Les éoliennes et la L.P.O. : le contentieux sans le discernement ?

Les éoliennes et la L.P.O. : le contentieux sans le discernement ?

Le 24 décembre 2008, le préfet de l’Aude a délivré à trois sociétés distinctes trois permis de construire pour trois parcs éoliens comportant chacun cinq éoliennes et un poste de transformation. L’association « Ligue de Protection des Oiseaux », délégation de l’Aude (LPO Aude), a saisi le tribunal administratif de Montpellier d’une demande d’annulation de ces permis de construire qui, par un jugement du 22 novembre 2012, n°0902691, a annulé lesdits permis. Les sociétés dont les permis de construire des parcs éoliens ont été annulés ont alors interjeté appel du jugement. La cour administrative d’appel de Marseille a rendu son arrêt le 28 novembre 2014 (CAA Marseille, 28 novembre 2014, n°13MA00344). Aux termes de cette décision, la Cour a, dans un premier temps, annulé le jugement du tribunal administratif de Montpellier pour méconnaissance du principe du contradictoire (I). Puis, dans un second temps, elle a fait usage de son pouvoir d’évocation mais a, tout de même, annulé les trois permis de construire litigieux. Deux motifs d’annulation des permis de construire ont été relevés par la Cour : en premier lieu, une insuffisance de l’étude d’impact  dans ses volets ornithologiques et chiroptérologique (II), et, d’autre part, une erreur manifeste d’appréciation commise par le Préfet au regard des dispositions de l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme quant à la perturbation d’un radar météorologique par les éoliennes. Mais ce dernier moyen n’est-il pas aux antipodes de l’objet associatif de la LPO ? (III) I. L’annulation du jugement pour méconnaissance du principe du contradictoire Par une lettre du 31 octobre 2012, le président de la première chambre du tribunal administratif de Montpellier a indiqué aux parties, en application de l’article R. 611-7 du code de justice administrative, que le tribunal était susceptible de relever d’office le moyen tiré du défaut d’intérêt à agir de la Ligue de protection des oiseaux, délégation de l’Aude. En réponse à cette lettre, la LPO Aude, a produit, par un mémoire enregistré le 5 novembre 2012, l’agrément préfectoral dont elle bénéficie pour engager des instances devant les juridictions administratives pour tout litige se rapportant à la protection de la nature et de l’environnement. Ce mémoire n’a toutefois pas été transmis aux parties adverses qui ont, en appel, invoqué une méconnaissance du principe du contradictoire. En effet, aux termes de l’article L. 5 du code de justice administrative : « L’instruction des affaires est contradictoire. Les exigences de la contradiction sont adaptées à celles de l’urgence. » Aux termes de l’article R. 611-1 du même code : « […] La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-3, R. 611-5 et R. 611-6. / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s’ils contiennent des éléments nouveaux. » La Cour a commencé par préciser que « certes, le tribunal ne s’est pas prononcé expressément sur la recevabilité de la demande de première instance, puisqu’aucune fin de non-recevoir n’avait été soulevée par les parties ». Néanmoins, elle a considéré que « ce mémoire du 5 novembre 2012 a été susceptible d’avoir une incidence sur l’appréciation par le tribunal de l’intérêt à agir de la demanderesse en première instance ». Ainsi, « en s’abstenant de communiquer aux autres parties ce mémoire, le tribunal administratif de Montpellier a méconnu la règle du caractère contradictoire de la procédure ». La Cour a donc annulé le jugement. Cette position est particulièrement stricte en ce qui concerne le caractère contradictoire de la procédure : – D’une part, la LPO Aude n’avait peut-être pas fourni son agrément préfectoral mais elle avait produit ses statuts dès l’introduction de sa demande. Il existait donc des éléments de nature à démontrer l’intérêt à agir de la requérante dès l’introduction de la requête. – D’autre part, le tribunal administratif avait uniquement envisagé de relever d’office le moyen tiré du défaut d’intérêt à agir mais aucune des parties adverses n’avait soulevé une quelconque fin de non recevoir tiré du défaut d’intérêt pour agir et, ce, même après la lettre du 31 octobre 2012 du président de la première chambre du tribunal administratif de Montpellier. En conséquence, bien qu’il soit exact que la fourniture par la requérante de son agrément a influencé le juge en le conduisant à ne pas relever d’office un défaut d’intérêt à agir, il est sévère, au regard des circonstances de l’espèce, de considérer qu’il s’agissait d’un élément nouveau qui devait être soumis à un débat contradictoire. Après avoir annulé le jugement, la Cour a décidé d’évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la LPO Aude tendant à l’annulation des trois permis de construire. II. L’annulation des permis de construire en raison de l’insuffisance de l’étude d’impact En premier motif d’annulation des permis de construire, la Cour a retenu l’insuffisance de l’étude d’impact. Tout d’abord, la Cour a rappelé le principe selon lequel « les inexactitudes, omissions ou insuffisances d’une étude d’impact ne sont susceptibles de vicier la procédure, et donc d’entraîner l’illégalité de la décision prise au vu de cette étude, que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l’information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l’autorité administrative ». Puis, la Cour a relevé que le site d’implantation des éoliennes présentait une sensibilité particulière notamment en raison de la présence d’un Parc Naturel Régional (PNR), d’une Zone Naturelle d’Intérêt Ecologique, Faunistique et Floristique (ZNIEFF) et d’une Zone Importante pour la Conservation des Oiseaux, ( ZICO) Elle a ensuite rappelé que « le guide sur l’étude d’impact sur l’environnement des parcs éoliens, réalisé par le ministère de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement précise que l’étude de la faune, et notamment de l’avifaune, doit couvrir un cycle biologique représentatif, c’est-à-dire intégrer les saisons optimales d’observation » et a énuméré les saisons optimales d’observation pour chaque type d’oiseaux. S’agissant des chiroptères, elle a…

La durée de validité des autorisations d’urbanisme à nouveau allongée, mais de façon temporaire (décret du 29 décembre 2014)

Le 29 août 2014, le Premier ministre Manuel Valls, et la Ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité, Sylvia Pinel, ont présenté un plan de relance du logement visant à : Libérer le foncier privé ; Augmenter l’offre de logements neufs intermédiaires et sociaux ; Favoriser l’acquisition de logements neufs ; Améliorer l’habitat ; Poursuivre la simplification des normes de construction ; Simplifier et recentrer les dispositions de la loi Alur. Le dossier de presse de ce plan de relance peut être consulté ici. Afin d’atteindre son objectif de poursuite de la simplification des normes de construction, ce plan de relance prévoyait notamment de prolonger les délais de validité des permis de construire de deux à trois ans, dès cet automne. Le calendrier semble avoir pris légèrement du retard mais la prolongation des délais de validité des permis de construire est désormais actée depuis un décret du 29 décembre 2014, publié dès le lendemain au Journal Officiel de la République Française (décret n°2014-1661 du 29 décembre 2014 prolongeant le délai de validité des permis de construire, des permis d’aménager, des permis de démolir et des décisions de non-opposition à une déclaration préalable). Ce décret s’adresse à un public très large dans la mesure où il concerne : l’Etat, les collectivités territoriales, les particuliers, les entreprises et enfin les professionnels de l’aménagement et de la construction, c’est-à-dire toutes les personnes concernées par la relance de la construction de logements. Il a pour objet d’allonger la durée de validité des permis de construire, d’aménager ou de démolir et des décisions de non-opposition à une déclaration. Notons à cet égard qu’il n’est plus question de prolonger la seule validité des permis de construire, comme annoncé dans le dossier de presse communiqué à la fin du mois d’août 2014. Le décret prévoit que le délai de validité des permis de construire, d’aménager ou de démolir et des décisions de non-opposition à une déclaration est porté à trois ans au lieu de deux ans. Cette prolongation est automatique et n’a nul besoin d’être demandée par le pétitionnaire (contrairement à la prolongation qui peut être demandée, mais n’est pas automatique pour les permis éoliens, voir notre analyse ici). Cette prolongation de la durée de validité des autorisations n’est que temporaire. En effet, le régime prévu par le décret du 29 décembre 2014 est provisoire dans la mesure où il concerne les autorisations d’urbanisme (ou de non opposition à déclaration) actuellement en cours de validité et celles qui interviendront au plus tard le 31 décembre 2015. Il est donc valable uniquement un an. Rappelons qu’un régime assez similaire avait été prévu par le décret n° 2008-1353 du 19 décembre 2008 prolongeant le délai de validité des permis de construire, d’aménager ou de démolir et des décisions de non-opposition à une déclaration préalable (aussi appelé décret “anti-crise”). Les dispositions auxquelles il est dérogé par le décret du 29 décembre 2014 sont les premier et troisième alinéas de l’article R.* 424-17 et à l’article R.* 424-18 du code de l’urbanisme. A cet égard, il convient de rappeler les dispositions de ces articles.  L’article R.*424-17 du code de l’urbanisme dispose : « Le permis de construire, d’aménager ou de démolir est périmé si les travaux ne sont pas entrepris dans le délai de deux ans à compter de la notification mentionnée à l’article R. 424-10 ou de la date à laquelle la décision tacite est intervenue. Il en est de même si, passé ce délai, les travaux sont interrompus pendant un délai supérieur à une année. Les dispositions du présent article sont applicables à la décision de non-opposition à une déclaration préalable lorsque cette déclaration porte sur une opération comportant des travaux. » Aux termes de l’article R.*424-18 du code de l’urbanisme : « Lorsque la déclaration porte sur un changement de destination ou sur une division de terrain, la décision devient caduque si ces opérations n’ont pas eu lieu dans le délai de deux ans à compter de la notification mentionnée à l’article R*424-10 ou de la date à laquelle la décision tacite est intervenue. Il en est de même lorsque la déclaration ne comporte pas de travaux et porte sur l’installation d’une caravane en application du d de l’article R*421-23 ou sur la mise à disposition des campeurs de terrains ne nécessitant pas de permis d’aménager en application de l’article R*421-19. »   Il ressort de la lecture du décret que le deuxième alinéa de l’article R.*424-17 du code de l’urbanisme que ne sont pas concernées par une augmentation du délai de deux à trois ans les opérations qui font l’objet d’une interruption de travaux supérieure à un an. En outre, le décret du 29 décembre 2014 précise que le régime transitoire ne fait pas obstacle à la prorogation de ces autorisations dans les conditions définies aux articles R.* 424-21 à R.* 424-23 du même code. Il est, par conséquent, toujours possible d’obtenir des prorogations sur demande, conformément à ces textes. Certaines de ces prorogations sont d’ailleurs bien plus intéressantes que celle autorisée par le présent décret dans la mesure où, à titre d’exemple, pour les éoliennes, la demande de prorogation peut être présentée, tous les ans, dans la limite de dix ans à compter de la délivrance de l’autorisation (article R.*424-21 du code de l’urbanisme, alinéa 2). Enfin, lorsque les autorisations concernées par le décret du 29 décembre 2014 ont fait l’objet, avant cette date, d’une prorogation dans les conditions définies aux articles R.* 424-21 à R.* 424-23, le délai de validité résultant de cette prorogation est majoré d’un an. En conclusion, en premier lieu, en dépit du but louable dans lequel le décret s’inscrit, le plan de relance du logement, il n’est pas certain qu’il parvienne à atteindre son objectif de poursuite de la simplification des normes de construction. En effet, le décret du 29 décembre 2014 ajoute un régime dérogatoire et provisoire à un régime existant ce qui ne simplifie guère la situation actuelle. Le gouvernement est coutumier des faits comme en témoigne le nouveau régime des décisions implicites (le silence valant désormais acceptation) qui…

Inondations … Attention les Ministres sortent les parapluies ! (instructions ministérielles du 22 sept. et 6 oct. 2014)

Le Gouvernement semble très mal à l’aise sur la question de la gestion du risque inondation dans les zones à risque. Il s’agit pourtant d’une question au cœur de l’actualité : en effet, le procès « Xynthia » est actuellement en délibéré, le bilan à mi-parcours du plan « Submersions rapides » vient d’être dressé et les récentes inondations dans le sud de la France ont encore fait des victimes… Le Gouvernement encourt un risque de voir sa responsabilité engagée pour carence fautive dans les zones où il existe un risque d’inondation. Afin de se couvrir, il a sorti les parapluies : deux instructions ministérielles sont venues donner des consignes aux Préfets afin qu’ils agissent de façon à ne pas pouvoir se faire reprocher une quelconque carence dans la gestion du risque inondation. La première instruction ministérielle date du 22 septembre 2014. Elle émane de Madame la Ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. Cette instruction ministérielle est relative aux thèmes prioritaires d’actions nationales en matière de risques naturels et hydrauliques pour 2014-2015. Comme l’indique son titre, elle a pour objectif d’établir des priorités d’actions pour les deux années à venir, dans le domaine de la prévention des risques naturels et hydrauliques. Le titre de cette instruction est d’ailleurs un peu trompeur dans la mesure où l’instruction concerne essentiellement le risque d’inondations. Elle établit des priorités pour « assurer le meilleur fonctionnement possible des services de prévision des crues et d’hydrométrie et des services de contrôle de sécurité des ouvrages hydrauliques ». L’instruction prévoit en outre des actions prioritaires sur quatre thèmes : –        la poursuite de la mise en œuvre de la directive européenne 2007/60/CE du 23  octobre  2007 relative à l’évaluation et à la gestion des risques d’inondation, afin de mieux identifier les territoires prioritaires et de faire émerger les stratégies des acteurs locaux ; –        l’accompagnement des projets portés par les collectivités territoriales, notamment les programmes de travaux de confortement des digues pour les territoires touchés par la tempête Xynthia ; –        la poursuite de l’élaboration des plans de prévention des risques naturels (PPRn) sur les secteurs à forts enjeux, en terminant notamment l’élaboration des PPR littoraux prioritaires ; –        l’accompagnement des collectivités dans la mise en œuvre du volet prévention des inondations de la compétence GEMAPI (gestion des eaux et des milieux aquatiques et prévention des inondations) créée par la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’information des métropoles. Hormis le risque inondation, cette instruction rappelle qu’il faut également tenir compte des autres risques naturels. A cet égard, elle invite les Préfets à mettre en œuvre une gouvernance partenariale avec les différents acteurs de la prévention des risques naturels et insiste sur le partage impératif des informations sur les risques naturels entre les différents acteurs. Elle ajoute que les projets d’urbanisme importants doivent être exemplaires en ce qui concerne la gestion des risques et que des priorités locales peuvent être établies. Enfin, Madame le Ministre attire l’attention des préfets sur l’une des recommandations du rapport d’évaluation à mi-parcours du plan « submersions rapides » concernant la responsabilité de l’Etat dans les campings à risque. Pour ces campings, elle souligne qu’il est nécessaire d’adopter des plans d’actions en insistant sur le fait que les situations les plus critiques peuvent aboutir à la fermeture. Elle rappelle à cet effet que la mise en œuvre de cette action leur avait été demandée par une lettre du 17 février 2011 et une circulaire interministérielle du 7 avril 2010. C’est sur ce point que les parapluies sont grands ouverts : l’instruction ministérielle mentionne en effet très clairement la responsabilité de l’Etat dans les campings à risque et la nécessité d’agir pour éviter tout dommage. La seconde instruction ministérielle date du 6 octobre 2014. Elle émane de Madame la Ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie et de Monsieur le Ministre de l’Intérieur. Cette instruction est relative à l’application de la réglementation spécifique aux terrains de camping et de caravanage situés dans les zones de submersion rapide. Elle tire le bilan de l’évaluation à mi-parcours du plan de « submersions rapides » et vient compléter l’instruction du mois de septembre sur cette question.  Elle a pour objet de rappeler la réglementation relative aux terrains de camping et de caravanage situés dans les zones à risque prévisible. A cet égard, elle exige le recensement de l’ensemble des campings situés en zone à risque. Pour les campings existants, elle demande que soit vérifié le respect des prescriptions d’information, d’alerte et d’évacuation arrêtées en application de l’article L. 443-2 du code de l’environnement. Cette instruction impose également aux Préfets de département de vérifier la validité des autorisations accordées. Outre ces mesures, elle insiste sur la nécessité de prendre en compte les autres risques naturels et technologiques lors de l’instruction du permis d’aménager et du contrôle de légalité. Elle précise également les conditions d’évacuation des campings dans les zones à risque lorsque la vigilance orange ou rouge pour crue est déclenchée. Par ailleurs, elle invite les gestionnaires de camping à prendre en compte ses recommandations en présence d’un risque de tempête (élagage des arbres, surveillance, regroupement des campeurs dans des abris en dur). Elle demande aussi à ce que des inspections des campings soient réalisées. Enfin, un modèle de cahier des prescriptions est annexé à cette instruction. Ce modèle comporte plusieurs rubriques : –        sur les risques existants ; –        sur les mesures d’information ; –        sur les dispositifs d’alerte ; –        sur la procédure d’évacuation et de mise à l’abri ; –        sur le rôle du gestionnaire du camping. Les gestionnaires des campings se voient donc imposer de nombreuses mesures de prévention des risques, à croire que ce sont eux les responsables des dommages causés par les inondations. Certes, ils ont demandé l’autorisation d’implanter un camping dans une zone à risque. Cependant, l’autorisation est, in fine, délivrée par l’administration, sous le contrôle du Préfet. Il est assez maladroit pour l’Etat d’imposer de nombreuses obligations aux gestionnaires des campings existants alors qu’il peut être considéré que c’est lui, à l’origine, qui a commis une faute en ne s’opposant…

Contentieux administratif des antennes relais : ce qu’il reste à démontrer.

La position du Conseil d’Etat en la matière est déormais assez bien fixée (cf. par ex.CE, 2ème et 7ème sous-sections réunies, 21/10/2013, 360481) depuis qu’il admet l’opposabilité du principe de précaution aux autorisations d’urbanisme (CE 19 juill. 2010, Assoc. du quartier Les Hauts de Choiseul, req. no 328687: AJDA 2010. 1453, note Y. J.; AJDA 2010. 2114, note Dubrulle; Constitutions 2010, no 4, p. 107, note Carpentier; Envir. 2010, no 135, note Trouilly; Dr. envir. 2010, no 185, p. 396, note Duhamel; JCP A 2011, no 2119, note Billet – CE 8 oct. 2012, Cne de Lunel, req. no 342423: Dr. envir. 2012. 333). Elle vient d’être rappelée par une espèce lue le 27 août 2014 ( n°364525), le juge considérant que “s’il appartient à l’autorité administrative compétente de prendre en compte le principe de précaution, énoncé par l’article 5 de la Charte de l’environnement et auquel se réfère l’article L. 110-1 du code de l’environnement, lorsqu’elle se prononce sur l’octroi d’une autorisation délivrée en application de la législation sur l’urbanisme, les dispositions de l’article 5 de la Charte ne permettent pas, indépendamment des procédures d’évaluation des risques et des mesures provisoires et proportionnées susceptibles, le cas échéant, d’être mises en œuvre par les autres autorités publiques dans leur domaine de compétence, de refuser légalement la délivrance d’une autorisation d’urbanisme en l’absence d’éléments circonstanciés sur l’existence, en l’état des connaissances scientifiques, de risques, même incertains, de nature à justifier un tel refus d’autorisation“. Et l’on sait que le maire ne peut pour cette même raison et eu égard à la police spéciale des télécommunications qui lui échappe interdire sur le territoire de sa commune, fut-ce au nom de la police générale, les antennes relais (CE , ass., 26 oct. 2011, Cne de Saint-Denis, req. no 326492: AJDA 2011. 2039, note Grand; AJDA 2011. 2219, Chron. Stahl et Domino; Dr. envir. 2011. 316; RD publ. 2013. 477, chron. Pauliat. – CE , ass., 26 oct. 2011, Cne de Pennes-Mirabeau, req. no 329904: AJDA 2011. 2219, chron. Stahl et Domino – CE , ass., 26 oct. 2011, SFR, req. no 341767: AJDA 2011. 2039, note Grand). Très prudemment la Haute juridiction garde donc une position contingente sur l’absence de nocivité des antennes et pour ainsi dire fixée jusqu’à preuve du contraire. Pour cette seule raison les justiciables exposés ne doivent certainement pas renoncer à se réclamer du principe de précaution qui, en cours d’instance, peut toujours trouver à s’appliquer si la sciences livre des études répliquées moins favorables aux opérateurs. L’arrêté commenté démontre par ailleurs que demeurent  à juger ces deux moyens qui nous semblent fort pertinents et en particulier le deuxième qui est affaire d’espèce : “si le requérant fait valoir que le respect du principe de précaution exigerait également la réalisation d’un bilan des coûts et des avantages d’une bonne couverture du territoire par le réseau de téléphonie mobile au regard des risques sanitaires et environnementaux, la délivrance d’une information sincère, complète et continue aux riverains de l’antenne relais et l’organisation d’une consultation du public, le tribunal ne s’est pas prononcé sur ces questions, qui n’étaient pas soulevées devant lui et qu’il n’avait pas à examiner d’office. Par suite, le requérant ne peut utilement se prévaloir de ce que le principe de précaution impliquerait le respect de telles exigences procédurales pour soutenir que le tribunal aurait commis une erreur de droit et inexactement qualifié les faits de l’espèce“. Rappelons au demeurant que l’implantation de l’antenne relais peut également être discutée sur le terrain de son intégration paysagère en vertu de l’article R. 111-21, le Conseil d’Etat l’ayant encore rappelé dans son arrêt précité du 21 octobre 2013 : “Considérant, en troisième lieu, que l’article R. 111-21 du code de l’urbanisme permet de s’opposer à un projet : ” si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l’aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l’intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu’à la conservation des perspectives monumentales ” ; qu’il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que le projet d’installation en cause, qui a fait l’objet d’un traitement particulier, qui s’inscrit dans un environnement urbain et qui n’est pas situé dans le champ de visibilité de ” la tour aux figures ” de Dubuffet ou de l’église Notre Dame des Pauvres, serait de nature à porter atteinte au caractère ou à l’intérêt des lieux avoisinants ; que, dès lors, le maire d’Issy-les-Moulineaux ne pouvait légalement s’opposer aux travaux déclarés pour ce motif “

La promesse de vente sous condition suspensive : l’application de la clause pénale n’est pas automatique!

Par un arrêt en date du 6 mai 2014 (C.cass, viv. 3ème, 6 mai 2014 n° 13-12619), la Cour de cassation précise que les vendeurs qui ont remis en vente un immeuble ayant fait l’objet d’une promesse de vente sous condition suspensive ne peuvent demander le bénéfice de la clause pénale en cas de refus de l’acquéreur de réitérer la vente. En l’espèce, des particuliers avaient conclu une promesse de vente concernant un terrain avec la condition suspensive que l’acquéreur obtienne un permis de construire. Le permis de construire fut obtenu et les vendeurs sollicitaient la régularisation de la vente. Tel ne fut pas le cas puisque l’acquéreur resta silencieux. Les acquéreurs ont alors sollicité l’application de la clause pénale à leur profit étant précisé qu’ils avaient entre-temps publié une annonce de remise en vente de l’immeuble. Saisie du litige, la Haute juridiction analyse dans un premier temps la condition suspensive dont était assortie la promesse de vente en jugeant : « Qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté que la promesse de vente du 24 janvier 2008 était notamment consentie à l’acquéreur sous condition suspensive du dépôt d’une demande de permis de construire dans les 10 jours de la signature de la promesse et que si l’acquéreur ne recevait pas de réponse de l’administration avant le 15 avril 2008, la condition serait réputée défaillante, la régularisation de la vente étant prévue au plus tard au 30 avril 2008 ; que la cour d’appel a également constaté que l’acquéreur n’avait déposé sa demande de permis de construire que le 18 février 2008 et que, sur demande de l’administration, il avait complété son dossier le 29 avril 2008, démontrant sa volonté de poursuivre la vente, de sorte qu’à la date du 29 avril 2008, le délai de réalisation de la condition suspensive avait été tacitement prorogé par les deux parties (…) » Puis la Cour de cassation censure partiellement la Cour d’appel quant aux conséquences découlant de la publication par les acquéreurs d’une annonce de vente : « Qu’il résulte en l’espèce des constatations de la cour d’appel, qu’à aucun moment les consorts X… n’ont signifié à Monsieur Y… qu’ils publiaient le 7 juin 2008 une annonce pour proposer le bien à la vente, ou encore, au moment de passer cette annonce, qu’ils ne souhaitaient plus le lui proposer, pas plus qu’ils ne lui ont adressé la moindre mise en demeure visant le dépassement des délais, les consorts X… faisant en effet à cet égard valoir dans leurs conclusions d’appel (p. 7) qu’ils entendaient exclusivement, au moyen, de cette annonce, s’octroyer une sorte de garantie en recherchant un éventuel nouvel acquéreur, pour le cas où il s’avèrerait finalement impossible de conclure une quelconque transaction avec Monsieur Y…, de sorte qu’au regard des constatations de la cour d’appel selon lesquelles les parties étaient convenues, au 29 avril 2008, de proroger les délais de réalisation de la condition d’obtention du permis de construire, en l’absence de toute manifestation inverse de la volonté des consorts X…, Monsieur Y… était fondé, une fois le permis de construire obtenu, à demander la réitération de la vente, que l’annonce ait, ou non, été passée, et que de ce fait, en pratique, dans les relations entre les consorts X… et Monsieur Y…, le bien objet de la vente était toujours « immobilisé » ; que dès lors en affirmant qu’en mettant le bien en vente, sans en aviser antérieurement Monsieur Y…, ni l’avoir mis en demeure d’une quelconque façon, les consorts X… lui avaient signifié sans équivoque que leur bien n’était plus immobilisé et qu’ils s’estimaient déliés de leur engagement, la cour d’appel n’a pas tiré de ses constatations les conséquences légales, et a derechef violé l’article 1134 du code civil. PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi » Cet arrêt est intéressant puisqu’il rappelle qu’en principe la promesse de vente sous condition suspensive produit ses effets selon la volonté des parties lorsque les conditions suspensives se réalisent et que les termes arrivent à échéance; a contrario, si la volonté affichée des parties n’est pas de mener la vente à son terme, l’application de la clause pénale peut être neutralisée par le juge. Concrètement, en cas de violation de la promesse, les sanctions sont celles du droit commun. La victime de l’inexécution peut : Demander la résolution et/ou des dommages et intérêts (Cass. civ., 26 mars 1884 : DP 1884, 1, p. 403 ; S. 1886, 1, p. 341 : vendeur demandant la résolution. – Cass. 3e civ., 28 avr. 1981, n° 80-10.002, préc. n° 88 : idem. – P.-H. Antonmattei et J. Raynard, op. cit., n° 67. – J. Huet, op. cit., n° 11520. – Ph. Malaurie, L. Aynès et P.-Y. Gautier, op. cit., n° 137). Demander le paiement de l’indemnité prévue par la clause pénale (CA Poitiers, 1re ch., 26 nov. 2008 : JurisData n° 2008-379706. – CA Bourges, ch. civ., 16 nov. 2004, n° 03/01740 : JurisData n° 2004-261859). En l’espèce il s’agissait de cette seconde hypothèse dans le litige soumis à la Cour de cassation. Toutefois, la Cour de cassation de manière assez logique en l’espèce refuse de faire droit à l’application automatique de la clause pénale au regard du comportement des vendeurs lesquels ont publié une annonce de vente de l’immeuble démontrant qu’ils considéraient ne plus être liés par la promesse de vente litigieuse. C’est donc une recherche de la volonté des parties au sens de l’article 1134 du code civil qui est menée par la juridiction d’appel reprise par la Cour de cassation. Ce refus de la Cour de cassation d’appliquer automatiquement le jeu de la clause pénale prévue dans une promesse de vente doit conduire les bénéficiaires de promesse à demeurer vigilants et à émettre expressément leur volonté de réitérer la vente… car s’ils sont trop prudents (notamment en remettant le bien en vente… ce qui somme toute n’apparaît pas déraisonnable au vu du silence de l’acquéreur), leur comportement risque d’être interprété contre eux. Aurélien BOUDEWEEL Green Law Avocat