Garantie décennale: un système de climatisation par pompe à chaleur constitue un ouvrage au sens de l’article 1792 du Code civil et la garantie peut s’appliquer (Cass, 24 sept.2014)

Dans un arrêt en date du 24 septembre 2014, la Cour de cassation (C.cass, civ, 3ème, 24 septembre 2014 n°13-19615) est venue préciser qu’un système de climatisation par pompe à chaleur constitue un ouvrage au sens des articles 1792 et suivants du Code civil de sorte que la garantie décennale doit pouvoir s’appliquer. Rappelons que la responsabilité décennale est prévue par l’article 1792 du Code civil qui dispose : « Tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage, des dommages, même résultant d’un vice du sol, qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination ». L’article 1792-2 du Code civil ajoute que : « La présomption de responsabilité établie par l’article 1792 s’étend également aux dommages qui affectent la solidité des éléments d’équipement d’un bâtiment mais seulement lorsque ceux-ci font indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d’ossature, de clos ou de couvert ». Il résulte de ces dispositions que les dommages allégués doivent présenter un caractère de gravité suffisant pour que la garantie décennale puisse être mise en jeu. Une jurisprudence abondante rappelle que les juges du fond doivent prendre soin d’observer ce caractère de la gravité des dommages (C.Cass. 3e civ., 8 oct. 1977, n° 95-20.903 : JurisData n° 1997-003989 et Cass. 3e civ., 19 nov. 1997, n° 95-15.811) pour éviter la censure de la Cour de cassation (Cass. 3e civ., 20 mai 1998, préc. – Cass. 3e civ., 27 mai 1999, n° 97-17.520 : RD imm. 1999, p. 406, obs. Ph. Malinvaud).  Il convient de distinguer deux types de dommages au titre de la garantie décennale : Les dommages compromettant la solidité de l’ouvrage (C.civ, art. 1792, al. 1er). La jurisprudence fournit de nombreux exemples à cet égard (C.Cass. 3e civ, 12 mars 1986, n° 84-14.486 : défaut d’étanchéité provoquant des infiltrations à l’intérieur des appartements ; C. Cass. 3e civ., 4 févr. 1986 : une fissure large et traversante ; C.Cass. 3e ci., 14 nov. 1984 : glissement de terrain déstabilisant l’assise d’une construction). Les dommages rendant l’immeuble impropre à sa destination : la référence à la notion de destination de l’immeuble permet alors la mise en œuvre de la garantie décennale. De fait, de nombreux dommages qui n’affectent pas la solidité de l’immeuble peuvent néanmoins être pris en compte au titre de la garantie décennale. Ces désordres peuvent résulter de la défaillance  soit des éléments de construction de l’immeuble (isolation par exemple) soit des éléments d’équipement. En l’espèce, il s’agissait de cette deuxième catégorie de dommages dont était saisie la Cour de cassation. Une société entendait faire jouer la garantie décennale eu égard aux désordres sur une climatisation par pompe à chaleur installée dans son immeuble. La Cour de cassation censure le raisonnement de la Cour d’appel qui n’avait pas accueilli la demande de garantie et rappelle: « … que pour débouter la société Maison Malleval de ses demandes formées sur l’article 1792 du code civil, l’arrêt retient que s’agissant d’un ouvrage conçu au sein d’un bâtiment de commerce et bureaux afin de rafraîchir l’air ambiant, il doit être considéré en raison de son importance et de son emprise sur le sous-sol comme constituant un élément d’équipement, que, compte tenu du fait qu’il ne s’agit pas d’un ouvrage autonome mais d’un simple élément d’équipement, l’impropriété à destination ne se conçoit pas au niveau de l’élément d’équipement lui-même mais bien à celui de l’ouvrage desservi dans son ensemble et que la société Maison Malleval ne dit pas en quoi un certain rafraîchissement de l’air ambiant était nécessaire au bon fonctionnement de sa surface de vente en rez-de-chaussée et de ses bureaux ; Qu’en statuant ainsi, alors que l’installation d’un système de climatisation par pompe à chaleur immergée au fond d’un puits en contact avec la nappe phréatique sur un ouvrage existant constitue un ouvrage dont l’impropriété à destination s’apprécie indépendamment de l’immeuble pris dans son ensemble, la cour d’appel a violé les textes susvisés». Cet arrêt de la Cour de cassation confirme que l’enjeu de la qualification d’’ouvrage’ est fondamental.  En cas de désordres, il permet à la victime d’obtenir la responsabilité du constructeur de l’ouvrage dès constat du désordre. En revanche, en l’absence de désordres affectant un ouvrage au sens juridique du terme, la victime de désordres devra rechercher et démontrer une faute, un préjudice, le lien de causalité entre les deux : soit une démonstration classique du droit de la responsabilité contractuelle, parfois difficile à démontrer en matière immobilière. Aurélien BOUDEWEEL Green Law Avocat

Eau: condamnation d’un distributeur d’eau pour coupure d’eau illégale (TI Soissons, 25 sept.2014)

Par une ordonnance de référé en date du 25 septembre 2014, le tribunal d’instance de SOISSONS a condamné un distributeur d’eau pour coupure d’eau illégale à une famille dans l’incapacité de payer ses factures (ici disponible: jugement TI SOISSONS 25.09.14). En l’espèce, le distributeur d’eau avait coupé entre le 28 juillet et le 15 septembre l’alimentation en eau d’une famille en grande difficulté financière qui était dans l’incapacité de payer ses factures. Rappelons que l’article L115-3 du Code de l’action sociale et des familles prévoit : « Dans les conditions fixées par la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement, toute personne ou famille éprouvant des difficultés particulières, au regard notamment de son patrimoine, de l’insuffisance de ses ressources ou de ses conditions d’existence, a droit à une aide de la collectivité pour disposer de la fourniture d’eau, d’énergie et de services téléphoniques dans son logement. En cas de non-paiement des factures, la fourniture d’énergie, d’eau ainsi que d’un service téléphonique restreint est maintenue jusqu’à ce qu’il ait été statué sur la demande d’aide ». Dans le cadre du litige qui lui était soumis, la tribunal d’instance de SOISSONS fait application de cette disposition et condamne le distributeur d’eau: « Selon l’article L115-3 du Code de l’action sociale et des familles, dans sa rédaction issue de la Loi n°2013-312 du 15 avril 2013 «  En cas de non-paiement des factures, la fourniture d’énergie, d’eau ainsi que d’un service téléphonique restreint est maintenue jusqu’à ce qu’il ait été statué sur la demande d’aide  auprès de la collectivité par cette personne ». Il découle de ce texte qu’un client d’un distributeur d’eau, qui est de bonne foi, mais qui, compte-tenu de l’existence d’une situation financière très obérée, est en retard dans le règlement de ses factures, a, en vertu de son droit fondamental à l’eau, le droit d’obtenir une aide de la collectivité publique pour disposer du maintien de la fourniture d’eau dans sa résidence principale, ou, à défaut, le droit de réclamer un plan d’apurement de sa dette auprès de son fournisseur, qui ne peut pas interrompre la fourniture d’eau si cet usager respecte les modalités de paiement de celle-ci qui ont été convenues entre les parties. (…) En l’espèce, la bonne foi de Madame Fabienne M… épouse D….est présumée. La L…. n’allègue ni ne prouve aucun élément qui serait susceptible d’établir sa mauvaise foi, concernant sa réelle volonté de s’acquitter du règlement de ses factures d’eau, alors qu’il résulte des termes d’un courrier en date du 18 septembre 2014, émanant de la Société S…, adressé à Madame Fabienne M….épouse D…., que cette dernière a versé 2 acomptes d’un montant de 30,00 €, le 20 août 2014, et de 50,00 € le 08 septembre 2014, conformément à l’échéancier convenu entre les parties ». En condamnant le distributeur d’eau, le tribunal d’instance souligne le droit fondamental de toute personne à l’eau. L’ordonnance rendue par la juridiction civile est l’occasion de mettre en lumière l’application des dispositions de l’article L115-3 du Code de l’action sociale et des familles. On retiendra de cette disposition: Que toute personne, en cas de non-paiement de ses factures d’eau consécutives à des difficultés financières à le droit d’obtenir de l’aide de la collectivité publique pour disposer du maintien de la fourniture d’eau et le distributeur doit dès lors maintenir son service. A défaut, toute personne a le droit de réclamer un plan d’apurement de sa dette auprès du fournisseur qui ne peut alors interrompre la fourniture en cas de respect des modalités de règlement convenus entre les parties. En tout état de cause, la juridiction saisie d’un litige appréciera la bonne foi du particulier qui est présumée mais peut être combattue par le distributeur. Notons que l’article L115-3 du code de l’action sociale et des familles s’applique à l’ensemble des distributeurs de fourniture d’eau mais également aux distributeurs d’énergie et de services téléphoniques. Compte-tenu des difficultés financières de nombreuses familles, il est fort à parier que les tribunaux seront de plus en plus sollicités au visa de cette disposition comme le démontrera également le futur jugement rendu par le tribunal d’instance de BOURGES dans un litige identique au présent litige concernant un autre distributeur et dont le délibéré est attendu le 12 novembre prochain…. Affaire à suivre. Aurélien BOUDEWEEL Green Law Avocat

Diagnostic de performance énergétique : son absence à l’acte n’entraîne pas l’annulation de la vente !

Par un arrêt en date du 8 juillet 2014 (C.cass., 3ème civ.,8 juillet 2014, n°13-19-330) la Cour de cassation rappelle dans le cadre d’un litige relatif à la vente d’un immeuble, que l’absence de diagnostic de performance énergétique au dossier de vente n’entraîne pas pour autant son annulation. En l’espèce, après qu’un contrat de vente fût signé, les  acquéreurs ont sollicité par la voie judiciaire la nullité de ce dernier au motif que le droit de rétractation prévu par l’article L. 271-1 du CCH n’aurait pas été régulièrement purgé. Selon eux, le délai de rétractation n’aurait pas commencé à courir, faute d’avoir annexé au compromis le diagnostic de performance énergétique (DPE) et l’état des risques naturels et technologiques. Ils ajoutent enfin et compte tenu de la notification du cahier des charges et du règlement du lotissement, postérieurement à la signature du compromis, qu’il aurait fallu procéder à une nouvelle purge du délai de rétractation Rappelons que le législateur contemporain a multiplié les diagnostics obligatoires avant toute vente immobilière, effectués par des organismes agréés et devant figurer en annexe de la promesse de vente ou, à défaut de promesse, dans l’acte authentique de vente. La plupart de ces annexes sont contenues dans le dossier de diagnostic technique prévu par l’ordonnance n° 2005-655 du 8 juin 2005 (art. L. 271-4-I du Code de la construction et de l’habitation et Décret n° 2006-1114, 5 sept. 2006). Notons que les articles L. 134-3 du Code de la construction et de l’habitation et L. 271-4 et suivants du même code prévoient que dans le cas d’une vente d’immeubles existants, le diagnostic de performance énergétique (DPE) doit être annexé à la promesse de vente. Dans le cadre du litige qui lui était soumis, la Cour de cassation confirme l’appréciation portée par la Cour d’appel qui avait rejeté la demande des acquéreurs en retenant que : « Attendu qu’ayant souverainement retenu que M. et Mme X… s’étaient engagés en toute connaissance des contraintes environnementales du lotissement sans que leur consentement ne fût vicié et qu’en signant l’acte authentique sans émettre de réserve ils avaient renoncé à se prévaloir de l’irrégularité de la purge du droit de rétractation, la cour d’appel, qui n’a pas modifié l’objet du litige ni violé le principe de la contradiction et devant laquelle il n’était pas soutenu que l’objet de la vente avait été substantiellement modifié par les documents remis après la signature de la promesse de vente, a pu déduire de ces seuls motifs, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, que les demandes des acquéreurs devaient être rejetées». L’arrêt rendu par la Cour de cassation confirme plusieurs décisions déjà rendues par les juridictions du fond. Une jurisprudence abondante rappelle que le DPE n’est exigible que pour les ventes conclues postérieurement au 1er  novembre 2006. En l’occurrence, les juges ont pu rappelé que la loi ne sanctionne pas l’absence dudit diagnostic par la nullité de la promesse (CA Rouen, 1re ch., 18 mai 2011, n° 10/02832). Le présent arrêt est intéressant en ce qu’il souligne que même pour les ventes intervenues après le 1er novembre 2006, l’absence de diagnostic de performance énergétique n’entraîne pas la nullité de la vente. La cour de cassation constate en l’occurrence que les acquéreurs avaient signés l’acte authentique sans émettre la moindre réserve, renonçant ainsi à se prévaloir de l’irrégularité de la vente. Si l’arrêt de la cour de cassation peut être surprenant au premier abord, il est en tout état de cause empreint d’une certaine logique puisque l’on peut constater que la cour d’appel puis la cour de cassation avaient pu relever que les acquéreurs ne soulevaient à aucun moment le fait que l’objet de la vente avait été substantiellement modifié par les documents remis après la vente… ce qui aurait pu changer le sens de la décision! Me Aurélien BOUDEWEEL Green Law Avocat

Solaire / liquidation des installateurs photovoltaïques : tout n’est pas perdu en cas de conclusion de contrat de crédit affecté ! (acte II)

Par un jugement en date du 14 février 2014 (Tribunal d’instance QUIMPER, 14 février 2014, RG n°11-13-000438), le Tribunal d’instance de QUIMPER confirme la résolution du contrat de crédit signé par les particuliers pour financer leur installation photovoltaïque dès lors que la résolution du contrat principal est encourue et prononcée judiciairement. Ce jugement confirme donc un courant jurisprudentiel dont nous nous étions fait l’écho dans un précédent article (Article du 14 avril 2014, C. d’appel de LIMOGES, 24 janvier 2014, RG n°12/01358), En l’espèce, des particuliers avaient contracté auprès d’une société spécialisée dans la fourniture et la pose d’un système solaire photovoltaïque. Très rapidement, ils ont reproché à la société de ne pas avoir effectué les travaux dans les règles de l’art et les opérations de branchement alors que cela avait été contractuellement prévu au contrat. Comme souvent, les particuliers avaient contracté un contrat de crédit accessoire auprès d’une banque afin de financer ledit projet. Il est par ailleurs à noter que la société installatrice était entrée, dans l’intervalle, en procédure collective. Sur le plan juridique, les particuliers sollicitaient de la juridiction que les irrégularités du bon de commande soient constatées au visa des dispositions du code de la consommation. C’est exactement ce que la juridiction de QUIMPER constate en jugeant :  « Le contrat dénommé : « demande de candidature au programme Maison Verte » signé le 23 avril 2012, à leur domicile, entre M. et Mme … et le représentant de la SARL …., après un démarchage téléphonique est affecté de nombreuses irrégularités au regard des articles L 121-23 du code de la consommation et suivants du Code civil. Notamment, la nature et les caractéristiques précises des biens et prestations offerts, la mention de la faculté de renonciation et les conditions d’exercice de celle-ci, la mention intégrale des articles L121-23 à L121-26 du code de la consommation ne sont pas indiquées. De plus, le formulaire utilisé est dépourvu de bordereau de rétractation conforme aux dispositions du code de la consommation (…) La nullité du contrat est évidente ». Ce type de contrat est malheureusement monnaie courante et un flux jurisprudentiel en est attendu puisqu’à la nullité du contrat s’ajoute fréquemment des malfaçons on non exécution de contrat, puis la liquidation judiciaire de la société ayant usé de pratiques trompeuses. Le Tribunal d’instance de QUIMPER tire ensuite les conséquences de cette nullité sur le contrat de crédit affecté en jugeant qu’:  « Elle entraîne en application des dispositions de l’article L 311-32 du code de la consommation celle du contrat de crédit ». Ce jugement est intéressant puisqu’il rappelle l’interdépendance du contrat principal et du contrat de crédit affecté et les conséquences découlant de la résolution du contrat principal sur le second. A noter que la loi n°2014-344 du 17 mars 2014 a réformé plusieurs dispositions du code de la consommation intéressant les opérations de démarchage. On retiendra que le nouvel article L111-1 I du code de la consommation impose des obligations plus étendues à la charge du professionnel puisque ce dernier doit informer le consommateur les informations suivantes : Les caractéristiques essentielles du bien ou du service. Il est précisé que cette information doit être faite en fonction du support de communication utilisé : on ne donne pas autant de détail sur les caractéristiques du bien si celui-ci est exposé en vitrine ou si la commande se fait par téléphone ; Le prix du bien ou du service selon les modalités de l’article L. 113-3 qui n’a pas été modifié ; La date ou le délai dans lequel le professionnel livrera le bien ou exécutera le service ; L’identification du professionnel, un décret en Conseil d’État fixera les éléments de cette identification. Un autre décret, prévu à l’article L. 111-2-1 nouveau, précisera les informations à donner lorsque le contrat porte sur la fourniture de services et ne donne pas lieu à un écrit. Surtout, aux termes de l’article L212-21 du Code de la consommation le consommateur dispose dorénavant d’un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d’un contrat conclu à distance, à la suite d’un démarchage téléphonique ou hors établissement, sans avoir à motiver sa décision. Rappelons que ces nouvelles dispositions ne s’appliquent aux contrats conclus après le 13 juin 2014. Nul doute que les dispositions protectrices, rappelées dans ce jugement par le Tribunal d’instance de QUIMPER, resteront plus que jamais d’actualités malgré la réforme récente du code de la consommation. Aurélien BOUDEWEEL Green Law Avocat

Solaire/ liquidation des sociétés spécialisées en photovoltaïque : l’irrégularité du contrat de crédit comme sortie de secours ? (Cass, 30 avr.2014)

Par un arrêt en date du 30 avril 2014 (C.cass, 30 avril 2014, n°13-15581), la Cour de Cassation rappelle que le contrat de crédit destiné à financer la fourniture et la pose de panneaux photovoltaïques constituant des travaux de construction relève des opérations énumérées à l’article L 312-2 du Code la consommation, ce qui entraîne un certain formalisme qui peut être favorable aux producteurs d’électricité. En l’espèce, un couple de particuliers avait souscrit auprès d’un organisme de crédit la somme de 28 600 euros destiné à financer la vente et l’installation sur leur immeuble d’équipements de production d’électricité par panneaux photovoltaïques. Il semblerait que l’installation produisait de l’électricité destinée à être vendue mais aussi à être consommée. Devant une installation mal exécutée et où il avait d’ailleurs pu être constaté que la sécurité des lieux était compromise, les particuliers avaient assigné la société installatrice des panneaux solaires, son mandataire judiciaire (puisque cette dernière était placée en liquidation judiciaire) et la société de crédit au titre de l’article L312-2 du Code de la consommation. Il est important de relever que les particuliers,, de manière habile, soutenaient que le contrat de crédit qu’ils avaient souscrit était soumis aux dispositions de l’article L312-12 du Code de la consommation et qu’en tout état de cause le contrat de prêt et le contrat principal étaient interdépendants de telle sorte que la résolution du contrat principal emportait de plein droit la résolution du contrat de prêt. Notons que la banque soutenait que le contrat de crédit en l’espèce n’entrait pas dans le champ d’application protecteur de l’article L312-12 du Code de la consommation lequel dispose : « Les dispositions du présent chapitre s’appliquent aux prêts qui, quelle que soit leur qualification ou leur technique, sont consentis de manière habituelle par toute personne physique ou morale en vue de financer les opérations suivantes : 1° Pour les immeubles à usage d’habitation ou à usage professionnel et d’habitation : a) Leur acquisition en propriété ou la souscription ou l’achat de parts ou actions de sociétés donnant vocation à leur attribution en propriété, y compris lorsque ces opérations visent également à permettre la réalisation de travaux de réparation, d’amélioration ou d’entretien de l’immeuble ainsi acquis ; b) Leur acquisition en jouissance ou la souscription ou l’achat de parts ou actions de sociétés donnant vocation à leur attribution en jouissance, y compris lorsque ces opérations visent également à permettre la réalisation de travaux de réparation, d’amélioration ou d’entretien de l’immeuble ainsi acquis ; c) Les dépenses relatives à leur réparation, leur amélioration ou leur entretien lorsque le montant du crédit est supérieur à 75 000 € ; d) Les dépenses relatives à leur construction ; 2° L’achat de terrains destinés à la construction des immeubles mentionnés au 1° ci-dessus ». Les conséquences de cette soumission de certains contrats de prêt à l’article L312-12 du Code de la consommation sont nombreuses puisqu’un formalisme doit être respecté. L’article L312-10 du Code la consommation prévoit ainsi un délai de réflexion de dix jours au bénéfice de l’emprunteur:  « L’envoi de l’offre oblige le prêteur à maintenir les conditions qu’elle indique pendant une durée minimale de trente jours à compter de sa réception par l’emprunteur. L’offre est soumise à l’acceptation de l’emprunteur et des cautions, personnes physiques, déclarées. L’emprunteur et les cautions ne peuvent accepter l’offre que dix jours après qu’ils l’ont reçue. L’acceptation doit être donnée par lettre, le cachet de la poste faisant foi ». En l’espèce, la Cour de cassation rejette l’argumentation de la banque et confirme le raisonnement suivi par la Cour d’appel en rappelant : « Mais attendu qu’ayant constaté que le prêt contracté était d’un montant supérieur à 21 500 euros et qu’il était destiné à financer la fourniture et la pose de panneaux photovoltaïques constituant des travaux de construction et permettant aux propriétaires d’un immeuble à usage d’habitation non seulement de vendre l’électricité produite à un fournisseur d’énergie, mais également d’en bénéficier pour leur usage personnel, la cour d’appel en a exactement déduit que ce prêt relevait des opérations énumérées à l’article L. 312-2 du code de la consommation dans sa rédaction applicable en la cause ».   Plus encore et pour justifier le versement de dommages et intérêts la Cour de cassation précise :  « Mais attendu qu’ayant retenu, par motifs adoptés, que l’absence d’émission d’une offre de prêt immobilier avait fait obstacle aux dispositions plus protectrices des articles L. 312-1 et suivants du code de la consommation, notamment celles relatives à la formation du contrat et au délai de réflexion de dix jours prévu à l’article L. 312-10, la cour d’appel a caractérisé le préjudice subi par les emprunteurs ».   La Haute juridiction se focalise donc dans le litige qui lui est soumis sur l’irrégularité du contrat de crédit pour justifier la réparation des particuliers, sans se positionner sur les motifs qui auraient pu justifier en l’espèce la résolution du contrat principal (chantier de l’installation laissé à l’abandon). D’un point de vue pratique, cet arrêt de la Cour de cassation est particulièrement intéressant puisqu’il permet de rappeler aux particuliers qui ont contracté des prêts en vue de financer leurs projets d’installations photovoltaïques qu’une action en résolution du contrat principal et du contrat de prêt peut être exercée, indépendamment du placement en liquidation judiciaire de la société spécialisées dans l’installation photovoltaïque. Face à la multiplication du placement en liquidation ou redressement judiciaire de nombreuses sociétés spécialisées dans la vente et l’installation de centrales photovoltaïques, l’action en résolution du contrat de prêt devient donc une arme juridique redoutable comme en témoigne le présent arrêt. Ainsi et concrètement les particuliers en obtenant la résolution de leur contrat de prêt pourront atténuer sensiblement leur préjudice en n’ayant plus à subir le remboursement des échéances de prêts pour une installation hors service ou mal posée. Me Aurélien BOUDEWEEL Green Law Avocat