Limites de rejets de tritium en INB : pas de manque de précaution selon le Conseil d’Etat

Par David DEHARBE Le Comité de réflexion d’information et de lutte anti-nucléaire (CRILAN) avait demandé au Tribunal administratif de Caen l’annulation de l’arrêté du 15 septembre 2010 du ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer et du ministre de l’économie, de l’industrie et l’emploi, portant homologation de la décision n° 2010-DC-0188 de l’autorité de sûreté nucléaire (ASN) du 7 juillet 2010 fixant les limites de rejets dans l’environnement des effluents liquides et gazeux pour l’exploitation des réacteurs “Flamanville 1” (INB n°108), “Flamanville 2” (INB n°109) et “Flamanville 3” (INB n°167). En vertu de l’article R. 351-2 du code de justice administrative la juridiction a transmis l’affaire au Conseil d’Etat qui s’est prononcé par un arrêt du 17 octobre 2014 (Conseil d’État, 6ème / 1ère SSR, 17/10/2014, 361315). Cette espèce retiendra l’attention des spécialiste du droit nucléaire en ce que le Conseil d’Etat se reconnaît compétent sur la base de la nouvelle rédaction de l’article R. 311-1 4° du Code de justice administrative pour connaître en premier et dernier ressort des recours, de plein contentieux, contre les arrêtés ministériels homologuant les décisions prises par l’Autorité de sûreté nucléaire. Cela n’allait pas de soi, l’article R. 311-1 du Code de justice administrative visant les décisions de l’ASN mais par leur homologation par arrêté Ministériel. Pour sa part, l’environnementaliste relève cet arrêt à deux autres titres. D’abord sur le terrain de la suffisance d’impact, le Conseil confirme qu’il n’est pas impossible de compléter dans des circonstances bien particulières une étude d’impact après enquête publique : « l’association requérante soutient que l’étude d’impact serait insuffisante, faute d’analyser les conséquences du rejet dans l’environnement de substances chimiques nocives, susceptibles notamment de provoquer de graves lésions oculaires, provenant de l’utilisation de six tonnes par an de produits dits désincrustants nécessaires au fonctionnement de l’unité de dessalement d’eau de mer de l’EPR, qui doit traiter environ 430 000 m3 d’eau par an ; que l’insuffisance de l’étude d’impact est démontrée, selon elle, par la production d’une étude d’impact complémentaire détaillée traitant ce point, réalisée deux ans après l’enquête publique ; que, toutefois, la circonstance qu’a été réalisée ultérieurement une étude complémentaire afin de préciser certaines modalités d’exécution du projet ne révèle pas par elle-même une insuffisance du dossier de demande d’autorisation ou de l’étude d’impact ; que figurait dans le dossier soumis à enquête publique une annexe B-6c relative à l’unité de dessalement mentionnant l’utilisation de produits désincrustants et comportant une appréciation de la consommation, de la fréquence et des rejets de ces produits ; que, par suite, aucune insuffisance du dossier de demande ou de l’étude d’impact initiale ne peut être regardée en l’espèce comme établie ». On le voit une fois de plus : c’est la vocation intrinsèquement et suffisamment informative (sur cette notion cf. notre commentaire sur le blog de Green Law sous Conseil d’Etat, 15 mai 2013, n°353010), le Conseil d’Etat a été amené, en tant que juge des) de l’étude initiale qui permet au juge d’écarter tout débat sur l’incomplétude prétendument déduite d’une production après enquête publique . L’environnementaliste retiendra encore ce nouveau refus du Conseil d’Etat de censurer un dispositif réglementaire sur la base du principe de précaution. Certes aux visas des articles 1er et 5 dé la Charte de l’environnement, l’arrêt décline en matière d’INB, le considérant initié dans l’espèce Association coordination interrégionale stop tht et autres (CE, 12 avril 2013, , n° 342409 – « La méthodologie du principe de précaution fixée par le Conseil d’Etat », Droit de l’environnement, n°216, octobre 2013) et appliqué en matière d’amiante (Conseil d’État, 1ère / 6ème SSR, 26/02/2014, 351514, note Deharbe AJDA 2014, p. 1566) : « qu’il incombe à l’autorité administrative compétente en matière d’installations nucléaires de base de rechercher s’il existe des éléments circonstanciés de nature à accréditer l’hypothèse de risques de dommages graves et irréversibles pour l’environnement ou d’atteintes à l’environnement susceptibles de nuire de manière grave à la santé, qui justifieraient, en dépit des incertitudes subsistant quant à leur réalité et à leur portée en l’état des connaissances scientifiques, l’application du principe de précaution ». Mais s’agissant de contrôler, l’augmentation des limites des rejets de tritium sous forme gazeuse ou liquide (” eau tritiée “) homologuée par le Ministre, le Conseil d’Etat rejette au fond le moyen en concluant que « l’administration n’a pas commis d’erreur d’appréciation dans l’évaluation des risques de l’installation » dès lors que « ces limites maximales demeurent très inférieures à celles qui sont prévues par la réglementation sanitaire en vigueur; que l’augmentation des limites de rejet du tritium s’accompagne d’une diminution des rejets d’autres substances radioactives ; qu’en outre, les études ou documents les plus récents versés au dossier, notamment le livre blanc du tritium publié le 8 juillet 2010, qui été rédigé sur la base des réflexions des groupes de travail mis en place en 2008 par l’ASN, et les travaux de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), s’ils soulignent la nécessité de poursuivre les recherches, confirment, en l’état des connaissances scientifiques et compte tenu des mesures prises, l’absence de risques graves pour l’environnement ou la santé publique ». On remarquera encore avec le plus grand intérêt,  que le Conseil d’Etat a pris lui-même le soin d’actualiser son appréciation sur le prétendu manque de précaution, dès lors que que l’arrêt précise : « qu’il ne résulte pas de l’instruction que des circonstances nouvelles seraient de nature à remettre en cause l’appréciation portée sur ceux-ci ».

P.P.R.T. : nouveau toilettage sur ordonnance

Par David DEHARBE A la suite de la catastrophe AZF, c’est par la loi n°2003-699 du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages que l’obligation pour l’Etat de créer des PPRT a été instituée aux articles L. 515-15 à L. 515-26 du code de l’environnement du Code de l’environnement. Le décret n°2005-1130 du 7 septembre 2005 définit les modalités et les délais d’élaboration de ces plans (cf. ses dispositions codifiées aux articles R. 515-39 à R. 515-50 du code de l’environnement). Un PPRT est constitué d’un plan de zonage réglementaire, d’un règlement, d’un cahier de recommandations et d’une note de présentation. En localisant son bien sur le plan le riverain pourra identifier les prescriptions de travaux et les recommandations qui s’y appliquent. Le guide d’élaboration des PPRT, en ligne sur le site Internet du ministère, donne les outils méthodologiques d’élaboration des plans, de l’examen des études de dangers à la définition de la stratégie du plan, combinant réglementation de l’urbanisme, de la construction et des usages, mesures foncières et actions de réduction des risques à la source. Ces plans doivent délimiter un périmètre d’exposition aux risques technologiques à l’intérieur duquel peuvent être instituées dans certaines zones prévues par l’article L. 515-16 du Code de l’environnement, des prescriptions relatives à la construction, à l’utilisation ou à l’exploitation d’ouvrages, un droit de délaissement des bâtiments existants, un droit d’expropriation pour les communes à l’encontre des immeubles et droits réels immobiliers. Le dispositif a du subir plusieurs modifications tant la mise en œuvre des PPRT a posé problème, au-delà de la difficulté de les élaborer. Leurs mesures foncières devant être financées par l’Etat, les collectivités territoriales et l’exploitant, à des parts de contribution déterminées par convention négociée entre ces parties, il n’était pas rare qu’aucun accord ne soit trouvé. Une circulaire du 3 mai 2007 de la Ministre de l’écologie adressée aux préfets tentait de résoudre ce problème en fixant la part de contribution de l’état entre 25 et 40% du coût total des mesures foncières en fonction de certains critères. Cependant, le rapport du Sénat n°107 pour la période 2011-2012 note que seulement trois conventions de financement ont étaient signées fin 2011 … Pour tenter de remédier à ce problème, la loi de finance pour 2012 (loi n°2011-1977 du 28 décembre 2011) est venue prévoir expressément la part de contribution de chaque partie aux mesures foncières (un tiers du coût total). En tout état de cause si l’absence de signature des conventions n’empêche pas l’approbation des PPRT, les réticences des collectivités et des exploitants à supporter la charge de ces plans expliquent sans aucun doute que 10 ans après l’entrée en vigueur de la loi “Risques”, faussement flatteur le bilan par le avancé Ministère de l’Ecologie. Certes en 2013 les PPRT « concernent 407 bassins industriels et plus de 800 communes et 99% d’entre eux sont désormais prescrits et 73 % approuvés. Plus de 10 000 personnes sont concernées par des mesures foncières, dont le coût s’élève à environ 2 Md€, et plus de 100 000 par des travaux de renforcement. Par ailleurs, les investissements réalisés par les industriels afin de réduire les risques de leurs établissements se sont élevés à des montants annuels compris entre 200 et 300 M€ et ont permis de réduire les zones soumises aux mesures foncières d’environ 350 km ² ». Mais derrière ce bilan se cache une toute autre réalité : celle du financement, à penser comme à trouver. D’abord le Conseil constitutionnel (Décision n° 2012-662DCLoi de finances pour 2013 Article104 (ex 64 bis) Financement des travaux prescrits dans le cadre d’un plan de prévention des risques technologiques (PPRT)) a censuré le dispositif d’aide aux riverains des établissements soumis à PPRT contenu dans la loi de finances pour 2013, cette disposition étant jugée étrangère au domaine des lois de finances et donc constitutive d’un censure des «cavalier budgétaires ». Le dispositif visait à porter à 90% la prise en charge du coût des travaux de renforcement du bâti dans les habitations des riverains des sites concernés : l’Etat accordant un crédit d’impôt porté de 30 à 40%, et la loi rendait obligatoire l’engagement auparavant volontaire intervenu d’un cofinancement des travaux par les collectivités et les industriels à hauteur de 25% chacun – solution tendant à généraliser l’accord national établi entre les représentants de l’Association des maires de France, Amaris et les principales fédérations d’industriels concernées.. Puis c’est la loi n°2013-619 du 16 juillet 2013, portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union Européenne dans le domaine de l’environnement qui a du lever les freins à l’élaboration et à l’approbation des Plans de Préventions des Risques Technologiques (PPRT) en prévoyant : – Un délai de 6 ans à compter du bouclage financier du PPRT pour les riverains pour exercer le droit de délaissement lorsque celui-ci leur a été accordé par le PPRT. On notera que pour les plans approuvés avant le 30 juin 2013, les riverains ont jusqu’au 30 juin 2020 pour exercer ce droit (loi n°2013-619, art. 4); – Une clarification des travaux prescrits par le PPRT éligibles au crédit d’impôt à hauteur de 40% de leur coût total en y intégrant expressément le diagnostic préalable aux travaux (loi n°2013-619, art. 6) ; – L’harmonisation du plafonnement du montant des travaux prescrits aux riverains par le PPRT avec le plafond prévu pour le crédit d’impôt au bénéfice des personnes physiques, fixé à l’article 200 quater A du code général des impôts . Ainsi désormais, le plafond du montant des travaux prescrits par le PPRT à un riverain est de 20 000 euros (loi n°2013-619, art. 8); – La participation à hauteur de 50% répartie à parts égales entre d’une part les exploitants à l’origine des risques et d’autre part les collectivités territoriales dans le financement des travaux prescrits aux riverains par le PPRT (loi n°2013-619, art. 9); – L’inclusion des dépenses liées à la limitation de l’accès et à la démolition éventuelle des biens…

REFORME DU CODE DE L’EXPROPRIATION : DÉJÀ UNE CIRCULAIRE !

Par Marie-Coline Giorno (Green Law Avocat) Nous sommes en 2015 après Jésus-Christ. Toute la législation française fait l’objet d’une tendance à la simplification du droit… Toute ? Non ! Car un village peuplé d’irréductibles circulaires résiste encore et toujours à l’envahisseur ! La loi n° 2013-1005 du 12 novembre 2013 a habilité le Gouvernement à simplifier les relations entre l’administration et les citoyens. L’article 5 de cette loi a notamment autorisé le Gouvernement à procéder par ordonnance à la modification du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique afin « d’y inclure des dispositions de nature législative qui n’ont pas été codifiées, d’améliorer le plan du code et de donner compétence en appel à la juridiction de droit commun ». Il était également précisé que le Gouvernement pouvait « apporter les modifications qui seraient rendues nécessaires pour assurer le respect de la hiérarchie des normes et la cohérence rédactionnelle des textes ainsi rassemblés, harmoniser l’état du droit, remédier aux éventuelles erreurs et abroger les dispositions devenues sans objet. » Enfin, il pouvait « étendre, le cas échéant avec les adaptations nécessaires, l’application des dispositions ainsi codifiées en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et aux îles Wallis et Futuna. » La refonte du code de l’expropriation s’est opérée grâce à la publication de l’ordonnance n° 2014-1345 du 6 novembre 2014 relative à la partie législative du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique et de son décret d’application n° 2014-1635 du 26 décembre 2014. A peine cette réforme est-elle entrée en vigueur que, dès le 19 janvier 2015, la garde des sceaux, ministre de la justice, avait déjà pris une circulaire pour présenter le nouveau code de l’expropriation pour cause d’utilité publique aux juridictions judiciaires. Après avoir rappelé la genèse de la réforme du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, les objectifs et les principes de la recodification, la circulaire expose les principales modifications intéressant le contentieux judiciaire. A cet effet, la circulaire présente le livre II relatif à la « juridiction de l’expropriation, transfert judiciaire de propriété et prise de possession » et le livre III relatif à l’ « indemnisation ». En présence d’un doute sur l’interprétation d’une nouvelle disposition, il sera donc possible de l’examiner à la lumière de cette circulaire. La circulaire mentionne également les dispositions qui ont été abrogées par ce code ou qui n’ont pas été expressément reprises. Par ailleurs, elle donne des précisions quant à son application ultra-marine. Enfin, elle se prononce sur l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions. A cet égard, elle énonce que les procédures en cours restent régies par les dispositions qui leur étaient applicables au moment de l’introduction de l’instance. En revanche, elle précise que la procédure d’appel pouvant être ultérieurement introduite sera soumise aux dispositions nouvelles. La circulaire ajoute, en outre, que certaines ordonnances de désignation des juges de l’expropriation, prises avant le 1er janvier 2015, demeurent valables pour la durée de la désignation des juges de l’expropriation. Ces précisions n’étaient pas utiles dans la mesure où l’article 7 de l’ordonnance du 6 novembre 2014 précisait notamment que « Les contentieux […] judiciaires engagés sur le fondement des dispositions de l’ancien code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, en cours au jour de l’entrée en vigueur de la présente ordonnance, demeurent régis par les dispositions de l’ancien code de l’expropriation pour cause d’utilité publique jusqu’à dessaisissement de la juridiction saisie ». La circulaire se termine alors sur le fait que le changement de numérotation dans le code d’une règle qui n’a pas été modifiée au fond ne cause aucun grief. En conséquence, excepté l’éclairage apporté par cette circulaire sur les dispositions des livres II et III du nouveau code de l’expropriation du code de l’expropriation, cette circulaire ne présente que peu d’intérêt. En outre, cette circulaire intervient non pas pour préciser un texte sur lequel il existerait déjà des incertitudes quant à l’interprétation mais pour présenter un texte qui vient juste d’entrer en vigueur. Dès lors, dans un contexte de simplification du droit, est-il pertinent de prendre des textes de « présentation » d’autres textes ? Cela ne participerait-il pas, au contraire, à complexifier l’état du droit ? De plus, n’existe-t-il pas un adage selon lequel « Nul n’est censé ignorer la loi », ce qui pourrait dispenser le Gouvernement de prendre des circulaires pour présenter des textes qui ont pourtant fait l’objet d’une publication au Journal Officiel ? Par ailleurs, était-il adroit d’adresser cette circulaire aux juridictions judiciaires ? Il nous semble, qu’au contraire, cela leur pourrait leur faire outrage, celles-ci étant, en principe, parmi les mieux informées de l’état du droit… Peut-être que les autorités expropriantes auraient été plus intéressées par la publication de cette circulaire… Pour conclure, rappelons qu’à force de trop chanter, le barde Assurancetourix, finit systématiquement bâillonné au pied d’un arbre lors du banquet final des aventures d’Astérix… Nous ne souhaitons nullement bâillonner les auteurs des circulaires qui, parfois, nous sont d’une précieuse aide. Toutefois, en l’espèce, l’ordre juridique français aurait, à notre sens, pu faire l’économie de cette circulaire qui risque d’avoir un effet contreproductif en complexifiant encore la compréhension du droit de l’expropriation.

Mise à distance des éoliennes pour les générations futures : suspense au Parlement

Par Marie-Coline Giorno (Green Law Avocat) Tous les jours, les médias répètent qu’il faut abandonner l’énergie nucléaire et les énergies fossiles, qu’il faut multiplier le recours aux énergies renouvelables, que le projet de loi sur la transition énergétique doit constituer une avancée fondamentale pour l’environnement, qu’il est nécessaire d’agir pour le climat et qu’à cette fin, la 21ème conférence sur le climat qui se déroulera fin 2015 à Paris doit être un succès… Dans un contexte où les préoccupations environnementales reviennent manifestement sur le devant de la scène, le Sénat semble pourtant en avoir décidé autrement en mettant un frein au développement de l’énergie éolienne terrestre. Pourtant, le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte présenté au nom de M. Valls par Mme Royal affichait initialement des objectifs ambitieux. Ainsi, l’exposé de ses motifs précisait notamment que : « Le projet de loi fixe les objectifs, trace le cadre et met en place les outils nécessaires à la construction par toutes les forces vives de la nation – citoyens, entreprises, territoires, pouvoirs publics – d’un nouveau modèle énergétique français plus diversifié, plus équilibré, plus sûr et plus participatif. Il vise à engager le pays tout entier dans la voie d’une croissance verte créatrice de richesses, d’emplois durables et de progrès. Une croissance qui lutte contre le réchauffement climatique, combat le chômage et réduit la facture énergétique de la France, qui s’élève à près de 70 milliards d’euros au détriment de notre balance commerciale et de nos finances publiques. Une croissance non prédatrice qui protège la biosphère et nous permet de vivre en harmonie avec ses écosystèmes dont nous sommes partie intégrante. Une croissance qui valorise de nouvelles technologies et permet de conquérir de nouveaux marchés dans le domaine des énergies renouvelables et des transports propres. […] Ce texte exprime la conviction que la France dispose de puissants atouts pour réussir une mutation énergétique qui n’est pas une contrainte à subir mais une chance à saisir. » Son article 38 devait notamment procéder au toilettage et à la clarification de diverses dispositions du code de l’énergie. Ce projet de loi a été déposé par le Gouvernement devant l’Assemblée nationale et, dans un premier temps, examiné par elle. Le texte adopté par l’Assemblée Nationale le 14 octobre 2014 a ajouté après cet article 38 un article 38 bis A concernant l’implantation des éoliennes au regard des documents d’urbanisme et un article 38 bis concernant le moment auquel doit s’apprécier la compatibilité d’une installation classée avec les documents de planification d’urbanisme. Il n’était toutefois nullement question de modifier la distance d’implantation entre les habitations et les éoliennes. Dans un second temps, le projet de loi dans sa version adoptée par l’Assemblée nationale a été transmis au Sénat. Avant d’être examiné en séance plénière, le projet de loi a été transmis à une commission chargée de l’étudier, de proposer des modifications (amendements) et d’élaborer le « texte de la commission ». Un amendement a été déposé sur le texte de la Commission par plusieurs sénateurs dont M. Germain. Cet amendement visait à ajouter un nouvel article après l’article 38 bis A afin d’imposer une distance de 1000 mètres entre les habitations et les éoliennes industrielles, contre 500 mètres actuellement. Aux termes de cet amendement, la deuxième phrase du cinquième alinéa de l’article L.553-1 du code de l’environnement devait désormais être rédigée ainsi : « La délivrance de l’autorisation d’exploiter est subordonnée à l’éloignement des installations d’une distance de 1000 mètres par rapport aux constructions à usage d’habitation, aux immeubles habités et aux zones destinées à l’habitation définies dans les documents d’urbanisme en vigueur à la date de publication de la même loi. » L’exposé des motifs de cet amendement faisait état du fait que la distance de 500 mètres actuellement retenue était « largement sous-évaluée ». A cet égard, l’exposé des motifs se faisait l’écho des protestations « rapportées quasiment rapportées quotidiennement dans la presse régionale, de la part de populations rurales ou périurbaines qui manifestent leur désarroi. Les recours sont presque systématiques. » Pour justifier l’insuffisance de la distance actuelle, étaient aussi invoqués « une atteinte substantielle au droit de propriété et au droit de jouissance des riverains », l’impact sur la santé et la dévalorisation des biens immobiliers. Cet amendement avait donc pour objectif de concentrer les éoliennes industrielles dans les zones inhabitées et ce, afin de « préserver le point de départ des vocations écologistes : la beauté de la nature et de nos paysages qui participent de notre exception culturelle ». Cet amendement a été discuté en séance publique le 17 février dernier. M. Germain, qui défendait l’amendement, a alors justifié sa position par les considérations suivantes : « En définitive, c’est un sujet de biodiversité : nous souhaitons protéger le périurbain et le rural. Évidemment, l’urbain de passage qui voit au loin ces éoliennes les trouve belles et majestueuses. C’est vrai ! Mais, pour ceux qui vivent à côté, ces éoliennes géantes sont parfaitement intolérables, sans parler de la dévalorisation de leurs biens immobiliers. » M. Nègre, au nom de la Commission du développement durable, a déplacé le débat en soulignant un point très intéressant sur les distances entre les éoliennes et les habitations : Il a ainsi énoncé : « J’ai ainsi découvert que l’Académie nationale de médecine a recommandé en 2006 une distance de protection de 1 500 mètres et que la Royal Society of Medecine a mis en évidence un impact des éoliennes sur la santé perceptible jusqu’à 10 000 mètres de distance. J’ai également appris que le land de Bavière a décidé, après réflexion, que la distance par rapport à l’éolienne devait être égale à la hauteur de celle-ci multipliée par dix. […] Au Danemark, la distance doit être égale à trois fois la hauteur totale de l’éolienne.[…] En revanche, en Espagne, il n’existe pas de distance minimale, c’est étudié au cas par cas. Aux États-Unis, les comtés de Californie ont instauré des distances variant de une à quatre…

Future déclaration I.C.P.E. : feu le récépissé papier ! (projet de décret)

Par David DEHARBE (Green Law Avocat) Le Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie a mis en ligne et soumet à consultation publique en vertu de l’article L120-1 du code de l’environnement, un projet de décret (téléchargeable via ce lien) visant à simplifier la procédure de déclaration des I.C.P.E. et à totalement la dématérialiser par voie électronique au 1er janvier 2016. Cette consultation est ouverte du 26 février 2015 au 19 mars 2015 (Consultation publique du Medde, “CSPRT du 24 mars 2015 : réforme de la dématérialisation de la procédure de déclaration des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE)”, du 26 février 2015). Objet de la consultation : la télédéclaration pour les installations de classe D Le présent projet s’inscrit dans le cadre de la dématérialisation de la procédure de déclaration des installations classées pour la protection de l’environnement (I.C.P.E.) qui est l’une des mesures de simplification décidée par le Gouvernement lors du comité interministériel pour la modernisation de l’action publique (CIMAP) du 2 avril 2013. La date opérationnelle de mise en place est fixée au 1er janvier 2016. Ce projet doit faciliter les échanges entre les entreprises et les administrations, réduire les délais de procédures et permettre la constitution d’une base de données nationale unique des installations classées relevant du régime de la déclaration. Il comporte deux volets complémentaires : – une adaptation de la procédure de déclaration des installations classées relevant du régime de la déclaration, objet du présent projet de décret modifiant diverses dispositions du code de l’environnement concernant la procédure de déclaration des installations classées pour la protection de l’environnement relevant du régime de la déclaration, – une dématérialisation du processus de déclaration (télédéclaration), avec la mise à disposition d’un outil national harmonisant la procédure et assurant un rôle pédagogique auprès des déclarants. Prenons bien la mesure de la masse de documents qui seront ainsi à termes dématérialisés : aujourd’hui la France comporte environ 440 000 installations soumises à déclaration pour un bon millier d’inspecteurs I.C.P.E.. Le projet de décret comporte notamment les dispositions suivantes : – la mise en œuvre de la procédure dématérialisée à compter du 1er janvier 2016 et la suppression de la possibilité de déclaration « papier » à compter du 1er janvier 2021 ; – la mise en place de formulaires homologués (Cerfa) ; – la délivrance immédiate d’une preuve de dépôt de la déclaration par voie électronique. Cette preuve de dépôt informe le déclarant des prescriptions générales applicables à l’installation ; – la mise à disposition des arrêtés de prescriptions générales sur le site internet de la préfecture ; – la mise à disposition de la preuve de dépôt de la déclaration sur le site internet de la préfecture pendant une durée minimale de 3 ans – une procédure de télédéclaration pour l’édiction de prescription spéciales aux installations de classe D ; – une procédure de télédéclaration pour le changement d’exploitant de classe D. La “preuve de dépôt immédiate” remplacera le “récépissé” On remarquera surtout que ce nouveau dispositif imposerait au préfet un délai de 15 jours à compter de la date de délivrance de la preuve de dépôt pour « demander des compléments » au télédéclarant (nouveau dernier alinéa de l’article R.512-48). La possibilité de solliciter d’énigmatiques « compléments » est dangereuse. Sur quoi portent ces compléments ? Seraient-ils à comprendre comme s’ajoutant à la liste des documents exigibles au titre du formulaire qui doit préciser par un arrêté ministériel les éléments requis du télédéclarant ? Sachant que le projet décret ne liste plus limitativement les pièces actuellement exigées par l’actuel article R. 512-47 du code l’environnement. Rappelons que selon le droit en vigueur, « Lorsqu’il estime que la déclaration est en la forme irrégulière ou incomplète, le préfet invite le déclarant à régulariser ou à compléter sa déclaration ». Et la compétence du Préfet est ici liée : selon la jurisprudence non seulement le Préfet ne peut exiger une pièce non requise par l’article R512-47 mais de surcroit le Préfet ne peut refuser un récépissé motif pris de ce que l’installation ne serait pas en mesure de respecter ses prescriptions générales ICPE ou même celles d’urbanisme (CAA Nancy, 25 juill.2014, n°13NC01649, MEDDE, AJDA novembre 2014, p.222 – cf. également : CAA Marseille 7 février 2012, Association avenir d’Alet, req. n° 09MA04671 et CAA Nancy 26 juin 2012, M.B, req. n° 11NC00636). Ce qui importe c’est le caractère complet de la déclaration pour une activité dont la rubrique relève d’un tel classement : comme le rappelle le Conseil d’Etat « le préfet est tenu de refuser de donner récépissé d’une déclaration irrégulière ou incomplète » (CE, 23 mars 1990, n° 62644, M. et Mme Montagne). En fait on peut sans doute se rassurer sur l’intention des auteurs du décret par la délivrance « immédiate » de la preuve de dépôt accompagnée des prescriptions techniques générales d’origine préfectorales et/ou ministérielles. Sans doute la demande de « complément » doit-elle être accompagnée d’un accusé réception assorti des prescriptions, sauf à ce que le classement ou sa rubrique soient en eux-mêmes contestés par l’administration. Mais le danger de demandes abusives de compléments pouvant anticiper un débat sur le respect des prescriptions n’est pas non plus à exclure… On soulignera enfin que le futur  II de l’article R. 512-50 du code de l’environnement avalise l’hypothèse que certaines installations déclarées puissent être régies par le régime de la la déclaration au sein d’un même établissement comportant une installation classée soumise à autorisation, ceci au-delà de l’effet attractif du régime aggravant posé en principe par l’article R512-32 (c. env.)  : “les dispositions des arrêtés relatifs aux prescriptions générales prévus à l’article L.512-10 sont applicables aux installations classées soumises à déclaration incluses dans un établissement qui comporte au moins une installation soumise au régime de l’autorisation dès lors que ces installations ne sont pas régies par l’arrêté préfectoral d’autorisation”. Toutes ces questions trouveront une réponse après la consultation publique et plus précisément à compter du 1er janvier 2016, date d’entrée du…