Green Law obtient une réserve d’interprétation du Conseil constitutionnel

Le Conseil constitutionnel a été saisi le 18 juin 2015 par le Conseil d’État d’une question prioritaire de constitutionnalité initiée par le Cabinet et relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des dispositions du tableau du a) du A du 1 de l’article 266 nonies du code des douanes.  La juridiction a rendu sa décision téléchargeable sur son site (décision n°2015-482 QPC du 17 septembre 2015). Les dispositions de ce tableau du code des douanes fixent les tarifs de la taxe générale sur les activités polluantes applicables aux déchets non dangereux qui sont réceptionnés dans une installation de stockage de déchets non dangereux. La société requérante faisait notamment valoir que les tarifs plus favorables prévus par le tableau en cause au profit des installations produisant et valorisant le biogaz, y compris lorsqu’elles réceptionnent des déchets insusceptibles d’en produire, méconnaissent le principe d’égalité devant la loi. Le Conseil constitutionnel a relevé qu’en prévoyant des tarifs plus avantageux pour les déchets susceptibles de produire du biogaz lorsqu’ils sont réceptionnés par les installations de stockage produisant et valorisant le biogaz, le législateur a institué une différence de traitement en adéquation avec l’objectif d’intérêt général poursuivi qui consiste à favoriser la valorisation des déchets au moyen de la production de biogaz. Le Conseil constitutionnel a, en revanche, jugé que l’application des tarifs réduits prévus par les dispositions contestées du tableau aux déchets insusceptibles de produire du biogaz entraînerait une différence de traitement sans rapport direct avec l’objet de la loi. Il en a déduit que ces tarifs réduits ne sauraient être appliqués aux déchets insusceptibles de produire du biogaz réceptionnés par les installations produisant et valorisant le biogaz. Sous cette réserve d’interprétation, le Conseil constitutionnel a donc déclaré les dispositions contestées conformes à la Constitution. Cette décision comme celle de renvoi du Conseil d’Etat (CE, 17 juin 2015, n°389845) nous confirme non seulement l’accessibilité de la justice constitutionnelle mais aussi sa vocation à trancher les questions les plus techniques que posent le droit de l’environnement aux autres matières et en particulier ici au droit douanier. Je remercie toute l’équipe de Green Law Avocats pour l’avoir bien compris et engagé toute l’énergie nécessaire pour obtenir la décision n° 2015-482 QPC. David DEHARBE (Green Law Avocats)

Photovoltaïques/ contrat de crédit affecté : la banque ne peut se défaire de ses obligations !

Par Maître Aurélien BOUDEWEEL (Green Law Avocats) Par un arrêt en date du 9 juillet 2015 (Cour d’appel de LIMOGES, 9 juillet 2015, RG n°15/00020), la Cour d’appel de LIMOGES confirme le jugement de première instance qui prononce la nullité du contrat de fourniture et d’installation photovoltaïques et du contrat de crédit signé par les particuliers pour financer leur installation photovoltaïque. Rappelons que le crédit affecté est celui qui est consenti par un organisme de crédit à un consommateur lors de la conclusion d’un contrat de vente ou prestation de services afin de financer cette opération commerciale. Le contrat dit principal (de vente et fournitures de panneaux photovoltaïques en l’espèce) et le contrat de crédit dit affecté sont interdépendantes aux termes des articles L. 311-20 à L. 311-28 du code de la consommation En l’espèce, des particuliers avaient contracté auprès d’une société la livraison et la pose d’un système solaire photovoltaïque. L’acquisition s’est opérée au moyen d’un contrat de crédit affecté. Sur le plan juridique, les particuliers avaient assigné la société, installatrice de panneaux photovoltaïques et la banque en vue de faire reconnaître la nullité du contrat de vente de panneaux photovoltaïques et du contrat de crédit y afférent. Saisi du litige, la juridiction de premier degré avait prononcé la nullité du contrat de vente et consécutivement du contrat de financement au regard de l’interdépendance des deux contrats. L’exécution provisoire avait été ordonnée par la juridiction. La banque avait relevé appel du jugement rendu et avait saisi le Premier Président de la Cour d’appel d’une demande de suspension de l’exécution provisoire ordonnée au titre de l’article 524 du Code de procédure civile, soit la condamnation de la banque à rembourser les sommes versées par les particuliers au titre du contrat de crédit affecté. La Cour d’appel de LIMOGES confirme cette appréciation en jugeant : « Un jugement du tribunal d’instance de Tulle du 13 avril 2015 a, notamment, condamné la société X Banque à restituer aux époux Y… l’intégralité des sommes versées au titre du contrat de crédit affecté au contrat de fourniture et d’installation de panneaux photovoltaïques déclaré nul, avec exécution provisoire de la décision et au paiement d’une indemnité de 1. 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile. La société X Banque, qui a relevé appel le 19 mai 2015, a saisi le premier président d’une demande de suspension de l’exécution provisoire par assignation délivrée le 5 juin 2015 à Monsieur et Madame Y… et à titre subsidiaire d’un aménagement de l’exécution provisoire par la désignation d’un séquestre des sommes allouées au titre de l’exécution provisoire. A l’appui de sa demande, elle expose que l’exécution de la décision rendue présente un risque de conséquences manifestement excessives (…) Attendu que l’article 524 du Code de procédure civile édicte que le premier président, statuant en référé, ne peut arrêter l’exécution provisoire, en cas d’appel que si elle risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives. Attendu, au cas d’espèce, que la société X Banque n’établit pas l’existence et l’étendue des difficultés auxquelles se heurteraient les époux Y… au cas où ils devraient rembourser le montant de la condamnation ; qu’elle n’évoque pas de conséquences manifestement excessives que l’exécution de la condamnation à payer la somme d’environ 12. 000 euros risquent d’entraîner pour elle, notamment au regard de ses facultés de paiement. Attendu qu’ainsi, le risque de conséquences manifestement excessives, nécessaire à l’arrêt de l’exécution provisoire, n’est pas démontré. Attendu par ailleurs que la crainte par la société X Banque de la non restitution des sommes versées en exécution de la condamnation ne suffit pas à fonder une demande d’aménagement de l’exécution provisoire par la désignation d’un séquestre, alors qu’aucun élément ne vient corroborer son inquiétude ». Cet arrêt de la Cour d’appel de LIMOGES rappelle que la décision de suspension de l’exécution provisoire d’un jugement au titre de l’article 524 du Code de procédure civile n’est pas acquise au visa du seul risque allégé d’impossibilité de récupérer les sommes versées en cas de réformation de la décision judiciaire. Rappelons que la demande de suspension de l’exécution provisoire est prévue par l’article 524 du code de procédure civile qui dispose : « Lorsque l’exécution provisoire a été ordonnée, elle ne peut être arrêtée, en cas d’appel, que par le premier président statuant en référé et dans les cas suivants : 1° Si elle est interdite par la loi ; 2° Si elle risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives ; dans ce dernier cas, le premier président peut aussi prendre les mesures prévues aux articles 517 à 522 (…)». La juridiction apprécie souverainement l’existence de ce risque (Cass. soc., 8 déc. 2009, n°08-19.523). La jurisprudence admet que la preuve du risque des conséquences excessives de l’exécution provisoire peut résulter des documents comptables et/ou de tous autres éléments permettant de démontrer l’impossibilité pour le bénéficiaire de l’exécution provisoire de rembourser les sommes qui lui ont été versées L’arrêt de la Cour d’appel de LIMOGES confirme une jurisprudence de plus en plus etnette  tendant à sanctionner les organismes de crédit (professionnels) associés à des entreprises lors de la conclusion de contrat de vente hasardeux et contraires à la réglementation du Code de la consommation. Surtout, l’arrêt rappelle que les banques ne peuvent se dégager de leur responsabilité en cas de condamnation prononcée. On ne peut que se féliciter de cet arrêt rendu puisqu’il permet à des particuliers de pouvoir récupérer les sommes versées au titre du contrat de crédit affecté à la suite de la constatation de la nullité du contrat de vente principal. Les banques doivent donc répondre de leurs actes et ne sauraient se dégager de leurs obligations, même en cas d’appel formé contre un jugement qui leur est défavorable.    

Eolien en mer : projet de décret en préparation

Par Maître Marie-Coline Giorno (Green Law Avocat). L’éolien en mer répond à des règles très différentes de l’éolien terrestre, notamment au regard des autorisations exigées. Alors que l’éolien terrestre est soumis notamment à des autorisations au titre de l’urbanisme et de la législation sur les installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), l’éolien en mer nécessite d’obtenir des autorisations telles que des autorisations d’occupation du domaine public maritime et des autorisations au titre de la législation sur les installations, ouvrages, travaux et activités ayant une incidence sur l’eau et les milieux aquatiques et marins (IOTA). Pour compléter la réglementation applicable à l’éolien en mer, un projet de décret relatif aux ouvrages énergétiques en mer est actuellement en préparation. Ce projet de décret (consultable ici) a été soumis à consultation publique en application de l’article L. 120-1 du code de l’environnement. Cet article « définit les conditions et limites dans lesquelles le principe de participation du public, prévu à l’article 7 de la Charte de l’environnement, est applicable aux décisions, autres que les décisions individuelles, des autorités publiques ayant une incidence sur l’environnement lorsque celles-ci ne sont pas soumises, par les dispositions législatives qui leur sont applicables, à une procédure particulière organisant la participation du public à leur élaboration. » La consultation publique s’est déroulée du 8 juillet au 30 juillet 2015. A son terme, le ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie comptabilisait une dizaine de commentaires déposés sur son site (cf. présentation de la consultation publique disponible ici). Ainsi que l’indique le ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, « Ce projet de décret vise à consolider le cadre juridique applicable aux projets d’énergies renouvelables en mer lauréats d’appels d’offres, d’appels à projets nationaux ou européens et aux ouvrages des gestionnaires de réseaux en mer et simplifier les procédures et le traitement des recours sans diminuer le niveau de protection environnementale et de consultation du public. » (cf. présentation de la consultation publique disponible ici). Le projet de décret comporte sept articles dont six seulement présentent un véritable intérêt : – L’article 1er du projet de décret prévoit la désignation d’une cour administrative d’appel qui serait compétente en premier et dernier ressort pour les contentieux relatifs aux autorisations administratives nécessaires à la construction et l’exploitation des projets éoliens en mer ; – L’article 2 du projet de décret allonge la durée des concessions d’utilisation du domaine public maritime pour les ouvrages de production d’énergie renouvelable en mer, leurs ouvrages connexes et les ouvrages des gestionnaires des réseaux public de trente à quarante ans ; – L’article 3 du projet de décret précise, en cas de résiliation pour un motif d’intérêt général de la convention d’occupation domaniale avant son terme, que le titulaire est en droit d’obtenir réparation de son préjudice direct et certain ; – L’article 4 du projet de décret précise les délais de recours contre les décisions prises au titre de la loi sur l’eau en matière d’éolien en mer. Un délai de deux mois pour les recours des tiers est notamment envisagé. Cet article précise également expressément que le préfet peut être saisi à compter de la mise en service de l’installation ou de l’ouvrage ou du début des travaux ou de l’activité, aux seules fins de contester l’insuffisance ou l’inadaptation des prescriptions définies dans la décision. La décision du Préfet pourra ensuite faire l’objet d’un recours contentieux dans un délai de deux mois ; – L’article 5 du projet de décret prévoit une notification obligatoire à l’auteur de la décision et au titulaire de l’autorisation ou de la déclaration des recours administratifs et contentieux dirigés contre les autorisations administratives nécessaires à la construction et l’exploitation des projets éoliens en mer. Il prévoit également la possibilité d’adresser une requête au juge afin de fixer une date au-delà de laquelle des moyens nouveaux ne peuvent plus être invoqués, qui doit intervenir au plus tard sept mois à compter du dépôt du recours. L’article exige également que le recours soit jugé dans un délai de douze mois. A défaut, il sera transmis au Conseil d’Etat ; – L’article 6 du projet de décret permet d’allonger au-delà de dix ans la durée maximale des autorisations de production d’électricité octroyées aux lauréats des appels d’offres au titre du code de l’énergie. Ce projet de décret a fait l’objet d’un avis favorable du Conseil supérieur de l’énergie en date du 22 juillet 2015 (consultable ici). Le projet de décret est donc déjà bien avancé. Nous n’avons, à ce jour, reçu aucune indication quant à son éventuelle date de publication. Néanmoins, il convient de rester vigilant sur ce sujet dans la mesure où la publication d’un tel décret devrait modifier grandement le cadre juridique applicable aux projets éoliens en mer.

Photovoltaïque/ contrat de crédit affecté : l’obligation de vigilance de la banque avant le déblocage des fonds

Par Aurélien BOUDEWEEL Green Law Avocat Par un arrêt en date du 26 mars 2015 (Cour d’appel de NIMES, 26 mars 2015, RG n°13/000986), la Cour d’appel de Nimes confirme le jugement de première instance qui prononce la nullité du contrat de crédit signé par les particuliers pour financer leur installation photovoltaïque dès lors que la résiliation amiable du contrat principal est constatée. Rappelons que le crédit affecté est celui qui est consenti par un organisme de crédit à un consommateur lors de la conclusion d’un contrat de vente ou prestation de services afin de financer cette opération commerciale. Dans ce contrat, une double relation contractuelle se noue entre le professionnel, l’établissement de crédit et le consommateur : – Un premier contrat, dit contrat principal, est conclu entre le professionnel et le consommateur, – Une autre relation contractuelle se noue entre le consommateur et l’établissement de crédit. Ces deux relations contractuelles sont interdépendantes aux termes des articles L. 311-20 à L. 311-28 du code de la consommation. En l’espèce, des particuliers avaient contracté auprès d’une société la livraison et la pose d’un système solaire photovoltaïque. L’acquisition s’est opérée au moyen d’un contrat de crédit affecté. Sur le plan juridique, les particuliers avaient assigné la société, installatrice de panneaux photovoltaïques et la banque en vue d’obtenir l’annulation ou la résolution du contrat de crédit. Saisi du litige, la juridiction de premier degré avait prononcé la nullité du contrat de financement. La Cour d’appel confirme cette appréciation en jugeant : « Les fonds ont été versés pour le compte des époux X… le 17 mars 2009 par la société Groupe Sofemo à la société BSP Groupe VPF qui lui en a donné quitus, au vu de l’attestation de « livraison-demande de financement » signée le 12 mars 2009 par l’un des époux X… mentionnant une formule pré-imprimée selon laquelle ” le bien ou la prestation, objet de de l’offre préalable de. référencée ci-dessus a été livré ou exécuté, conformément aux références portées sur l’offre préalable, sur le bon de commande et/ ou la facture “. Cette attestation signée par l’un des emprunteurs le 12 mars 2009- soit moins de quinze jours après la signature de l’offre et 5 jours après l’expiration du délai de réflexion n’était pas suffisamment précise, ne comportant pas toutes les informations nécessaires, pour rendre compte de la complexité de l’opération financée et ainsi lui permettre de s’assurer de l’exécution complète du contrat principal. En se libérant totalement des fonds au seul vu de cette attestation et d’une facture BSP Groupe VPF, sans procéder préalablement aux vérifications nécessaires, auprès des époux X…, ce qui lui aurait permis de constater que si les panneaux photovoltaïques avaient été livrés le 12 mars 2009, expliquant la signature de M. X… au bas de l’attestation, ils n’étaient pas posés dans l’attente de la suite à donner à leur déclaration de travaux déposée en mairie de Mérindol, la société Groupe Sofemo a commis une faute la privant du remboursement du capital emprunté. Enfin, aucun grief ne peut être retenu à l’encontre de M. Mustapha X… et Mme Karima Y… , dès lors que -l’attestation de « livraison-demande de financement » n’est pas assez explicite quant à l’exécution effective des travaux commandés, l’emprunteur pouvant de bonne foi signer l’attestation à la livraison des différents matériels ; – le courrier du 16 mars 2009 qui leur a été adressé par Sofemo évoque l’enregistrement de leur demande de financement et la mise en place du dossier mais non de manière précise et claire, le versement effectif à la société BSP Groupe VPF de la somme de 28 000 €, – la société BSP Groupe VPF a récupéré les dix modules livrés à leur domicile, leur a indiqué qu’elle procédait à l’annulation de leur dossier tant auprès de ses partenaires que des services fiscaux et n’a jamais prétendu-et pour cause, les attestations produites par les intimés confirmant que les panneaux photovoltaïques n’ont jamais été posés sur le toit de leur habitation-comme elle s’y emploiera avec Sofemo que les panneaux photovoltaïques avaient été installés le 12 mars 2009 et retirés avec remise en état du toit le 24 septembre 2010 ». Cet arrêt de la Cour d’appel de NIMES rappelle l’interdépendance du contrat principal et du contrat de crédit affecté. Surtout, il confirme un courant jurisprudentiel constant en la matière qui souligne que l’obligation de l’emprunteur de rembourser le prêt d’argent ne commence qu’avec la livraison de la marchandise ou l’exécution de la prestation (Cass. 1re civ., 7 janv. 1997 : Contrats, conc. consom. 1997, comm. 86. – Cass. 1re civ., 7 févr. 1995 : Contrats, conc. consom. 1995, comm. 166. – CA Douai, 8 sept. 1994 : Rev. huissiers 1995, p. 116). La Cour d’appel de NIMES confirme une jurisprudence, tendant à sanctionner les organismes de crédit (professionnels) peu scrupuleux dans la vérification, pourtant obligatoire, de la régularité et conformité du contrat principal (contrat de vente) duquel il dépend. Surtout, l’arrêt rappelle que ces derniers ne doivent pas se libérer de toute responsabilité par la simple production d’une attestation de fin de travaux pré-remplie et/ou peu explicite. Au-delà de la confirmation du régime protecteur dont bénéficie ainsi le consommateur dans le cadre de la conclusion du contrat de crédit affecté, il est impératif que les particuliers restent vigilants face à des professionnels lors de la signature de contrats ou autres attestations.

Valorisation des énergies de récupération / Obligation d’achat: le Conseil d’Etat se prononce aux termes d’une affaire en deux actes (CE, 20 mai 2015)

Par Marie-Coline GIORNO Green law Avocat Le 20 mai 2015, le Conseil d’Etat a rendu deux décisions très intéressantes, qui seront mentionnées au recueil Lebon, concernant l’application du régime de l’obligation d’achat aux installations de valorisation des énergies de récupération et aux installations utilisant à titre principal l’énergie dégagée par la combustion de matières non fossiles d’origine végétale ou animale. ACTE I : Le Premier Ministre est enjoint de prendre un décret relatif aux installations de valorisation des énergies de récupération (CE, 20 mai 2015, n°380727, mentionné aux tables du recueil Lebon Par un courrier du 30 janvier 2014, la société P…SAS avait demandé au Premier ministre de prendre un décret, complétant le décret du 6 décembre 2000 fixant par catégorie d’installations les limites de puissance des installations pouvant bénéficier de l’obligation d’achat d’électricité, afin de mettre en œuvre les dispositions du 6° de l’article L. 314-1 du code de l’énergie (soit les installations qui valorisent des énergies de récupération dans les limites et conditions définies au même article, notamment au 2°). Une décision implicite de rejet est née du silence gardé par le Premier ministre sur sa demande. La société P…SAS a donc saisi le Conseil d’Etat d’un recours en excès de pouvoir afin de demander l’annulation de cette décision.  Aux termes de sa décision, le Conseil d’Etat commence par rappeler les conditions d’exercice du pouvoir réglementaire par le Premier ministre tel que défini par l’article 21 de la Constitution.  Ainsi, le Conseil d’Etat constate que «  le Premier ministre ” assure l’exécution des lois ” et ” exerce le pouvoir réglementaire ” sous réserve de la compétence conférée au Président de la République pour les décrets en Conseil des ministres par l’article 13 de la Constitution. » Il ajoute que « l’exercice du pouvoir réglementaire comporte non seulement le droit mais aussi l’obligation de prendre dans un délai raisonnable les mesures qu’implique nécessairement l’application de la loi, hors le cas où le respect d’engagements internationaux de la France y ferait obstacle ». Il cite ensuite l’article L. 314-1 du code de l’énergie relatif aux contrats d’obligation d’achat de l’électricité produite par certaines installations  qui codifie les dispositions de l’article 20 de la loi du 7 décembre 2006 relative au secteur de l’énergie : « Sous réserve de la nécessité de préserver le fonctionnement des réseaux, Electricité de France et, si les installations de production sont raccordées aux réseaux publics de distribution dans leur zone de desserte, les entreprises locales de distribution chargées de la fourniture sont tenues de conclure, lorsque les producteurs intéressés en font la demande, un contrat pour l’achat de l’électricité produite sur le territoire national par :/ (…) 6° Les installations qui valorisent des énergies de récupération dans les limites et conditions définies au présent article, notamment au 2° ». Il considère à cet égard que le 2° de ce même article, qui vise notamment les installations qui utilisent des énergies renouvelables, précise qu’un décret en Conseil d’Etat détermine les limites de puissance installée des installations de production qui peuvent bénéficier de l’obligation d’achat et que ces limites, qui ne peuvent excéder 12 mégawatts, sont fixées pour chaque catégorie d’installations pouvant bénéficier de l’obligation d’achat sur un site de production. En l’espèce, il considère que « l’application de ces dispositions était manifestement impossible en l’absence du décret précisant les différentes catégories d’installations valorisant des énergies de récupération susceptibles de bénéficier de l’obligation d’achat d’électricité et fixant, sans excéder le plafond légal de 12 mégawatts, les limites de puissance installée de ces installations ». Il en déduit alors « que le gouvernement était ainsi tenu de prendre le décret dont la société requérante demandait l’édiction ». Certes, un décret du 28 mars 2014, qui modifie le décret du 6 décembre 2000 fixant par catégorie d’installations les limites de puissance des installations pouvant bénéficier de l’obligation d’achat d’électricité est intervenu pour préciser les dispositions de cet article. Toutefois, le Conseil d’Etat écarte cette circonstance au motif que ce décret « concerne les seules installations utilisant l’énergie dégagée par la combustion ou l’explosion du gaz de mine ; qu’en prenant un tel décret, qui ne vise, sans justification particulière, que ces installations, le Premier ministre ne saurait être regardé comme ayant satisfait à l’obligation qui lui incombait ». Au regard du délai de plus de sept ans entre la publication de la loi et le rejet implicite, sans que ce délai ne soit justifié par aucun motif particulier, le Conseil d’Etat conclut que le rejet implicite de la demande du requérant est intervenue « après l’expiration du délai raisonnable ». Il annule donc la décision litigieuse et enjoint au Premier ministre de prendre le décret requis pour les énergies de récupération dans un délai d’un an. Cette décision, qui traduit les difficultés pour le Premier ministre à mettre en œuvre le dispositif de l’obligation d’achat pour tous les types d’énergie, souligne également que l’exercice du pouvoir réglementaire est, certes, un droit mais surtout un devoir et que ce devoir doit s’exercer dans un délai raisonnable. Il sera intéressant d’examiner quelles suites le Premier ministre donnera à cette injonction compte tenu du fait que la décision du Conseil d’Etat intervient dans un contexte où le mécanisme de soutien aux énergies renouvelables fait actuellement l’objet d’une réforme importante. ACTE II : Le Conseil d’Etat maintient l’arrêté du 27 janvier 2011 fixant les conditions d’achat d’électricité produite par les installations utilisant à titre principal l’énergie dégagée par la combustion de matières non fossiles d’origine végétale ou animale (CE, 20 mai 2015, n380726, mentionné aux tables du recueil Lebon) La société P…avait également saisi le Conseil d’Etat d’une requête en excès de pouvoir tendant à obtenir, d’une part, l’annulation de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le Premier ministre sur sa demande tendant à l’abrogation partielle du décret n° 2000-1196 du 6 décembre 2000 fixant, par catégories d’installations, les limites de puissance des installations pouvant bénéficier de l’obligation d’achat d’électricité et, d’autre part, l’annulation de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le ministre de l’écologie sur sa demande tendant à…