapproché du principe selon lequel l’erreur de l’administration profite à l’administré, ce qui a déjà été rappelé par le Conseil d’Etat en ce qui concerne les conséquences de l’erreur de l’administration dans l’indication des voies et délais de recours (CE 21 décembre 2007, Groupement d’irrigation des prés de la forge et autres, n°280195).