Entreprises en difficulté et environnement : nouvelles publications chez LexisNexis

Entreprises en difficulté et environnement : nouvelles publications chez LexisNexis

Par David DEHARBE, avocat gérant (Green Law Avocats)

Au sein de la Revue de procédures collectives civiles et commerciales des éditions LexisNexis, sont publiés les actes du webinaire abordant la thématique « Protection de l’environnement et droit des entreprises en difficulté » (LexisNexis, Rev proced. coll. décembre 2024, dossiers 26 à 29, p.51 à 69).

Pénal de l’environnement : Une nouvelle circulaire du 9 octobre 2023 en vue de l’efficacité de la politique pénale environnementale 

Pénal de l’environnement : Une nouvelle circulaire du 9 octobre 2023 en vue de l’efficacité de la politique pénale environnementale 

Par Ségolène REYNAL, avocate of counsel (Green Law Avocats)

Le 9 octobre une nouvelle circulaire de politique pénale en matière de justice pénale environnementale a été publiée (NOR : JUSD2327030C).

Elle enrichit et précise la dernière circulaire sur le sujet en date du 11 mai 2021 visant à consolider le rôle de la justice environnementale (NOR : JUSD2114982C).

La loi ASAP et la remise en état des ICPE

Par David DEHARBE (Green Law Avocats) La loi dite ASAP, LOI n° 2020-1525 du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique, a d’une manière générale pour objet d’alléger les procédures administratives et de sécuriser la réglementation applicable aux porteurs de projets en matière environnementale pour permettre le développement de l’activité industrielle. Et, cette même loi est venue modifier le régime de la remise en état en matière d’ICPE par adoption de ses articles 57 et 58. Le régime de la remise en état des sites applicable aux ICPE à l’occasion de l’arrêt définitif d’une installation classée pour la protection de l’environnement est d’ores et déjà encadré  par le code de l’environnement. En effet, le code de l’environnement prévoit que l’exploitant doit notifier au préfet la date de l’arrêt définitif au moins 3 mois avant cet arrêt, conformément à l’article R.512-46-25 du code de l’environnement pour les installations soumises à enregistrement. Ce délai est également de 3 mois en ce qui concerne les ICPE soumises à autorisation et peut être porté à 6 mois pour les autorisations à durée limitée conformément à l’article R.512-39-1 du code de l’environnement. Concernant les ICPE soumises à déclaration, l’exploitant notifie au préfet la date de l’arrêt définitif au moins 1 mois avant cet arrêt (article R.512-66-1 du code de l’environnement). La notification ainsi prévu doit indiquer les mesures prises ou prévues pour assurer, dès l’arrêt de l’exploitation, la mise en sécurité du site et ces mesures comportent, notamment : 1° L’évacuation ou l’élimination des produits dangereux et la gestion des déchets présents sur le site ; 2° Des interdictions ou limitations d’accès au site ; 3° La suppression des risques d’incendie et d’explosion ; 4° La surveillance des effets de l’installation sur son environnement. Mais les obligations liées à la cessation d’activité ne sont pas limitées à la mise en sécurité du site. L’exploitant d’une installation doit encore réhabiliter le site pour rendre compatible les sols avec un usage futur conformément au code de l’environnement ou permettre un usage comparable à celui de la dernière période d’exploitation de l’installation mise à l’arrêt. Quel que soit le régime applicable à l’installation, l’exploitant doit placer le site de l’installation dans un état tel qu’il ne puisse porter atteinte aux intérêts mentionnés à l’article L. 511-1 du code de l’environnement et en fonction du type d’installations : qu’il permette un usage futur du site déterminé selon les dispositions des articles R. 512-39-2 et R. 512-39-3 conformément à l’article R. 512-39-1 du code de l’environnement concernant le régime de l’autorisation. qu’il permette un usage futur du site déterminé selon les dispositions des articles R. 512-46-26 et R. 512-46-27 conformément aux dispositions de l’article R512-46-25 du code de l’environnement concernant le régime de l’enregistrement. qu’il permette un usage futur du site comparable à celui de la dernière période d’exploitation de l’installation  pour ce qui concerne les installations soumises à déclaration conformément aux dispositions de l’article R512-66-1 du code de l’environnement. Les réhabilitations de sites ICPE, notamment sous le régime de l’autorisation et de l’enregistrement, peuvent impliquer la validation du projet et de l’usage futur par le préfet. Et l’article R512-66-2 du code de l’environnement dispose qu’à tout moment et même après la remise en état du site, le préfet peut imposer à l’exploitant, les prescriptions nécessaires à la protection des intérêts mentionnés à l’article L. 511-1. En cas de modification ultérieure de l’usage du site, l’exploitant ne peut se voir imposer de mesures complémentaires induites par ce nouvel usage sauf s’il est lui-même à l’initiative de ce changement d’usage. La procédure de réhabilitation peut donc s’avérer longue et complexe et nécessiter de nombreux échanges avec la DREAL et le préfet, plus particulièrement lorsque le site a été l’objet de pollutions historiques. C’est pourquoi le nouvel exploitant ou l’aménageur du SSP peut souhaiter se substituer à l’exploitant en prenant à sa charge cette réhabilitation. Le code de l’environnement prévoit  en effet la possibilité pour l’exploitant qui cesse l’exploitation d’avoir recours à un «tiers demandeur» qui souhaiterait changer l’usage actuel du site, de se substituer à l’exploitant, pour réaliser les travaux de réhabilitation en fonction de l’usage que ce tiers envisage pour le terrain concerné. Cette possibilité est prévue et encadrée par l’article L. 512-21 du code de l’environnement depuis la loi ALUR. Cette substitution n’est possible que si la demande en est faite auprès des services de l’Etat du département. Le tiers demandeur adresse au représentant de l’Etat dans le département un mémoire de réhabilitation définissant les mesures permettant d’assurer la compatibilité entre l’usage futur envisagé et l’état des sols. Le représentant de l’Etat se prononce alors sur l’usage proposé et peut prescrire au tiers demandeur les mesures de réhabilitation nécessaires pour l’usage envisagé. La loi ASAP est venue modifier le régime de la remise en état applicable aux ICPE en consacrant à l’article 57 le recours à des entreprises certifiées pour attester d’une remise en état effective du site pollué (I.), et en élargissant la possibilité de transférer l’obligation de remise en état à un tiers (II.). La loi ASAP a également modifié l’article L. 512-6-1 du code de l’environnement en imposant aux installations mises à l’arrêt et soumises à autorisation de ne pas porter atteinte aux intérêts mentionnés à l’article L. 211-1 du même code, et elle a ajouté à l’article L. 514-8 du code de l’environnement, les dépenses que l’Etat a engagées ou fait engager dans le cadre de la gestion ou du suivi des impacts et conséquences d’une situation accidentelle (III.). Pour finir la loi d’accélération et de simplification de l’action publique édicte à son article 58 la possibilité pour le préfet de fixer un délai contraignant pour les opérations de réhabilitation et de remise en état des sites ayant accueilli des ICPE (IV.). La consécration du recours à une entreprise certifiée pour attester de la remise en état du site  L’article 57 de la loi ASAP a inséré aux articles L. 512-6-1 et L. 512-7-6 qui concernent les installations soumises à enregistrement et autorisation…

DOMMAGE DE POLLUTION MINIER DE L’EXPLOITANT DISPARU : L’ETAT DOIT INDEMNISER LES PREJUDICES DE JOUISSANCE ET DANS LES CONDITIONS D’EXISTENCE

Par Maître David DEHARBE (Green Law Avocats) Par un jugement du 31 octobre, le tribunal administratif de Lyon (TA Lyon, 31 oct. 2019, n°1708503) a considéré que l’Etat est tenu de garantir les dommages issus d’une pollution des sols causée par l’activité antérieure d’une exploitation minière quand bien même l’exploitant n’existerait plus. Pour une meilleure compréhension du jugement, il convient de rappeler les dispositions de l’article L. 155-3 du Code minier (disponible ici), qui dispose que « L’explorateur ou l’exploitant ou, à défaut, le titulaire du titre minier est responsable des dommages causés par son activité. Il peut s’exonérer de sa responsabilité en apportant la preuve d’une cause étrangère. Sa responsabilité n’est limitée ni au périmètre du titre minier ni à sa durée de validité. En cas de disparition ou de défaillance du responsable, l’État est garant de la réparation des dommages causés par son activité minière. Il est subrogé dans les droits de la victime à l’encontre du responsable ». En l’espèce, les propriétaires d’un moulin rénové, sur le territoire de la commune de Les Salles, situé dans le périmètre d’un ancien secteur minier, font état d’une pollution sur leur territoire. Une étude sanitaire avait été réalisée par un groupement d’intérêt public et avait révélé une pollution importante sur le terrain d’assiette de leur propriété, mais aussi de la cave de leur habitation. Cette pollution au plomb n’était pas anodine. Les requérants avaient adressé une réclamation préalable au préfet de la Loire, afin d’obtenir la réparation des conséquences dommageables de cette pollution. Leur réclamation était restée sans réponse, ces derniers saisissent le TA de Lyon afin d’obtenir une indemnisation. Les juges font tout d’abord une appréciation de la pollution au regard de l’usage antérieur du terrain. Afin d’établir le lien de causalité, les juges se fondent sur l’étude réalisée par le groupement d’intérêt public ainsi qu’un arrêté préfectoral en date du 3 juillet 2019. Les résultats des divers prélèvements réalisés pour ladite étude démontrent que la contamination au plomb affecte non seulement le terrain, mais également la cave d’habitation des requérants. Si la pollution n’est pas issue de l’activité de l’ancienne fonderie exploitée de 1730 à 1844 sur la même parcelle, elle est en revanche issue des déchets ayant pour origine l’ancienne activité minière située sur le secteur proche de Saint-Martin-La-Sauveté. Les juges relèvent que « La pollution dont se plaignent M. B… et Mme A… apparaît donc directement en lien avec cette activité ». Le lien de causalité entre les dommages issus de la pollution relève ici de l’identification des polluants par une analyse des sols. Si l’ancien exploitant minier, ou les autres responsables de cette pollution au plomb ont aujourd’hui disparu, la juridiction estime que « les intéressés sont fondés, en application des dispositions de l’article L. 155-3 du code minier, à solliciter la garantie de l’État en réparation des dommages subis du fait de cette activité minière ». Les dispositions du Code miner encadrent la responsabilité de l’exploitation, et à titre subsidiaire celle de l’État. Classiquement, l’exploitant ou à défaut le titulaire d’un titre minier est responsable des dommages de son activité. Il est difficile pour l’exploitant de se dégager de sa responsabilité en cas de dommage. Dans ce cas, la responsabilité civile de l’exploitant pourra être engagée, et cela même après la fermeture du complexe minier (Cass., 3e civ., 24 sept. 2014, Synd. assainissement Orne aval c/ Sté des Mines de Sacilor-Lormines n° 11-22386). L’exploitant ne peut invoquer sa non-responsabilité que par la preuve d’une cause étrangère. L’utilisation de cet article s’apprécie souvent au regard de l’apparition tardive des effets pervers de pollutions parfois mal renseignée ou même dissimulée. La loi permet une réparation et une responsabilité de l’État dans deux cas spécifiques. L’article L. 155-3 du code minier précité, précise que l’État est garant de la réparation des dommages causés par une activité minière, et ce dès lors qu’il y a disparition ou défaillance du responsable. La notion de disparition est aisée à comprendre, elle agit dans le cas où l’on est dans l’impossibilité d’identifier formellement le responsable de l’activité, que cela soit sa disparition physique ou morale. Dans le cas de la défaillance, cela signifie que l’exploitant n’est plus en capacité d’assumer ces obligations. Cela peut notamment être le cas lors d’une incapacité financière (au sens de la circulaire   du 25 juill. 2000, relative à la mise en œuvre des articles 75-1 à 75-3 du Code minier). Cette deuxième hypothèse n’a pas été envisagée en l’espèce. Il est à noter que la procédure de délivrance d’un permis d’exploitation prend en considération la capacité financière du futur exploitant (CE, 13 juillet 2006, Société Geotech International, n° 273184). Dans notre espèce, les requérants demandent une indemnisation de leurs préjudices de jouissance de leur bien et d’un trouble dans leurs conditions d’existences.  Ils obtiennent gain de cause : «  il résulte de l’instruction que le remblaiement du terrain de M. B… et Mme A… avec des stériles issus de l’activité minière exploitée sur le secteur de Saint-Martin-la-Sauveté a entraîné une pollution au plomb mise en évidence à partir de 2014 par l’étude Géodéris, dont les résultats provisoires ont été portés à la connaissance des requérants lors d’une réunion du 13 novembre 2014. Dès le 21 novembre 2014, l’agence régionale de santé Rhône-Alpes les a invités à faire mesurer le dosage de la plombémie dans leur sang et celui de leurs enfants, puis de se soumettre à un suivi médical régulier afin de surveiller l’augmentation éventuelle de ce taux. Par un arrêté du 13 avril 2016, le préfet de la Loire a instauré des restrictions sanitaires d’utilisation, de mise sur le marché et la surveillance des productions animales et végétales issues notamment des parcelles appartenant aux requérants, classées à la fois en zone de protection et en zone de surveillance. Toute activité agricole s’est ainsi trouvée interdite sur leur terrain, ainsi que la consommation et la cession de toute production d’un éventuel jardin potager, dont la culture est déconseillée. Les requérants doivent également suivre de strictes recommandations sanitaires générales, telles que l’interdiction de laisser…

ICPE / Liquidateurs judiciaires : les mesures de cessation d’activité d’une ICPE vous incombent en cas d’inertie de l’exploitant (CE 28 septembre 2016)

Par Graziella DODE- GREEN LAW AVOCATS Dans un arrêt du 28 septembre 2016, le Conseil d’Etat rappelle les obligations des liquidateurs judiciaires en matière d’installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE). En l’espèce, la société mise en liquidation judiciaire avait exploité des installations classées d’élevage et de fabrication d’engrais (rubriques 2111-1 et 2170-1). Le liquidateur désigné par un jugement du tribunal de commerce n’avait pas rempli ses obligations au titre de l’article R. 512-39-1 du code de l’environnement. Pour rappel, cet article dispose que : « I.-Lorsqu’une installation classée soumise à autorisation est mise à l’arrêt définitif, l’exploitant notifie au préfet la date de cet arrêt trois mois au moins avant celui-ci. Ce délai est porté à six mois dans le cas des installations visées à l’article R. 512-35. Il est donné récépissé sans frais de cette notification. II.-La notification prévue au I indique les mesures prises ou prévues pour assurer, dès l’arrêt de l’exploitation, la mise en sécurité du site. Ces mesures comportent, notamment : 1° L’évacuation des produits dangereux, et, pour les installations autres que les installations de stockage de déchets, gestion des déchets présents sur le site ; 2° Des interdictions ou limitations d’accès au site ; 3° La suppression des risques d’incendie et d’explosion ; 4° La surveillance des effets de l’installation sur son environnement. III.-En outre, l’exploitant doit placer le site de l’installation dans un état tel qu’il ne puisse porter atteinte aux intérêts mentionnés à l’article L. 511-1 et qu’il permette un usage futur du site déterminé selon les dispositions des articles R. 512-39-2 et R. 512-39-3. » En cas de procédure collective, il revient au liquidateur désigné de remplir ces obligations si l’exploitant ne les a pas accomplies. En effet, « le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l’administration et de la disposition de ses biens même de ceux qu’il a acquis à quelque titre que ce soit tant que la liquidation judiciaire n’est pas clôturée. Les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur » (Com. art. L. 641-9, I). En conséquence, selon le Conseil d’Etat, « lorsque les biens du débiteur comprennent une installation classée pour la protection de l’environnement dont celui-ci est l’exploitant, il appartient au liquidateur judiciaire qui en assure l’administration, de veiller au respect des obligations découlant de la législation sur les installations classées pour la protection de l’environnement ». Le liquidateur doit notifier la cessation d’activité au préfet et prévoir les mesures permettant d’assurer la mise en sécurité du site. Il doit également apporter les éléments de preuve permettant de s’assurer que le site est dans un état qui ne peut porter atteinte aux intérêts protégés par l’article L. 511-1 et faire des propositions d’usage futur du site. En l’espèce, le liquidateur s’était borné à fournir des courriers de l’exploitant à la préfecture dans lequel l’exploitant refusait de déclarer le site en cessation d’activité et affirmait, sans apporter de preuve, que la mise en sécurité du site était effective. Le liquidateur a ensuite fait obstacle à la visite du site par l’inspection des installations classées. Il a ainsi fait l’objet d’un arrêté préfectoral de mise en demeure en date du 20 octobre 2010 lui demandant d’adresser dans un délai d’un mois la déclaration de cessation d’activité relative au site exploité par l’entreprise, en précisant les mesures prises ou prévues pour assurer la mise en sécurité du site, et de transmettre ses propositions, dans un délai de deux mois, au maire et au propriétaire du terrain sur le type d’usage futur envisagé dans le cadre de la remise en état du site. Dans sa décision du 28 septembre 2016, le Conseil d’Etat a rejeté le pourvoir formé par le liquidateur, estimant que la Cour administrative d’appel n’avait commis aucune erreur de droit (CAA Versailles, 5 juin 2014, n° 12VE01136) en confirmant le rejet de sa demande d’annulation de l’arrêté de mise en demeure dont il avait fait l’objet (TA Montreuil, 26 janvier 2012, n° 1013329). Le liquidateur s’était défendu sur le fondement de l’article L. 622-17 du code de commerce, alinéa IV, selon lequel « les créances impayées perdent leur privilège si elles n’ont pas été portées à la connaissance de l’administrateur et, à défaut, du mandataire judiciaire ou, lorsque ces organes ont cessé leurs fonctions, du commissaire à l’exécution du plan ou du liquidateur, dans le délai d’un an à compter de la fin de la période d’observation ». En l’espèce, le liquidateur estimait que la mise en demeure de prendre des mesures de dépollution n’avait pas été portée à sa connaissance dans le délai imparti. Pour autant, dans cette décision, le Conseil d’Etat démontre que l’administration garde son pouvoir de police administrative, et plus précisément de police des installations classées. L’arrêté préfectoral de mise en demeure de prendre des mesures de dépollution est légal même lorsqu’il est pris au-delà du délai d’un an précité.